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Déclaration du gouvernement sur la situation économique, sociale et financière du pays 2000 (traduction française)
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Nous avons laissé le XXe siècle derrière nous sans toutefois l’avoir définitivement enterré. Ce fut un siècle immense, rempli de moments tragiques, d’êtres bafoués et de rêves anéantis. Ce fut un siècle sombre, mais ce fut également un siècle où de nouveaux rêves, de nouveaux espoirs sont nés et de nouveaux plans ont été forgés. Aucun de ces plans n’a encore abouti, et on ne peut les comprendre si l’on oublie les atrocités qui les ont rendus nécessaires.
Il y a de cela 60 ans jour pour jour, le 10 mai 1940, les troupes nazies ont envahi et occupé notre pays.
C’est avec une rigueur impitoyable que la machine de guerre et la machine politique fasciste allemande ont enchaîné et pris à la gorge notre petit pays qui s’est retrouvé seul et sans alliés.
Notre Grande-Duchesse Charlotte et notre gouvernement furent contraints de s’exiler. Des dizaines de milliers de Luxembourgeois durent s’enfuir. Des milliers furent enfermés dans des camps de concentration et des prisons. Ils furent déportés ou contraints au travail forcé, arrachés à ce qu’était leur vie. L’enrôlement de force des jeunes Luxembourgeois dans l’armée nazie, qui a laissé des traces et des cicatrices dans toutes les familles luxembourgeoises était un crime de guerre unique et qualifié, une intervention brutale dans le cours naturel de la vie de la nation. Les Luxembourgeois se sont révoltés contre cette atteinte à leur avenir par une grève générale. Ainsi, ils ont à tout jamais assuré une place à notre pays dans le concert des nations qui ont fait front à l’oppression.
Nos parents et nos grands-parents se sont vu voler leur jeunesse le 10 mai 1940. Ils ne la retrouvèrent que partiellement en 1945, car la reconstruction morale et matérielle de notre pays endigua leur énergie pour de nombreuses années encore.
Aujourd’hui, au 60e jour-anniversaire, ceux qui désormais vivent en sécurité, en liberté et dans la prospérité remercient, se doivent de remercier et veulent remercier et témoigner leur respect à ces femmes et à ces hommes qui ont souffert pendant la guerre et qui ont reconstruit notre pays après la guerre.
Le 28 septembre, jour du 81e anniversaire du référendum sur la monarchie, lorsque nous aurons un nouveau Chef à la tête de notre Etat, il nous faudra nous rappeler que cela n’aurait pas été possible si, 60 ans auparavant, les Luxembourgeois ne s’étaient pas défendus.
Le hasard (pour autant qu’en Histoire on puisse parler de hasard) a voulu qu’hier, à la veille du 10 mai, nous commémorions le cinquantième anniversaire du Plan Schuman.
Le Plan Schuman est l’un de ces nouveaux plans européens que je viens d’évoquer il y a quelques instants, un de ces plans qui n’ont pas encore abouti et dont on ne comprend le sens que si l’on garde en mémoire le massacre continental qui a eu lieu sur leur parvis.
Sans le 10 mai 1940, sans cette guerre en Europe, cette guerre qui devint une guerre mondiale, Robert Schuman n’aurait jamais conçu ce plan.
L’idée de rassembler le charbon et l’acier sous un seul couvert européen, ce qui jusque là relevait de la seule et exclusive compétence nationale de pays ennemis, était une idée géniale. Schuman, Monnet et bien d’autres encore (parmi eux également des personnalités luxembourgeoises de ces années de guerre) ont bâti avec zèle et ardeur, sur les premiers succès de la CECA, la Communauté européenne qui, en 1991 à Maastricht, est devenue l’actuelle Union européenne.
Le Plan Schuman était un plan contre la guerre et contre le nationalisme aveugle qui y a conduit. L’Union européenne est jusqu’à ce jour synonyme d’un programme pour la paix et en représente la garantie, la collaboration, la coopération et la solidarité entre les nations européennes.
La paix en Europe n’est une évidence qu’aux yeux des ignorants de l’Histoire et pour ceux qui sont éblouis par l’éclat d’une vie moderne facile. Par contre, pour ceux qui connaissent l’histoire mouvementée de notre continent, pour ceux qui ont réfléchi à l’humanité et qui s’y connaissent, la paix et la liberté représentent des valeurs qui peuvent facilement être renversées par la force d’anciens démons.
Non, malgré les progrès réalisés et malgré les apparences, le plan de Robert Schuman est loin d’être terminé. Notre génération aussi se doit de continuer, avec méthode et enthousiasme, la construction calme et mûrement réfléchie de la maison européenne.
Notre plus grand défi pour l’avenir est celui de l’élargissement de l’Union européenne vers l’Europe centrale et l’Europe de l’Est.
Cet élargissement est nécessaire, car il est un des éléments qui décident de la paix ou de la guerre. Une Europe éternellement divisée serait une grave entrave à la stabilité continentale.
L’élargissement doit être mûrement réfléchi et réalisé avec soin. Lors du sommet de Nice, en décembre prochain, il faudra que nous puissions confectionner un habit dans lequel il y aurait suffisamment de place pour 25 pays (ou plus), sans que ses coutures ne craquent. Le succès ne sera atteint que si nous prenons au sérieux les craintes des gens d’ici comme les inquiétudes des gens de là-bas. Un élargissement à tout prix à la vitesse grand V, qui ne reposerait pas sur une préparation solide et de larges perspectives, ne fera qu’augmenter les craintes des uns sans diminuer les inquiétudes des autres. La politique se doit d’éradiquer la peur, car, sinon, la peur servira à faire de la politique.
Nous devons prouver que l’élargissement a un sens tant au niveau politique, économique que social; et cela, pour les nouveaux membres tout comme pour les anciens. Nous devons prouver qu’une Union européenne composée de 27 Etats membres et avec 550 millions d’habitants est à même de prendre des décisions et d’agir. Le nouveau traité devra permettre à une avant-garde d’Etats membres de se donner les instruments institutionnels nécessaires à l’approfondissement de l’idée européenne justement là où un trop peu d’Europe représenterait un danger. L’Union européenne demeure un projet éminemment politique. Sa réduction au niveau d’une zone de libre échange diminuerait la dimension de l’ambition européenne. Un continent si compliqué ne peut se contenter de concepts simples.
Nous, et j’entends par là les Etats membres, nous nous devons d’être honnêtes vis-à-vis des pays candidats. Nous devons leur dire ce qui va et ce qui ne va pas. Par exemple, il est impensable que, seulement quelque temps après leur entrée dans l’Union européenne, ils veuillent déjà faire partie de la zone euro.
Nous devons clairement faire comprendre aux candidats que le fait d’être membre de l’Union européenne ne donne pas automatiquement droit d’accès à l’union monétaire européenne.
Du point de vue luxembourgeois, l’élargissement signifie, si nous voulons rester l’une des trois capitales européennes, des investissements massifs dans les infrastructures du siège de l’Union. Près de 50 milliards d’investissements seront nécessaires au Kirchberg pour les années à venir. L’aménagement du Kirchberg devra répondre prioritairement aux impératifs de la consolidation et de l’extension du siège des institutions européennes. Le comité de coordination pour l’installation des institutions et des services européens, qui dépend du ministère d’Etat, devra être renforcé tant au niveau du matériel que du personnel. Le gouvernement présentera l’année prochaine un programme d’investissements, qui prendra en compte les implications de l’élargissement et qui montrera les efforts nécessaires à la consolidation. Les investissements seront réalisés sous le couvert de la loi de garantie, puisqu’ils rapporteront plus tard des milliards à l’Etat sous forme de recettes.
L’élargissement de l’Union européenne montre bien que le Plan Schuman n’a pas encore abouti. On peut également constater cela par les plans audacieux en matière de défense, de consolidation et de maintien de la paix.
Dans le traité d’Amsterdam et par la décision du Conseil européen, l’Union européenne a clairement démontré qu’elle est décidée à se donner une politique de défense et de sécurité européenne digne de ce nom. Cette nouvelle politique ne fera pas concurrence à l’Otan et ne la remplacera pas, mais elle sera la réponse à des déficits et des faiblesses européens que l’on a pu clairement constater récemment lors du conflit du Kosovo.
Il est vrai que, avec la fin de la guerre froide et le soi-disant équilibre apporté par les moyens de dissuasion entre les deux blocs militaires, la menace atomique directe a disparu. Il n’en est pas moins vrai que l’Europe ne dispose pas encore d’un système de coopération en matière de sécurité.
Tout au contraire, de nouvelles incertitudes, de nouveaux risques sont apparus. La stabilité est menacée par le démantèlement des structures étatiques, par le terrorisme national et international, par les massacres et les génocides, par le retour d’anciens réflexes nationalistes, par un fanatisme incontrôlé de fondamentalistes de toutes sortes.
Parce qu’il en est ainsi, les Européens ont décidé d’assumer plus encore leurs propres responsabilités.
L’Union européenne est en train de devenir une union politique, celle-ci passant par une union de sécurité et de paix. L’Europe se doit de trouver l’équilibre entre économie et sécurité, sans quoi elle basculera.
Cet équilibre, ce début d’une responsabilité plus grande en matière de sécurité, de stabilité et de paix, autour et en Europe, ne peut être atteint sans y mettre un certain prix.
Paix, sécurité, liberté et stabilité ne doivent pas être uniquement déclinées sous une forme militaire.
Un pays qui, comme le Luxembourg, accueille des milliers de réfugiés du Kosovo et du Montenegro, donc des réfugiés européens, apporte ainsi une importante contribution à la liberté et à la stabilité.
Un pays qui, comme le Luxembourg, contribue, à raison de 1% de sa richesse nationale, à l’aide au développement, investit dans la paix et la stabilité. Le renforcement de notre engagement en matière d’aide au développement va de pair avec un renforcement nécessaire de notre engagement en matière de politique de stabilité et de sécurité. Tous deux ont un même but, qui est notre contribution à la garantie de la stabilité et de la sauvegarde de la paix.
En Europe, tout comme dans le reste du monde, nous sommes respectés pour notre politique de développement volontariste.
Si nous voulons conserver notre place au sein de l’Union européenne et de l’Otan, il faut alors que nous assumions notre part des efforts communs au niveau de la stabilité et de la paix.
Cela, nous ne le faisons pas encore. Alors que les membres européens de l’Otan apportent en moyenne 2,2% de leur PIB aux fins de défense et de sécurité, le Luxembourg y contribue beaucoup moins, puisque seulement 0,9% de notre PIB est destiné à cet effet.
Le gouvernement a l’intention d’augmenter sa contribution, sur une période de 5 à 6, ans à un niveau supérieur à 1,2% de notre PIB.
Trois éléments de politique complémentaires qui, en évitant des chevauchements tout en ayant un sens et en remplissant leurs objectifs tant au niveau national qu’international, représenteront notre apport à la politique de stabilité européenne, tout comme ils aideront à éviter et à endiguer les conflits. En bref, ce sera notre contribution à la politique européenne de paix.
Si nous voulons être reconnus comme un partenaire européen à part entière (et nous le voulons), alors il nous faut plus et de meilleurs volontaires à l’armée. Voilà pourquoi il nous faudra renforcer l’attrait de l’armée pour voir augmenter le nombre de volontaires. Nous le réaliserons en augmentant la solde des volontaires, en abolissant les charges inintéressantes et inutiles qui empêchent les volontaires de suivre une formation vitale. Nous le réaliserons aussi en ouvrant notre armée (sous certaines conditions) aux jeunes étrangers qui vivent au Luxembourg, en prévoyant des emplois dans les services de l’Etat et dans les communes pour les volontaires démobilisés et en améliorant leur conditions de logement au “Härebierg”.
En plus des aspects ayant trait au personnel, il nous faudra également investir en matériel, un matériel qui permettra à notre armée de participer en toute sécurité aux missions de paix européennes. Voilà pourquoi, dès à présent, nous développerons un deuxième projet de loi sur un programme d’équipement militaire pour les années 2001 à 2005.
Nous devons réaliser ces objectifs très vite, afin de préparer notre armée aux missions qui lui incombent au sein de l’Europe. Au plus tard en l’an 2000, des soldats luxembourgeois devront pouvoir faire partie des troupes européennes fortes de 60.000 hommes oeuvrant pour la paix. Par-dessus tout, notre pays devra être plus ouvert aux alliances. Notre contribution à l’Otan devra être augmentée en conséquence.
La résolution de crises dépasse de loin les uniques aspects militaires. Les aspects humanitaires ne sont pas moins importants. Notre pays cherchera sa propre place dans ce segment de la solidarité internationale en créant un corps humanitaire civil. Il devra exister avant l’an 2002. Des crédits seront repris à cet effet au projet de budget de l’année 2001.
En somme, nous ne voulons pas en arriver à un stupide militarisme, cela ne correspond d’ailleurs pas à notre caractère, mais nous voulons nous donner les moyens d’assumer comme un membre à part entière nos responsabilités en matière de stabilité au sein de l’Union européenne et de l’Otan.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
La politique est devenue si compliquée et si complexe que, de par elle-même, on n’arrive plus à la comprendre spontanément.
Il n’est pas possible, de prime abord, de comprendre pourquoi, à la fin de la guerre froide, il nous faut contribuer de manière plus importante aux efforts pour la sécurité et la stabilité. Voilà pourquoi, de manière quelque peu inhabituelle dans le cadre d’un discours sur l’état de la nation, je viens d’exposer plus intensément cet aspect de la politique.
Mais aussi, des aspects politiques faisant plus directement partie de l’actualité ont parfois besoin d’explications pour que ne naissent pas de fausses interprétations.
Le soi-disant “faible” euro est un de ces éléments qui nécessite plus d’explications.
A l’avenir, le gouvernement sera tenu, chaque année, de discuter de l’euro dans le cadre du débat sur l’état de la nation. L’euro a pris la relève du franc belge, et comme nous avons par le passé souvent évoqué le franc belge, souvent d’ailleurs en nous faisant beaucoup de soucis, nous devrons maintenant parler de l’euro. Cela est plus particulièrement vrai cette année, alors que, chez nous aussi, beaucoup de gens se posent des questions au sujet de l’euro.
L’euro a été introduit au 1er janvier 1999. Son introduction, qui s’est déroulée sans aucun problème, représenta un succès technique exceptionnel. C’était là une première tout à fait réussie.
Un an et demi après son introduction, l’euro est, aux yeux de beaucoup de gens, mal en point. Depuis son introduction, il a perdu 24% de sa valeur par rapport au dollar. L’euro est faible, disent-ils. L’euro nous rend encore plus pauvres que nous ne l’étions déjà avant, prétendent-ils.
Je veux pourtant démentir avec véhémence ces fausses impressions.
L’euro perd de sa valeur face au dollar. C’est vrai.
Mais pourquoi est-ce le cas?
C’est le cas, parce que depuis des années déjà, l’économie américaine connaît un taux de croissance plus élevé que celui de l’Europe. Le risque de surchauffe aux Etats-Unis a fait grimper les taux d’intérêts américains à un niveau bien plus élevé qu’en Europe. Les investissements en dollars ont, pour cette raison, un rendement plus élevé que ceux en euro.
Ce que nous vivons aujourd’hui dans la relation euro-dollar, nous l’avons connu par le passé dans la relation dollar-mark allemand. Aujourd’hui, pour un dollar, il faut payer 2,13 marks. En 1985, un dollar valait 3,40 marks. Le mark allemand était, dès lors, plus faible à cette époque-là que ne l’est l’euro aujourd’hui. Si l’on convertit la relation entre le mark par rapport au dollar en une relation euro par rapport au dollar, alors le mark allemand a subi une fluctuation exprimée en euro sur les dix dernières années, entre 0,60 et 1,40 euro. L’euro devait être aussi fort que la plus forte des monnaies du système monétaire européen, donc du mark allemand. L’euro est aujourd’hui aussi fort que le mark allemand ne l’était. Il est également plus fort que le franc belgo-luxembourgeois l’était: aujourd’hui, le dollar coûte 45 francs; en 1985 il coûtait 69 francs. Et pourtant à cette époque, aucun Luxembourgeois ne s’en faisait. Aujourd’hui, alors que nous sommes plus forts de 24 francs, il n’y a pas plus de raisons de s’en faire.
La faible performance de l’euro vis-à-vis du dollar persistera-t-elle?
En principe non, l’économie européenne devant sortir en l’an 2000 de la dépression conjoncturelle. En comparant les économies américaine et européenne sur la base de l’année entière, elles devraient connaître un accroissement plus ou moins égal. Quand cela aura lieu, il reste à espérer que les marchés financiers verront d’un meilleur oeil les performances économiques européennes, notamment une croissance accrue, des déficits budgétaires réduits et des dettes étatiques en forte baisse. Il reste à espérer qu’ils regarderont alors de plus près les faiblesses américaines, telles qu’une balance commerciale déficitaire de plus de 350 milliards de dollar, un important niveau d’endettement des ménages américains et de l’Etat lui-même, une dépendance prononcée de l’économie et du budget américains par rapport à l’évolution des cours de la bourse. Quand les marchés financiers découvriront les meilleures données économiques européennes et la moins bonne situation aux Etats-Unis, alors l’euro gagnera du terrain par rapport au dollar, ce dernier étant aujourd’hui surévalué. Les marchés financiers se comportent actuellement de façon tout à fait irrationnelle, mais il n’existe pas d’exemple dans l’histoire monétaire où ils l’ont fait de manière permanente.
Nous sentirions-nous mieux sans euro ?
Certainement pas. Le dollar surévalué et l’euro sous-évalué ont pour conséquence que les exportations vers la zone dollar sont devenues meilleur marché. Cela fait du bien à l’économie européenne et contribue aussi à ce que nous voyions enfin la lumière au bout du tunnel conjoncturel européen. Si le dollar était faible et l’euro fort, les produits américains évinceraient les produits européens et notre économie se remettrait plus lentement et plus difficilement.
Cette situation ne cache-t-elle pas des dangers ?
Si, bien sûr. Le dollar fort crée un risque inflationniste de par l’augmentation des prix des produits d’importation facturés en dollars. Combinée au cortège inflationniste des prix des produits pétroliers trois fois plus chers, cette situation est malsaine pour l’évolution des prix en Europe. Afin de pallier des risques d’inflation naissante, la Banque centrale européenne a procédé, avec raison, à des hausses adéquates des taux d’intérêts, hausses qui n’étoufferont pas la reprise conjoncturelle. Par ailleurs, alors que le dollar fort aide notre économie, nous pourrions risquer d’entrer dans une phase de fatigue réformiste dangereuse. De par le monde, on croit aujourd’hui déjà qu’une des raisons dominantes de la faiblesse de l’euro réside dans l’incapacité des quinze pays européens à financer durablement leurs régimes de pensions.
Le cours externe de l’euro ne peut donner satisfaction, mais sa stabilité intrinsèque est importante.
- Voilà le point essentiel. La Banque centrale européenne a eu pour mission de garantir la stabilité des prix. Le cours externe est important, mais certainement de second rang. Ce n’est pas sans raisons que nous maîtrisons l’inflation depuis dix ans: notre croissance économique est peu inflationniste, la valeur intrinsèque de notre monnaie commune ne baisse point et nous ne nous appauvrissons pas. Pour le même montant, nous pouvons, dans les onze pays de la zone euro, recourir aux mêmes services qu’il y a quelques mois encore. Celui qui passe ses vacances en zone euro peut se désintéresser du dollar fort. Nos salaires, nos pensions et nos retraites ne dépendent pas du dollar, mais de l’inflation, une inflation qui a atteint des niveaux historiquement bas.
- Que se serait-il passé si nous n’avions pas eu l’euro l’année passée ni cette année ? Sans euro, il n’y a pas de politique économique européenne coordonnée. Sans politique économique européenne coordonnée, nous aurions aujourd’hui, après la guerre du Kosovo - d’ailleurs nous avons eu pour la première fois depuis 50 ans une guerre en Europe et ce, trois mois après l’avènement de l’euro - et avec un triplement des prix du pétrole, ce que nous avons si souvent connu par le passé dans des cas semblables: chaque gouvernement se serait occupé de lui-même sans égard pour les autres. Une inflation de 5 à 6% tout comme un méli-mélo monétaire en auraient été les conséquences. Des réévaluations et dévaluations en auraient été les conséquences. Nous, en tant que Luxembourgeois, nous aurions perdu des parts de marché en Europe. Nous n’en avons pas perdu parce que, en Europe, nous disposons d’une monnaie unique. Bien des gens se font du souci quant à la valeur externe de l’euro. Si nous avions encore le franc belge, nous devrions nous inquiéter de sa valeur au sein de l’Europe. Encore un exemple de ce qui se serait passé sans l’euro: la crise au sein du gouvernement italien aurait conduit à une dévaluation de la lire italienne. Les produits que nous livrons en Italie seraient devenus plus chers. Les prix des produits italiens que nous importons au Luxembourg auraient baissé avec, pour conséquence, comme en 1992 déjà, moins d’exportations en Italie et moins de ventes chez nous. L’euro nous a permis d’éviter cela.
Pour résumer, nous suivrons de près le cours externe de l’euro, sans toutefois nous faire trop de soucis, et sans oublier de nous réjouir de sa stabilité intrinsèque. Sans euro, la situation en Europe et au Luxembourg serait moins bonne. Au 1er janvier 2002, un euro aura la même valeur qu’au 1er janvier 1999: il vaudra toujours 40,3399 francs. L’euro ne nous a pas appauvris, il a préservé notre pouvoir d’achat.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Dans le contexte de l’euro, je viens de citer le développement économique aux Etats-Unis tout comme en Europe.
Cette déclaration, comme l’indique son nom d’ailleurs, traite de la situation économique du pays. Quelle sera donc l’évolution de notre économie et quelles seront les conséquences de ce développement?
L’économie européenne, en 1999, a connu une croissance de 2,3%, celle des Etats-Unis a augmenté de 4,2% et celle du Luxembourg de plus de 5%. Le Luxembourg a connu une croissance trois fois plus élevée que la moyenne de l’Union européenne et, plus particulièrement, que ses trois pays voisins. Les experts du Fonds monétaire international, de l’OCDE et de la Commission européenne sont d’avis que cela provient en majeure partie d’un savant mélange politique entre l’offre et la demande, entre politiques économique, financière et sociale. Ce mélange subtil ne date pas d’aujourd’hui, mais repose déjà sur une longue tradition. Certes, de 1985 à 1999, la croissance économique moyenne est de 5,5%. Cela représente la meilleure performance en Europe, flirtant avec celle de la nouvelle économie des Etats-Unis d’Amérique. Cette évolution, qui est loin d’être le fruit du hasard, mais plutôt le résultat d’une politique, a permis à notre Etat d’augmenter sa part dans le financement de la sécurité sociale à 50% des recettes courantes de la protection sociale, tout en réduisant la part des charges fiscales et sociales qui, de 1970 à 1983, ont augmenté de 30 à 50% du PIB, à moins de 45%. Nos coûts indirects du travail sont ainsi les plus bas en Europe et, de ce fait, ils ont permis d’augmenter le nombre d’emplois au Luxembourg de 5,4%, soit 11.000 emplois, ce qui représente plus de trois fois le taux européen ou américain. Tous les secteurs de l’économie ont connu un accroissement de l’emploi: 1,6% dans l’industrie, 4,4% dans la construction, 4,3% dans le commerce, 6,5% dans le secteur financier et 9% dans les autres services. Cette expansion du marché de l’emploi a des conséquences positives sur le chômage, qui avait déjà atteint le niveau européen le plus bas: il a ainsi fortement baissé. Mais c’est surtout l’emploi national, celui des résidents luxembourgeois, qui a augmenté de 3%. Le taux d’emploi national a augmenté de 60,1% en 1998 à 61,6 % en 1999, pour atteindre pratiquement la moyenne européenne de 61,9%. Le taux des frontaliers dans les nouveaux emplois baisse alors qu’entre 1990 et 1997 ils occupaient 80% des nouveaux emplois. Ce taux a baissé en 1998 et 1999 à 65%.
L’inflation, notamment à cause du triplement du prix du pétrole, a fait un bond en avant: en février/mars 2000 : elle a augmenté de 2,7% contre 0,5% douze mois plus tôt. Le noyau dur de l’inflation, c’est-à-dire l’inflation où le renchérissement du pétrole et d’autres produits volatils a été neutralisé, est resté stable à 1,5%. Nous prévoyons un apaisement de la pression inflationniste dans le courant de cette année, à la double condition que les prix du pétrole brut se stabilisent à un niveau situé entre 20 et 25 dollars et que l’euro puisse au moins partiellement profiter de son potentiel de réévaluation. En l’an 2000, le taux d’inflation sera probablement de 2,4%. Une tranche indiciaire viendra donc à échéance vers les mois de septembre-octobre 2000.
Les charges salariales ont augmenté en moyenne de 3% en 1999, ce qui représente un chiffre nettement plus élevé qu’en 1998, où l’augmentation ne se chiffrait qu’à 1,8%. Les coûts salariaux à l’heure, exception faite du Danemark et de l’Angleterre, augmentent de 4% plus rapidement que dans les autres pays européens qui sont nos concurrents principaux. L’augmentation des coûts salariaux est la conséquence directe de la tranche indiciaire échue en août 1999. Sans cette indexation, l’augmentation n’aurait été que de 2%, ce qui aurait été en harmonie avec le cycle conjoncturel. Ces 2% d’augmentation proviennent, à raison d’un tiers, de l’augmentation du niveau des primes et gratifications.
On peut supposer que, en l’an 2000, l’économie européenne connaîtra une croissance de 3,4%, sensiblement similaire à celle des Etats-Unis, pour laquelle on pronostique une croissance ralentie de 3,6%. Il reste à espérer que le ralentissement de la croissance américaine se fera d’une manière douce, car un atterrissage trop dur aurait des répercussions négatives également en Europe.
L’économie luxembourgeoise devrait croître de 5,6% en l’an 2000 et de 5,7% en l’an 2001. Une fois de plus, cela dépasserait de loin la moyenne européenne ainsi que la moyenne de nos pays voisins. Le taux annuel moyen de chômage devrait continuer à baisser et l’accroissement de l’emploi devrait atteindre bien plus de 4%.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
La situation que je viens de vous relater en quelques mots, donc de façon incomplète, rendrait fiers tous les chefs d’Etats en Europe s’ils pouvaient la présenter à leur pays.
Nous ne sommes jamais la lanterne rouge en Europe. Sur certains points essentiels, nous sommes même à la tête du peloton européen. Je préfère de loin cette situation à la situation inverse.
Notre économie croît fortement, notre marché de l’emploi croît encore plus, notre population aussi. En fin de compte, nous nous dépassons.
A première vue, il semble que nous puissions rester optimistes quant à notre avenir, d’autant plus que notre situation financière, comme l’ont attesté les ministres de l’Economie européens et la Commission européenne, est exemplaire, puisque sans baigner dans la prospérité, nous avons sagement prévu le financement d’importants engagements étatiques, dont nous aurons à supporter le poids durant les années à venir.
Cependant, en allant plus loin, en étudiant les chiffres, en examinant les procédés et les processus, on voit que cette croissance rapide nous lance de sérieux défis et nous crée d’importants problèmes. Des problèmes, soyons honnêtes, que nous ne maîtrisons pas, et, si nous sommes réalistes, des problèmes que nous aurons du mal à maîtriser.
Nos médailles d’or ont toutes un revers. Il est bien normal que nous préférions regarder la face qui brille le plus. Cette face nous servira de miroir pour nous contempler, pour éblouir les autres et nous-mêmes. Mais le revers de la médaille, cette face qui brille moins, cette face dont l’éclat est en train de ternir, c’est la face dans laquelle les jeunes d’aujourd’hui devront se regarder lorsqu’ils seront plus âgés. Si nous voulons bien faire les choses, si aujourd’hui nous voulons faire de la politique pour demain, il nous faut regarder cette face. Notre regard devra alors être plutôt songeur, notre politique devra être plus profonde. La politique luxembourgeoise n’a pas le choix, elle doit devenir plus profonde. Rendre l’évolution plus profonde, plus durable, voilà un impératif qui est loin d’être seulement écologiquement sectoriel. Il se doit d’être plus général, plus linéaire. Toute politique doit être orientée vers une durabilité mesurable.
La croissance de l’économie et celle du marché du travail nous donnent de nombreuses possibilités. Nous devons en profiter.
La croissance de l’économie et celle du travail cachent cependant de grands risques aussi, des risques que nous devons maîtriser.
De cette gestion parallèle quasi obligatoire des opportunités et des risques découle le dilemme de la politique luxembourgeoise.
Etudions ensemble un de ces cas où opportunités et risques se rejoignent.
- Si nous voulons garantir le financement de nos régimes de pensions et de retraites à court et à moyen terme, l’économie et le marché de l’emploi doivent continuer à croître comme ils l’ont fait au cours de ces dernières années. Si nous voulons conserver un niveau élevé de retraites et de pensions, voire l’augmenter, si nous voulons conserver notre niveau confortable et élevé de prestations sociales pour les générations à venir, alors il nous faudra encore grandir de manière soutenue pendant de longues années. Grandir au niveau économique, mais aussi au niveau de la politique du marché de l’emploi. Si nous voulons conserver cette croissance soutenue, nous évoluerons vers un pays de 700.000 habitants, ce que nous sommes en passe de faire comme en témoignent les chiffres. Si nous devenons un pays comptant toujours plus d’habitants, si nous créons, ou plutôt si nous devons créer annuellement 8, 9, 10, voire 11.000 nouveaux emplois pour garantir le financement de retraites de plus en plus élevées, alors nous rencontrerons d’énormes problèmes qui seront la conséquence incontournable de cette évolution. Nous aurons alors besoin de plus de routes, de plus d’écoles, de plus d’habitations, de plus d’infrastructures collectives, de plus de crèches, de plus d’hôpitaux, de plus de lits de gériatrie, de plus de maisons de repos, de plus de fonctionnaires dans les services de l’Etat et dans les communes, qui devront s’occuper de tout cela. Cette croissance soutenue qui en sera la cause donnera lieu à juste assez de revenus d’impôts pour financer ses propres effets.
Cependant, et cela pourrait paraître souhaitable à la vue de ces conséquences, si l’économie et le marché de l’emploi commencent à fléchir, s’ils s’affaiblissent, s’ils tombent à des niveaux européens normaux, nous serons alors confrontés à un autre problème, non moins important: celui du financement des retraites et pensions de ceux qui sont concernées et surtout, celui du financement des retraites et pensions de ceux qui le seront dans une dizaine d’années.
Alors, que faire?
Devons-nous décréter une croissance limitée de l’économie? Arriverons-nous à promulguer une croissance économique limitée? Et à supposer qu’il nous soit possible d’endiguer la marche vers un pays de 700.000 habitants, serons-nous prêts à nous montrer plus raisonnables à moyen et long terme dans la conception du niveau des prestations des retraites et des salaires? Voilà le dilemme politique typique au Luxembourg. Nous ne le résoudrons pas en l’ignorant. Parfois, et très souvent d’ailleurs, on a l’impression que, dans ce pays, nous voulons tout à la fois et même le contraire: une croissance rapide pour tout nous permettre et, en même temps, sans en tirer les conséquences de cette croissance rapide, ou une croissance plus lente pour que tout reste convivial sans pour autant avoir à tirer les conséquences d’une croissance plus lente.
Dans cet amalgame de désirs et de réalités, la réponse n’est pas facile à trouver, d’autant plus que la politique est dépassée si on la laisse seule. Ici, comme dans beaucoup de domaines politiques, la réponse ne peut se trouver que dans un juste milieu non encore défini. Le développement durable doit être au centre de toute politique.
Nous avons besoin d’un développement durable dans notre économie, dans le marché de l’emploi, dans le social, sur le plan culturel et en matière de sécurité, dans la construction, dans l’aménagement du territoire, ainsi que dans la politique de l’immigration. Bref, partout ! Rien ne peut être décidé aujourd’hui sans penser aux effets que ces décisions pourraient avoir sur les générations futures.
Nous avons besoin d’une croissance durable de notre économie.
Le but de la politique européenne et de la politique luxembourgeoise est de permettre une croissance non inflationniste durable. Jusqu’à aujourd’hui, cela a mieux réussi au Luxembourg que dans le reste de l’Europe. La croissance élevée constante et régulière depuis 1985 le prouve bien. Cela démontre aussi que dans ce laps de temps, notre économie s’est déconnectée des cycles conjoncturels de nos pays voisins. Une croissance soutenue dans les pays limitrophes profite sérieusement à notre croissance mais, à l’inverse, un affaiblissement de la conjoncture en Allemagne, en France ou en Belgique touche beaucoup moins notre économie qu’il y a 50 ou 20 ans encore. En tant qu’économie ouverte et orientée vers l’exportation, nous restons, en partie, fortement tributaires de l’évolution économique européenne, tout en étant devenus bien plus autonomes qu’auparavant.
Notre économie doit continuer à croître, mais pas n’importe comment. Elle doit grandir de manière durable.
Nous n’avons pas besoin de courir à tout prix derrière une nouvelle entreprise. Les nouvelles entreprises doivent être écologiques et pleines de ressources. Le critère prédominant pour les implantations futures n’est plus le nombre d’emplois créés, mais le volume de la valeur ajoutée qu’elles apporteront.
Notre économie génère de nombreux emplois, l’Etat devant se limiter à organiser de façon optimale les conditions générales d’encadrement. Voilà pourquoi nous préparons actuellement une réforme fiscale qui, lorsqu’elle entrera en vigueur au 1er janvier 2002, ramènera le taux d’imposition de nos entreprises de 37,49% aujourd’hui à moins de 35%. Voilà pourquoi nous continuons avec le démantèlement des barrières administratives qui frappent plus particulièrement les petites entreprises. Voilà pourquoi nous actualiserons cette année le plan d’action de 1996 pour les classes moyennes, nous réformerons la loi sur le droit d’établissement et l’accès à certaines professions, nous adapterons la liste relative à l’artisanat et à son rayon d’action et démarrerons le septième plan quinquennal pour le tourisme. Voilà pourquoi nous présenterons une nouvelle loi sur la prévention des faillites, qui aura pour but la modernisation de la “gestion contrôlée”.
Les nouvelles entreprises qui s’établiront au Luxembourg ne doivent pas obligatoirement créer beaucoup plus d’emplois. N’oublions pas que nous ne voulons pas d’une explosion démographique dans le marché de l’emploi. EIles devraient apporter de meilleurs emplois, des emplois plus hautement qualifiés. Nous voulons plus cibler la prospection économique, rendre l’économie plus apte à résister aux crises par une diversification plus sophistiquée. Nous avons besoin d’une offensive dans le domaine du TIC: Haute Technologie, Information, et Communication, voilà les moteurs du futur.
Nous ne commençons pas à zéro dans ces domaines. En 1999, nous avions quelques 530 entreprises actives dans le domaine de l’information et de l’informatique, ce qui représente 3.100 emplois. Nous avons besoin de ces entreprises, nous avons besoin de plus d’emplois de ce genre.
Pour que cela réussisse, quelques conditions d’accompagnement doivent être améliorées.
Le monde entier se bat pour ces entreprises et pour ces emplois. Les entreprises naissent là où les conditions sont les plus appropriées. La globalisation les amène, mais la globalisation peut aussi les éloigner, voire les enlever. Il nous faut donc, dans ce pays, une imposition compétitive pour les entreprises et les salariés, des charges sociales basses, d’excellentes infrastructures, du personnel compétent ainsi qu’un encadrement de base attrayant dans les domaines de la communication et de l’information, afin que nous puissions jouer un premier rôle dans cette nouvelle économie.
Notre pays est-il préparé à ce nouveau défi ? J’affirme que oui, mais j’affirme aussi qu’il nous faut encore devenir meilleur.
Oui, nous sommes prêts pour la société de l’information.
Le Comité Info 2000 a réalisé un travail précieux et a donné des recommandations utiles au cours de la dernière période législative. Elles sont en application ou sont sur le point de l’être.
Au cours des quinze dernières années, le nombre de ménages luxembourgeois disposant d’un ordinateur a augmenté de 7,2% à 50%. Un Luxembourgeois sur deux possède un téléphone mobile. Un Luxembourgeois sur trois dispose d’un accès Internet. 40% de nos écoles primaires et 100% de nos écoles secondaires disposent d’un accès Internet. Dans l’enseignement primaire, nous trouvons un ordinateur pour 19 élèves et, dans l’enseignement secondaire, un ordinateur pour 11 élèves.
Ces chiffres sont très satisfaisants, comparés au reste de l’Europe, mais nous devons devenir meilleurs encore et plus rapides surtout. Après le Conseil européen de Feira au mois de juin, le gouvernement présentera un plan d’action national détaillé, qui aura pour but de concrétiser les décisions E-européennes de Lisbonne. Le ministre délégué à la Communication, Monsieur François Biltgen, devra faire de ce plan d’action un programme d’action - E-Luxembourg - et le piloter en tant que responsable. Il aura à sa disposition une commission nationale pour la société de l’information dans laquelle le ministère d’Etat fonctionnera en tant que ministère-pilote et dans laquelle les ministères de l’Economie, de la Recherche et de l’Enseignement supérieur, de la Fonction publique, de l’Education nationale et du Travail seront représentés.
Le budget de l’année 2001 verra ses moyens financiers considérablement augmentés, afin de permettre une accélération de l’avancement dans la société de l’information.
- En attendant le plan et le programme E-Luxembourg, nous pouvons dès à présent donner quelques indications sur les démarches à suivre.S’il est vrai que nous disposons aujourd’hui d’un taux d’équipement technologique assez élevé, il n’en est pas moins vrai que celui-ci doit continuer à évoluer plus encore vers le haut. Les Luxembourgeois surfent, mais ils ne sont pas encore assez nombreux à surfer, et surtout, ils ne surfent pas aussi longtemps que les autres. Les Américains surfent jusqu’à 44 fois plus longtemps que les Luxembourgeois. Cela vient du fait que chez nous, celui qui veut utiliser de manière intensive les services Internet est confronté à des coûts qui, comparés au niveau international sont bien plus élevés. Ces coûts sont particulièrement élevés pour des ménages à faibles revenus. Les prix doivent baisser pour que nous ayons plus d’internautes, pour que ces derniers restent plus longtemps connectés, pour que dans les écoles on puisse surfer moins cher, pour que nous n’ayons pas un prolétariat de l’Internet sans raccordement à ce moyen de communication. Le gouvernement y travaille
- Les jeunes grandissent avec ces nouvelles technologies. Nous et ceux qui sont plus âgés sommes dépassés par l’Internet dans l’emploi ou dans la retraite. Le gouvernement créera et favorisera des initiatives à l’attention des moins jeunes, afin de les familiariser avec les nouvelles technologies de la communication. L’ordinateur et Internet doivent trouver leur place dans chaque ménage, mais aussi dans les maisons de repos. Ils devront être présents dans tous les lieux de rencontre.
- L’Internet fait désormais partie intégrante de notre vie quotidienne. Il doit être utilisé de manière conséquente, afin de faciliter la vie de tous les jours, et pas seulement à ceux qui éprouvent des problèmes pour se déplacer. D’ici la fin de l’an 2003, la majeure partie de l’Administration devra fonctionner “en ligne”. Des télé-procédures internes et externes seront mises en place pour le bien-être du citoyen et de l’Administration. A ces fins, le gouvernement présentera, dans les mois à venir, un plan d’action sectoriel.
- Bientôt, de nouvelles technologies à bande large seront disponibles. Nous voulons résolument et rapidement développer l’introduction de réseaux à bande large sur la base des normes UMTS. Au cours de ce mois encore, nous allons décider si nous allons vendre aux enchères la licence pour le téléphone mobile de la troisième génération ou, et cela est plus probable, si nous allons l’accorder sur la base d’un “concours de beauté” fondé sur la redevance à payer.
- Nous devons adapter nos outils de régulation aux nouvelles technologies. Le projet de loi sur le commerce électronique donnera aux transactions électroniques les moyens juridiques pour que celles-ci puissent mieux se développer. Nous serions heureux si ce projet de loi, tout comme celui sur les services postaux pouvaient être votés très rapidement.
- Le cadre réglementaire pour les télécommunications sera réorienté et les procédures administratives en vue de l’obtention d’une licence et en matière d’établissement seront facilitées. Le gouvernement prendra des mesures réglementaires, afin que le consommateur soit protégé contre les nouveaux risques du commerce électronique.
- La société de l’information offre plus de moyens d’expression et de communication, proposant ainsi un espace de liberté agrandi. Ces moyens ont donc besoin d’un encadrement juridique, afin que les opportunités puissent être saisies et les risques endigués.
- Dans quelques semaines, une nouvelle loi sur la protection des données passera à la Chambre des députés. Son but est de faciliter la circulation des données tout en protégeant la vie privée.
- La nouvelle loi sur la presse prendra en compte les nouvelles formes de communication et, notamment, celle de l’Internet. Nous voulons mettre un terme (ce qui n’est pas simple) aux abus sur Internet, pour autant que ceux-ci aient leur base au Luxembourg.
- L’accès aux données non confidentielles que détient l’Etat sera facilité
- La société de l’information et l’école sont un couple dont nous devons continuer à nous occuper. Aujourd’hui, si nous disposons d’un ordinateur pour 11 élèves, nous devons arriver à en avoir un pour 8 élèves. Les investissement dans les réseaux Restena seront amplifiés, afin d’être prêts quand les programmes européens décidés à Lisbonne démarreront. Les équipements dans les écoles primaires doivent être complétés. S’il n’y a pas d’autres moyens, l’Etat devra aider financièrement les communes. A l’école, personne ne devra être victime d’un l’isolement technologique. C’est pourquoi il est tout à fait normal qu’un programme en faveur de l’enseignement différencié soit développé.
Les points les plus importants à l’école sont la formation et la formation continue des enseignants. Les enseignants devront pratiquement disposer d’un “permis de conduire Internet” sinon les élèves n’apprendront jamais à conduire. Beaucoup d’enseignants se sont adaptés en se formant eux-mêmes. Ils ont entraîné leurs élèves et les ont convertis. Aujourd’hui, ce dont nous avons besoin, c’est d’un nouveau système général.
Il ne faut cependant pas oublier que l’école, à côté de la préparation à la vie professionnelle, a encore d’autres vocations. L’école n’a pas pour but de produire des athlètes de haut niveau technologique qui ne se retrouveront pas dans la vie. Son but est de former les êtres humains et les citoyens pour que la vie de la société leur soit familière et qu’ils puissent ainsi se débrouiller sur le marché de l’emploi. Il ne faut pas attendre de la société de l’information plus qu’elle ne saura nous donner. Nous ne devons pas la manquer, mais ne pas la surestimer non plus.
Les nouvelles technologies et surtout les nouvelles technologies de l’information créent des emplois et rendent la croissance économique plus durable. A elles seules, elles ne pourront cependant pas résoudre nos problèmes de marché de l’emploi. Une politique de l’emploi active reste nécessaire, surtout en faveur des chômeurs peu qualifiés. La technologie de l’information doit être ouverte à tous, sans laisser pour compte ceux pour lesquels elle représente un mur insurmontable, ou tout du moins encore insurmontable à l’heure actuelle.
La société de l’information nous rendra plus riches en informations. A nous de faire attention à ce qu’elle ne nous rende pas plus pauvres en sentiments et en expérience. Aucune information, si facile à trouver soit-elle, ne remplacera jamais une discussion calme entre êtres humains. Un poème à l’écran sonnera toujours différemment d’un poème dans un livre. On peut envoyer une lettre d’amour par courrier électronique, mais son impact sera toujours plus grand, si on l’écrit de façon manuscrite.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Il n’y a pas que la société de l’information qui fait partie d’une évolution durable, d’autres politiques aussi en font partie.
- En premier lieu, il nous faut conserver nos infrastructures à un niveau élevé. Il n’existe pas d’économie forte sans infrastructures performantes. C’est pourquoi, le Luxembourg veut aussi rester à l’avenir le pays européen avec le plus haut pourcentage du PIB en investissements publics. Cela devient évident, si l’on voit que les plus-values de l’exercice budgétaire 99 seront principalement versées, avec l’accord du Parlement, dans les fonds d’investissement publics. On peut le vérifier dans le programme gouvernemental sous les rubriques “travaux publics “ et “bâtiments publics”. Cela devient évident si l’on réfléchit aux investissements dans le domaine de la culture avec l’Abbaye de Neumünster, le musée Pei, les rotondes, la salle de concert du Kirchberg et la salle de musique rock à Belval, et ce ne sont ici que des exemples. On peut le constater aussi avec les projets de nouvelles écoles. 4 à 6 lycées vont être construits. Nous en proposerons bientôt les emplacements géographiques.
- Un développement durable de l’économie et du pays nécessite la continuation de notre politique agricole. Le plan pour le développement rural existe et il démontre que nos villages ne sont pas oubliés. L’indemnité compensatoire sera augmentée l’année prochaine. Une nouvelle école agricole sera construite.
- Si on veut se développer durablement, il faut également s’adonner de manière soutenue à la recherche. Le gouvernement s’est donné pour but de relever le budget en faveur de la recherche au cours de cette période législative à un niveau de 0,3% du PIB. Le gouvernement choisira parmi les 40 programmes de recherche déposés auprès du Fonds national pour la Recherche, trois programmes particulièrement intéressants. Des projets ont été présentés pour un montant total de plus de 4 milliards de francs. La recherche prend son envol.
- Dans le domaine de l’écologie il n’est nul besoin de motiver la nécessité d’un développement durable. Le programme en vue de la réduction des émissions de CO2 est en cours, sa stratégie a été présentée il y a quelques jours. Le plan national pour un développement durable sera discuté lors d’un débat d’orientation au Parlement. Le public sera impliqué dans la préparation d’une loi sur le développement durable. Le Conseil d’Etat discutera, à la fin de l’automne, du plan modifié sur la gestion des déchets. Avant la fin de l’année, la transposition de la directive “Habitat” sera mise sur le chemin des instances.
- Le transport joue un rôle prédominant dans la politique infrastructurelle. Le gouvernement, ensemble avec les responsables de la ville de Luxembourg, tirera bientôt les conclusions de l’étude sur le BTB qui ne devrait pas tarder à être terminée. Je voudrais profiter de cette occasion pour dire haut et fort que l’alternative au BTB ne peut être la non-construction de celui-ci. Si nous ne voulons pas du BTB, et si nous ne voulons pas en même temps connaître une saturation malsaine au niveau du trafic, alors il nous faut un nouveau concept. Nous ne déciderons rien sans l’accord de la Ville de Luxembourg. Mais la Ville devra le moment venu dire ce qu’elle veut, et ce en tenant compte de ses problèmes, mais aussi des problèmes du reste du pays. La Ville est importante, mais la Ville n’est pas le pays. C’est seulement ensemble, et l’un pour l’autre que nous pourrons avancer et que nous ne resterons pas coincés dans les embouteillages.
- Bientôt, le projet de loi sur la grande infrastructure ferroviaire sera finalisé. Coût: 12 milliards ! Ses objectifs: améliorer la sécurité sur le réseau ferroviaire, augmenter la capacité du trafic.
- Il y a encore un autre point dont nous devons nous occuper durablement: l’image de notre pays à l’étranger. Nous ne sommes pas seulement une place financière. Nous en sommes bien sûr une, mais nous sommes plus que cela. Nous sommes une place financière qui offre une grande palette de produits financiers. Nous devons la présenter à l’étranger, afin que l’idée préconçue que notre place n’est qu’un centre de private-banking disparaisse. Nous sommes une place performante au niveau de l’industrie, de l’information et de la communication. Nous savons que la SES est le premier opérateur de satellites en Europe et le troisième de par le monde, nous savons que la CLT-UFA est le plus grand groupe médiatique du continent, nous savons que l’ARBED est un des plus grands intervenants sur le marché de l’acier, nous savons que la Cargolux est un des transporteurs de fret couronné du plus de succès, nous le savons. Nous devons l’inculquer aux autres. Cela coûte de l’argent, cela nécessite du personnel, mais il est primordial que les autres nous voient tels que nous sommes réellement.
- Le Luxembourg est un pays sans cycle universitaire complet. Une université complète en toutes disciplines ne représenterait pas un apport à un développement durable. Notre pays se développe mieux si les jeunes Luxembourgeois apprennent à connaître le monde. Tant que dans nos entreprises il y aura du personnel qui aura effectué ses études en Allemagne, en France, en Angleterre, aux Etats-Unis, ou en Suisse, en Belgique ou en Autriche, nous serons meilleurs que les autres, car nous serons plus internationaux qu’eux. A l’époque de la globalisation et de l’internationalisation, l’aveuglement académique de nos entreprises serait néfaste. Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas rajouter une deuxième année au premier cycle. Cela ne veut également pas dire que le troisième cycle ne doit pas être développé, afin d’apporter plus d’internationalisme à notre place universitaire. Après le DESS sur le contentieux communautaire, après le DUT sur le management social, il importe maintenant de créer un troisième cycle dans les domaines des médias, de la communication, de la gestion d’entreprise et de l’entreprenariat. Les préparatifs ont bien débuté. Les premières discussions ont eu lieu sur l’ouverture d’un troisième cycle dans le domaine de la statistique.
- Comme nous l’avons annoncé dans le programme gouvernemental, de nouvelles institutions devraient s’établir au Luxembourg. Deux projets concrets devraient permettre au Luxembourg de se placer d’une manière plus visible sur la carte académique européenne. La “European University Foundation” vise la création d’une fondation universitaire à Luxembourg, fondation qui regrouperait à Luxembourg des universités de 5 à 6 pays européens. Les étudiants de ces universités sont obligés d’étudier dans plusieurs pays européens. En automne de cette année, une conférence ministérielle devrait lancer cette forme innovatrice de coopération. Le projet Euro-Uni vise à la création d’une université virtuelle à Luxembourg. L’utilisation de technologies de pointe, notamment du satellite, devrait permettre aux étudiants, plus particulièrement à ceux de la Grande-Région, de suivre des cycles universitaires complets sur Internet. Un projet pilote est prévu pour 2001. Le développement du troisième cycle ne pourra réussir que si ceux qui viennent chez nous, c’est-à-dire des étudiants de toute l’Europe, trouvent assez de logements à Luxembourg. Nous devons les mettre à leur disposition.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
On ne peut discuter du développement économique et de sa consistance sans évoquer l’évolution de la place financière.
La place financière joue un rôle prépondérant dans l’économie luxembourgeoise. Nous ne dépendons pas d’elle comme nous dépendions à l’époque de la métallurgie. Nous ne dépendons pas de la place financière à un point tel que certains de ses acteurs ou de ses animateurs le pensent. Malgré cela, nous sommes plus dépendants d’elle que de raison. Certaines voix qui crient à un nouveau monolithisme n’ont pas tout à fait tort.
Une petite économie supporte mal ce genre de “poids lourds”, qui risquent de tout étouffer sous eux. Voilà pourquoi la politique gouvernementale n’est pas de laisser grandir indéfiniment la place financière. Nous disposons d’une des plus grandes places financières mondiales et nous voulons la garder. Si nous arrivons à réaliser cela, nous aurons réussi. Pour conserver cette place financière, nous avons besoin de trois choses qui sont en train d’être réalisées.
- Une place financière digne de ce nom et qui veut subsister doit offrir une palette de produits diversifiés. Ceux qui croient qu’une surconcentration de services à l’attention de la clientèle privée est la base de toute politique de place se trompent fondamentalement. La politique luxembourgeoise ne fera pas cette erreur. Elle misera plutôt sur une logique de consolidation de la place par une diversification intelligente. Les lois sur les fonds de pension, les lettres de gage et, bientôt, sur le commerce électronique en témoignent. La place financière luxembourgeoise doit être leader en matière de produits, un leader plus imaginatif, plus rapide et plus flexible que ses concurrents.
- Notre place financière, si elle veut s’affirmer, doit être une place financière sérieuse et propre. Elle l’est, et nous devons le savoir, puisque, régulièrement, on essaie de faire passer la place financière pour un bassin où se rencontrent les criminels et ceux qui procèdent au blanchiment d’argent, en essayant de la discréditer. Nous nous devons d’être irréprochables sur le plan de la lutte contre la criminalité économique et financière.
Voilà pourquoi nous avons renforcé la loi de 1998 sur le blanchiment d’argent et élargi son champ d’action aux domaines de la criminalité, du trafic d’armes, de la corruption et du proxénétisme.
Voilà pourquoi, en 1999, nous avons eu une loi contraignante sur la domiciliation des sociétés, qui devrait mettre fin aux activités illégales et frauduleuses en marge du secteur financier.
Voilà pourquoi le Gouvernement a adopté un projet de loi qui approuve la convention du Conseil européen sur le blanchiment, le dépistage et la confiscation du produit de crimes, l’idée étant que les criminels ne puissent pas tirer profit au niveau économique de leurs activités illégales. Voilà pourquoi, par une loi, nous voulons interdire aux banques de financer des opérations d’armes. Que les autres qui nous montrent du doigt en fassent autant. Voilà pourquoi nous voudrions que la Chambre des députés approuve le projet de loi sur l’entraide pénale internationale, qui devrait nous permettre une évacuation plus rapide des commissions rogatoires internationales. Voilà un point où nous sommes sous le feu de la critique et duquel nous devons nous sortir. Voilà pourquoi nous voulons ratifier le protocole additionnel sur l’escroquerie fiscale du Conseil européen sur l’entraide judiciaire pénale. Voilà pourquoi nous voulons augmenter les effectifs des tribunaux et de la police, afin qu’ils deviennent plus efficaces dans la lutte contre la criminalité économique et financière. Au tribunal du district de Luxembourg, seront ajoutés deux juges d’instruction dans une chambre d’accusation. Cette initiative, comme les précédentes, démontre bien que sur la place financière les criminels n’auront plus aucune chance.
• La place financière, si elle veut s’imposer, doit supporter les efforts du gouvernement tendant à arriver à un compromis acceptable en matière d’harmonisation fiscale. Après la réalisation du marché intérieur et après l’entrée dans l’Union monétaire, la question fiscale en Europe se pose différemment. Voilà pourquoi le précédent gouvernement a adopté en 1997, sous sa propre présidence, un paquet fiscal auquel adhère complètement le gouvernement actuel. Nous ne permettrons pas que ce paquet soit ouvert et scindé en des parties éparpillées dans le temps. Nous insistons sur la réalisation d’un code de bonne conduite vérifiable contre la concurrence fiscale déloyale. Nous insistons sur le fait que, en matière de précompte mobilier, les pays aient le choix entre un échange d’informations et une retenue à la source, que nous préférerions sous forme compensatoire. Ce soi-disant modèle de coexistence n’est pour nous et pour certains autres pas encore enterré. Nous réprouvons dans sa forme actuelle la proposition anglaise visant à un échange d’informations ainsi qu’à la levée à terme du secret bancaire. Nous avons proposé en 1997 ce modèle de coexistence, parce que nous ne voulions pas l’abolition pure et dure du secret bancaire. Il n’y a pas de raison pour que trois ans plus tard nous révisions notre avis à ce sujet sous la pression anglaise. Il est vrai qu’il existe maints arguments contre le secret bancaire. S’il ne sert qu’à la fraude fiscale ainsi qu’à des transactions criminelles, il s’autodétruira. Mais il existe aussi maints arguments en faveur du secret bancaire. Nous voulons le conserver pour de bonnes raisons. Nous voulons le conserver tant que nos concurrents le maintiendront aussi. Pour le reste, je plaiderai pour une prise de position plus souveraine dans cette matière, car je pense qu’il ne faut pas considérer chaque fois les démarches visant à son abolition comme une offense nationale. Nous voulons une place financière sérieuse, comme nous voulons un secret bancaire raisonnable. Mais notre place financière vaut bien plus que son secret bancaire. Tout comme le Luxembourg d’ailleurs.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,Notre économie déborde de force et croît de manière robuste. Les finances de notre Etat sont en parfaite santé. Nous avons une dette publique faible et pas de déficit budgétaire. L’Etat ne dispose pas de trop d’argent, mais d’assez d’argent pour financer les grands investissements qui nous guettent.
Nous pouvons être contents de l’état de notre économie et de nos finances. Nous pouvons être contents de nous, mais pas au point de nous surestimer ni de nous dépasser. Quelques mauvaises décisions suffisent à remettre tout en jeu.
Cependant, pouvons-nous être tout aussi satisfaits de l’état général de notre pays, comme nous le sommes de nos finances et de notre économie? Je ne pense pas. Je pense plutôt que la politique est faite de plus de choses que d’économie et de finances. Le social est tout aussi important.
Rien ne va sans une économie performante et sans des finances saines, mais le reste ne va pas tout seul. La croissance économique dans ses résultats est neutre. C’est à la politique de mettre en forme et d’arranger ces résultats. C’est la politique, la politique de l’Etat, du Parlement, des partenaires sociaux, des groupes d’intérêts, c’est la politique qui est responsable de ce qui, en fin de compte, ressortira de l’économie et des finances pour les êtres humains.
L’étude exclusive de l’économie et des finances n’est qu’une vue sommaire de la politique. Un pays ne se développe calmement et correctement que si le social croît de façon durable aussi. Grandir durablement au niveau social revient à remédier aux déficits sociaux existants de façon à ce que, demain, de nouveaux déficits sociaux et financiers ne fassent pas leur apparition.
L’Etat ne remplit pas son devoir s’il reste socialement inactif. Il fait mal son devoir s’il est socialement hyperactif. Il le fait bien lorsqu’il maintient le corps social en mouvement avec humanité et bon sens, sans le surmener. L’Etat social actif est, à longue échéance, tributaire d’une certaine durabilité. Si aujourd’hui on peut réaliser de gros efforts (alors que l’on est assez fort pour le faire), des efforts que l’on ne pourra conserver que si demain on doit se surmener, alors, à longue échéance on s’essouffle et, enfin, on s’écroule.
La politique sociale est un marathon pour lequel il faut économiser ses forces. Elle n’est pas un sprint, un 100 mètres, où l’état physique après 20 kilomètres ne nous intéresse pas.
Puisque pour le moment nous sommes en pleine forme, nous pouvons facilement répondre à toutes les revendications en matière de retraites qui nous sont présentées. Nous pourrions soutenir un rythme qui, sur les premiers 100 mètres ferait sursauter le stade social de joie. Mais que valent les fleurs que reçoit un athlète après 100 mètres, alors qu’il doit encore parcourir plus de 20 kilomètres, qu’il ressent de plus en plus la fatigue au point de ralentir, voire de s’asseoir, que le public rentre chez lui et que les fleurs commencent à faner ? Qu’est-ce qu’un athlète, qu’est-ce que le public avec des fleurs qui ne se conserveront que jusqu’aux prochaines élections ? Rien ! Et voilà pourquoi, en matière de pensions, nous en resterons à ce qui a été défini dans la déclaration gouvernementale: nous pallierons rapidement les véritables déficits sociaux, mais nous ne créerons pas des déficits financiers à longue échéance. Les retraites et les pensions seront ajustées au 1er janvier 2001. Après étude, de larges améliorations ponctuelles seront faites au 1er janvier 2002.
Et, si dans un an, nous ouvrons le dossier des retraites une nouvelle fois, il serait bon que nous le fassions de façon responsable et sans démagogie stupide. La politique et l’atmosphère dans le pays ne profitent pas de l’impression que, dans ce pays, nous ne connaissons qu’un seul problème: les retraites. Les retraites soulèvent des problèmes, mais elles ne sont pas un problème. Le conflit au niveau des retraites concerne toute notre société, les syndicats, les groupes socio-professionnels. Il existe dans ce pays autant de spécialistes en matière de pensions qu’il existe d’habitants. Il en existe dans tous les partis politiques, dans les uns plus que dans les autres, mais chacun en a assez. Cependant, dans pratiquement aucun parti, il n’existe un consensus au niveau des pensions. Soyons honnêtes, nous nous donnons seulement l’air que tous les membres du parti chrétien social adoptent la ligne du ce parti, comme si tous les membres du parti socialiste adoptaient la ligne de parti socialiste, comme si tous les membres du parti démocratique adoptaient la ligne du parti démocratique, comme si tous les membres du parti écologique adoptaient la ligne du parti écologique, comme si tous les membres de l’ADR adoptaient la ligne de l’ADR. Nous savons bien que c’est tout à fait différent. Mais nous continuons à nous battre comme s’il en était ainsi. Parfois, on a même l’impression que le conflit autour des pensions est plus important que la question en elle-même sur les pensions. Nous pouvons continuer ainsi, mais je pense qu’il ne le faut pas. Je propose que les partis se réunissent autour d’une table pour discuter de ce dossier et trouver un consensus acceptable par tous les partis. En tant que partis politiques, nous devons cela à notre avenir et nous devons prouver que nous pouvons nous réunir pour ne pas nous combattre plus tard, pour le mal du pays et de ses habitants.
Les discussions que nous devrions avoir ensemble, les analyses que nous devrions faire ensemble les solutions que nous devrions trouver ensemble devraient se concentrer sur la question du financement à long terme des retraites, même si de prime abord, cela n’y paraît pas. Une question que nous devons aborder est celle de la relation entre le financement des retraites et le taux d’emploi.
Année après année, nous créons de nouveaux emplois. Nous ne disposons pas d’assez de main-d’oeuvre pour occuper ces nouveaux emplois. Voilà pourquoi nous sommes obligés d’employer de plus en plus de frontaliers dans notre économie. En 1998, ils ont représenté 33% et, en 1999 34,3% de notre emploi. Le fait que nous donnions un emploi à plus de 81 000 frontaliers est bon pour le marché de l’emploi de la Grande-Région, une Grande-Région que nous voulons plus active et dont nous profitons également. Que le taux d’emploi purement national, c’est-à-dire le taux d’emploi des résidents en âge de travailler, soit bas, n’est à terme pas sain pour la stabilité de notre régime de retraites. Les frontaliers cotisent bien dans nos caisses de pensions, mais une partie de plus en plus importante de nos retraites sont versées à l’étranger. Le pouvoir d’achat qui en résulte est investi là et pas chez nous. Cela peut devenir un problème sérieux.
Il n’est donc pas anormal que le Conseil des ministres européen, la Commission européenne et d’autres encore ne cessent d’attirer notre attention sur ce risque et nous enjoignent de relever le taux d’emploi national et de procéder à ce qu’ils appellent les réformes incontournables dans les régimes de pensions et de retraites qui deviennent nécessaires, si ce n’est déjà par le vieillissement de la population.
A terme, notre taux d’emploi national est trop bas.
Même si ce taux a augmenté de 60,1% en 1998 à 61,6% en 1999, il reste trop bas.
- Il est tout spécialement bas chez les hommes de plus de 50 ans, qui, aujourd’hui, prennent leur retraite sensiblement plus tôt que par le passé et qu’ailleurs. On peut exprimer cela différemment: les hommes qui ont une espérance de vie de plus en plus longue prennent leur retraite de plus en plus tôt. Nous devons y remédier.
Nous devons y remédier, mais avec tact.
Le but n’est pas de forcer les ouvriers et employés malades et invalides à travailler. Cela ne leur apporterait rien, tout comme cela n’amènerait rien ni aux entreprises ni à notre pays.
Le but est bien de prendre des mesures pour que les hommes qui peuvent encore travailler puissent encore le faire.
Il existe, dans notre société, une attitude carrément perverse. Nous ne donnons plus leur chance à ceux qui ne sont plus si jeunes, qui ne sont plus à 100% en bonne santé, qui sont devenus plus lents et qui n’ont plus la possibilité de s’adapter rapidement aux changements dans l’entreprise. C’est une honte d’être mûr pour la retraite à 52-53 ans, comme si ces personnes ne représentaient plus rien, comme si elles ne savaient plus rien. C’est un véritable scandale que certaines entreprises essaient de “sortir” les gens de plus de 50 ans pour les remplacer par des plus jeunes, moins chers. Ce scandale en amène un autre: le nombre de ceux qui, à 52-53 ans font tout pour pouvoir arrêter de travailler, ne cesse d’augmenter. On peut parfois le comprendre, car la vie d’une entreprise évolue rapidement et les conditions sont parfois difficilement supportables pour des gens qui ne fonctionnent plus à plein régime. Malgré tout cela, j’ai toujours l’impression que nous avons affaire ici à un changement de mentalité malsain: le respect envers celui qui ne sait plus tout faire vite et bien disparaît, et avec lui, le respect de soi, propre à celui qui sait encore tout faire mais à qui on ne laisse plus rien faire. Nous sommes en train de devenir une société sans sentiments, une société où ne comptent que le bénéfice et la performance optimale, mais où l’individu ne compte plus. Nous devons arrêter ce mouvement vers l’impitoyable. Pour les gens concernés, pour les problèmes de retraites que ces durcissements imprévisibles de la morale engendrent. Voilà pourquoi nous devons adapter la législation sur l’invalidité pour qu’enfin, le malade puisse prendre sa retraite, que celui en bonne santé puisse travailler et que celui qui n’est plus aussi performant puisse travailler différemment. Voilà pourquoi nous devons multiplier nos efforts en vue d’une formation continue à vie, de manière à rendre les gens plus “employables”. On parle beaucoup de la nouvelle économie. Personne ne parle du nouveau marché de l’emploi. Dans ce nouveau marché de l’emploi circulent des gens qui doivent apprendre à s’adapter. Le temps où l’on prenait sa retraite dans l’entreprise dans laquelle on avait débuté est révolu. Nous ne pouvons laisser les gens livrés à eux-mêmes sur ce chemin du nouveau marché de l’emploi.
- Le taux d’emploi national n’est pas trop faible seulement chez les hommes de plus de 50 ans. Le taux d’emploi national des femmes en âge de travailler l’est également. Ce taux, avec 48,7% en 1999, était le plus faible d’Europe. Fort heureusement, ce taux a également connu une hausse non négligeable de 5,1 depuis 1996. La politique fiscale, une politique active en faveur des femmes, de meilleures infrastructures, tout comme un revirement de mentalité chez les patrons, y ont contribué. Cette évolution doit continuer, car l’avenir de nos systèmes de retraites est d’autant plus assuré que le chiffre de ceux qui cotisent à Luxembourg et qui consommeront lors de leur retraite à Luxembourg est élevé.
Sur ce point, il y a lieu de faire fi des mauvaises impressions.
Ce n’est pas le rôle de la politique ni d’ailleurs son désir de forcer les femmes et les mères à entrer dans nos entreprises. Les femmes qui ne travaillent pas à l’extérieur, mais à la maison, rendent également un grand service à la collectivité. Le travail ménager n’est pas une activité de loisirs, c’est pourquoi, d’ailleurs, il est appelé travail ménager. Si nous devions les payer, nous serions mal en point. Il s’agit là d’un travail non rémunéré mais qui n’est toutefois pas moins important que le travail qui est rétribué.
La question de savoir si dans un ménage, les deux partenaires doivent travailler à l’extérieur ou si l’un d’entre eux doit rester au foyer n’est pas du ressort de l’Etat. C’est le ménage qui doit en décider, pas l’Etat.
Cela ne veut cependant pas dire que l’Etat doit s’abstenir complètement. Il doit faire face aux réalités. Il existe des ménages où un partenaire désire rester au foyer parce qu’il croit ainsi pouvoir mieux répondre à son devoir d’éducation. Cette attitude ne doit pas être commentée. Il faut tout simplement la respecter. Il y des ménages où un salaire suffit et où un deuxième est inutile. Ces ménages se suffisent à eux-mêmes, ils n’ont pas besoin de l’Etat. Il existe des ménages où un salaire ne suffit pas, où il en faut un deuxième. C’est ici que l’Etat doit devenir actif. Il existe des ménages où un partenaire veut interrompre sa carrière professionnelle pour s’occuper de ses enfants et, ensuite, reprendre la vie active. Ces ménages existent et il y en a de plus en plus. C’est ici que l’Etat doit intervenir afin que cette façon de vivre différente soit possible. Et puis, il y a des femmes qui veulent être indépendantes, qui ne veulent pas dépendre matériellement de quelqu’un, qui tiennent à leur autonomie dans leur travail et en-dehors aussi. Cette option, qui s’avère être souvent la bonne dans la vie, doit être accompagnée par des mesures étatiques.
Ces façons de vivre, que l’Etat ne peut et ne doit pas contrôler, nécessitent de multiples actions de la part de l’Etat. J’en prends ici une que nous avons commencée, mais que nous devons encore prolonger de manière plus conséquente encore.
Les familles avec enfants où les deux partenaires travaillent à l’extérieur sont souvent confrontées au problème de la conciliation de leur vie de famille et de leur travail.
Les rythmes scolaires et professionnels ne s’accordent que très rarement. Ce n’est pourtant pas à cause de cela mais aussi pour cela que Madame la ministre de l’Education a lancé une réflexion sur les rythmes scolaires. Elle a annoncé une initiative dans ce sens et a lancé un débat dans la société. Je n’ai pas assez de temps pour approfondir ce débat dans le cadre de cette déclaration. La Ministre de l’Education l’a précisé: il ne s’agit pas seulement du samedi chômé. Il s’agit plus d’adapter les rythmes scolaires, de manière à satisfaire une large majorité de parents. Il s’agit également des horaires scolaires dans la semaine et dans l’année, donc de la problématique des vacances scolaires. Il en va, et malheureusement cela se perd un peu dans le débat actuel, des contenus et de la qualité de l’enseignement. Voilà pourquoi les méthodes d’apprentissage de la lecture et de l’écriture à l’école primaire seront revues, le contenu et les infrastructures du régime préparatoire devront être adaptés à l’hétérogénéité des élèves, les branches administratives et commerciales du secondaire technique seront réformées, l’apprentissage technique sera revu et constamment adapté, une réforme du cycle supérieur du secondaire sera mise sur pied. A cela, les rythmes scolaires et le samedi chômé, il convient cependant de ne pas oublier l’élément principal: les enfants. Nous ne devons pas organiser la société sans ni contre les enfants. C’est pour eux que nous devons le faire. Ainsi, il doit être clair que les nouveaux rythmes scolaires doivent permettre aux familles et aux enfants de passer l’heure du repas ensemble, pour autant que les distances le permettent. L’école ne doit pas se mettre entre les générations, elle ne doit pas empiéter sur le temps que les familles passent ensemble alors que celles-ci veulent justement être plus souvent réunies.
Pour permettre aux familles avec enfants qui exercent une activité professionnelle de combiner vie professionnelle et vie familiale, nous devons accélérer la mise à disposition de structures d’accueil lorsque les enfants ne peuvent être au sein de leur famille. Le terme de structure d’accueil est mauvais. Les enfants ne doivent pas seulement être accueillis quelque part. Nous devons créer à leur attention des endroits, un espace où ils pourront vivre et être actifs.
L’Education nationale reste seule responsable des cantines dans les établissements secondaires; la ministre de la Famille deviendra responsable pour l’accueil des enfants de moins de 13 ans.
- 3.700 places sont aujourd’hui disponibles pour les 28.500 enfants de 0 à 4 ans. Cela correspond à un taux de 13 %. Sur la base des listes d’attente et de certains changements à venir, nous estimons un besoin supplémentaire de 1.100 places. Celles-ci doivent être créées dans les cinq prochaines années. Ainsi le taux atteindra les 17%.
Trois objectifs motivent le gouvernement pour mettre à disposition assez de places pour les enfants de 0 à 4 ans.
L'offre existante doit en premier lieu être consolidée. De plus en plus de gestionnaires demandent à l'Etat de reprendre leur crèche. Il faut y réfléchir à deux fois car si on le fait, il serait plus sage de charger un établissement public ou un établissement privé organisé en établissement public de la gestion des crèches.
Pour répondre aux besoins des familles à revenus faibles, l’Etat se propose de louer un cinquième des places disponibles dans les crèches privées et de les mettre à la disposition de ces familles. Le coût pour l’Etat s’élèverait à 25 millions par an.
Nous n’y arriverons pas sans l’aide des communes. Elles doivent créer les infrastructures nécessaires et les payer. L’Etat participera aux frais de fonctionnement. On peut même se poser la question de savoir s’il ne serait pas utile de forcer les communes à offrir des crèches. Les modalités pour cela doivent être discutées dans le calme. 1 100 places équivalent à un investissement de 1,1 milliard et à la création de 270 emplois.
- Pour les enfants de 4 à 13 ans, nous avons besoin de places où ils puissent vivre et jouer après les heures de cours. 3.113 places pour les 40.500 enfants de cette catégorie d’âge sont disponibles. Cela correspond à un taux de 8%. Les rythmes scolaires modifiés réduiront les besoins des familles où un partenaire travaille à temps partiel. Nos sondages et nos réflexions nous amènent cependant à penser que nous avons encore besoin de 3 à 5.000 places supplémentaires.
Ici aussi, nous avons deux objectifs précis.
L’accueil des enfants en dehors des heures de cours sera, à l’avenir, pris en charge uniquement par le ministère de la Famille. L’accueil des enfants ne sera pas gratuit et se fera en fonction du revenu des parents. Si les parents disposent d’un bon salaire, ils devront prendre en charge la totalité de ces frais, ce qui est normal.
Nous avons également besoin des communes pour l’accueil des enfants en âge scolaire. Notre intention n’est pas de forcer les communes à y participer, mais nous les y inciterons plutôt. Nous voulons subventionner les infrastructures qu’elles mettront à disposition à raison de 50%, avec un maximum de 400.000 francs par place. Coût maximal pour l’Etat: 2 milliards de francs. Nous devrons discuter du partage des frais de fonctionnement. Si l’Etat prenait en charge 50% de ces frais, cela aurait une répercussion d’un demi milliard sur le budget de l’Etat. En réalisant 5.000 places, nous créerions 770 nouveaux emplois.
Pour résumer, on peut dire que cette politique en faveur des enfants de moins de 13 ans coûte de l’argent, mais qu’elle rapporte aussi quelque chose. Elle apportera plus de sérénité dans les familles. Elle aura pour conséquence une augmentation du taux d’emploi national et, enfin, elle créera 1.040 nouveau emplois, dont un grand nombre dans le secteur socio-éducatif.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Nous venons de parler longtemps de places pour les enfants. Voilà pourquoi il serait peut-être utile d’évoquer ici les habitations et la construction. Pour cela aussi, il nous faut un développement durable, car n’oublions pas que le logement est un droit pour chaque citoyen.
Notre population augmente en moyenne de 1,34% par an ce qui fera également augmenter la demande pour de nouvelles habitations, demande à laquelle nous ne pouvons répondre à l’heure actuelle. C’est pour cette raison que le gouvernement veut continuer à développer ses efforts dans le domaine de la construction d’habitations familiales.
Rien qu’au cours de l’an 2000, le ministre du Logement aidera les personnes qui construisent, achètent ou améliorent leur habitation, à raison de 2,3 milliards.
Le montant qui pourra être subventionné sera relevé, en ce qui concerne les subventions d’intérêts, de 4 à 5 et, en ce qui concerne les bonifications d’intérêts, de 5 à 6 millions.
Le septième programme pour le logement sera complété à brève échéance et aura couvert 213 projets et 5.243 logements lorsqu’il arrivera à son terme.
Les taux de subvention pour l’achat d’une maison seront relevés au niveau des taux accordés lors de la construction d’un nouveau logement.
Le Fonds de Logement a comme projet de créer à Cessange une surface de 14,75 hectares, à des fins d’habitation.
Dans les prochaines semaines, le gouvernement étudiera intensément l’avis du Conseil social et économique sur la construction familiale, et en tirera les conséquences nécessaires.
Nous voulons également créer des emplacements pour des habitations sur les friches industrielles du Sud. Nous voulons attaquer de front la reconversion des friches industrielles, ce qui représente une chance unique pour donner un coup de pouce à l’aménagement du territoire dans le sud du pays. Si nous “meublons” les friches industrielles, alors des emplacements pour des entreprises, des administrations publiques, des sociétés de services privées, des habitations, des infrastructures pour les loisirs et la culture devront les occuper tout en respectant la qualité de vie et l’environnement. Nous n’implanterons pas uniquement une salle de concert rock ou des entreprises, comme initialement prévu. Ce sera également le cas, mais pas uniquement, puisqu’il faudra également tenir compte des autres fonctions.
Aujourd’hui, nous ne voulons pas déjà dévoiler le concept général et dire quand “quoi viendra où”. Les préparatifs sont en cours et ce, sous la régie du ministre de l’Intérieur. Ce dernier en discutera de façon régulière avec les syndicats intercommunaux régionaux et les communes. Le Syndicat Intercommunal sera responsable du développement et de la mise en oeuvre du plan de développement régional. L’Etat et l’Arbed constitueront à parts égales une société de développement qui gèrera la viabilisation et le développement des friches industrielles. Le Conseil de surveillance de cette société comprendra les communes. Seul l’Etat, qui paie, et l’Arbed seront membres du Conseil d’administration. Ce Conseil d’administration travaillera en étroite collaboration avec les comités de gestion qui seront créés sur chaque site, comités de gestion dans lesquels les communes auront une fonction consultative. Elles ne pourront y donner que leur avis puisqu’elles devront garder leur autonomie et leur liberté quand il y sera question de l’autorisation des plans d’aménagement et des permis de construire.
Les nouvelles destinations accordées aux friches industrielles seront discutées ensemble avec les communes. Lorsque ce dialogue aura abouti, la Chambre des députés recevra un rapport complet. A propos de l’aménagement du territoire, il convient aussi de tenir compte des impératifs de l’aménagement du territoire en ce qui concerne le plan hospitalier. Le patriotisme local borné et le “chacun pour soi” aveugle nous mèneront dans une impasse. Enfin, avant d’en finir avec les aspects d’aménagement du territoire, je voudrais exprimer ma reconnaissance au Ministre de l’Intérieur pour la manière calme avec laquelle il gère la fusion entre la police et la gendarmerie. La sécurité n’échappe pas à l’aménagement du territoire, elle sera renforcée par un recrutement dans la police et par le perfectionnement de ses équipements.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je souhaite revenir à la notion du développement social durable sur laquelle je m’étais arrêté tout à l’heure.
Nous sommes actuellement engagés dans la série de négociations tripartite sur la politique de l’emploi. Nous en sommes arrivés à la conclusion que, de manière générale, le plan pour l’emploi de 1998 a été exécuté rapidement et qu’il commence à porter ses fruits. La loi PAN de 1999, qui a amendé un total de 26 lois, et qui, à cause de sa grande diversité, n’a pas toujours été bien comprise, est pourtant bien acceptée. Cette loi a accordé aux partenaires sociaux de nouvelles et importantes compétences en matière de temps de travail, tout en les retirant au gouvernement. Les partenaires sociaux ont de grandes difficultés à assumer leurs nouvelles compétences, parce qu’ils n’arrivent pas à se mettre d’accord sur l’application de la nouvelle disposition sur la période de référence. Comme ils n’arrivent pas à un accord, ils ne parviennent pas à discuter les mesures actives de création d’emplois, mission que la loi leur impose dans le cadre des contrats collectifs.
Nous l’avons dit en avril 98, en février 99 et à nouveau en août 99: le gouvernement n’est pas le seul responsable pour le marché de l’emploi. A leur demande, les partenaires sociaux ont vu leur part de responsabilité augmentée par la loi de 1999. Maintenant, ils doivent l’assumer. Le gouvernement ne peut se substituer à eux, mais il essaie pour le moment, dans le cadre de discussions entre le ministre du Travail et les partenaires sociaux, de leur montrer le chemin vers une meilleure compréhension. Nous espérons trouver un accord avant le 15 juin. Nous espérons que le climat social s’améliorera alors et que le dialogue social pourra repartir de plus belle. Sans dialogue social efficace, sans politique contractuelle dynamique, sans arrangements généraux et sans accords spécifiques dans le domaine de la politique de l’emploi, notre pays s’engagera sur une voie difficile.
La rupture du dialogue social, ou simplement sa correction qualitative vers le bas engendrera des confrontations desquelles personne ne sortira gagnant. Voilà pourquoi le gouvernement veut devenir le machiniste du dialogue social, sans pour autant trop intervenir dans l’autonomie tarifaire. Le gouvernement pourra graisser le véhicule politico-tarifaire autant qu’il le voudra, mais ce sont les partenaires sociaux qui devront l’accélérer et le conduire. S’ils n’y parviennent pas, c’est la politique qui devra prendre le volant. Certains, qui auraient mieux fait de passer les vitesses eux-mêmes, pourraient ainsi être écrasés. Ce n’est pas d’une nouvelle loi sur l’emploi dont nous avons besoin, mais d’un changement de mentalité. Il nous faut plus de flexibilité, une flexibilité justifiable et acceptable. Il nous faut de la flexibilité, mais celle-ci doit s’affranchir du soupçon de dénaturation de ses objectifs. La flexibilité n’a pas pour but de supprimer des droits sous le couvert de la globalisation et de la pression de la concurrence. Son but, compte tenu de la globalisation et d’une concurrence accrue est de rendre les emplois plus sûrs, de rendre les entreprises plus rentables et de transformer les chômeurs en salariés. Les salariés ne sont pas les ennemis du patron, mais ses collaborateurs. Le patron n’est pas un négrier sans scrupules, mais une personne qui veut développer son entreprise et son personnel. Seulement si les uns et les autres se comportent ainsi et s’ils s’estiment mutuellement, alors nous avancerons. Si tel n’est pas le cas, nous resterons sur place et nous serons dépassés par ceux qui ont la force et le courage de réaliser le consensus social; et ceux-là sont de plus en plus nombreux.
La tripartite est, et restera, l’usine à consensus luxembourgeoise. Elle ne fermera pas ses portes et ne fera pas faillite, mais elle a besoin de filiales dans le domaine des contrats collectifs, qui n’essaient pas de faire le travail d’une manière différente de celle qui a été définie à la tête d’un groupe d’entreprises.
Une politique salariale de la continuité a été décidée à la tête du groupe, et cela dans le respect de la cogestion. La modération salariale qui a été invoquée par tous les gouvernements européens dans les orientations économiques de l‘année prochaine n’équivaut pas à un gel des salaires. La modération salariale équivaut à un accroissement des salaires au rythme des gains de productivité. Pas moins et pas plus. La politique a contrebalancé la modération salariale telle qu’elle l’a comprise et appliquée par une plus faible imposition du travail, particulièrement du travail non-qualifié. Elle veut persévérer dans ce sens lors de la prochaine réforme fiscale, mais seulement si la politique salariale économique générale et sectorielle reste responsable. Cela vaut aussi bien pour le secteur privé que pour le secteur public, pour lequel nous espérons avoir terminé les négociations salariales d’ici l’été. Le revenu de ceux qui travaillent doit augmenter. Voilà pourquoi, le salaire social minimum sera adapté au 1er janvier 2000 à l’évolution moyenne des salaires des années 1998 et 1999. Ceux qui gagnent moins ou ont moins de chance dans la vie ne doivent pas être les dindons de la farce le jour où seront distribués les gains de la croissance. Voilà pourquoi, l’année prochaine, l’Etat engagera 50 collaborateurs handicapés.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Sans croissance économique et sans prospérité, il est impossible de changer la situation actuelle et de rendre la société plus équitable.
Mais l’idée que la croissance et la prospérité, attirent obligatoirement l’équité, voire l’imposerait pratiquement, est une idée naïve. L’équité est le fruit du dur labeur d’hommes et de femmes politiques.
La croissance laisse subsister des injustices. Nous le voyons dans les pays industrialisés où chaque jour, 35 millions d’êtres humains ont faim. Rien qu’aux Etats-Unis, le pays qui connaît un boom économique depuis dix ans, une famille sur dix ne peut pas subvenir à ses besoins. Les Etats-Unis sourient aux marchés financiers, ils ne sourient pas aux pauvres. Les Etats-Unis ne doivent en aucun cas nous servir d’exemple. Voilà pourquoi, à l’époque de la globalisation et des gains rapides, nous nous devons défendre un modèle social de solidarité.
Au Luxembourg aussi, il y a des pauvres. Nous le savons, nous nous en occupons et nous continuerons à nous en occuper. A un moment où l’économie européenne redémarre et où l’économie luxembourgeoise croît fortement, à un moment où le chômage baisse et le pouvoir d’achat augmente, il est bon que le Conseil économique et social nous ait rappelé que, au Luxembourg, des hommes, des femmes et des enfants ne connaissent la prospérité que par des journaux ou les informations télévisées, pour autant qu’ils disposent d’une télévision ou qu’ils lisent le journal. Le Conseil économique et social a bien fait de mettre l’accent sur un point faible luxembourgeois: il existe des pauvres dans notre pays riche. A terme, si la pauvreté gagne du terrain, cela représente une menace pour notre cohésion sociale et notre développement social durable.
Nous pensons cependant que le Conseil économique et social exagère sa decription de la pauvreté au Luxembourg. Les pauvres, au Luxembourg, ne le sont pas autant que les pauvres en Belgique, en France ou au Portugal. Tout est relatif, le Conseil économique et social n’a pas assez intégré cette relativité dans son analyse de la situation. Le CEPS, qui est un institut luxembourgeois internationalement reconnu en matière de recherche sur la pauvreté, a constaté que dans le cadre de l’évolution des revenus entre 1985 et 1997, donc avant la réforme de la loi sur le RMG, “L’inégalité ne s’est pas renforcée”. Le Conseil économique et social, quant à lui, tire une conclusion contraire de la même substance analytique. Nous ne pensons pas que celle-ci soit tout à fait correcte.
Quoi qu’il en soit, c’est à raison que le Conseil économique et social, c’est-à-dire les organisations patronales et syndicales nous interpellent à propos du sujet de la pauvreté, et c’est pourquoi nous allons résolument aborder ce problème.
Je précise néanmoins que la politique ne devrait pas être la seule à se sentir concernée, mais également les syndicats. La lutte contre la pauvreté doit être leur objectif prioritaire. Ils s’obligent, suivant l’avis du Conseil économique et social, à créer, dans le cadre des négociations sur les contrats collectifs, de nouvelles possibilités d’emploi pour nos concitoyens défavorisés, afin de leur permettre une réinsertion dans le monde du travail. Les patrons aussi sont sollicités par cet avis du Conseil économique et social. Tout comme les syndicats, ils s’engagent, dans le cadre des contrats collectifs, comme le prévoit d’ailleurs la loi PAN de 1999, à libérer des places de stages pour les moins favorisés. Ils s’engagent, par leur avis, à prêter main-forte dans la lutte contre la pauvreté.
L’idée, reprise dans l’avis du CES, que le problème et sa solution relèvent de la responsabilité du gouvernement, est fausse. Tout comme c’est le cas dans la politique de l’emploi, le patronat et les syndicats sont également sollicités. Cher représentants des syndicats, pensez aux pauvres, lorsque vous formulerez vos revendications. Une sixième semaine de congé et une réduction du temps du travail ne les aideront guère. Il en va de même pour l’accroissement des taux d’augmentation des retraites. Chers représentants du patronat, pensez aux pauvres et aux exclus, lorsque vous embauchez et lorsque vous négociez des contrats collectifs. La revendication pour une plus grande flexibilité ne leur apportera rien.
La politique doit agir, oui, mais pas seule.
Elle agira. La loi sur le surendettement devra être votée rapidement, que cette loi soit amendée ou non. Elle traîne depuis des années dans cette enceinte. La législation sur le RMG doit constamment être revue. Nous acceptons le débat sur la pauvreté, mais nous ne sommes pas les seuls concernés.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
On ne sait pas très bien où commence et où finit le social. Une chose est certaine: le problème des réfugiés et les réponses à ce problème ont des conséquences sociales. Elles ont des conséquences sociales, puisque, au sens étymologique du terme, elles touchent à notre manière de vivre ensemble.
Les chiffres sont connus. Nous avons accueilli, en valeur absolue, et, proportionnellement aussi, beaucoup de réfugiés. C’était une bonne chose; car lorsque des hommes, en plein centre de l’Europe, sont persécutés pour des raisons d’ordre ethnique et autres, et qu’ils ne sont plus en sécurité, alors il nous faut ouvrir nos portes. Tout le monde ne le voit pas du même oeil. Dans la politique comme je la conçois, je m’engagerai toujours en faveur des hommes dont les droits fondamentaux sont menacés pour qu’ils trouvent un toit, un endroit pour vivre, pour respirer chez nous. Lorsque la peur, la terreur et la violence au Kosovo menacent des hommes, ils trouveront chez nous de l’air pour respirer. Un homme en vaut un autre, et lorsqu’on torture et qu’on viole les êtres humains, ces derniers sont d’une certaine manière, tous des Luxembourgeois. Ce que tu ne veux pas que l’on te fasse, ne le fais pas à autrui. Nous étions contents, il y a soixante ans de cela, que personne ne nous ait refoulés lorsque nous avons dû nous enfuir. Donc nos portes aussi devront rester ouvertes.
Si à l’avenir, nous voulons que les Luxembourgeois acceptent encore d’accueillir chez eux des personnes tyrannisées, il faudra que les conditions suivantes soient remplies:
Les personnes que nous accueillerons ne doivent pas se comporter exactement comme nous. On ne peut pas attendre cela de gens traumatisés et meurtris. Mais ils doivent se conformer à nos lois et à notre ordre. Nous ne pourrons accepter des espaces sans loi au Luxembourg. Si nous l’acceptions, nous en arriverions bientôt à la xénophobie et à un revirement au niveau de l’acceptation de notre politique en matière de réfugiés. La loi doit être respectée aussi par ceux qui viennent chez nous. Voilà un principe bien clair et sans équivoque.
Ceux qui arrivent chez nous dans la détresse sont les bienvenus. Mais lorsque leur détresse aura pris fin, lorsque, dans leur lieu d’origine la situation se sera calmée, ceux qui n’auront pas reçu l’asile politique et ceux qui n’auront pas respecté notre loi sur l’immigration devront rentrer chez eux. Voilà un autre principe sans équivoque. Que certains rentrent chez eux de leur propre gré et que d’autres, qui ne respectent pas nos lois, essaient de rester ici, cela n’est pas possible.
S’il y a ici des députés qui pensent que tous les réfugiés doivent rester chez nous, qu’ils le disent. S’ils le disent, qu’ils expliquent aussi comment, à l’avenir, nous pourrons justifier pourquoi chaque réfugié qui vient au Luxembourg peut y rester indépendamment de la décision du tribunal quant à sa demande d’asile. Qu’ils admettent alors que nos lois ne sont faites que pour la galerie et qu’elles ne sont pas valables.
Ceux qui ont la difficile mission de faire respecter nos lois, le ministre de la Justice, les officiers de police, la police des étrangers en particulier, et d’autres encore, le font en leur âme et conscience. Ils ont autant de sentiments que vous et moi. Leur conscience est aussi fine et multiforme que celles de ceux qui les critiquent. Je suis en faveur d’un traitement humain des réfugiés que l’on renvoie chez eux. Ce n’est pas une phrase en l’air. Je le dis comme je le pense, mais je dis aussi que celui qui est extradé et qui ne part pas de son propre gré doit être expulsé dans la dignité, une dignité à laquelle il doit vouloir contribuer aussi.
Celui qui protège, contre l’Etat et la loi, les réfugiés qui devraient repartir, contribue à ce que d’autres qui sont dans la détresse ou en danger de mort ne soient pas accueillis. Celui qui ferme les portes de sortie est responsable de la fermeture des portes d’entrée.
L’amalgame fait dans le débat public entre le problème des réfugiés et celui des étrangers sans papiers, est inquiétant. Cela arrive aussi bien inconsciemment que consciemment. Une personne qui arrive au Luxembourg de manière illégale, qui ne respecte donc pas nos lois, n’est pas dans la même situation que celle qui demande l’asile. Ce sont deux choses complètement différentes et il est temps que l’on cesse de les mélanger.
Le problème des “sans-papiers” est examiné avec sérieux et générosité par le gouvernement. Nous nous réunirons une deuxième fois le 31 mai prochain avec les signataires de l’initiative pour la régularisation de leur situation et nous étudierons les solutions ensemble. En un mot comme en cent: en premier lieu nous voulons clarifier la situation des demandeurs d’asile refusés, et ensuite, celle des “sans-papiers”. Voilà deux problèmes différents qui nécessitent des solutions différentes aussi. Dans les deux cas, des êtres humains sont en cause et cela rend la réponse doublement difficile. Comme ces questions touchent particulièrement aussi bien le ministre de tutelle que nous tous, ne serait-il pas utile d’envisager une réforme de notre loi de 1972 sur l’immigration. Je serais heureux si nous pouvions en discuter, tous partis politiques confondus.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
J’en arrive à la fin de mon long discours. Il était long, car un petit pays aussi a des problèmes qui souvent ne sont pas plus petits que ceux de nos grands voisins. Comme nos grands problèmes ne sont pas plus petits que ceux de nos voisins, on ne trouvera pas leur solution dans un slogan réclame moins d’Etat. Nous n’avons pas besoin de moins d’Etat, nous avons besoin d’un Etat meilleur. Nous avons besoin d'un meilleur Etat, d’un Etat plus proche de ses citoyens. Voilà pourquoi nous continuons à travailler d’arrache-pied à la réforme de l’administration. Bientôt, une nouvelle loi sur le statut des fonctionnaires où des mesures de réforme administrative seront prises, sera lancée. Voilà pourquoi, dans le budget 2001, nous tiendrons compte de la nécessité d’une protection renforcée en faveur des jeunes. Dans ce sens, nous soumettrons au Parlement un projet de loi sur les nouvelles formes de coexistence avant le printemps prochain. Voilà pourquoi dans les prochains mois, nous déposerons une nouvelle loi sur la presse. Voilà pourquoi également, nous introduirons, dès le début de l’année prochaine, un projet de loi sur un “Ombudsman”, un interlocuteur des citoyens. Voilà pourquoi, dans le courant de 2001, nous réaliserons la démocratie participative en facilitant le recours au référendum. Nous n’avons pas beaucoup d’expérience en matière de référendum, mais celle que nous avons acquise est bonne. Les Luxembourgeois ont une fois dit non, alors qu’un oui aurait eu des conséquences néfastes. Ils ont une fois dit oui, alors qu’un non ne nous aurait pas satisfaits. Ils sont comme cela les Luxembourgeois, tantôt bornés et boudeurs tout en ayant raison, tantôt ouverts et généreux en ayant dans ce cas toujours raison. Nous devrions tous être ainsi: fermes dans notre relation avec l’esprit du temps, mais ouverts au temps nouveau et à ses hommes. Restons Luxembourgeois quand l’esprit luxembourgeois a un sens, comme après le 10 mai 1940 lorsque nous nous sommes opposés pendant cinq ans à l’occupant. Soyons Européens là où notre coeur et le bon sens l’exigent, comme après le 9 mai 1950 lorsque nous avons dit oui au Plan Schuman et par là à 50 ans de paix.