Nicolas Schmit, Discours prononcé à l'occasion de la 117e session du Comité des ministres du Conseil de l'Europe, Strasbourg

Je tiens d'abord à saluer chaleureusement Monsieur Milan Roćen, Ministre des Affaires Etrangères du Monténégro, nouvel Etat membre que nous venons d’accueillir dans notre famille. Je suis convaincu que son pays, comme il l'a d'ailleurs maintenant expliqué, sera un partenaire engagé dans la défense des valeurs qui font l’unicité et la spécificité de notre Organisation.

Monsieur le Président, permettez-moi également de vous féliciter pour la manière très efficace avec laquelle Saint-Marin a conduit sa présidence du Comité des Ministres. Mon estime va également vers tous vos collaborateurs, et plus particulièrement l’Ambassadeur Bellatti Ceccoli.

L’engagement de mon pays dans l’approfondissement de la relation entre l'Union européenne et le Conseil de l'Europe est bien connu. Nous l’avons démontré avant le Sommet de Varsovie qui a fourni les lignes directrices pour la future coopération, nous l’avons aussi prouvé tout au long des deux années de discussions à la fois au sein de l’Union européenne, mais aussi entre l'Union européenne et le Conseil de l’Europe. Le Mémorandum qui a été conclu est d'abord un accord politique pour rendre, conformément à la teneur du rapport du Premier Ministre Juncker, les contacts plus étroits entre les responsables des deux institutions, pour faire en sorte que les deux Organisations différentes certes, mais complémentaires, deviennent de véritables partenaires pour construire cette Europe sans clivages qui est notre objectif commun.

Le Mémorandum traduit en actions opérationnelles plusieurs axes essentiels de l'approche proposée par le rapport Juncker. Je pense plus particulièrement à l’engagement commun d’assurer la cohérence entre les espaces juridiques respectifs, à la volonté politique de coopérer concrètement et de s’inspirer des acquis de chacun, de tirer le meilleur usage du savoir-faire unanimement reconnu du Conseil de l’Europe dans le domaine des droits de l’homme en Europe. Je voudrais aussi souligner l'attachement de mon pays à l'adhésion de l'Union européenne à la fois à la Convention européenne des Droits de l'Homme et au Conseil de l'Europe. Cela doit rester un objectif que nous devons poursuivre énergiquement.

Nous venons d’avoir également une discussion intéressante sur le rapport du Premier Ministre Juncker et je souscris entièrement au compte-rendu que vous venez de faire de nos discussions. Le rapport reflète en effet une même ambition pour le continent européen, une ambition qui vise la construction d'une Europe fondée sur les mêmes valeurs démocratiques, sur le respect des libertés publiques, sur le progrès social, la paix, sur le respect du droit. Je pense que nous devons maintenant entreprendre cette tâche pour mieux organiser l'architecture européenne, pour renforcer dans ce cadre le rôle futur du Conseil de l'Europe, pour améliorer l'interaction entre notre organisation et l'Union européenne mettant en chantier sans tarder ce qui peut se faire dès aujourd'hui. Je pense plus particulièrement aux recommandations relatives aux relations entre l'Agence européenne des droits fondamentaux et le Conseil de l'Europe, la plus grande implication des Ministres dans les travaux du Conseil de l'Europe et enfin la révision de la procédure concernant le Secrétaire Général que nous avons décidée.

Monsieur le Président, plusieurs intervenants, notamment la Ministre suisse et la Ministre du Liechtenstein ont attiré notre attention sur les grandes difficultés que connaît notre système de protection unique des Droits de l'Homme, notamment la Cour européenne. C'est la Cour qui est au cœur même de notre dispositif et qui fait l'originalité, l'unicité de notre système de protection des Droits de l'Homme. Nous devons en effet tout entreprendre pour rendre à ce système unique dans le monde son efficacité, puisque rendre la justice dans les délais acceptables qui est d'ailleurs l'un des principes mêmes de la Cour, doit bien sûr s'appliquer aussi à la Cour elle-même. C'est donc pour nous un objectif que nous devons poursuivre avec énergie.

Le Protocole n° 14 est certainement l’un des moyens pour atteindre cet objectif. Il est pour cette raison impératif qu’il puisse produire ses effets sans tarder. Comme les interlocuteurs qui m’ont précédé, je demeure confiant que la Fédération de Russie fera tout le nécessaire pour que le Protocole soit ratifié très prochainement. J'aimerais dans ce contexte aussi rappeler qu'il est absolument impératif que tous les membres de cette organisation exécutent les arrêts de la Cour. C'est un élément crucial qui donne précisément la force à notre système de protection des Droits de l'Homme.

Je pense également au rapport du groupe des Sages dans ce contexte. Je salue la pertinence de leurs propositions qui s'adressent tant à la Cour qu'aux Etats membres. Le Gouvernement luxembourgeois est disposé à les examiner dans un esprit ouvert. Certaines des pistes de réflexion offertes par les Sages mettront du temps à se concrétiser. Dès lors, je propose que nous donnions mandat à nos collaborateurs de mettre rapidement en chantier les propositions qui ne nécessitent pas de modifications de la Convention. Engageons en parallèle la réflexion sur les propositions qui présupposent une modification de la Convention en prenant en compte, le cas échéant, les premières expériences de mise en œuvre du Protocole n° 14.

Je voudrais mentionner rapidement aussi les grandes campagnes lancées par le Conseil de l'Europe l'année dernière, notamment la Campagne européenne de la Jeunesse "tous différents, tous égaux" qui a été lancée avec l'aide de la Commission européenne, les partenaires du Benelux et notre Conseil. C'est à travers des contacts entre jeunes qu'effectivement nous réussirons à construire une Europe sans clivage, une Europe fondée sur les mêmes valeurs.

Je voudrais aussi saluer l'initiative concernant le dialogue interculturel et notamment sa dimension religieuse.

Enfin, je ne peux que me féliciter de l’adoption aujourd'hui d’un nouvel accord partiel élargi sur le sport appelé de ses vœux par mon pays dès le début de cette initiative.

Cette journée a une certaine signification historique. C'est une sorte de coïncidence heureuse que parfois l'histoire sait produire. Le jour où le Monténégro devient membre de notre Organisation, la Serbie prend la Présidence de notre Comité. Après tant de drames dans cette région, c'est une formidable réussite des valeurs, des méthodes européennes. Mais c'est également une grande obligation qui incombe à tous les membres, et je dirais en premier au membre qui a l'honneur d'assumer la Présidence de notre Organisation. L'un des principes fondamentaux de notre Organisation est le respect et la prééminence du droit. Et je dois dire avec d'autres, que c'est le respect du droit, aussi du droit international, qui doit être assuré par tous les membres. Dans cet esprit je souhaite tout le succès à la Présidence serbe et je considère que cette Présidence est une contribution importante à la paix, à la stabilité et au respect des droits de l’homme, notamment dans la région européenne qui a connu les plus grands conflits encore il y a peu de temps.

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