Jean Asselborn, Discours à l'occasion de la réunion ministérielle UE-Afrique, Sharm el-Sheikh

Messieurs les présidents,
Chers collègues,

Je tiens tout d’abord à remercier très chaleureusement notre hôte égyptien, Ahmed Abul Gheit, de nous offrir cette occasion de nous concerter une dernière fois avant le sommet UE-Afrique de Lisbonne.

Ce sommet marque une étape historique dans les relations entre nos deux continents. Pour la première fois, des documents stratégiques déterminant l’avenir de nos relations pour de nombreuses années à venir ont en effet été élaborés conjointement. Les cotés européen et africain se sont fixés ensemble des objectifs communs basés sur des valeurs communes qui sont définis dans la stratégie conjointe. De même, le premier plan d’action a été élaboré conjointement en vue la mise en œuvre des priorités établies dans la stratégie. J’insiste tant sur cette "élaboration conjointe" car elle me semble en effet être l’un des caractères saillants, à côté de son approche globale et intégrée, de notre nouveau partenariat.

Messieurs les présidents,

L’adoption de ces documents lors du sommet de Lisbonne élèvera notre partenariat à un autre niveau: un partenariat stratégique entre partenaires égaux, entre alliés fiables, qui ensemble s’attèlent à la résolution des nombreux défis qui se posent à nos deux continents. Finie la relation donateur-bénéficiaire qui a trop longtemps réduit nos partenaires africains à des spectateurs passifs, sans que nous, les Européens, nous ayons vraiment apprécié à sa juste valeur la contribution active que les pays africains peuvent apporter à la résolution des défis communs.

Je pense à la paix et la sécurité, à la gestion des conflits régionaux et internationaux, au développement et à la lutte contre la pauvreté, à la création d’une zone de prospérité du Cap Nord au Cap Horn, mais aussi à la lutte contre le changement climatique et la sécurité énergétique.

L’Union africaine a émergé ses dernières années comme un vrai partenaire, au niveau continental, de l’Union européenne. La stratégie conjointe et le plan d’action qu’on adoptera dimanche prochain consacreront ce rôle, tout comme celui d’interlocuteur privilégié dans tous les domaines.

Chers collègues,

Un domaine qui me tient tout particulièrement à cœur, et dont je sais que nos partenaires africains partagent l’importance, est la bonne gouvernance et les droits de l’Homme. Si le développement reste la priorité des priorités, il est difficile d’imaginer un développement dans des circonstances où les droits individuels sont bafoués, l’application de la loi n’est pas garantie et où la corruption gangrène tout le système. Ces fléaux doivent être combattus, et le succès que les pays africains connaissent depuis un certain temps en matière de réussite économique s’explique sans doute par les efforts importants déployés dans ce domaine. Je pense notamment au NEPAD, au mécanisme de revue des pairs, à la charte africaine sur la démocratie, les élections et la gouvernance ou encore à la commission africaine sur les droits de l’Homme et des peuples. Ce sont des développements dont nous ne pouvons que féliciter nos partenaires africains. Dans ce contexte, je tiens à saluer les efforts de la SADC qui, a sollicité la médiation du président Mbeki, en vue de chercher à résoudre la crise politique, économique et sociale au Zimbabwe et à ramener le pays dans le giron des nations démocratiques. Cette crise de gouvernance concerne en effet toute la région et, au-delà, tout notre partenariat: nous nous devons d’en discuter!

La bonne gouvernance est également un des principes de base de la politique luxembourgeoise de coopération au développement. Le Luxembourg consacre actuellement prés de 0,9% de son PIB à l’aide au développement; la bonne gouvernance et le respect des droits de l’Homme sont des facteurs qui jouent un rôle très important dans l’élaboration des programmes de coopération pluriannuels avec nos pays partenaires, dont la majorité se trouve en Afrique. Nous comptons poursuivre notre engagement et allons continuer d’œuvrer au sein de l’UE afin qu’on respecte les objectifs qu’on s’est fixés en 2005 dans le cadre de la revue quinquennale des Objectifs du millénaire.

Messieurs les présidents,

Le Luxembourg est toutefois convaincu de la nécessité d’un concept intégré en matière de sécurité collective. C’est pourquoi, nous ne pouvons que saluer l’approche retenue en matière de paix et de sécurité dans notre partenariat et la coopération développée dans ce secteur au cours des dernières années. Mon pays a cherché à y apporter aussi sa contribution, en participant p.ex. en 2006, à l’opération EUFOR en RDC destinée à assurer les conditions de sécurité nécessaires à la tenue des premières élections démocratiques depuis plus de 40 ans. Au Darfour, le Luxembourg a soutenu et continue à soutenir les efforts de maintien de la paix de l’UA et de l’ONU. J’espère que le déploiement de la force hybride UNAMID pourra désormais se faire dans les meilleurs délais. Enfin, mon pays s’apprête à participer financièrement et en personnel à la mission EUFOR Tchad/RCA qui doit sécuriser la zone autour des camps de réfugiés à l’Est du Tchad et au Nord de la République centrafricaine.

Un dernier sujet que j’aimerais évoquer est celui de la migration. J’estime qu’il s’agit là d’un phénomène fondamentalement positif dont il importe de mettre à profit tout le potentiel. S’il n’est parfois pas apprécié dans toutes ses dimensions, c’est qu’il est souvent mal compris et surtout mal géré. Les flux migratoires ne doivent pas mener à de nouveaux antagonismes entre Nord et Sud. C’est pourquoi une coopération en matière d’immigration est cruciale, et seul un partenariat basé sur une responsabilité partagée et une approche globale peuvent apporter les réponses aux défis qui se présentent au niveau des pays d’origine, de transit et de destination.

Messieurs les présidents,

"Humanity will not enjoy security without development, it will not enjoy development without security, and it will not enjoy either without respect for human rights."

C’est dans l’esprit de cet adage de l’ancien Secrétaire général des Nations unies Kofi Annan que j’entrevois le développement de nos relations et le partenariat que nous allons conclure en cette fin de semaine à Lisbonne. Je suis sûr qu’ensemble on réussira à saisir les opportunités qui s’ouvrent devant nous.

Merci pour votre attention.

Dernière mise à jour