Jean-Claude Juncker au Parlement européen à Strasbourg

Le 11 mai 2005, le Premier ministre et président en exercice du Conseil européen, Jean-Claude Juncker, a prononcé au Parlement européen à Strasbourg, siégeant en séance plénière, un discours placé sous le thème de "L'Europe 60 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale".

"L’obligation ardente" de se souvenir du 8 mai 1945, date de la capitulation du 3e Reich, était le mot-clé du discours que le Premier ministre et président en exercice du Conseil européen, Jean-Claude Juncker, a prononcé lors de la session plénière du Parlement européen consacrée au thème de "L’Europe 60 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale". 

Il a rendu un hommage appuyé aux résistants, aux déportés, aux soldats américains et russes ainsi qu'au peuple britannique. Il a évoqué le puissant mouvement de reconstruction d’une Europe démocratique, libre et de plus en plus unifiée et le dépassement des divisions de la guerre froide et l’élargissement.

"L'obligation de se souvenir", a déclaré Jean-Claude Juncker, "est surtout ardente, me semble-t-il, pour ceux qui sont nés après la Deuxième Guerre mondiale, les hommes et les femmes de ma génération." Cette génération "n’a pas été le témoin direct de la tragédie qui s'était abattue sur le continent européen. Nous n'avons pas vu, comme l'ont vu ceux qui nous ont précédés, les camps de concentration et les prisons où furent tués, torturés et humiliés les hommes, jusqu'à leur abaissement le plus total. Nous n'avons pas vu, comme eux, les champs de bataille, parce que nous n'avions pas à les traverser, la mort dans l'âme, sans parler de la mort physique très souvent. Nous n'avons pas pu ni dû observer, comme eux ont pu et dû le faire, les longs cortèges de prisonniers de toutes les nations qui traversaient l'Europe, constituant en fait un seul cortège funèbre continental. Nous n'avons pas été [...] confrontés à des choix dramatiques, individuels ou collectifs. Nous n'avions pas à dire non, nous n'avions pas à dire oui, nous pouvions vivre dans le soleil de l'après-guerre. Tous les choix dramatiques nous ont été épargnés".

Jean-Claude Juncker a exprimé sa reconnaissance envers une génération qui "avait tant de raisons de baisser les bras, de ne rien faire, de pleurer sur son sort" mais qui a "reconstruit l'Europe, fait de l'Europe le plus beau continent qui soit".

"Le 8 mai 1945 fut pour l'Europe une journée de libération", s’est-il exclamé avant de s’adresser en allemand aux députés européens: 

"Der 8. Mai 1945 war auch ein Tag der Niederlage. Aber es war die Niederlage des Faschismus, die Niederlage des Nationalsozialismus, die Niederlage der Kapitulation der Demokraten vor dem Schrecklichen, das seit 1933 passiert war. Aber es war für Deutschland auch und vor allem ein Tag der Befreiung! Ich möchte den gewählten Vertretern des deutschen Volkes in diesem Hause sagen: Noch nie waren die Deutschen uns so gute Nachbarn wie heute!"

Le Premier ministre a ensuite rendu un hommage appuyé "à ces jeunes soldats américains et canadiens qui, de l'autre côté de l'océan, sont venus en Europe pour libérer l'Europe, ignorant jusqu'à l'existence même d'un certain nombre de pays à la libération desquels ils ont contribué. Nous ne devrions jamais l'oublier."

Les soldats de l'Armée rouge ont reçu le même hommage: "Quel nombre excessif de biographies interrompues parmi les Russes qui, pour la liberté de l'Europe, ont donné vingt-sept millions de morts!"

"Je voudrais rendre un hommage particulier à un peuple d'Europe qui a su dire non alors que d'autres, trop souvent, étaient tentés par un petit oui. Je voudrais ici, aujourd'hui, rendre hommage au peuple britannique qui a su dire non et sans l'apport duquel rien n'aurait été possible."

La division de l’Europe entre une partie occidentale libre et démocratique et une partie centrale et orientale qui "n'a pas connu la liberté que nous avons connue pendant cinquante ans" a été pour le Premier ministre l’occasion d’évoquer les pays baltes dont il a salué l’adhésion à l’UE comme il a salué l’élargissement en général. Et de conclure sur la division dépassée de l’Europe: "Réjouissons-nous, aujourd'hui, de ne plus devoir nous référer à la logique implacable de la guerre froide et de pouvoir faire la paix entre les deux parties de l'Europe."

La reconnaissance envers la génération de la guerre et la fierté qu’inspire l’Europe actuelle ont marqué la fin du discours:

"Soyons reconnaissants à ceux qui ont dit non lorsqu'il fallait dire non et soyons fiers de tous ceux qui, aujourd'hui, disent oui à la grande Europe, à l'Europe qui a vu son histoire et sa géographie se réconcilier. Soyons fiers de ceux qui ne veulent pas que l'Europe se transforme en une zone de libre-échange et soyons fiers de ceux qui, comme nous, comme des millions d'autres, pensent que l'Europe est un continent compliqué qui mérite mieux qu'une zone de libre-échange. Soyons fiers de l'Europe que ceux qui étaient là avant nous ont construite et comportons-nous en dignes héritiers."

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