Garder le contact. Le ministre de l'Économie au sujet de l'ouverture du marché de l'énergie

Le Jeudi: Pour quelles raisons le gouvernement n'a-t-il pas lancé une campagne d'information pour expliquer aux consommateurs l'ouverture du marché?

Jeannot Krecké: Nous n'avons pas encore communiqué parce que le texte du projet de loi qui règle les détails de la libéralisation n'a pas encore été voté par le parlement. J'espère bien que ce vote pourra avoir lieu avant le 13 juillet. La commission parlementaire concernée vient de terminer les amendements à envoyer au Conseil d'Etat. Et il n'est pas certain que son avis soit disponible en temps utile. Si tout va bien, le texte pourrait être publié fin juillet. Mais pour le consommateur, les dispositions concernant la libéralisation sont applicables à partir du 1er juillet.

Le Jeudi: Comment rassurer les consommateurs qui craignent une éventuelle hausse des prix?

Jeannot Krecké: Il faut savoir que nous ne maîtrisons pas le coût de l'énergie primaire, qui varie selon le marché. Par contre, parallèlement à la législation, je suis en train de mener des négociations avec les entreprises du secteur pour mettre en place une structure d'énergie, gaz et électricité, qui fera qu'à terme on puisse se procurer ces énergies à moindre coût.

Le prix de l'électricité comprend trois éléments: le coût d'utilisation du réseau, défini par l'Institut luxembourgeois de régulation, la fourniture d'électricité elle-même, qui dépend du marché et des contrats, et les taxes et redevances.

A l'avenir, il faudra intervenir sur les coûts du réseau et sur ceux de la fourniture de l'électricité, c'est-à-dire la production. Nous y travaillons.

Suite aux exigences avancées par le parlement dans le projet de loi, nous risquons d'avoir une légère hausse des coûts réseau. Ils pourraient ensuite diminuer.

Le Jeudi: L'objectif de la libéralisation du marché n'est-il pas de faire jouer la concurrence, ce qui entraînera une baisse des prix?

Jeannot Krecké: La libéralisation du marché de l'énergie l'ouvre à la concurrence, certes, mais cela ne veut pas dire diminution des prix. Dans ce secteur, il ne faut pas s'attendre à ce qui s'est passé dans les télécommunications. En effet, il y a une différence fondamentale: contrairement à l'énergie, les télécommunications offrent un service qui ne demande aucune matière première. De plus, il n'y a pas de concurrence sur le réseau puisqu'il est régulé par l'ILR, ce n'est que la fourniture de l'électricité qui est libéralisée. Le consommateur pourra donc choisir librement où il l'achètera.

Le Jeudi: Qui assurera le service public, notamment en cas de défaillance de paiement ou de nouveau black-out?

Jeannot Krecké: En cas de défaillance de paiement d'un consommateur, une notification sera envoyée à l'Office social. Le parlement devrait adopter une motion qui déterminera quel est l'organisme qui prendra en charge le paiement. Les gestionnaires de réseau assument la responsabilité d'un black-out. Ils doivent assurer le service. La loi prévoit des solutions pour sécuriser les réseaux: leur mise en souterrain et un contrôle de l'Etat sur les infrastructures.

Le Jeudi: Vous souhaitez installer au Luxembourg la future plate-forme régionale d'échange d'électricité qui résulte de l'accord signé entre le Luxembourg, l'Allemagne, la Belgique, la France et les Pays-Bas. La future ligne haute tension venant de France permettra-t-elle un couplage avec le Luxembourg?

Jeannot Krecké: Le gouvernement avait pris l'engagement de construire cette ligne lors de la tripartite. Le projet est toujours en procédure d'autorisation auprès du ministère de l'Environnement. Mais ce n'est pas le seul moyen.

La connectivité des réseaux, et donc la sécurité d'approvisionnement de toute la région, va s'améliorer avec cette plate-forme, dans laquelle sont associés les représentants des régulateurs, des gestionnaires de réseau, des bourses d'électricité, des distributeurs et des producteurs des cinq pays.

Le Jeudi: Que répondez-vous aux Verts qui vous reprochent de ne pas vouloir créer une société de réseau nationale et de livrer ainsi le marché aux grands groupes énergétiques?

Jeannot Krecké: Il est primordial que l'Etat garde la maîtrise des réseaux. Par contre, si nous nationalisons les réseaux, nous devrons indemniser les actionnaires des sociétés qui en ont la gestion aujourd'hui. Il est hors de question de nationaliser. Je négocie actuellement avec ces sociétés en vue d'obtenir 51% des actions ou des assurances pour avoir la maîtrise des réseaux.

En outre, l'Etat ne se désengage nullement des firmes qui assurent la production, la fourniture et la distribution d'énergie. Il garde une forte présence dans la production et la fourniture.

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