Interview de Xavier Bettel dans L'essentiel

"Augmenter les impôts? Un poison"

Interview: L'essentiel (Thomas Holzer)

L'essentiel: Auriez-vous pu imaginer annoncer un confinement un an après le début de votre mandat?

Xavier Bettel: Quand on est Premier ministre, on doit être prêt à toute éventualité, mais un confinement, non. Il y a d'abord eu l'état d'urgence, le rêve de certains despotes. Cela a été une décision difficile, mais qui a permis de donner des réponses rapides. Le confinement a été dur, le déconfinement aussi. Nous n'avions pas d'expérience sur le sujet. Aujourd'hui encore, nous ne savons pas tout sur le virus...

L'essentiel: La décision a-t-elle été prise en concertation avec d'autres pays?

Xavier Bettel: La concertation a été compliquée, car la situation était différente d'un pays à l'autre et à l'intérieur des pays. On a assez peu coordonné. Emmanuel Macron a été à l'écoute, j'ai eu énormément d'échanges avec lui. Avec ma collègue belge Sophie Wilmès aussi.

L'essentiel: Les nuits ont été courtes...

Xavier Bettel: Et les journées longues, mais je n'ai pas à me plaindre. Tout un pays a connu une période difficile. J'ai eu de la chance d'avoir un mari à la maison qui était top. Le soir quand je rentrais, il avait préparé à manger. C'est important d'avoir quelqu'un à ses côtés quand il s'agit de prendre une décision par heure.

L'essentiel: Comment avez-vous vécu le placement en "quarantaine" du Luxembourg au début de l'été?

Xavier Bettel: Mal! J'ai eu l'impression qu'il fallait arrêter les tests avec des pressions dans ce sens en interne et en externe. Mais je préfère voir le -pays sur une liste noire que des hôpitaux pleins.

L'essentiel: Un reconfinement général est-il possible?

Xavier Bettel: Non, ce serait vraiment la dernière des choses que je déciderais. Nous n'avons pas l'intention de prendre de nouvelles mesures, mais si on devait le faire, nous pourrions cibler. Cela pourrait être le masque obligatoire dans la rue, même si je suis contre. Je pense que ça ne sert à rien. Il faut également voir si certaines manifestations autorisées peuvent être des "clusters".

L'essentiel: Comment faire face aux dépenses exceptionnelles de l'Etat durant la crise?

Xavier Bettel: Si nous n'avions pas investi dans l'économie, elle se serait effondrée. L'emprunt n'est pas une dette pour les générations futures. Si demain tout est fermé, la facture sera plus élevée. C'est maintenant que nous avons besoin de l'argent.

L'essentiel: Quid d'éventuelles mesures fiscales?

Xavier Bettel: Ajouter diverses taxes? Très peu pour moi. Augmenter les impôts serait un poison, aussi bien pour les entreprises que pour les particuliers. La priorité est de relancer la consommation et l'emploi.

L'essentiel: Des projets vont-ils être abandonnés?

Xavier Bettel: Abandonnés non, mais peut-être décalés. Certaines dépenses que j'avais prévues sont passées dans la crise. Le discours sur l'état de la Nation (NDLR: mi-octobre) sera un moment de vérité.

L'essentiel: Le Luxembourg n'a pas échappé au mouvement contre le racisme...

Xavier Bettel: Le racisme, l'antisémitisme ou encore l'homophobie existent aussi ici. Je ne pense pas qu'il y ait un risque de repli identitaire au Grand-Duché. L'extrême droite n'a aucun élu, ni à la Chambre, ni dans une commune. Nous ne cherchons pas à donner de leçons, mais il y a pire qu'ici...

L'essentiel: Pensez-vous déjà à 2023 et à la perspective d'un troisième mandat?

Xavier Bettel: "Carpe Diem". Je ne me pose pas la question. Pour l'instant, j'ai une crise et une sortie de crise à gérer. En 2023, j'aurai 50 ans, on verra!

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