Un grand moment de musique, de l´émotion pure à la Maison du Grand-Duché de Luxembourg à Berlin

La Maison du Grand-Duché de Luxembourg à Berlin qui a ouvert ses portes à la fin du mois de février 2001 a fêté le 29 avril dernier son deuxième anniversaire par une soirée de gala d’une qualité exceptionnelle, qui s’est déroulée devant un public de premier choix, comprenant de hautes personnalités de la vie publique, économique et culturelle de la capitale d’Allemagne, des Chefs de Missions diplomatiques et d’autres amis de l’Ambassadeur et Madame Julien Alex.

Encore une fois la salle de la MGDL s’est révélée trop exiguë pour accueillir un public qui devient toujours plus nombreux, une preuve s’il le fallait qu’au fil de ces deux dernières années l’Ambassade du Luxembourg à Berlin a su se tailler une solide réputation par la qualité des manifestations de promotion de la culture luxembourgeoise qu’elle offre régulièrement au public berlinois.

Notre compatriote Françoise Groben, violoncelliste, et Peter Laul, pianiste, avaient placé sur leur ambitieux programme trois monuments de la littérature musicale classique pour violoncelle et piano couvrant pratiquement un siècle et demi, notamment les variations de Ludwig van Beethoven sur un thème de la «Flûte enchantée» de W.A. Mozart, la Sonate en la majeur de César Franck et la Sonate op. 40 de Dimitri Chostakovitch.

Le récital du 29 avril 2003 restera gravé dans la mémoire de tous ceux qui avaient le privilège d’y assister.

Inutile de parler de technique: celles des deux artistes se sont révélées sans la moindre faille. Ils savent faire chanter leurs instruments et en extraire toutes les finesses (Dans ce contexte on ne saurait passer sous silence la sonorité exceptionnelle du violoncelle Matteo Gofriller datant de 1695 que la Banque Générale du Luxembourg a mis à la disposition de Françoise Groben). Les deux artistes maîtrisent à la perfection l’art d’épouser des styles musicaux aussi divers que le classicisme d’un Beethoven, le romantisme d’un César Franck ou le modernisme d’un Chostakovitch. Mais ce qui caractérise le mieux le jeu de ces grands interprètes, c’est l’équilibre qu’ils savent réaliser entre leurs instruments, leur engagement réciproque, leur spontanéité et l’absence de toute routine, des qualités  rares qui ont impressionné le public qui retenait son souffle et suivait impressionné les moindres inflexions de leur jeu subtil. Il est rare lors d’une soirée pareille, que le silence se transforme en musique. Françoise Groben et Peter Laul ont su mettre tant de tension dans leurs interprétations qu’ils ont aussi réussi  cette prouesse. Ils ont fait vivre à leur public des moments d’émotion intenses.

Que d’efforts il faut investir pour arriver à un tel degré de perfection.

L’art de Mozart pour faire changer de visage à un thème musical, sa virtuosité pour le façonner au point de le rendre pratiquement méconnaissable est connu.

Dans ses variations pour piano et violoncelle sur le thème « Bei Männern, welche Liebe fühlen », de la Flûte enchantée de Mozart, l’auteur des célèbres variations pour piano sur un thème de Diabelli rend la monnaie à son illustre ancêtre.

Sur cette œuvre d`une fraîcheur inégalable  plane en permanence le sourire de Mozart, et ce aussi bien dans les parties illustrant le caractère espiègle de Papageno que dans les rêvasseries de Pamina, songeant à cet amour conjugal que Beethoven a glorifié dans son unique opéra, Fidélio.

De la célèbre Sonate en la majeur de César Franck il existe plusieurs versions, notamment une version (originale) pour violon et piano, une deuxième pour flûte et piano et une version pour violoncelle et piano, celle-là même que nous avons pu apprécier dans l’interprétation de Françoise Groben et Peter Laul. On parle même d’une  version pour piano seul, transcrite par Alfred Cortot, qui est tombée dans l’oubli.

Le public était stupéfait du phrasé et des sonorités d’une rare beauté que Françoise Groben a su extraire de son instrument, surtout dans les passages lents et graves. Peter Laul quant à lui a subjugué son auditoire par sa retenue, évitant à tout moment d’écraser le jeu de sa partenaire, s’imposant toutefois lorsque la partition l’exigeait.

La Sonate en la majeur de César Franck est un des grands chevaux de bataille de la littérature musicale pour piano et violoncelle. L’interprétation intelligente, pleine de sensibilité contrôlée des deux artistes ne craint aucune comparaison avec celles, nombreuses, des autres grands pianistes et violoncellistes qui l’ont fait figurer sur leur programme.

La Sonate op. 40 de Chostakovitch a été composée en 1934, à l’époque où fut créée la 4 ème Symphonie, une œuvre complexe et tourmentée. La Sonate op. 40 n’est pas non plus privée d’aspects inquiétants. On ne les retrouve pas seulement dans la sombre dureté incisive du deuxième mouvement et dans le caractère introspectif du mouvement lent. La Sonate op. 40 contient toutes les caractéristiques de l’art de Chostakovitch. Elle est construite sur des thèmes folkloriques russes qui - après avoir été exposés de façon sereine - sont travaillés au burin par le grand compositeur, qui y distille ensuite son mal de vivre, son pessimisme et à l’occasion sa hargne.

Tout Chostakovitch y est, et surtout son penchant pour la « Verfremdung », un aspect qui apparente ses compositions à celles d’un Gustav Mahler (voir les macabres scherzi de certaines de ses symphonies). Une œuvre russe à souhait, également dans les passages scandés construits sur des thèmes russes de danse.

Par ses tempi effrénés et sa virtuosité l’exécution du quatrième mouvement demande tant de la part du pianiste que du violoncelliste une technique accomplie et un engagement total. Françoise Groben et Peter Laul ont aussi dominé cette partie difficile de la partition. A aucun moment ils n’ont succombé à la tentation de s’abandonner à la griserie de la virtuosité. Sous leurs mains, celle-ci n’est jamais devenue une fin en soi.

Un grand merci à Françoise Groben et Peter Laul pour cette inoubliable soirée.

Pendant l’entracte la Galerie d’art moderne Rosenkranz située au rez-de-chaussée de l’immeuble Klingelhöferstrasse 7 qui héberge e.a. l’Ambassade du Luxembourg et notre MGDL à Berlin, avait ouvert ses portes au public qui assistait au concert. L’ambassade remercie chaleureusement Madame Rosenkranz de cette heureuse initiative.

Comme à l’accoutumée, à l’issue du Récital l’Ambassadeur du Luxembourg et Madame Julien Alex ont offert à leurs hôtes une réception arrosée de crûs de la Moselle luxembourgeoise.

(communiqué par le Ministère des Affaires étrangères / Ambassade du Luxembourg à Berlin)

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