Déclaration sur la politique étrangère et européenne de Jean Asselborn à la Chambre des députés

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Jean Asselborn lors de sa déclaration

Le ministre des Affaires étrangères et européennes, Jean Asselborn, a prononcé le 25 novembre 2014 la Déclaration sur la politique étrangère et européenne à la Chambre des députés.

Alors que le mandat du Luxembourg en tant que membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU) arrive à son terme, et que le Grand-Duché s’apprête à présider le Conseil de l’Union européenne (UE) au deuxième semestre 2015, le chef de la diplomatie luxembourgeoise a livré les grandes orientations de la politique étrangère du pays.

Dans un monde où la multitude de crises témoigne d’une grande nervosité et où, hélas, le droit international est trop souvent mis à mal, le ministre a rappelé l’importance d’un cadre international solide pour un pays comme le Luxembourg. Il a souligné le caractère indispensable d’une politique étrangère engagée, solidaire et responsable, pour défendre à la fois les valeurs et les intérêts du pays, mais aussi les fondements sur lesquels repose la communauté internationale.

Travaux du Luxembourg au Conseil de sécurité des Nations unies

Le ministre a débuté son intervention en évoquant les travaux du Luxembourg au Conseil de sécurité des Nations unies. Tout en détaillant la philosophie avec laquelle le Grand-Duché s’est efforcé de relever ce défi historique, il a mis en évidence les résultats concrets de l’engagement luxembourgeois au sein du Conseil.

Le Luxembourg présidant le groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés depuis le 1er janvier 2013, le ministre Asselborn a rappelé que l’adoption à l’unanimité, en mars 2014, d’une nouvelle résolution sur ce sujet représente une réelle avancée pour la protection des enfants. Sur la Syrie, il s’est félicité que malgré les divergences politiques importantes, l’impulsion donnée par le Luxembourg ait pu déboucher sur l’adoption à l’unanimité de deux résolutions visant à améliorer l’acheminement de l’aide humanitaire et l’accès aux populations affectées et que la mise en œuvre des résolutions se traduit d’ores et déjà par de réelles avancées sur le terrain.

Le ministre Asselborn a ensuite livré son analyse de la situation en Ukraine, qui malheureusement démontre que, 25 ans après la chute du mur de Berlin, la paix sur le continent européen ne va pas de soi. Il a condamné avec la plus grande fermeté la violation du droit international que constitue l’annexion illégale de la Crimée. Mettant en garde contre une vision manichéenne de la crise, il a insisté d’une part sur le fait que la Russie doit contribuer à la désescalade à l’Est de l’Ukraine et d’autre part que l’Ukraine doit opérer des réformes dont en priorité une décentralisation du pouvoir et des réformes garantissant l'État de droit, le respect des minorités et la lutte contre la corruption. Alors que les développements actuels sont inquiétants, le ministre a insisté sur la nécessité de ne pas focaliser les efforts uniquement sur l’adoption de sanctions qui ne constituent pas une fin en soi, mais de redoubler d’énergie pour revitaliser le processus politique initié à Minsk afin de sortir de l’engrenage de la confrontation. 

Conflit israélo-palestinien

Au sujet du conflit israélo-palestinien, le ministre a fortement regretté l’échec des tentatives de relance du processus de paix, l’absence de négociations faisant le lit des extrémistes de tout bord. Déplorant l’augmentation des tensions entre Israéliens et Palestiniens, il a mis en garde contre les dérives risquant d’entrainer un basculement vers un conflit religieux qui aurait des conséquences régionales désastreuses. Plaidant en faveur d’une solution à deux États, basée sur les frontières de 1967, le ministre a déclaré que la création d’un État palestinien ne saurait être considéré comme étant un cadeau fait au peuple palestinien, mais qu’il constitue la pierre angulaire d’une solution permettant à Israël de vivre en paix et en sécurité. Or, la poursuite constante de la politique de colonisation a pour conséquence de rendre physiquement impossible toute solution à deux États, en plus de contrevenir au droit international. Enfin, les conditions de vie désastreuses à Gaza montrent l’importance de lever le blocus.

Le ministre a déclaré soutenir activement les travaux actuellement en cours au Conseil de sécurité, où la Jordanie, au nom du groupe arabe, prépare une résolution. Concernant la reconnaissance de l’État palestinien, le ministre a insisté sur l’importance d’avoir une approche coordonnée au niveau de l’UE afin de dépasser la dimension plus symbolique des reconnaissances bilatérales. La reconnaissance de l’État de Palestine doit servir l’objectif concret de la paix et ne doit pas être une fin en soi. Il a prévenu qu’en cas d’obstruction à la solution à deux Etats, le Luxembourg saurait prendre ses responsabilités.

Situations respectives dans les pays du voisinage sud de l’UE

Le ministre Asselborn a ensuite passé en revue les situations respectives dans les pays du voisinage sud de l’UE. Il s’est notamment félicité de la transition démocratique initiée en Tunisie, a insisté sur le rôle stratégique régional de l’Égypte, a déploré la situation actuelle en Libye et a détaillé l’impact alarmant de la crise syrienne sur toute la région et notamment sur le Liban, la Jordanie, la Turquie et l’Irak. Regrettant que l’impasse politique ait consacré l’émergence de groupes terroristes dans la région, le ministre Asselborn a insisté sur la nécessité de persévérer en soutenant l’opposition syrienne modérée, aucun choix ne pouvant s’opérer entre deux tyrannies, que ce soit celle d’Assad ou de ‘Daech’. Il a ensuite détaillé les moyens entrepris pour combattre la barbarie de ‘Daech’ et le phénomène des combattants terroristes étrangers.

Sur le programme nucléaire iranien, le chef de la diplomatie luxembourgeoise a abordé les négociations et formulé l’espoir que les parties E3+3 parviennent à un accord avant la date butoir qui est désormais fixée au 30 juin 2015. Mettant en évidence le fait que les négociations en cours constituent une vraie fenêtre d’opportunité pour arriver à une normalisation des relations de l’Iran avec la communauté internationale, le ministre a insisté sur l’importance du respect mutuel dans le dialogue avec cet acteur de poids au Moyen-Orient.

Relations du Luxembourg avec le continent africain

Au sujet des relations du Luxembourg avec le continent africain, le ministre a réaffirmé la volonté du Grand-Duché de s’engager pleinement pour approfondir encore davantage les relations en combinant les niveaux politique, diplomatique et de la coopération avec un volet économique et culturel. Faisant allusion à l’essor économique de l’Afrique et à son importance croissante dans le commerce international, le ministre s’est félicité de ces développements positifs. Encouragé également par l’apaisement de certaines tensions, il a précisé que la stabilité politique et sécuritaire ne devait pas reposer uniquement sur des dirigeants forts au détriment d’institutions fortes, seules à même de répondre durablement aux aspirations populaires vers plus d’États de droit et de la démocratie.

Conscient des menaces sérieuses à la paix et à la stabilité qui pèsent toujours sur plusieurs régions du continent africain, le ministre a passé en revue la situation Mali et dans la bande sahélo-saharienne, en République centrafricaine et au Soudan du Sud. Rappelant l’engagement du Grand-Duché sur les dossiers africains traités au niveau du CSNU ainsi que la participation luxembourgeoise aux missions EUTM Mali, EUCAP Sahel Mali, EUCAP Sahel Niger et EUSEC RDC Congo, le ministre a affirmé que le partenariat développé par le Luxembourg avec plusieurs pays de l’Afrique de l’Ouest depuis deux décennies contribue à s’attaquer aux causes profondes des conflits en œuvrant résolument pour le développement socio-économique.

Relancer la croissance et l’emploi en Europe

Le chef de la diplomatie luxembourgeoise a ensuite fait un tour d’horizon des principaux éléments de l’actualité politique européenne et a livré son analyse des élections européennes de mai dernier, qui ont permis de déboucher sur un Parlement fort pourvu d’une majorité saine et une Commission expérimentée. Il a exploré les pistes pour relancer la croissance et l’emploi en Europe, notamment à travers le programme d’investissement annoncé par le président de la Commission, et a insisté sur la nécessité de l’appliquer avec la flexibilité nécessaire en fonction des situations rencontrées dans chaque pays, dans l’intérêt de tous les citoyens de l’UE et en particulier des plus vulnérables.

Le ministre a ensuite rappelé que, tant pour des raisons stratégiques qu’écologiques, l’UE se devait d’avoir une action forte en matière de climat et d’énergie et a réaffirmé des objectifs ambitieux en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES), en matière d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique, notamment au travers du  paquet climat-énergie 2030.

Le ministre Asselborn a par ailleurs renouvelé son engagement en faveur de la politique d’élargissement de l’Union européenne. Il a souligné qu’il était de la responsabilité de l’UE de répondre favorablement à l’appel à la paix, la prospérité, la démocratie et l’État de droit des pays des Balkans. Le ministre s’est réjoui que les négociations avec la Turquie, pays à l’économie dynamique qui joue un rôle crucial dans la région, aient pu reprendre fin de l’année dernière.

Négociations relatives au TTIP

Le ministre Asselborn a également mis en avant l’importance d’un renforcement des relations économiques dans l’intérêt mutuel des deux rives de l’Atlantique. Conscient des préoccupations éprouvées par la société civile luxembourgeoise et des défis qui se posent dans les négociations relatives au TTIP, le ministre Asselborn a notamment abordé la question des normes sociales et environnementales ainsi que la nécessité de renforcer le dialogue avec l’opinion publique et d’œuvrer pour un maximum de transparence, tout en marquant sa réticence à l’inclusion d’un mécanisme de règlement des différends. 

La politique étrangère luxembourgeoise reste fortement attachée au multilatéralisme, y compris dans le domaine du commerce international où il importe plus que jamais de résister aux tendances protectionnistes et de lutter contre des barrières enfreignant le commerce international pour favoriser le développement économique des pays les moins développés. Il a par ailleurs rappelé l’importance accrue que le gouvernement accorde à la diplomatie économique.

Grandes orientations et objectifs de la 12e présidence luxembourgeoise

Alors que le Luxembourg s’apprête à présider le Conseil de l’Union européenne (UE) au deuxième semestre 2015, le ministre a informé les députés sur les préparatifs en cours, ainsi que sur les grandes orientations et objectifs de cette 12e présidence luxembourgeoise. Conformément à l’agenda stratégique établi dans le cadre du Trio de Présidences, avec l’Italie et la Lettonie, l’accent sera mis sur la lutte contre le chômage, en particulier des jeunes, la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, la stratégie de croissance Europe 2020 et l’action en matière de climat et d’énergie. Le ministre a rappelé que si l’UE a trouvé son origine dans l’objectif de garantir la paix, elle se devait aujourd’hui de garantir la paix sociale.

Le ministre a conclu son intervention en expliquant que l’expérience acquise par le  Luxembourg au cours de mandat en tant que membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, couplée à l’engagement profondément européen du Grand-Duché, a sensiblement renforcé la visibilité, la crédibilité et le respect du Luxembourg sur la scène internationale. Le Luxembourg continuera, au travers des instances multilatérales, mais également de manière bilatérale, à mettre ses compétences au service du respect du droit international, de la paix et de la sécurité.

Communiqué par le ministère des Affaires étrangères et européennes

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