Vers une autorisation exceptionnelle et limitée de l’usage de cannabis à des fins médicales

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Conférence de presse
(de g. à dr.) Dr Alain Origer, coordinateur national «Drogues» ; Lydia Mutsch, ministre de la Santé ; Dr Simone Steil, médecin-chef, Division de la médecine préventive
En date du 27 octobre 2017, le Conseil de gouvernement a donné son accord de principe quant à l’accès au cannabis à des fins médicales à l’échelle nationale.

"Garantir l’accès aux meilleurs soins possibles, en fonction de l’état de santé du patient et dans la limite de ce qui est utile et nécessaire, constitue une mission d’intérêt public essentielle. L’usage médical du cannabis est une étape importante dans le cadre des efforts visant à réduire les douleurs et souffrances de certains patients, là où les traitements habituels ne le permettent pas ou plus", précise Lydia Mutsch, ministre de la Santé.

La recherche en matière d’usage à des fins médicales de cannabis, d'extraits de cannabis et de certains cannabinoïdes s'est développée de manière significative au cours des dernières années et l’intérêt scientifique pour le "cannabis médical" a connu un essor important. Entretemps, de nombreuses études suggèrent que notamment le tetrahydrocannabinol (THC) et le cannabidiol (CBD) peuvent avoir des effets bénéfiques dans le cadre du traitement d'un certain nombre de maladies.

Une récente métaanalyse, publiée en 2017, se distinguant par son étendu, sa représentativité (quelque 10.000 articles scientifiques ont été analysés) et sa clarté en matière de formulation scientifique, fait état de "preuves concluantes" et de "preuves substantielles" quant à l'effet positif de l’utilisation de cannabis ou de certains cannabinoïdes auprès des patients souffrant de différentes pathologies.

"Si la recherche en matière de cannabis et de son utilisation à des fins médicales a progressé remarquablement au cours des dernières années, nombre de questions restent encore ouvertes à ce jour. Toutefois, les données à disposition aujourd’hui permettent d’avancer qu’il peut être opportun, face à un certain nombre de tableaux cliniques et pour certains patients, d’envisager le recours au cannabis médicinal, du moins comme complément possible aux traitements existants", souligne Dr Alain Origer, coordinateur national "Drogues".

La situation au Grand-Duché et au sein de l'Union européenne


Depuis 2012, suite à un changement législatif, des médicaments à base de cannabinoïdes dûment autorisés peuvent être prescrits au Grand-Duché. En 2015, le médicament Sativex®, indiqué pour réduire les symptômes de la spasticité modérée à sévère due à une sclérose en plaques, a été autorisé au Luxembourg.

Au sein de l’Union européenne, une minorité grandissante d’États membres ont mis en place des cadres légaux réglementant l’accès au "cannabis médical". L’exemple le plus récent est la nouvelle législation allemande, adoptée à l’unanimité par le Bundestag allemand en 2017, qui autorise l’usage du cannabis à des fins médicales.

La pratique montre toutefois que différents modèles et dispositifs ont été mis en place pour donner accès à des composantes et produits variés issus du cannabis médicinal, tels que des teintures, des huiles, des extraits à compositions variables notamment en THC et en CBD, les deux molécules présentant les potentiels thérapeutiques les plus documentés, ainsi que les sommités fleuries de la plante de cannabis. Dans la plupart des cas, le recours au cannabis médicinal requiert soit une ordonnance médicale, soit une confirmation de diagnostic médical. La distribution ou la délivrance des produits visés est également assurée par des moyens variés. Partant, un dispositif standard ne s’est pas imposé à ce jour étant donné que la création d’un accès au cannabis à des fins médicales semble se confronter de façon générale à un ensemble de spécificités à caractère national.

Beaucoup de législations en vigueur définissent l'éligibilité des patients sur base d’un ensemble de conditions médicales ou symptômes pour lesquels les effets bénéfiques du cannabis ou produits issus du cannabis ont été étudiés scientifiquement.

Étant donné qu’à ce jour, uniquement les médicaments à base d’extraits de cannabis ou de cannabinoïdes dûment autorisés sont médicalement prescriptibles à l’échelle nationale, l’utilisation du cannabis à des fins médicales nécessite un certain nombre de changements législatifs et réglementaires, permettant de rendre le cannabis et ses extraits naturels prescriptibles.

Mise en place d’un dispositif pilote pour une première phase de deux ans


Au vu de l’expérience gagnée par d’autres pays qui ont mis en place des dispositifs comparables ainsi que par des programmes nationaux comme le programme de traitement de la toxicomanie par substitution, la mise en place d’un dispositif pilote est envisagée. Une évaluation notamment du nombre de patients bénéficiaires et des indications de prescription s’imposera en vue de disposer des données nécessaires pour décider d’une éventuelle consolidation ou du développement du dispositif national en la matière.

Toutes les mesures nécessaires à la délivrance sécurisée et à la limitation du risque d’abus seront prévues dans le cadre d’amendements à la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie et par une adaptation du règlement grand-ducal modifié du 19 février 1974 portant exécution de la loi du 19 février 1973 sur la vente des substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie.

Il convient de souligner que le cannabis médicinal n’est ni une panacée contre tous les maux ni un remède pour tous. À l’heure actuelle, son action potentielle est la mieux documentée au niveau d’effets bénéfiques sur une série de symptômes associés à différentes maladies. En ce qui concerne d’éventuelles autres applications, il faudra laisser le temps à la science pour faire son travail.

En permettant le recours au cannabis à des fins médicales, le Luxembourg étendra l’offre thérapeutique existante et ajustera son système de santé à la lumière des connaissances actuelles en la matière.

La mise en place du dispositif et son application se fera en étroite association avec les autres ministères concernés.

L’accord de principe quant à l’utilisation du cannabis à des fins médicales, donné par le Conseil de gouvernement, permettra de progresser dans les démarches nombreuses à entreprendre pour créer un dispositif national garantissant l’accès au cannabis de qualité standardisée à des fins thérapeutiques et d’assurer sa disponibilité et délivrance sécurisées.

Communiqué par le ministère de la Santé

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