François Biltgen présente les grandes lignes de la contribution du gouvernement luxembourgeois au débat sur le Livre vert sur la modernisation du droit du travail

En date du 19 avril 2007, François Biltgen, ministre du Travail et de l'Emploi, a présenté les grandes lignes de la contribution du gouvernement luxembourgeois au débat sur le Livre vert de la Commission européenne "Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle."

Dans le cadre d’un large débat public, les États membres de l’Union européenne avaient été appelés à réfléchir et à se prononcer à la manière de faire évoluer le droit du travail dans le sens du processus de Lisbonne, cela notamment à travers la modernisation du droit du travail afin de relever le défi de la conciliation d’une flexibilité accrue avec la nécessité d’offrir un maximum de sécurité.

Le ministre du Travail et de l’Emploi a présenté la position arrêtée en date du 6 avril 2007 par le gouvernement luxembourgeois par rapport aux différents sujets traités par le Livre vert. Il s’agit notamment de questions relatives aux domaines suivants :

  • transitions professionnelles dans le cadre des restructurations d’entreprises
  • insécurité juridique liée à l’apparition de formes de travail variées
  • relations de travail triangulaires
  • aménagement du temps de travail
  • mobilité des travailleurs
  • contrôle de l’application de la législation et du travail non déclaré

François Biltgen a précisé que la prise de position luxembourgeoise a été préparée en consultant le public par l’intermédiaire du site www.europaforum.lu et par une conférence-débat avec le commissaire européen responsable de l’Emploi, des Affaires sociales et de l’Égalité des chances, Vladimir Spidla, qui a eu lieu le 13 février 2007.

La contribution du gouvernement luxembourgeois au Livre vert se résume en cinq points essentiels, a indiqué le ministre:

  • La modernisation du droit du travail ne peut être une fin en soi
  • Les analyses de la réglementation des marchés du travail ne sont pas assez claires pour déterminer s’il y a une corrélation entre la rigueur de la protection de l’emploi et le taux d’emploi
  • Le droit du travail ne saura résoudre tous les problèmes qui se posent au niveau des marchés de l’emploi, sa modernisation ne constitue qu'un élément parmi d'autres
  • Flexibilité et sécurité ne sont pas des notions antagonistes: elles doivent être conciliées
  • Les lignes de démarcation entre le droit du travail et d'autres formes de contrat doivent être raffermies

La modernisation du droit du travail ne peut être une fin en soi

Le gouvernement luxembourgeois s’oppose à toute "pensée unique", a indiqué le ministre. Étant donné que les différents États membres disposent de modèles sociaux bien divergents, il est inadmissible, pour le gouvernement luxembourgeois, de proposer des solutions non-différenciées en matière de modernisation du droit du travail. Il faudrait plutôt, selon François Biltgen, créer un socle minimum de droits sociaux, au-dessus duquel les États membres pourraient agir subsidiairement.

Toujours dans ce contexte, le ministre a indiqué qu’une réflexion sur une nouvelle gouvernance économique pourrait être utile. Il s’agirait de fixer un cadre à l’intérieur duquel les partenaires sociaux pourraient négocier des règles adaptées à leur(s) situation(s). Ainsi, les partenaires sociaux pourraient valablement se substituer au législateur en matière de droit du travail.

Les analyses de la réglementation des marchés du travail ne sont pas assez claires pour déterminer s’il y a une corrélation entre la rigueur de la protection de l’emploi et le taux d’emploi

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) calcule depuis quelques années des indicateurs concernant la rigueur de la réglementation du marché du travail. Selon les résultats de la dernière étude, le Luxembourg se situerait "en tête" des pays de l’OCDE quant à la rigueur globale de la protection de l’emploi. D’après l’OCDE, une protection de l’emploi stricte réduit les flux d’entrée et de sortie du chômage. Cependant, le marché d’emploi luxembourgeois contredit cette théorie, a indiqué François Biltgen. Selon ses dires, le taux de création d’emplois au Luxembourg est élevé, malgré la protection d’emploi rigide au Grand-Duché.

La modernisation du droit du travail ne saura résoudre tous les problèmes qui se posent au niveau des marchés de l’emploi, sa modernisation ne constitue qu'un élément parmi d'autres

François Biltgen a notamment relevé la problématique des restructurations et délocalisations. A son avis, cette problématique ne peut pas être résolue par la seule flexibilisation du droit du travail. Celle-ci ne constitue qu'un élément parmi d'autres. La question centrale réside dans l'innovation et le "life long learning" qui devraient encore être plus développés.

Les pays hautement industrialisés et à niveau de vie et de salaires élevés ne peuvent pas devenir concurrentiels par un abaissement du niveau social, mais uniquement par un accroissement de la productivité, a déclaré le ministre. La détérioration du droit du travail ne serait pas la réponse adéquate, mais il s'agit de mener une politique d’investissement dans la recherche et dans la formation.

Dans le contexte des restructurations, François Biltgen a cité le plan de maintien dans l’emploi comme mécanisme supplémentaire assurant de nouvelles sécurités aux salariés concernés sans toutefois recourir à une flexibilisation du droit du travail.

Flexibilité et sécurité ne peuvent être considérées comme des notions antagonistes: elles doivent être conciliées

Selon le ministre, le besoin de flexibilité ne concernent pas seulement les employeurs, tout comme ce ne sont pas seulement les salariés qui ont besoin de sécurité. En d'autres mots, la flexibilité et la sécurité concernent les deux parties, ce ne sont pas des notions antagonistes, au contraire, elles doivent être conciliées.

Afin d'accroître la sécurité et la flexibilité, le gouvernement va sous peu entamer un projet de loi sur l’introduction de comptes épargne-temps, a annoncé François Biltgen. Les comptes épargne-temps permettront aux travailleurs plus jeunes de travailler plus afin de jouir plus tard dans leur vie, selon leurs besoins, d'une réduction de leur temps de travail. Ce système permettra, en toute sécurité, d’apporter plus de flexibilité aux salariés, de même qu’aux entreprises.

Les lignes de démarcation entre droit du travail et autres formes de contrat doivent être raffermies

En ce qui concerne l’introduction de la notion de "travail économiquement indépendant", proposée par la Commission européenne, François Biltgen a signalé l’opposition stricte du gouvernement luxembourgeois à une telle "zone grise". Dans ce contexte, le statut de "faux indépendant" - des personnes employées sous le statut de l'indépendant mais traitées comme des salariées, sans pourtant jouir des mêmes protections - est, selon le ministre, à requalifier comme salarié.

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