Jean-Claude Juncker invité du "Cercle Europartenaires" à Paris

Le 5 mars 2003, le Premier ministre Jean-Claude Juncker, était à Paris l’invité du "Cercle Europartenaires", présidé par l’ancienne ministre française Elisabeth Guigou. Il a animé un débat sur les "Rendez-vous économiques et sociaux de l’Union européenne".


de g. à dr.: Jean Gandois, Jean-Claude Juncker, Elisabeth Guigou et Jean-Noël Jeanneney

Parmi les invités figuraient Jacques Delors, président de "Notre Europe" et ancien président de la Commission européenne, Jean Gandois, vice-président du Conseil d’Administration de Suez, Rémy Sautter, président-directeur général de RTL, Yves-Thibault de Silguy, directeur général de Suez, et Jean-Noël Jeanneney, président d’Europartenaires. De nombreuses personnalités du monde politique, économique, social et culturel ainsi que les principaux ambassadeurs accrédités à Paris, dont Jean-Marc Hoscheit, étaient présentes.

A travers une analyse approfondie de la situation actuelle de l’Union européenne, Jean-Claude Juncker a brossé un portrait sans concessions de l’Union et de son avenir. De nombreux sujets concernant l’Europe ont été abordés durant la conférence et le débat. Le Premier ministre s’est dit assez déçu de la situation actuelle de l’Union et a souligné que beaucoup de travail et de volonté seraient encore nécessaires pour réussir les nombreux défis économiques et sociaux à venir.

Jean-Claude Juncker a souligné que l’introduction de la monnaie unique s’est soldée par un succès mais que l’Union économique et monétaire (UEM) n’a pas su jouer le rôle de catalyseur en entraînant d’autres processus vertueux. "Les problèmes européens, en la matière, auraient dû être simplifiés à travers l’introduction de l’euro, mais ils se sont heurtés à l’immobilisme" a ajouté le Premier ministre.

Pour Jean-Claude Juncker la "politique monétaire a fait ses preuves et symbolise une véritable politique européenne. La grande faiblesse de l’UEM est et reste l’union économique entres les pays membres". D’après lui toujours, les politiques économiques sont restées purement nationales et il y a un grand retard à rattraper en ce qui concerne leur convergence. "La coordination de ces politiques est restée le maillon faible du dispositif économique et monétaire de l’Europe". Pour Jean-Claude Juncker, des instruments nécessaires manquent à la Commission européenne et la coordination des politiques économiques aurait clairement dû être le pivot central de la pensée économique et de la préparation de l’action économique commune.

Le Premier ministre luxembourgeois s’est également exprimé sur le pacte de stabilité et de croissance de l’Union européenne. Celui-ci a des mérites mais donne lieu, et surtout récemment, à de nombreux débats au sujet de sa nécessaire "flexibilisation". Jean-Claude Juncker, par ailleurs, trouve que des propositions pour plus de flexibilité sont souhaitables mais que certains pays, au lieu de prôner l’application du pacte sans avoir l’intention de s’y tenir, devraient également se soucier de la crédibilité de la démarche monétaire commune.

Quant à l’aide européenne au développement, Jean-Claude Juncker a jugé les efforts européens insuffisants et pense qu’il faut des moyens autrement plus importants pour contrecarrer la pauvreté. Pour lui, l’aide au développement doit être une des grandes ambitions de l’Union européenne pour les décennies à venir.

"Nous devons aussi rester vigilants en ce qui concerne les mouvements migratoires d’Afrique, de la Méditerranée ou d’ailleurs, qui se multiplient. Si nous manquons d’analyses et de perspectives, cela pourrait devenir un grand problème pour l’avenir", a-t-il ajouté. "Le Luxembourg, qui investit plus de 0,7% de son PIB en aide au développement, montre que les petits états peuvent aussi être des grandes nations" a-t-il conclu.

Le problème de l’emploi et de sa coordination au sein de l’Union européenne n’ont que très peu évolué depuis le Conseil européen spécial de 1997 et depuis l’adoption de lignes directrices concernant l’emploi. "Comme pour l’UEM, un système de convergence dans ce domaine avec les partenaires sociaux et les autres grands acteurs auraient pu être créés" a commenté le Premier ministre et déplore qu’il n’y ait toujours pas de politique conceptuelle et commune pour l’emploi.

Au sujet de la crise irakienne et de la crise diplomatique européenne, le Premier ministre s’est vu navré du manque de coordination des gouvernements des états membres. "Avec quatre pays européens siégeant au Conseil de sécurité de l’ONU, l’Union européenne aurait dû mettre à profit cette opportunité pour parler d’une voix et organiser une forte action diplomatique européenne", a-t-il estimé. "Il me semble que l’Union européenne, en termes de politique extérieure et la politique de sécurité a fait marche arrière", a-t-il conclu.

Pour conclure, Jean-Claude Juncker a adressé un message d’optimisme à l’assemblée présente. "Non, il ne faut pas désespérer. Il faudra, durant l’élaboration de la Convention et lors de la prochaine Conférence Intergouvernementale (CIG), parfaire les incohérences et insuffisances actuelles. Il faut se pencher sur le perfectionnement d’un mécanisme de coordination des politiques économiques et même si les économies restent nationales il faut les gérer et ceci dans un esprit de solidarité collective. Quant à l’emploi, il faut qu’il ait enfin la même priorité que la construction économique et monétaire. Pour nos concitoyens nous devons, avec beaucoup de volonté politique, améliorer l’Union européenne".

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