Nicolas Schmit, Discours au sujet du Pacte européen sur l'immigration à l'occasion de la réunion informelle des ministres de la Justice et des Affaires intérieures, Cannes

Monsieur le Président,

L’Europe est un continent d’immigration après avoir été une terre d’émigrants.

Certains de nos pays comme le mien avec plus de 40% de non-nationaux sont depuis longtemps des sociétés d’immigration. D’autres le sont devenus depuis assez récemment.

Parce que l’Europe a besoin d’immigration et parce que la mobilité des personnes a l’échelle globale est une donnée fondamentale de notre temps, l’approche d’un certain laisser-faire qui a prévalu longtemps, peut-être trop longtemps, dans certaines de nos politiques en la matière ne convient plus.

L’Union européenne a donc besoin d’un message clair et équilibre, intelligible et cohérent, à la fois vers l’extérieur - vers les pays source de l’immigration, comme vers l’intérieur - vers nos propres populations. Ce message politique ne doit pas être un message de fermeture ni de repli mais un message qui marque à la fois une ouverture organisée et une démarche solidaire.

Cette démarche solidaire est indispensable dans un espace européen ouvert, sans frontières intérieures, une des réalisations majeures de la construction européenne. Mais cette approche solidaire doit aussi caractériser nos relations envers nos partenaires du sud et de l’est.

Ce Pacte européen sur l’immigration et l’asile doit porter ce message politique. Il doit documenter la capacité de l’Europe de développer et de mettre en œuvre une politique commune dans des domaines ou seule une démarche commune, voire communautaire, peut avoir des résultats. En matière de politique d’immigration, la plus-value européenne est évidente. Mais elle doit également se faire dans le respect des spécificités nationales.

Ce message doit aussi être équilibré. Il ne s’agit pas de nous "défendre" mais avant tout de construire ensemble, entre nous et avec nos partenaires, une politique.

Notre priorité est de mieux organiser l’immigration légale - sa finalité est d’abord économique. Mais le fait qu’il s’agisse de travailleurs dont nos économies ont besoin ne doit pas nous faire oublier qu’il s’agit d’hommes et de femmes qui ont des droits: droit au regroupement familial, droit à l’éducation.

De même, l’intégration est un volet indispensable de toute politique d’immigration. Cette intégration doit se faire dans le respect de la dignité de chacun et prendre en compte à la fois les droits des immigres et la cohésion de nos sociétés, qui est nécessaire pour l’acceptabilité de l’immigration.

En ce qui concerne plus précisément certains éléments du Pacte, je rappelle que souvent les régularisations massives sont le résultat d’une absence de politique pendant de nombreuses années. Sous présidence luxembourgeoise nous avons instaure en 2005 un système d’information mutuel préalable. Il faudrait aller plus loin dans ce domaine.

La lutte contre l’immigration illégale est un élément nécessaire d’une politique d’immigration. Elle doit se faire à 4 niveaux, à savoir les réseaux des trafiquants, les employeurs, le contrôle des frontières ainsi que la coopération avec les pays d’origine, à travers les partenariats de mobilité notamment. Les propositions concrètes dans ce domaine ont largement notre soutien.

Pour ce qui est de l’asile, nous devons accomplir des progrès importants pour arriver à une procédure d’asile unique - j’aurai préféré 2010 comme date butoir au lieu de 2012. Cette dernière date doit alors être un engagement ferme.

Finalement, une bonne politique d’immigration ne peut à elle seule résoudre toutes les questions. La question de l’immigration est liée à d’autres problèmes, à savoir les prix de l’énergie qui explosent, la hausse de prix des produits alimentaires, l’environnement, la crise aggravée dans certains pays du Sud. Tous ces phénomènes contribuent à augmenter les pressions migratoires.

Il importe donc de veiller à la cohésion et à la cohérence de nos politiques.

Je vous remercie.

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