Remise d´un rapport sur les effets juridiques de la double nationalité au ministre de la Justice Luc Frieden

Le 14 janvier 2004, le rapport "Citoyenneté multiple et nationalité multiple au Grand-Duché de Luxembourg", un rapport sur les effets juridiques de la double nationalité, a été remis au ministre de la Justice Luc Frieden par ses auteurs, les professeurs belges Francis Delpérée et Michel Verwilghen.


Francis Delpérée (à dr.) et Michel Verwilghen remettent le rapport au ministre Luc Frieden

Les deux professeurs de l’Université de Louvain avaient été chargés par le gouvernement luxembourgeois, sur proposition du ministre de la Justice, d’examiner les effets juridiques de la double nationalité, au cas où le Luxembourg opterait pour cette solution, a expliqué au départ Luc Frieden.

Le ministre de la Justice a précisé que la loi sur la nationalité a déjà été modifiée en 2001, avec comme but de parvenir à une "meilleure nationalité" et de s’assurer que "ceux qui obtiennent la nationalité luxembourgeoise soient mieux intégrés", dit Luc Frieden. Des critères d’intégration plus stricts furent ainsi définis, à savoir la possibilité pour les autorités de vérifier les casiers judiciaires ainsi que le contrôle des connaissances de base sur la langue luxembourgeoise. Cette réforme prévoyait en outre l’abandon de la nationalité d’origine au moment de l’adoption de la nationalité luxembourgeoise.

Le ministre de la Justice a rappelé que désormais déjà les enfants nés d’un couple où la mère et le père n’ont pas la même nationalité disposent de toute façon de la double nationalité. Il en va de même pour ceux qui ont décidé de devenir Luxembourgeois, mais où le pays d’origine n’a pas accepté l’abandon de cette nationalité, a fait savoir Luc Frieden. Selon les informations fournies par le professeur Verwilghen, on peut compter aujourd’hui entre 20.000 et 30.000 "bi-nationaux" au Luxembourg.

Dans ce contexte et en vue d’une meilleure intégration des étrangers qui vivent légalement au Luxembourg le gouvernement se trouve aujourd'hui confronté à la question de la double nationalité, expliqua le ministre de la Justice. Afin de pouvoir évaluer les conséquences d'une introduction du principe de la double nationalité au Luxembourg, le gouvernement luxembourgeois a chargé les professeurs Delpérée et Verwilghen d’étudier ces questions juridiques.

Le ministre de la Justice a avancé que "si nous réussissons à trouver une solution à certains problèmes techniques, nous ne sommes pas opposés à l'introduction du principe de la double nationalité". Selon le ministre, ce qui pourrait encore plaider en faveur de la double nationalité est la possibilité de "permettre à ceux qui vivent avec cœur et raison dans notre pays et qui y sont bien intégrés d’acquérir la nationalité luxembourgeoise, sans pour autant devoir renoncer à leur histoire et leur culture".

Les conditions sur la citoyenneté devraient toutefois être clarifiées, précisa le ministre, qui propose une réflexion sur la durée de résidence et sur d'autres modalités.  Avant tout, la question devrait donner lieu à un large débat politique."D’où la décision de ne pas introduire un projet de loi y relatif au cours de la législature actuelle", nota le ministre.

Lors de la présentation du rapport, les deux professeurs ont fait savoir que, grâce à la grande mobilité des gens, la "multi-citoyenneté" constitue aujourd’hui une réalité, un phénomène généralisé dans beaucoup de pays en Europe. Au sujet de la méthode employée, les auteurs ont fait abstraction de comparaisons avec d’autres pays, mais ont essayé de restituer le problème dans un contexte européen. Francis Delpérée a précisé par ailleurs que la double citoyenneté doit être envisagée dans deux sens: la possibilité pour un Luxembourgeois qui vit à l’étranger de maintenir des liens avec son pays natal et le droit pour un étranger qui vit au Luxembourg de garder des liens avec son pays d’origine.

Le ministre de la Justice a enfin précisé que le rapport qui exprime les points de vue des académiciens, "qui jouissent de la liberté académique", ne correspond pas nécessairement à la position du gouvernement luxembourgeois. "Nous entendons alimenter le débat, mais ne voulons pas dicter des solutions", a ajouté à ce sujet le professeur de droit public Francis Delpérée.

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