"Le traité de Rome régit l'UE". Le ministre délégué aux Affaires européennes, Nicolas Schmit, au sujet du 50e anniversaire des Traités de Rome

Le Quotidien: Le 50e anniversaire du traité de Rome est-il seulement l'une des commémorations parmi tant d'autres?

Nicolas Schmit: II y aura une commémoration solennelle à Berlin, dans le cadre du Conseil européen. La présidence allemande prépare une déclaration avec laquelle elle désire éviter une discussion interminable. Elle veut mettre en évidence les valeurs et les réalisations de l'Europe, sans oublier de montrer les perspectives. Quelques pays essayent d'empêcher de mentionner l'euro, que tous les États n'ont pas adopté, mais qui est l'un des achèvements majeurs de l'Europe. Au Grand-Duché il y aura différentes manifestations qui s'inscriront dans le cadre des célébrations. Un grand concert aura lieu, le 25 mars à la Philharmonie, réunissant les personnes qui sont nées un 25 mars. D'autres initiatives viseront à atteindre les citoyens au plus près de leur vie quotidienne, lorsqu'ils achèteront du pain, par exemple.

Le Quotidien: Pouvez- vous vous mettre dans la peau des diplomates, qui en 1957, ont négocié et préparé le texte du traité de Rome?

Nicolas Schmit: Je pense que oui. Je sais que les Luxembourgeois avaient quelques appréhensions à l'époque. Il y avait la peur, en 1956, de perdre l'indépendance, et les citoyens se demandaient ce qu'il adviendrait de différents secteurs de notre économie dans la Communauté, malgré l'expérience positive de la CECA. Il y avait des craintes dans le secteur de l'agriculture. Les angoisses étaient diffuses. Il y avait des avis sceptiques, voire très critiques. Je pense cependant que les diplomates qui ont participé aux négociations ne partageaient pas les appréhensions et étaient motivés par leur conviction qu'il était nécessaire de continuer le processus d'intégration.

Le Quotidien: Le traité CECA n'allait-il pas plus loin que le traité de Rome?

Nicolas Schmit: Certainement le traité CECA a été le premier pacte de l'époque de la paix. Bien qu'instaurant déjà une union politique, son impact est resté sectoriel. Ce traité avait aussi une durée limitée. Nous nous référons davantage au traité de Rome de 1957 comme traité constitutif, puisque nous vivons encore aujourd'hui sous certaines dispositions établies par ce traité.

Le Quotidien: Y avait-il déjà des visions d'une Europe telle qu'elle se présente aujourd'hui et au-delà des 27?

Nicolas Schmit: Une clause visant l'élargissement était déjà contenue dans le traité de Rome. Jean Monnet et Robert Schuman ont soutenu leur vision que la séparation entre l'Ouest et l'Est serait dépassée un jour.

Le Quotidien: Parviendrons-nous à une Europe "de l'Atlantique à l'Oural"?

Nicolas Schmit: Là, je suis beaucoup plus sceptique. Nous sommes arrivés à un moment, où nous devons réfléchir à propos des frontières de l'Europe. Nous ne pouvons pas demander aux citoyens de s'identifier avec une Europe, lorsqu'ils ont des problèmes à reconnaître la légitimité et lorsqu'ils ne sont pas prêt à s'associer au processus d'intégration.

L'entité doit avoir une délimitation géographique. Nous ne pouvons pas dire à l'heure actuelle "avec ou sans l'Ukraine, avec ou sans la Russie"; une pause dans l'élargissement est utile. La porte ne devra pas être fermée définitivement; mais elle ne doit pas être grande ouverte lorsque les Européens sont appelés à réfléchir à propos de ce qu'ils veulent faire de cette Europe.

Le Quotidien: Qu'adviendra-t-il du traité constitutionnel et des questions institutionnelles?

Nicolas Schmit: J'espère que nous parviendrons assez rapidement de surmonter le débat. Depuis 2005 nous nous trouvons dans une situation d'introspection. Le traité a échoué dans deux pays et nous devons trouver l'issue.

Le Quotidien: Le traité constitutionnel est-il définitivement abandonné?

Nicolas Schmit: En tant que participant à l'initiative de Madrid je ne peux pas l'affirmer ainsi. Le traité n'entrera pas en vigueur de la façon, comme il a été approuvé par les Luxembourgeois et ratifié par la suite. Il n'est pas admissible non plus, que 18 pays aient ratifié le traité constitutionnel et que leur position ne soit pas respectée.

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