Jean-Claude Juncker reçoit l'avis de la Commission consultative des droits de l'homme

La Commission consultative vient de transmettre ce 20 juin 2001 au Premier ministre son avis sur le projet de loi 4735 relatif à la protection des personnes à l'égard du traitement des données à caractère personnel dont elle avait été saisie.

Dans ses conclusions sur un projet de loi qui s'inscrit, sous un aspect extrêmement technique, dans le coeur même de nos libertés publiques, la CCDH critique un certain nombre d'aspects du projet.

  1. La CCDH est ainsi d'avis que l'article 9(2) du projet qui exige la notification d'un traitement effectué à des fins journalistiques, littéraires ou artistiques à la Commission nationale pour la protection des données est incompatible avec l'exercice de la liberté d'expression. Elle demande en conséquence que le principe de notification, même réduit à sa plus simple expression, ne soit pas appliqué à l'exercice de la liberté d'expression.
  2. La CCDH pense que le gouvernement devrait distinguer entre le traitement de données à caractère personnel et le travail sur des données personnelles dans le cadre d'un travail journalistique, littéraire ou artistique, et consacrer à ce dernier volet un projet de loi spécifique qui règle les questions relatives à la liberté d'expression en accord avec les principes de la Convention européenne des droits de l'homme.
  3. La CCDH estime que les pouvoirs d'investigation et répressifs conférés à la nouvelle Commission nationale de protection des données (art. 32 et ss.) sont exorbitants et constituent un précédent de nature à rompre avec les fonctions traditionnelles des juridictions d'instruction. Elle demande que ces pouvoirs soient revus, car leur conformité avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme sur le droit à un procès équitable est plus qu'incertaine.
  4. La CCDH estime que les conditions d'interconnexion de banques de données à caractère personnel énoncées à l'art. 16 (2) ne sont pas claires et qu'une des premières règles sur laquelle est fondée la légitimité du traitement des données à caractère personnel, c'est-à-dire que "la personne concernée a donné son consentement exprès" (cf. art. 5 (1, f), n'est pas respectée.
  5. La CCDH estime également, qu'en matière d'interconnexion, l'intérêt légitime du responsable du traitement ne peut primer sur le droit des personnes concernées. Si cela devait cependant être le cas pour des cas de force majeure, ces cas de figure doivent être plus explicitement déterminés.
  6. La CCDH pense que le gouvernement devrait revoir les règles de l'agrément du chargé de protection des données en vue d'éviter tout conflit d'intérêts en la matière. (cf. art. 40)
  7. La CCDH estime que le gouvernement devrait à l'art. 41 traitant des dispositions spécifiques, séparer les procédures liées à l'application des articles 88-1 à 88-4 du code d'instruction criminelle en matière de flagrant délit ainsi qu'en matière de mesures spéciales de surveillance d'un côté, et les procédures liées à la sauvegarde de la vie humaine de l'autre côté. Pour des raisons à la fois juridiques, conceptuelles et de lisibilité des lois, ces trois procédures, qui font intervenir des acteurs tout à fait différents (Procureur d'Etat, juge d'instruction, "toute personne" ) dans des contextes tout à fait différents, devront être traitées dans trois articles différents.
  8. La CCDH pense par ailleurs qu'il n'est pas nécessaire d'intégrer dans la présente loi des dispositions relatives à l'application technique des articles 88-1 à 88-4 du code d'instruction criminelle, dans la mesure où des incidents comme le contrôle des communications d'une fraction parlementaire ne pourront pas être évités par les dispositions du présent projet de loi, alors que c'était une des intentions affichées par le gouvernement.

Dernière mise à jour