Jean Asselborn: "La situation est grave". Interview avec le ministre des Affaires étrangères au sujet des résultats du sommet de Bruxelles

Denis Berche: Dans quel état êtes-vous après cet échec?

Jean Asselborn: Fatigué et un peu démoralisé. Ce que j'ai pu voir dans cette longue négociation sur le budget n'avait rien de trop génial. Je me souviendrai longtemps de la tristesse et de l'émotion des nouveaux États membres quand Blair a dit qu'il ne pouvait accepter leur dernière proposition.

Denis Berche: La remise en cause du rabais britannique est-il la cause principale de l'échec?

Jean Asselborn: Je ne crois pas. Ce n'était pas qu'une question d'argent avec le gel du rabais britannique. C'est d'abord et avant tout une question de système, de méthode. Blair voulait réformer d'abord et parler argent ensuite.

Denis Berche: Avez-vous l'impression d'avoir été mené en bateau par les Britanniques tout au long de la préparation de ce sommet?

Jean Asselborn: Je n'irai pas jusque-là. Tout au long des heures passées à préparer ce budget et ce sommet, ils ont écouté et n'ont jamais bougé sur le gel de leur rabais. Puis, ils sont arrivés à Bruxelles et ont voulu engager une réforme du budget européen pour toucher à la politique agricole commune qu'ils avaient pourtant décidée en 2002, avec les autres, de fixer jusqu'en 2013.

Denis Berche: Qu'est-ce qui ne va pas avec les Britanniques?

Jean Asselborn: Visiblement, l'intégration européenne et la recherche d'un consensus ne sont pas leurs points forts. On le savait, on en a eu le confirmation. Et puis les Néerlandais et les Suédois s'y sont ajoutés pour des raisons différentes.

Denis Berche: Quand avez-vous senti que l'accord serait impossible?

Jean Asselborn: Dès la première bilatérale de la matinée avec les Britanniques. Ils voulaient une réforme de tout le système dès 2008, sans toucher au chèque britannique et en ne laissant que quelques millions pour l'élargissement. Nous avons continué à travailler pendant de longues heures. Tout ce travail est au moins une base de départ pour de nouvelles négociations.

Denis Berche: Que retenez-vous de cet échec?

Jean Asselborn: La situation est grave, à défaut d'être désespérée. L'Europe a malheureusement montré à Bruxelles des aspects que je n'avais jamais vus de toute ma carrière. Quand on a une telle volonté de dire non, il est impossible de négocier quoique ce soit.

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