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Luc Frieden / "Des riches toujours plus riches"
Le Quotidien : Lors du dernier conseil Écofin du 11 décembre dernier, vous aviez indiqué que le Luxembourg ne pouvait accepter une retenue à la source de 35 %. Qu'est-ce qui vous a poussé à revenir sur cette position?
Luc Frieden : Pour nous, ce qui était important, c'était de prévoir une visibilité et commencer avec un taux compétitif. Ce qui est le cas. Si en 2010, tous les taux étaient différents (dans I'UE), ceux-ci pourraient être revus. Pour nous, il était important que les places concurrentes appliquent le même taux. Cet accord permet la visibilité d'une part (calendrier des impositions) et le maintien de la compétitivité, d'autre part.
Le Quotidien: Comment l'attractivité de la place financière luxembourgeoise pourra-t-elle perdurer?
L'attractivité de la Place s'en trouve renforcée car ces dernières années les banquiers et leurs clients avaient peur de la levée du secret bancaire et de l'introduction, du jour au lendemain, d'un taux d'imposition. L'image de la Place est encore améliorée parce qu'on disait qu'elle abritait de l'argent pas taxé, de l'argent au noir. Il sera donc plus facile pour les banquiers de vendre leurs produits.
Pour que l'accord intervenu mardi entre en vigueur, faut-il encore que la Suisse le signe?
La Suisse va devoir étudier l'accord et la convention ne sera signée avec l'Union européenne que si elle recueille l'acceptation unanime du Conseil des ministres des Finances. Nous n'accepterons pas de signer la convention si celle-ci n'est pas en tous points identique à l'accord que nous avons conclu avant-hier. La signature se fera en mars prochain et, le ler janvier 2004, tous les États devront appliquer le même système. Les îles anglo-normandes mettront également en place cet accord. La situation avec les États-Unis est plus compliquée car ils pratiquent déjà une certaine forme d'information à la demande mais il ne s'agit pas d'un concurrent de la place luxembourgeoise et l'Union européenne ne signera pas de convention avec les États-Unis.
L'idée du sommet de Feira en matière de fiscalité de l'épargne était double : reverser l'argent au pays d'origine de l'investisseur et créer un système égalitaire. Or, ce sont les épargnants les moins riches qui seront avant tout taxés?
C'est juste mais c'est dans l'intérêt de la place financière. Nous avons négocié pour que le champ soit le plus étroit possible. À Feira, le point essentiel était l'exigence britannique d'échange d'information, point qui n'a pas abouti hier. Il ne sera effectif que quand la Suisse le pratiquera. Je ne pense pas que la Suisse lèvera son secret bancaire en 2010.