Message de Koïchiro Matsuura, directeur général de l'UNESCO, à l'occasion de la Journée internationale de la femme

Ces douze derniers mois ont été témoin partout dans le monde d’avancées importantes en ce qui concerne les droits et l’autonomisation des femmes et le progrès de l’égalité des sexes. Après l’élection historique à la présidence de la République du Libéria de Mme Ellen Johnson-Sirleaf, qui était venue à l’UNESCO l’an passé à l’occasion de la Journée internationale de la femme, le Chili a élu à son tour sa première présidente, Mme Michelle Bachelet, qui a formé un gouvernement à parité de ministres hommes et femmes. Depuis, plusieurs autres femmes sont devenues chefs de gouvernement. La Jamaïque et la République de Corée sont actuellement et pour la première fois gouvernées par des premiers ministres femmes. Au Koweït et dans les Émirats Arabes Unis, les femmes ont pour la première fois été autorisées à voter et à se présenter aux élections.

Pour sa part, l’UNESCO continue de promouvoir activement l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes dans toutes les sphères de la vie, notamment aux niveaux décisionnels. Son engagement à cet égard vaut pour l’ensemble des domaines d’action de l’UNESCO, y compris sa stratégie et ses initiatives concernant les situations post-conflit. L’UNESCO s’emploie par exemple à prendre systématiquement en considération la question de l’égalité des sexes dans son programme pour l’Iraq, cas pilote devant fournir un exemple de bonne pratique.

Cette année, l’UNESCO, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, mettra l’accent sur "les femmes qui œuvrent pour la paix", en réunissant pour une table ronde internationale plusieurs femmes qui occupent des fonctions de haut niveau et participent à des efforts de consolidation de la paix. Le choix de ce thème a été motivé par le travail remarquable que des organisations féminines et des dirigeantes accomplissent un peu partout dans le monde, dans des conditions souvent très difficiles, pour construire et maintenir la paix dans leurs communautés et dénoncer l’impunité de la violence exercée contre les femmes. Et pourtant, les femmes ne participent généralement pas aux processus officiels de consolidation de la paix aux niveaux décisionnels. Elles restent en marge des actions officielles et demeurent sous-représentées dans l’ensemble du secteur de la sécurité.

Pour relever ce défi, la communauté internationale a besoin d’agir de manière concertée et systématique. Des progrès ont été réalisés dans la compréhension des liens qui existent entre l’appartenance à l’un ou l’autre sexe, le développement, les droits de la personne, la paix, la sécurité et la justice. La résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité, a réaffirmé le rôle important que les femmes jouent dans la prévention et le règlement des conflits, et demandé instamment aux États membres de l’ONU de faire en sorte que les femmes soient davantage représentées dans la prise de décisions. Or, la discrimination et la violence sexuelle endémiques font gravement obstacle à la mise en œuvre de cette résolution.

La lutte quotidienne pour la survie limite considérablement le nombre des femmes qui militent en faveur de la paix. Celles qui ont le courage et la capacité de s’engager dans l’action en faveur de la consolidation de la paix sont une minorité en danger, qui doit être reconnue, soutenue et renforcée.

Malgré l’émergence de femmes aux plus hauts niveaux de pouvoir en différents coins du monde, les violences à l’égard des femmes et des filles restent un des problèmes les plus répandus de nos sociétés. C’est pour cette raison que l’ONU a choisi pour thème de la Journée internationale de la femme en 2007 "Mettre fin à l’impunité de la violence à l’égard des femmes". L’"Étude approfondie de toutes les formes de violence à l’égard des femmes" du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui a été adoptée par l’Assemblée générale le 19 décembre 2006, affirme que la violence à l’égard des femmes constitue une violation des droits de l’homme et un obstacle majeur à la réalisation de l’égalité des sexes, ajoutant que tant que cette violence perdurera, nous ne pourrons prétendre progresser réellement vers l’égalité, le développement et la paix.

Depuis quelques années, la fréquence des violences commises contre les femmes en période de conflit armé et dans les situations post-conflit est de plus en plus largement reconnue et documentée. Lors de conflits armés, les femmes subissent, de la part d’individus qui sont ou non des agents de l’État, des violences physiques, sexuelles et psychologiques de toutes formes. L’ampleur de la discrimination et de la violence à l’égard des femmes dans les situations de conflit et d’après-conflit - et l’impunité avec laquelle ces violences continuent d’être perpétrées - comptent parmi les principaux obstacles à la consolidation de la paix.

Les actes de violence sexiste à l’école sont également un sujet de vive préoccupation. Ils constituent l’un des obstacles majeurs à l’accès au système scolaire, au maintien aux études et à la réussite scolaire, en particulier chez les filles, et compromettent gravement l’aptitude des pays et de leurs partenaires de développement à atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement qui concernent l’éducation ainsi que les objectifs de l’Éducation pour tous. Afin d’améliorer la prise de conscience de ce problème, et pour marquer le lancement du Rapport mondial des Nations Unies sur la violence contre les enfants, auquel elle a contribué, l’UNESCO a organisé en novembre 2006 une table ronde sur la violence sexiste en milieu scolaire dans le contexte de l’EPT. "L’élimination de toutes formes de discrimination et de violence à l’égard des petites filles" figure également parmi les thèmes prioritaires de la cinquante et unième session de la Commission de la condition de la femme qui se tient, autour de la Journée internationale de la femme, du 26 février au 9 mars 2007.

Il est clair que, si nous voulons parvenir à l’égalité des sexes dans le monde, il nous faut agir à tous les niveaux. La Journée internationale de la femme est l’occasion de se focaliser sur certains aspects essentiels de cette importante entreprise. Cette année, nous devons convaincre la communauté internationale de mettre un terme à la culture de l’impunité qui favorise la violence contre les femmes. Il s’agit d’une étape cruciale de notre action tendant à promouvoir non seulement les droits des femmes, mais aussi l’instauration de l’égalité et de la paix pour tous.

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