Lydie Polfer à la 109e session du Comité des ministres du Conseil de l'Europe

Strasbourg, le 8 novembre 2001

Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire Général,
Monsieur le Président de l'Assemblée,
Chers collègues,

Voici six mois, lors du dernier Comité des ministres, nous étions loin de nous douter que la lutte contre le terrorisme s’inscrirait au centre de nos préoccupations, que le secrétaire général se verrait amené à nous présenter un rapport pour l'action du Conseil de l'Europe dans le cadre d’un rassemblement international contre le terrorisme.

Hélas, les infâmes attaques du 11 septembre, qui visaient non seulement les Etats-Unis d’Amérique, mais toutes les sociétés démocratiques, nous y contraignent. Elles demandent une réaction déterminée de notre part. Mon collègue Louis Michel vient d’exposer en détail les mesures et initiatives prises par l’Union européenne à cet effet. Il va sans dire que je m’associe pleinement à son intervention.

A son instar, il m'importe de mettre en exergue l'importance de mener la lutte contre le terrorisme, que ce soit sur le plan national ou par le truchement des institutions et organisations multilatérales, en conformité avec le droit international, et cela en dépit du fait que ce phénomène abject dans l'étendue de sa brutalité et de son imprévisibilité pose un défi immense à la sauvegarde des droits de l'homme, à la démocratie et à l'état de droit ainsi qu'à la vie de nos sociétés en général.

J'en appelle au discernement dans la définition de politiques d'ordre préventif ou répressif, ce qui évitera aux Etats véritablement démocratiques de tomber dans le piège de la négation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précisément au nom de l'anti-terrorisme.

Le secrétaire général nous a soumis des éléments concrets pour l’action de notre Organisation contre le terrorisme. Je salue tout particulièrement la création d'un groupe multidisciplinaire sur la lutte internationale contre le terrorisme (GMT), qui, par son action analytique et prospective, permettra d'affiner et, le cas échéant, de compléter les instruments existants, en plein respect des développements dans d'autres institutions et en concertation avec elles, en vue d'assurer la convergence et la cohérence d'action de la communauté internationale.

Monsieur le Président,

Nous préconisons tous une coopération inter-institutionnelle forte. Je rappelle que l'année 2001 a été décrétée par les Nations Unies comme "année internationale pour le dialogue entre les civilisations". La pertinence de cette initiative en cette période troublée ne peut plus faire le moindre doute.

J'estime dès lors que sur un plan régional, et en complémentarité avec l'action globale, le Conseil de l'Europe devrait - avec l'Union européenne et l'OSCE - contribuer au lancement d'un dialogue multiculturel et inter-religieux, pour éviter les amalgames réducteurs et les stéréotypes blessants.

[ Je donne à penser qu'une réflexion commune qui engloberait l'Organisation de la Conférence islamique, mais aussi la Conférence des Eglises européennes, et qui pourrait bénéficier de l'apport potentiel du processus de Barcelone de l'UE, aurait vocation à contribuer aux travaux des Nations Unies en fournissant une impulsion forte émanant des Européens. ]

Monsieur le Président, chers collègues,

En ce qui concerne l'efficacité à terme de la Cour européenne des Droits de l'Homme, le souvenir de nos discussions et conclusions à Rome, il y a tout juste un an, reste vif dans mon esprit. Je salue la réforme entreprise depuis lors par la Cour elle-même; je l'encourage à poursuivre ses efforts, même s'ils ont une limite objective et que certains éléments - relevant notamment de décisions politiques des Etats - lui échappent. C'est là, chers collègues, que nous sommes tous sollicités.

Il est clair dans mon esprit que toute amélioration du système actuel est également tributaire de réformes domestiques, sous peine d'asphyxier le mécanisme de contrôle instauré il y a cinquante ans. La Cour ne doit et d'ailleurs ne peut devenir le palliatif des carences des systèmes nationaux.

Nos interrogations sur l'avenir de la protection des Droits de l'Homme en Europe, sous l'angle d'une future relation entre la Convention européenne des Droits de l'Homme et la Charte des Droits fondamentaux devront nous amener à garantir la cohérence des instruments afin d'éviter l'instauration d'ordres juridiques concurrentiels et de jurisprudences divergentes. La question de l'adhésion des Communautés européennes à la Convention européenne des Droits de l'Homme reste de toute façon posée.

Monsieur le Président,

Me référant à d'autres domaines d'action du Conseil, je souhaite, sans vouloir entrer dans le détail, encourager l'Organisation, ses Etats membres et ses Etats candidats, à répondre résolument et de manière constructive aux situations politiquement sensibles qui peuvent naître, voire même persister, sur le territoire de l'un d'eux, entre eux, ou encore dans une région donnée.

Pour conclure je salue l'excellente coopération qui s'est instaurée entre Présidences successives. Elle est dans l'intérêt de chaque Présidence tout comme dans celui de l'Organisation. Permettez-moi de formuler l'espoir que cette recherche de continuité puisse s'ancrer dans les mœurs.

Enfin, je tiens à adresser mes félicitations à la Présidence sortante du Liechtenstein pour son excellente performance et pour son engagement sans failles. Souhaitant bon vent à la Présidence lituanienne fraîchement émoulue, je l'assure qu'elle trouvera en la Vice-Présidence luxembourgeoise un partenaire fiable et dévoué à la cause du Conseil de l'Europe.

Je vous remercie de votre attention.

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