Discours de S.A.R. le Grand-Duc lors de la cérémonie officielle à l'occasion de la fête nationale 2016

Seul le discours prononcé fait foi

"Monsieur le Président de la Chambre des députés,

Monsieur le Premier ministre,

Mesdames et Messieurs les députés,

Mesdames et Messieurs les ministres,

Excellences,

Mesdames et Messieurs,

Les valeurs que nous mettons en avant lors de la Fête nationale, comme l’unité, la solidarité, la capacité d’avancer ensemble trouvent leur traduction dans la vie de tous les jours. Ce ne sont pas des termes abstraits. Au contraire, elles trouvent leur prolongement dans des actes concrets. Cette dernière année, j’ai été très touché par l’élan de solidarité de notre population envers les migrants qui ont été accueillis par milliers sur notre territoire. La nette amélioration de notre conjoncture économique est aussi le reflet de notre capacité à nous adapter et de notre faculté à avancer. Ces forces qui sont les nôtres nous mettent en situation d’affronter les défis présents et futurs.

En ce jour, c’est un événement qui a lieu à quelques centaines de kilomètres de nos frontières qui retient toute l’attention. S’exprimant sur son appartenance à l’Union européenne, le peuple britannique fait un choix fondamental sur son propre destin, mais chacun de nous sent bien que ce choix aura des implications bien plus larges, parce qu’il donnera une inflexion déterminante à l’évolution du projet européen. Que le choix des uns ait autant de conséquences sur la vie des autres, montre à quel point nous sommes devenus interdépendants et que l’intégration européenne est plus avancée dans les faits que l’on ne l’imagine parfois.

Sur la construction européenne et sur les commentaires qu’elle inspire à l’heure actuelle, il y aurait beaucoup à dire. L’ambiance n’est pas toujours au beau fixe. A l’enthousiasme a parfois succédé le scepticisme, au rêve la dure réalité des faits, aux grandes annonces la difficulté de décider et d’avancer tous ensemble du même pas. Il serait vain de nier toutes ces difficultés et de ne pas voir le fossé qui se creuse entre les opinions publiques et ce que l’on désigne du simple mot "d’Europe".

Pour autant, doit-on confondre un mode de fonctionnement qui montre ses insuffisances avec le projet en lui-même, qui incarne notre futur commun à tous? Doit-on s’arrêter aux blocages actuels pour ignorer les réalisations exceptionnelles que nous avons connues depuis plus d’un demi-siècle? Notre pays doit-il ajouter sa voix à ceux qui sèment le doute ?

Franchement, je ne peux le croire. Il y a quelques semaines, à Prague, je citais cette réflexion de Vaclav Havel évoquant "l’inconscient collectif qui se transmet de génération en génération" à propos des liens étroits entre l’histoire tchèque et la maison de Luxembourg.

De la même façon, cette aventure européenne, qui a été lancée ici-même – symboliquement la maison natale de Robert Schuman n’est qu’à quelques dizaines de mètres d’ici – a été gravée dans notre inconscient. Notre mémoire et notre cheminement en sont profondément marqués. Il est essentiel de garder à l’œil cette relation spéciale qui lie notre pays à l’histoire de la construction européenne. Celle-ci y est née et en retour l’a complètement métamorphosé.

De ce que nous sommes aujourd’hui, un pays prospère, ouvert, diversifié et mélangé, tout cela nous le devons à un rêve devenu réalité depuis le début des années 50 et un projet qui a su installer la paix sur le continent et apporter le développement économique. Quand bien même le scepticisme s’installe un peu partout, distinguons l’essentiel de l’accessoire. L’essentiel, c’est que notre pays doit tant à l’idée européenne et qu’il nous importe de rester fidèle à cet héritage. C’est aussi en lui restant fidèle que nous trouverons les solutions aux multiples problèmes du moment.

Mesdames, Messieurs,

La construction européenne ne se résume pas à des institutions, à des décideurs politiques, à des lois ou à des normes. Non, c’est bien autre chose. Des réalisations concrètes. Des mentalités qui changent. Ce sont des populations qui se côtoient de plus en plus, des jeunes qui ignorent les frontières pour étudier ou pour travailler. L’université de Luxembourg est une des plus belles illustrations de ces modifications structurelles qui affectent notre pays et le conduisent sur de nouvelles voies prometteuses.

Pendant très longtemps, l’idée communément admise partait du principe qu’il était bien préférable pour les jeunes Luxembourgeois de quitter le pays le temps de leurs études afin de s’ouvrir davantage au monde extérieur et de gagner en autonomie. Notre pays a vécu sur ce postulat avant de se rendre compte que l’environnement changeait, que l’enseignement supérieur se démocratisait à grande vitesse et notamment que la mise en place d’une Europe de l’enseignement supérieur nous obligeait à revoir notre position traditionnelle. Et notre pays a engagé le grand chantier de l’université avec détermination.

Aujourd’hui, j’ai beaucoup de fierté lorsque nous recevons des chefs d’Etat étrangers à leur montrer le site d’Esch-Belval, ses centres de recherche pointus, ses start-ups, son université, ses milliers d’étudiants luxembourgeois et étrangers. Ceux-ci sont un des piliers sur lesquels se construit le Luxembourg de demain. En dix, quinze ans, les choses ont donc évolué radicalement. C’est une évolution remarquable. Notre pays est devenu un pôle d’attraction dans un domaine nouveau. Nous pouvons y reconnaître notre capacité à innover et à nous lancer dans des initiatives collectives qui modifient le cours de notre vie sociale. Cet exemple est aussi révélateur de notre force créatrice d’une société multiple, où Luxembourgeois et non-Luxembourgeois s’équilibrent. Il est un signe d’optimisme qui émane de notre pays. A nous de le reconnaître et de le propager comme tel.

En ce jour d’unité nationale, je suis heureux de constater que notre capacité à préparer le Luxembourg de demain reste entière, tout en restant fidèle à nos racines. L’aventure européenne a fourni un cadre qui a permis à notre nation d’évoluer, mais surtout de s’épanouir. Je formule le souhait le plus cher qu’il en soit encore ainsi à l’avenir. Je souhaite enfin qu’une société plurielle et juste soit vers l’extérieur notre plus belle vitrine. Car c’est une très grande chance pour moi, avec la Grande-Duchesse qui m’est toujours d’un très grand appui, d’être au service de notre pays.

Vive le Luxembourg dans une Europe unie!"

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