L'Etat des 700.000 habitants au centre d'une discussion avec le Premier ministre Jean-Claude Juncker

Le Premier ministre Jean-Claude Juncker était l'invité de l'émission "Background" sur les ondes de RTL Radio Lëtzebuerg, le 13 juillet 2002. L'émission était exclusivement consacrée aux perspectives d'avenir du Grand-Duché de Luxembourg, placées notamment dans le cadre des discussions récentes sur l'Etat des 700.000 habitants.

Cette discussion a été initiée par le Premier ministre lors de la déclaration sur la situation économique, sociale et financière du pays le 10 mai 2000 et a connu un nouvel élan à la suite des accords de la "table ronde pensions" du 16 juillet 2001 qui a été traduite en législation nationale par la Chambre des députés le 5 juin 2002.

Le Premier ministre a tout d'abord souligné que la discussion n'a jamais été une question de volonté politique d'aboutir à une population de 520.000 personnes en 2020 ou de 700.000 personnes en 2050, mais que le financement des systèmes de rentes et de pensions dépendrait d'une croissance économique de 4% en moyenne pendant les décennies à venir; ce qui, par ricochet, impliquerait une croissance massive de la population active et résidente afin de pouvoir atteindre les taux de croissance nécessaires.

Si, au contraire, l'économie luxembourgeoise connaissait une stagnation ou même un recul, la question de la croissance démographique ne se poserait plus en ces termes. Or, les bases de calcul actuellement en vigueur seraient effectivement celles d'une croissance moyenne de 4%, sans laquelle le financement des systèmes de pensions privé et public, après les mesures de la table ronde, serait compromis. C'est pour cette raison que le Premier ministre avait regretté, suite au vote de la Chambre des députés, qu'il n'ait pas été possible de prévoir, via une motion parlementaire ou même au sein du gouvernement, que les mesures décidées par la "table ronde pensions" puissent être revues si une évolution défavorable de la croissance économique rendait précaire le financement des rentes et pensions. Le Premier ministre s'est dit tout de même prêt à assumer ses responsabilités si l'hypothèse d'une évolution défavorable de l'économie se confirmait, même si cela signifiait "d'intervenir massivement au niveau des cotisations ou des prestations, ce dont personne ne veut entendre parler, ni aujourd'hui, ni demain."

Répondant à une question d'un auditeur, le Premier ministre s'est montré prudent quant à l'idée de soumettre la question de l'évolution démographique du Luxembourg à un référendum. Selon Jean-Claude Juncker la problématique de l'évolution future du pays serait beaucoup trop complexe pour la réduire à la question "Êtes-vous pour ou contre l'Etat de 700.000 personnes?" qui, encore une fois, ne serait pas une question de volonté politique mais une nécessité économique afin de garantir le financement des systèmes de rentes et de pensions.

D'autres questions d'auditeurs tournaient autour de l'intégration des immigrants actuels et futurs au Luxembourg. Le Premier ministre s'est ainsi refusé à faire l'amalgame entre immigration et criminalité comme le suggéraient certains auditeurs. "La criminalité est un fait", a dit le Premier ministre, "mais elle concerne aussi bien les Luxembourgeois que les étrangers". Dans ce contexte, il faudrait distinguer entre une menace réelle de la sécurité et un sentiment d'insécurité virtuel. Si, dans le premier cas, le gouvernement est en train d'apporter une réponse adéquate - notamment avec l'augmentation conséquente des effectifs de la police grand-ducale - le deuxième cas, puisqu'il subit des influences émotionnelles, a tendance à donner des réponses faciles à des questions complexes. Jean-Claude Juncker a ainsi confirmé qu'un lien entre immigration et augmentation de la criminalité n'existait pas au Luxembourg.

Pour Jean-Claude Juncker l'intégration des immigrés devrait d'abord passer par l'apprentissage du luxembourgeois qui reste le facteur déterminant de l'identification avec le pays d'accueil. Le chef du gouvernement a ainsi annoncé que des pourparlers avec les partenaires sociaux seraient menés afin de trouver des "moyens intelligents" devant permettre aux immigrés de fréquenter des cours obligatoires de luxembourgeois, même pendant les heures de travail si une autre possibilité n'était pas envisageable, en raison notamment d'un travail physique trop fatigant, pour permettre aux intéressés de fréquenter des cours du soir. Le Premier ministre a également lancé un appel aux Luxembourgeois pour se porter volontaires pour enseigner le luxembourgeois dans ce cadre.

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