Mady Delvaux-Stehres: Ecole: les chantiers prioritaires

L e Quotidien: Quels sont vos objectifs en tant que ministre de l'Éducation nationale?

Mady Delvaux-Stehres: J'espère que ces objectifs sont ceux de toute la société luxembourgeoise: donner à chaque enfant le maximum de chances pour réussir sa vie. Il faut amener le plus grand nombre d'élèves vers une certification et que cette certification soit la plus élevée possible. Ce n'est pas pour brader les diplômes, mais pour développer au maximum leurs capacités. Dans un pays comme le Luxembourg, où le marché du travail attire beaucoup d'immigrants, cet objectif me semble primordial.

Quelles réformes comptez-vous entreprendre en priorité?

Il faut tout d'abord revoir l'évaluation des compétences des élèves. Nous n'avons pas de culture d'évaluation au Grand-Duché. Je dirais que nous avons une tradition très classique, puisque nous évaluons surtout l'écrit et la grammaire. Certes, ce sont des éléments importants, mais je pense qu'il faut prendre en compte d'autres éléments d'évaluation, comme par exemple la progression de l'élève, l'expression orale ou la compréhension. S'agissant de l'évaluation de l'enseignement, nous devons nous poser la question de savoir si l'enseignement correspond aux objectifs que nous nous sommes fixés. L'évaluation, à mon avis, doit servir à détecter aussi bien les points forts que les points faibles de notre système scolaire. Sans doute, l'étude PISA nous a-t-elle permis de réaliser à quel point il était important de vérifier si notre système d'enseignement était bon ou pas. Par ailleurs, mon prédécesseur a fait voter une loi sur l'autonomie des écoles. Nous devons donner vie à ce projet. Dans ce contexte, il faudra veiller à ce que le niveau des différentes écoles corresponde à l'exigence nationale. L'introduction d'épreuves standardisées à différentes étapes du cursus scolaire permettra de garantir un même niveau d'enseignement dans tous les établissements scolaires.

Parmi vos projets, il y a aussi la réforme des critères de passage.

Dans les prochains mois, je vais regarder tous les règlements grand-ducaux qui concernent la promotion et les critères de passage dans les différents ordres d'enseignement. Dans le secondaire, les critères sont très différents du classique au technique. Mon objectif est d'harmoniser, de rapprocher tous ces critères.

Autre sujet, qu'envisagez-vous pour lutter contre le redoublement?

La lutte contre l'échec scolaire, ce n'est pas nouveau, cela a toujours constitué une priorité pour les ministres de l'Éducation nationale. Concrètement, je projette de faire une évaluation du redoublement. La question est de savoir si cette pratique améliore vraiment les performances de l'élève l'année suivante. Personnellement, je pense que le redoublement dans la majorité des cas n'est pas très motivant pour l'élève. À mon avis, il faut détecter le plus tôt possible si un élève a des difficultés scolaires afin de lui apporter l'aide dont il a besoin.

Comment fonctionnera l'école pilote?

La Ganzdagsschoul ou école à journée continue sera un nouveau lycée. Les horaires des classes ne seront pas organisés comme dans les autres lycées. Il y aura des horaires moins serrés, avec des pauses plus longues. Le projet pilote implique aussi un travail d'équipe des enseignants. Il y aura des activités offertes en dehors des heures de cours. La contrepartie, évidemment, c'est qu'il n'y a plus de devoirs à domicile. Contrairement à ce que l'on peut lire dans certains commentaires, je n'ai rien contre la Ganzdagsschoul au niveau primaire. Si les communes ont envie de se lancer dans des projets pilotes, je serais très heureuse de les accompagner. J'espère pouvoir débuter cette expérience à la rentrée 2005 ou au plus tard en 2006.

L'allégement des programmes scolaires est également à l'ordre du jour.

Il y a un consensus dans la société luxembourgeoise selon lequel les programmes sont surchargés. Dans le passé, on avait l'habitude d'alourdir les programmes scolaires et rarement de les alléger. Les commissions de programme devront faire des propositions. Un accent particulier sera mis sur la pluridisciplinarité.

Dans le cadre de l'école pilote, une attention particulière sera portée à l'éducation aux valeurs. De quoi s'agit-il?

Dès septembre, nous allons mettre sur pied un groupe de travail qui sera chargé de faire des propositions pour lancer un nouveau cours qui ne sera ni de l'instruction religieuse ni de l'éducation morale. L'idée est de faire connaître aux élèves les grandes religions, les courants philosophiques. L'école se doit aussi d'apprendre aux jeunés la tolérance et le respect de l'autre.

Autre chantier, l'enseignement des langues....

C'est peut-être l'aspect le plus difficile dans notre enseignement, car nous tenons au plurilinguisme. Mon idée est, qu'à partir du secondaire, un élève pourra avoir le choix entre une première et une seconde langue. Il choisira comme seconde langue celle où il sera le moins performant, mais il devra étudier cette langue tout au long de son parcours scolaire. Cela implique bien sûr un enseignement différent des langues. Par ailleurs, nous sommes en train de réfléchir à un apprentissage plus précoce de l'anglais.

Pourquoi voulez-vous introduire un droit de recours?

Je pense qu'il faut mettre en place un recours interne dans chaque établissement scolaire. Il n'est pas normal que les parents n'aient d'autre recours possible que de faire appel aux tribunaux, lorsqu'ils désapprouvent une décision prise par l'école. Concrètement, il y a deux possibilités, soit c'est le directeur qui joue ce rôle, soit un médiateur.

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