Réactions du Premier ministre Jean-Claude Juncker aux propos européens du Premier ministre français, Lionel Jospin

J’ai lu attentivement le discours de M. Jospin qu’il m’avait fait parvenir ce matin. J’ai beaucoup apprécié la tonalité générale de ce discours, ne fut-ce que parce qu’il privilégie le contenu par rapport au contenant sur les développements que l’Europe telle que nous la connaissons doit prendre.

Je dois dire que je me sens en phase avec la plupart, sinon toutes les idées émises et avancées par le Premier ministre français. J’ai applaudi des deux mains à son appel à la volonté politique de faire de l’Europe une Europe qui serait plus sociale où il reprend l’idée, qui fut toujours la mienne, d’un socle des droits sociaux minima, renforcer davantage la coordination des politiques économiques, harmoniser, pour rendre la concurrence fiscale dommageable moins importante, la fiscalité des entreprises, créer une police criminelle européenne, qui serait opérationnelle, une police des frontières qui fonctionnerait sur un mode européen.

Voilà autant d’idées que nous même nous avions énoncé au cours des mois écoulés. Faire en sorte que la représentation extérieure de la zone euro devienne visible au niveau du Fonds monétaire international, voilà une autre idée qui n’est pas étrangère à notre propre pensée.

Je l’ai trouvé plus timide sur les prolongements institutionnels à long terme que l’Europe doit avoir. Je suis d’accord avec la notion de fédération d’Etats nations, parce que j’ai toujours considéré que les nations, les Etats ne seraient pas des inventions provisoires de l’histoire. Donc ce concept me parvient parfaitement. Mais je voudrais, peut-être contrairement à M. Jospin, que nous communautarisions davantage la politique extérieure et de sécurité commune. Là où il plaide pour un renforcement du rôle du Haut Représentant, je plaide pour l’insertion de cette fonction dans la Commission européenne, qui elle doit devenir l’initiateur en matière de politique étrangère. Je parle du long terme.

L’idée d’un Congrès qui serait composé et du Parlement européen et des parlements nationaux pour que l’Union européenne de demain soit dotée d’une grille de lecture en matière de subsidiarité me paraît être une bonne idée, mais sur ce point je demande à approfondir, ensemble avec le Premier ministre français et d’autres, cette idée qui, à mes yeux, n’est bonne que si elle ne fait pas une concurrence directe et alors déloyale au Parlement européen.

Donc, d’une façon générale c’est un discours à tonalité engageante et allante, qui me plait quant au niveau d’ambitions qu’il fixe pour l’Europe telle qu’elle est aujourd’hui. Sur le plan institutionnel dont Jospin dit qu’il est moins important que le projet politique en lui-même, il me semble être caractérisé par une timidité, qui peut-être quittera l’esprit de son auteur lorsque nous aurons réparti  - quand nous devons le faire - les compétences entre la fédération des Etats nations et les Etats nations eux-mêmes. Il y a donc à manger et à boire.

Dernière mise à jour