Le ministre de la Santé, Mars Di Barolomeo, au sujet de la nouvelle campagne de lutte contre le sida

En tant que ministre, quelles mesures sont prises de votre côté? Que faites-vous?

Mars Di Bartolomeo: Je pense qu'avec le sida dans nos pays, la mesure la plus efficace reste la prévention. Il ne faut en effet pas se tromper et penser que le sida est devenu une maladie curable, elle reste toujours incurable même s'il y a de meilleurs médicaments. Il ne faut pas avoir la mauvaise attitude qui veut dire s'habituer à la maladie et la "bagatelliser". Donc premièrement prévention, deuxièmement sensibilisation, maintenir l'actualité du sujet même si la maladie existe maintenant depuis plus de 20 ans et que nous sommes en train de finaliser un programme d'actions avec un certain nombre de mesures concrètes axées surtout sur la meilleure connaissance des modes de transmissions au Luxembourg.

Quelles campagnes faites-vous pour sensibiliser les gens?

Mars Di Bartolomeo: Premièrement il faut continuer d'en parler en permanence. Vos initiatives contribuent dans ce domaine.

Deuxièmement chaque année nous recommençons avec une campagne et l'année dernière on a constaté que, vu l'augmentation des nouvelles infections, on devait recommencer à zéro. De nouveau expliquer, sensibiliser...

Quelles explications donneriez-vous à l'augmentation des infections au Luxembourg en 2004?

Mars Di Bartolomeo: Difficile à répondre en une phrase. Certainement une des explications que j'ai déjà données c'est qu'on s'est habitué à la maladie. L'idée fausse que grâce aux bons médicaments actuels c'est devenue une maladie curable, s'est fortement répandue.

Il y a donc "bagatellisation" de la maladie et il faut constater que la maladie est devenue beaucoup plus volatile. Au début on disait que c'est une maladie qui touche surtout les drogués et les homosexuels. Aujourd'hui elle peut toucher tout le monde et toutes les couches (hétérosexuels, homosexuels, hommes comme femmes, Luxembourgeois comme étrangers ... ). Mais je crois que c'est surtout une mauvaise vue de la maladie, la fausse idée que la maladie pourrait être curable et l'habitude. Et on ne doit pas s'habituer à cette maladie parce que je ne vous citerez, qu'à titre d'exemple, une comparaison: l'année dernière le monde était choqué par le tsunami. Il faut se rendre compte que le sida équivaut à 15 tsunamis par an. Il tue trois millions d'hommes par année.

Le sida, est-il l'un des plus grands problèmes de santé ici au Luxembourg?

Mars Di Bartolomeo: Ehm... non je ne dirais pas ... bonne question ...!

C'est un problème grave, mais il y en a d'autres. Je dirais que c'est un des problèmes en matière de santé publique qui est prioritaire parce qu'on ne connaît pas seulement le problème, on connaît aussi un certain nombre de réponses au problème. Donc il faut s'y attacher, mais il faut en même temps dire qu'il y a d'autres problèmes très prioritaires dans le domaine de la santé, p. ex. le cancer, les maladies cardio-vasculaires, mais là dans le domaine de la santé, j'essaierais de répondre d'une manière plus diplomatique: tous les phénomènes où on peut éviter les maladies aux gens sont prioritaires! Donc je ne dirais pas que, parce qu'il n'y a que 60 infections, ça ne vaut pas la peine de s'en occuper; il y en a 60 de trop!

Est-ce qu'il y a des laboratoires pour la recherche d'un remède contre le sida au Grand-Duché, s'il n'y en a pas, où sont les laboratoires les plus proches dans nos pays voisins?

Mars Di Bartolomeo: Il y a tout un réseau de chercheurs qui travaillent dans le domaine de la recherche sur le sida, il y a des centres très éminents en France, en Allemagne, en Grande-Bretagne, partout dans le monde. Au Luxembourg nous avons au sein du CHL un département qui s'est spécialisé dans la détection et le suivi du VIH. Le docteur Robert Hemmer est l'un des spécialistes reconnus sur le plan européen et mondial en matière de VIH.

Quelles sont les actions concrètes organisées pour le 1er décembre?

Mars Di Bartolomeo: Lancement de la campagne, lancement d'une exposition, finalisation du programme d'actions, et ce n'est pas lié simplement à la journée mondiale mais dans le domaine de la sexualité responsable, nous sommes en train de finaliser le projet qui s'adresse à toutes les écoles post-primaires pour mettre à la disposition de tous les jeunes des préservatifs pour des tarifs qui s'approchent de la gratuité. La seule raison pour laquelle on n'a pas choisi la gratuité c'est que les machines ne fonctionnent pas sans jetons, donc on a décidé de mettre à disposition quatre préservatifs pour le prix de 20 centimes, ce qui correspond donc quasiment à la gratuité.

A partir de janvier nous allons mettre en place différentes mesures du programme d'actions, mais des actions concrètes! Actions de sensibilisation, relance de la sensibilisation pour l'utilisation des préservatifs et approche ciblée dans les milieux qui sont surtout concernés. Et j'insiste encore une fois: ce ne sont pas que les autres qui sont touchés par le sida ce sont toutes les couches qui sont concernées!

Quelles sont les organisations principales pour aider, sensibiliser les gens ici au Luxembourg?

Mars Di Bartolomeo: Dans le domaine de la lutte contre le sida et de la sensibilisation pour les risques, la société civile comme l'Aidsberodung, l'asbl. Stop Aids Now, et toutes les organisations non-gouvernementales sont des piliers très importants. C'est la raison pour laquelle elles sont conventionnées avec le ministère de la Santé. Par le biais de ces conventions on met à disposition de ces organisations les moyens dont ils ont besoin.

Quels sont les buts qui sont fixés pour les prochaines années?

Mars Di Bartolomeo: Réduire sensiblement le taux de nouvelles infections. Mais là il faut insister sur un phénomène qui, pour le sida, est beaucoup plus grave que pour d'autres maladies, le sida ne se combat pas seulement sur le plan national. Nous avons eu l'année dernière 60 nouvelles infections ici au Luxembourg. Nous avons eu une poignée de cas mortels et je crois que l'une des premières priorités est de combattre le sida là où il est le plus répandu, c'est-à-dire, toujours en Afrique, mais aussi dans les nouveaux pays européens. En Amérique latine il commence à se développer rapidément, donc il faut le combattre à la source parce que le sida n'est pas une maladie qui s'arrête aux frontières. J'essaye toujours d'utiliser une comparaison qui, d'après moi, est assez pertinente: je dis qu'on pourrait fermer les yeux à rencontre du problème de la fappe en Afrique parce que la famine ne s'exporte pas, or le sida est un phénomène tout aussi grave et il s'exporte! Et donc on a intérêt à lutter contre le sida là où il est le plus répandu parce qu'il ne va pas s'arrêter là, ça continue à se développer. C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas nous limiter à mettre à disposition des gens qui habitent dans nos régions les meilleurs médicaments possibles, mais nous devons nous engager pour mettre à disposition de toutes les populations les médicaments qui sont nécessaires pour freiner l'expansion.

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