La secrétaire d'État à la Culture, à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, Octavie Modert, fait le bilan de la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l'UE dans le domaine de la culture

C’est avec une grande satisfaction que je peux tirer aujourd’hui le bilan des travaux réalisés au cours du semestre écoulé en tant que présidente du Conseil des ministres de la Culture de l’Union européenne. Dans le domaine de la culture, nous avons en effet beaucoup travaillé. Nous avons eu la chance de pouvoir prouver et démontrer qu’il n’y pas de lassitude concernant l’Europe et la culture a beaucoup à contribuer à cet égard.

Nous nous sommes penchés de manière intense sur la proposition de décision pour le programme Culture 2007. Après la présentation par la Commission européenne de cette proposition sous Présidence néerlandaise, c’est sous notre Présidence qu’ont été réalisées de considérables progrès sur le fond du programme.

En effet, les discussions menées au sein du Comité des affaires culturelles sur la proposition de programme "Culture 2007", qui s’étendra sur les années 2007 à 2013, ont permis de relever un certain nombre de points consensuels en ce qui concerne les objectifs du programme. Toutes les délégations se sont accordées sur l’objectif général du programme, à savoir renforcer la coopération culturelle européenne, qui apporte une valeur ajoutée à l’action des Etats membres en matière culturelle. Le consensus semble également complet sur la nécessité de soutenir des actions de coopération annuelles et pluriannuelles, ainsi que sur l’importance des objectifs transdisciplinaires donnés au programme: dialogue interculturel, circulation des œuvres et mobilité des professionnels. Finalement, il convient de noter l’existence d’un consensus sur la nécessité de l’efficacité et de la visibilité du programme, de même que sur l’importance de veiller à la qualité des projets soutenus.

Un autre sujet dominant nos travaux était celui de la diversité culturelle. La Présidence luxembourgeoise a mené les travaux concernant les négociations, âpres par ailleurs, de la convention UNESCO sur la diversité des expressions culturelles et artistiques, aussi bien à Bruxelles quand il s’agissait de décider d’un code de conduite pour les sessions de négociation à Paris, qu’au sein de l’UNESCO, où les représentants luxembourgeois ont présidé les travaux des réunions intergouvernementales d’experts de février et de juin. Les progrès qui y ont été accomplis par la Présidence au nom de l'Union et la Commission européenne ont fait l’unanimité parmi les ministres de l'Union, mais aussi parmi un grand nombre d’États tiers, constatant un succès indéniable de la Présidence luxembourgeoise sur un dossier délicat. Aussi avons-nous fait un pas important dans la direction d’une présentation d’un texte consensuel à la prochaine Assemblée générale d’octobre 2005.

En date du 23 mai, j’ai eu l’honneur de présider le Conseil "Culture" de l’Union européenne à Bruxelles. Les ministres ont procédé à un échange de vues fructueux sur la mobilité des collections des musées et ils ont salué avec reconnaissance le travail accompli sous Présidence luxembourgeoise par le groupe de travail sur la mobilité des collections et sont prêts à suivre un grand nombre de recommandations, e.a. celles sur la qualité architecturale, sur les relations entre le tourisme et le patrimoine culturel, sur la digitisation du patrimoine culturel et scientifique.

Le Conseil a également procédé à un premier examen de la proposition de la Commission européenne sur le programme "Citoyens pour l’Europe". Cette proposition vise à contribuer à relever un des grands défis de l’Union, à savoir comment la rapprocher de ses citoyens. Il s’agit de promouvoir une citoyenneté européenne active, en encourageant la coopération entre les citoyens et les organisations citoyennes de différents pays.

La session s’est achevée par la présentation d’une nouvelle proposition de la Commission européenne pour le programme "Capitale européenne de la culture", intégrant à partir de 2009 les nouveaux États membres de l’Union et renforçant le rôle du jury.

La manifestation "Capitale européenne de la culture" peut être considérée comme étant l’une des réalisations les plus tangibles et connues de l’Europe de la culture. Rappelons à ce sujet l’impact immense qu’a eu l’année culturelle "1995" sur les activités et le monde culturels de notre pays, alors que le Luxembourg s’est vu pour la première fois attribuer le titre de ville européenne de la culture. Cette initiative a fermement contribué à rendre les Luxembourgeois plus attentifs à la culture et a incité le gouvernement à continuer à investir dans ce secteur. Nous nous réjouissons d’ores et déjà de l’imminente année 2007, lorsque nous porterons à nouveau le titre de Capitale culturelle en association avec la Grande Région et la ville de Sibiu en Roumanie; il s’agit là effectivement d’une idée propagée et exercée par le Luxembourg avant même que cette innovation ne soit officiellement incorporée dans la nouvelle proposition.

Sur plusieurs dossiers thématiques, je peux me réjouir d’avancées importantes réalisées par la Présidence luxembourgeoise, à savoir le dialogue interculturel, la mobilité des œuvres et des artistes, le patrimoine européen et le tourisme culturel, arrêtés par un programme de travail du Conseil de novembre 2004 , à réaliser d’ici la fin 2006. Nous étions donc la première des cinq Présidences tournantes successives à commencer à mettre en œuvre ces priorités et nos avancées serviront certainement de base aux travaux des collègues britanniques, autrichiens et finlandais.

Nous avons fait le choix de nous consacrer à la transposition des priorités du programme de travail, primordialement à travers l’organisation de séminaires spécialisés.

Du 15 au 17 avril, le 2e Forum européen pour la culture, placé sous le thème de "Redécouvrir l’Europe", organisé en collaboration avec l’Institut Pierre Werner a permis d’aborder le thème du dialogue interculturel. Il s’agissait notamment de favoriser les échanges intellectuels entre les cultures d’Europe. Au cours des trois jours de débats, acteurs culturels, politologues, historiens, intellectuels et artistes européens ont exposé leur conception de l’Europe élargie à 25 États membres, c’est-à-dire de cette «Europe retrouvée» – selon les mots de Jacques Rigaud, conseiller d’Etat honoraire et membre du conseil scientifique de l’Institut Pierre Werner – qu’il s’agit désormais de redécouvrir.

L’analyse de la conscience européenne et des relations entre les pays d’Europe occidentale et des pays d’Europe centrale et orientale qui ont récemment rejoint l’Union européenne ainsi que le problème de l’identité européenne – ou des identités européennes – se sont trouvés au cœur des débats. L’accent a été mis sur le dialogue et les échanges culturels entre ces pays.

La priorité du programme de travail de la protection du patrimoine européen et de la promotion du tourisme culturel a été traitée de manière soutenue au cours de trois réunions d’experts consacrées au tourisme culturel, à la numérisation du patrimoine culturel et à la qualité architecturale.

Tout d’abord, du 20 au 22 avril 2005, les travaux réalisés dans le cadre du colloque "Tourisme et culture – le défi de l’intégration européenne" organisé par l’Institut européen des itinéraires culturels ont abouti à un projet de Déclaration de Luxembourg. Les participants à cette réunion - fonctionnaires, experts et professionnels - ont proposé à la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’Union européenne, au Conseil des ministres et à la Commission européenne un certain nombre de recommandations pour qu’elles soient transmises aux présidences suivantes.

Ainsi, la politique communautaire qui sera menée en matière de tourisme culturel devrait notamment favoriser encore mieux le processus d’intégration des nouveaux pays membres et les coopérations culturelles et touristiques à l’échelle du continent, en mettant en lumière, au-delà des identités particulières, le patrimoine culturel européen et les valeurs communes comme élément de différenciation dans un monde en compétition croissante.

Les travaux réalisés au cours de ces deux jours ont encore renforcé notre volonté de continuer à encourager une réflexion sur l’évolution culturelle et économique de ce secteur-clé pour l’intégration européenne. Conjointement avec la France, nous nous sommes par ailleurs engagés en faveur d’une initiative qui consiste à mettre en place un itinéraire culturel des pères fondateurs de l’Europe, ce qui me semble particulièrement utile, à un moment où les citoyens européens souhaitent revenir ensemble sur l’origine et l’histoire de l’intégration européenne, pour exercer une identité européenne.

Nous avons également pu bénéficier de l’assistance et du savoir-faire des membres de la Fédération des éditeurs européens et du Bureau européen de la musique pour l’organisation du 19 au 21 avril d’un séminaire consacré aux industries culturelles, notamment l’industrie de la musique et du livre. Nous avons constaté que les industries culturelles sont un fer de lance de l’économie du futur, et qu’elles jouent un rôle indispensable dans la production et la diffusion de la création artistique. Dans la stratégie de Lisbonne, la culture joue un rôle clé en tant qu’industrie créatrice. L’objectif du séminaire était notamment de discuter de la place de ces industries au sein du nouveau programme cadre communautaire culture 2007.

A la fin de la Présidence luxembourgeoise, du 20 au 22 juin, nous avons organisé une réunion du groupe des représentants nationaux des États-membres de l'Union européenne sur la numérisation du patrimoine culturel et scientifique, créé en avril 2001 à Lund (Suède) dans le cadre du projet MINERVA - Réseau ministériel pour la valorisation des activités de numérisation. A l’issue des trois jours, les participants ont présenté le nouveau Plan d’action dynamique élaboré par la troïka des présidences des Pays-Bas, du Luxembourg et du Royaume-Uni, succédant au plan d’action de Lund.

Le 27 juin, la réunion informelle des ministres de la culture au Centre culturel de rencontre Abbaye de Neumünster a été l’occasion pour nous d’exposer à nos collègues européens les progrès réalisés en matière de culture au terme de six mois de Présidence luxembourgeoise.

En marge de cette réunion informelle, j’ai eu l’opportunité d’ouvrir les travaux du forum européen pour les politiques architecturales réunissant experts, architectes et fonctionnaires et, en l'occurrence, les ministres de l’Union européenne, des pays adhérents et candidats, de Norvège, du Canada et du Québec en tant qu’invités d’honneur. Nous avons voulu inviter les membres du Forum à assister au début de nos travaux afin de marquer l'attachement que nous apportons à la dimension de l'environnement naturel et bâti comme composante de l'identité culturelle de notre pays et de toute l'Europe. Les ministres ont constaté un engagement et un soutien cvertains, et du côté du gouvernement et du côté de l’architecture, pour une responsabilité commune pour créer un cadre de vie qui peut fournir de bons exemples à travers toute l’Europe, des cadres de vie qui soient vivables et qui respectent la diversité des peuples. Ainsi, cinq années après la première assemblée plénière du forum, il nous paraissait important de faire le point sur les progrès réalisés dans la prise en compte de l'architecture dans nos actions politiques.

En effet, l’impact potentiel de l’architecture sur le changement social et économique étant largement reconnu au sein de l’Union européenne, les participants ont conclu que l’architecture pourrait, dans une approche de la qualité du cadre de vie des citoyens, devenir un projet politique affirmé dans la poursuite de la construction de l’Europe. Ce projet, fondé sur la préservation et la promotion de la diversité culturelle et du patrimoine culturel d’hier et de demain, renforcerait le sentiment de l’identité européenne, la conscience de chacun de ses citoyens d’appartenir à une communauté de valeurs et leur volonté de bâtir ensemble un avenir commun.

Des industries culturelles européennes, l'architecture est celle dont l'échelle et les montants investis sont parmi les plus importants. Comme exemples récents au Luxembourg, je citerai la nouvelle Philharmonie et le nouveau Musée d'art moderne. C'est l'acte culturel dont tout un chacun a eu l'occasion de faire l'expérience, et auquel chacun a accès quotidiennement, le plus souvent sans en avoir conscience. Le débat sur l'aménagement du cadre de vie, et l'attachement que les citoyens y apportent, est facteur de cohésion: c'est une dimension culturelle largement partagée.

Notre Présidence s’est achevée par un moment culturel et artistique fort: l’inauguration de la nouvelle Philharmonie, la salle de concerts Grande-Duchesse Joséphine-Charlotte, le 26 juin, en présence des ministres de la culture de l’Union européenne.

Comme je viens de le mentionner, l'idée de faire construire une grande salle de concerts, souvent évoquée dans le passé, n'a vraiment pris forme qu'en 1995, alors que l'année culturelle battait son plein et que son succès dépassait toutes les attentes. La salle de concerts Joséphine-Charlotte est une de ces réalisations qui va certainement contribuer à créer un patrimoine architectural contemporain digne d'un pays qui veut tenir son rang et remplir son rôle au coeur de la Grande Région et de l'Europe.

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