Charles Goerens en visite au Sénégal

A l'occasion de l'inauguration de la Mission de la Coopération du grand-duché de Luxembourg à Dakar qui eut lieu le 23 janvier, a été organisé, sur initiative du gouvernement luxembourgeois et en coopération avec le Sénégal, un colloque de deux jours intitulé "Démocratie, droits de l'homme et développement".


Charles Goerens en compagnie de Mary Robinson, Haut Commissaire aux Droits de l'Homme de l'ONU, et de Jos Scheuer, Vice-président de la Chambre des députés

Ce colloque, qui s'est ouvert le 22 janvier et a duré deux jours, a réuni des représentants des cinq pays-cible de la coopération luxembourgeoise en Afrique de l'Ouest (Mali, Niger, Burkina Faso, Sénégal, Cap Vert), des membres d'organisations internationales et la délégation luxembourgeoise composée, entre autres, par le ministre de la Coopération et de l'Aide humanitaire Charles Goerens et par Jos Scheuer, Vice-président de la Chambre des députés et membre de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie. Il s'agissait d'analyser et de débattre des rapports qui existent entre le développement économique et social d'un pays, les droits de l'homme et la démocratie.

Le colloque a été ouvert par Cheikh Tidiane Gadio, ministre des Affaires étrangères du Sénégal, qui, dans son allocution, a rappelé la grande participation des femmes aux élections présidentielles de mars 2000, ce qui montre que les femmes sénégalaises ont développé un sens civique assez remarquable. Le ministre sénégalais a également tenu à souligner que l'éducation est un droit, un élément essentiel du jeu démocratique et non pas un privilège.

Dans son discours d'allocution, le ministre Charles Goerens a fait valoir que les droits de l'homme ne sont pas seulement un acte de foi ou un catalogue de droits, mais surtout un état d'esprit. Contrairement à l'acceptation de la politique classique des droits de l'homme, qui trouve ses origines au siècle des lumières, le débat actuel autour des droits de l'homme exige de mettre l'individu au centre de toute action.

Dans ce contexte, Charles Goerens a souligné que la région de l'Afrique de l'Ouest constitue un cadre idéal pour toucher les interlocuteurs des droits de l'homme. Selon le ministre de la coopération luxembourgeoise, une des questions qui préoccupe les responsables en matière de droits de l'homme est celle de savoir comment rendre la globalisation compatible avec le respect des droits de l'homme.

Charles Goerens s'est servi de l'exemple du Luxembourg pour démontrer qu'un petit pays, qui, en raison justement de sa taille, ne peut faire face seul aux défis politiques, économiques et de sécurité, a un intérêt substantiel de faire parti du «jeu démocratique».

Or le ministre a également insisté que la démocratie à elle seule ne suffit guère; elle doit être ancrée dans des textes juridiques, dotée d'une juridiction et d'une "communauté de destin", c.à.d. une interdépendance entre Etats.

Charles Goerens a terminé son discours sur une note d'optimisme en mettant en exergue les possibilités et les ouvertures que le gouvernement luxembourgeois voit se développer actuellement en Afrique de l'Ouest tout en rappelant qu'il est d'une grande importance d'assurer une cohérence des efforts dans le cadre onusien.


(D
e gauche à droite): Jean Feyder, ambassadeur, directeur de la Coopération et de l'Action Humanitaire, Jos Scheuer, Vice-président de la Chambre des députés et membre de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, Cheikh Tidiane Gadio, ministre des Affaires étrangères du Sénégal, Charles Goerens, ministre de la Coopération et de l'Action Humanitaire, Marc Franck, chef de la Mission de la Coopération du Luxembourg à Dakar

En tant que Vice-président de la Chambre des députés et membre de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, Jos Scheuer, dans son allocution de bienvenue, s'est plus particulièrement penché sur le sujet du parlementarisme. M. Scheuer a rappelé que c'est au sein du parlement que la volonté nationale doit s'exprimer et se déterminer. Dans ce contexte, il a rendu attentif à quatre problèmes souvent soulevés par les parlementaires africains: le renforcement de la capacité d'action des partis politiques et l'élaboration de textes constitutionnels et juridiques; la question du financement des partis; l'éclatement du paysage politique en une multitude de groupuscules et la "migration des élus" et la position matérielle et morale du mandataire politique.

Avant l'ouverture des six sessions de débats sur la démocratie, les droits de l'homme et le développement, Mary Robinson, Haut Commissaire aux Droits de l'Homme de l'ONU s'est adressée à l'audience. Dans sans allocution, Mme Robinson a constaté que le meilleur moyen pour assurer le développement est une politique centrée sur les droits de l'homme. Pour elle, il existe une relation étroite entre le développement et les droits de l'homme d'une part et la participation au processus démocratique d'autre part. Le Haut Commissaire a également insisté sur la nécessité de renforcer les cadres légaux et d'associer les acteurs non-étatiques tels que les multinationales et les ONG.

Parmi les thématiques discutées lors des six sessions de débats figuraient celle des nouveaux défis politiques qui se posent en Afrique de l'Ouest, celle des transitions démocratiques, celle des liens entre la forme de gouvernance et le développement, celle des rapports entre société civile et développement, celle du rôle central des droits de l'homme dans la promotion de la démocratie et du développement, celle de l'intégration régionale et sous-régionale des pays de l'Afrique de l'Ouest dans des ensembles supranationaux.

La journée de discussions qui a suivi l'ouverture du colloque a permis de dégager quelques enseignements importants, dont le principal est, sans doute, comme l'a rappelé le ministre Goerens, qu'il n'y a pas de modèle de démocratie complètement exportable.

Même si les modèles sont différents le sens de la démocratie, c'est-à-dire le respect des droits de l'homme et de l'Etat de droit, doit néanmoins rester identique. Il faut préciser que l'énoncé de règles n'emporte pas forcément comme conséquence leur mise en œuvre.


Charles Goerens, ministre de la Coopération et de l'Action Humanitaire aux côtés de Cheikh Tidiane Gadio, ministre des Affaires étrangères du Sénégal

Le ministre des Affaires étrangères du Sénégal, M. Gadio, a, à cet égard, précisé que la démocratie n'est acquise nulle part, qu'il s'agit d'un processus et qu'il vaut donc mieux parler de démocratisation. Il s'agit également de réfléchir au contexte socio-économique dans lequel la liberté est appelée à s'exercer. Or, celui-ci est d'évidence caractérisé par une mondialisation qui, pour de nombreux pays, se traduit par l'imposition de règles difficilement soutenables. Si cette dernière offre des opportunités, elle comporte en même temps des dangers et des contraintes considérables pour les pays en voie de développement. Ces derniers doivent néanmoins vaincre à tout prix le fléau de la pauvreté si on veut que la démocratisation s'inscrive dans un cadre durable. L'intégration dans des ensembles internationaux ne peut elle-même être qu'un outil dont la finalité est de réaliser un plus d'autonomie pour chaque pays membre.

On doit dans ce contexte mettre en lumière, comme l'a fait Amadou Sar, le manque de maîtrise des Etats et la nécessité d'acquérir une masse critique. Le contexte international n'est pas tant caractérisé par l'uniformité que par l'inégalité. Ainsi le droit à subventionner les agricultures est-il inégalement distribué, selon qu'il est exercé par des Etats plus ou moins puissants. En Afrique de l'Ouest, ce problème d'autonomie se manifeste notamment par la crise des cultures de rente, qui est une des facettes de la désarticulation entre le marché interne et le marché externe.

On conclura en se félicitant que la réflexion sur l'intégration soit alimentée par la politique de coopération d'un pays, le Luxembourg, dont la vocation historique a justement consisté à la faciliter.

Le 23 janvier, Charles Goerens a eu une entrevue avec Abdoulaye Wade, président du Sénégal, au Palais de la République à Dakar.


Le ministre Charles Goerens avec le président Wade

Cette entrevue, qui s'est déroulée dans un climat très chaleureux, permettait au ministre Goerens de présenter les vues du gouvernement luxembourgeois en matière de coopération au développement ainsi qu'un aperçu sur les projets de la coopération luxembourgeoise réalisés ou en cours de réalisation au Sénégal et dans la sous-région ouest-africaine.

Le ministre luxembourgeois a informé le président sénégalais du succès du colloque intitulé "démocratie, droits de l'homme et développement" qui a été organisé du 23 au 24 janvier sur initiative du gouvernement luxembourgeois et en coopération avec le Sénégal.

En effet, par ce colloque, les organisateurs ont pu rassembler des personnages du monde intellectuel et politique des cinq pays-cible de la coopération luxembourgeoise en Afrique de l'Ouest (Mali, Niger, Burkina Faso, Cap Vert, Sénégal) ainsi que le Haut Commissaire aux Droits de l'Homme de l'ONU, Mary Robinson. Le ministre Goerens a également informé le président Wade de l'intention du grand-duché de Luxembourg d'ouvrir une Mission de la Coopération du grand-duché de Luxembourg à Dakar le 24 janvier 2001.


Charles Goerens, ministre de la Coopération et de l'Action humanitaire, Marc Franck, chef de mission de la Mission de la Coopération du grand-duché de Luxembourg, Jos Scheuer, Vice-président de la Chambre des députés et membre de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, Jean Feyder, directeur de la Coopération au Développement au ministère des Affaires étrangères

Parmi les sujets abordés figuraient les droits de l'homme, les problèmes de stabilité politique et économique dans la sous-région et les grands défis de la coopération au développement. L'entrevue fut également une bonne occasion pour Charles Goerens de s'informer sur les projets de son interlocuteur en matière de l'éducation et de l'environnement. En effet, le président sénégalais soutient avec beaucoup de verve un projet de création de centres de la petite enfance dans le pays ainsi que la création d'un "ministère de la petite enfance". Le président poursuit également des projets ambitieux en matière de reboisement du pays. Le ministre de la coopération luxembourgeoise a qualifié ces deux projets d'une importance majeure pour le développement futur du Sénégal.

La clôture du colloque intitulé "démocratie, droits de l'homme et développement" fut suivie de l'inauguration de la Mission de la Coopération du grand-duché de Luxembourg à Dakar par le ministre de la Coopération et de l'Aide humanitaire dans la soirée du 24 janvier, en présence de Cheikh Tidiane Gadio, ministre des Affaires étrangères du Sénégal. L'ouverture d'une Mission dans la capitale sénégalaise, l'événement majeur de la visite au Sénégal, constitue une nouvelle donne dans les relations diplomatiques du Luxembourg avec le continent africain entier et l'Afrique de l'Ouest en particulier, la nouvelle Mission étant la première représentation diplomatique du grand-duché de Luxembourg sur le continent africain. C'était sous le gouvernement précédent que la nécessité de l'implantation d'une mission de la coopération avait déjà été reconnue, mais ce n'était que sous le gouvernement actuel que le projet se concrétisait. Marc Franck, qui peut se prévaloir d'une longue expérience en matière de coopération au développement sur le continent africain, assume le poste de chef de mission à Dakar.


Jos Scheuer, Charles Goerens et Cheikh Tidiane Gadio lors de l'inauguration de la Mission

L'implantation d'une mission diplomatique en Afrique de l'Ouest revête d'une importance non négligeable pour la coopération luxembourgeoise dans la sous-région et présente l'avantage d'avoir sur place un interlocuteur non seulement pour les gouvernements des cinq pays-cible de la coopération luxembourgeoise dans la sous-région, mais aussi pour la société civile locale et les organisations internationales y implantées.

Au cours des dernières années, la coopération luxembourgeoise a développé des projets et programmes de coopération bilatérale au Burkina Faso, au Cap Vert, au Mali, au Niger et au Sénégal, présentant les cinq pays-cible de la coopération luxembourgeoise en Afrique de l'Ouest.

Au Sénégal, les secteurs d'interventions de la coopération luxembourgeoise sont l'hydraulique villageoise, l'assainissement et la santé. En 1999, elle a aussi contribué à la restructuration du marché Kermel à Dakar. En 1999, le gouvernement luxembourgeois a également signé une convention de coopération avec l'ONG internationale ENDA Tiers Monde qui organise des actions innovatrices de lutte contre la pauvreté dans les bidonvilles de Dakar et en milieu rural, de l'élaboration de stratégies de développement et de l'organisation de sessions de sensibilisation, de réflexion et de formation au Luxembourg. En novembre 2000, le gouvernement luxembourgeois a décidé d'intervenir également dans le secteur de l'éducation.


Le bâtiment de la Mission de la coopération du grand-duché de Luxembourg à Dakar

Le gouvernement a pris la décision d'implanter la Mission de la coopération luxembourgeoise à Dakar en fonction de la très haute présence d'ambassades et d'organisations internationales dans la capitale sénégalaise, de sa longue expérience en matière de coopération avec le Sénégal et fonction d'un bon accès international au pays-cible de la sous-région.

Dans son allocution, M. Goerens a présenté la nouvelle Mission à Dakar comme le "joyau de la coopération luxembourgeoise". Bien que modeste de par ses ressources humaines (dans un premier temps la Mission opérera avec le seul chef de mission), le ministre a jugé que la décision politique d'implanter la Mission à Dakar a été la bonne. M. Gadio de son côté s'est félicité du fait que les cinq pays-cible de la sous-région aient accepté le principe que Dakar soit la capitale de la coopération luxembourgeoise en Afrique de l'Ouest. M. Goerens et M. Gadio ont finalement souhaité le meilleur succès au chef de mission Marc Franck dans l'exécution de ses nouvelles fonctions.

L'adresse de la Mission de la Coopération du grand-duché de Luxembourg est la suivante:

Immeuble Horizon, 2e étage,
Bd. de la République,
B.P. 25083 Dakar Fann.

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