Jean-Claude Juncker: J´adhère au contenu plus qu´à l´architecture. Réaction du Premier ministre au discours européen du Premier ministre français Lionel Jospin

La Tribune: Quelle appréciation portez-vous sur le discours européen de Lionel Jospin, notamment sur ses propositions institutionnelles?

Jean-Claude Juncker: Je suis moins intéressé par les propositions d'architecture institutionnelle de Lionel Jospin que par le contenu européen de son discours. Pour l'Europe, c'est très ambitieux, puisqu'il s'agit d'agrandir la surface de la construction: le socle des droits sociaux, la meilleure coordination des politiques économiques, la concurrence fiscale déloyale, la police criminelle et le parquet européen, la stratégie de défense à long terme...

Mais vous êtes plus réservé sur son schéma institutionnel?

Jean-Claude Juncker: Soyons clair: la notion delorienne de "Fédération d'Etats-nations" ne me gêne nullement. L'idée de désigner le président de la Commission dans les rangs de la formation politique majoritaire au Parlement me paraît réaliste. Mais le projet de Lionel Jospin est moins explicite sur le long terme. Par endroit, il est même timide, notamment lorsqu'il parle de renforcer la coopération en matière de Politique étrangère et de sécurité commune (PESC).

Que pensez-vous de ce projet de "Congrès" émanant des Parlements nationaux et du Parlement européen?

Jean-Claude Juncker: Cette idée mérite d'être approfondie. Je ne sais si c'est le meilleur instrument. Reste qu'il faut en tout cas un organe communautaire facilitant la ratification des changements mineurs dans les politiques communes.

Soutenez-vous l'idée d'un droit de dissolution du Parlement par le Conseil européen ?

Jean-Claude Juncker: Nous avons été plusieurs à avancer cette proposition dès le Conseil de Cologne (juin 1999). Car il faut un contrepoids aux éventuelles extravagances du Parlement. Mais cette possibilité de sanction est d'autant plus nécessaire que l'on augmente les pouvoirs du Parlement. Or, je ne trouve pas trace, dans le discours de Lionel Jospin, d'un tel accroissement de pouvoir... Cela dit, j'adhère à sa proposition de modifier le mode d'élection des eurodéputés.

Et quid du Conseil permanent des ministres ?

Jean-Claude Juncker: J'y suis favorable, il faut que les gouvernements soient représentés en permanence à Bruxelles au niveau ministériel et non simplement diplomatique.

Finalement, on a l'impression que vous êtes plus proche des propositions Jospin que des propositions Schröder...

Jean-Claude Juncker: Tout d'abord, il n'y a pas qu'eux en Europe. Ensuite, je ne crois pas le moment venu d'opposer les deux approches. Notamment sur le plan institutionnel, on a le temps de trouver le bon mécanisme. En revanche, ce qui me paraît important, c'est le contenu des politiques.

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