Déclaration de Jean Asselborn sur la politique étrangère et européenne à la Chambre des députés

En date du 8 novembre 2022, le ministre des Affaires étrangères et européennes, Jean Asselborn, a prononcé à la Chambre des députés la déclaration annuelle sur la politique étrangère et européenne.

©Chambre des députés Jean Asselborn, ministre des Affaires étrangères et européennes
Jean Asselborn, ministre des Affaires étrangères et européennes

 

Le chef de la diplomatie luxembourgeoise a présenté les grandes orientations de la politique étrangère et européenne du Luxembourg, en passant en revue les grands enjeux à l'ordre du jour européen et international marqués par l'agression militaire de la Russie contre l'Ukraine.

Introduction

Sur le plan international, la guerre d'agression lancée le 24 février dernier par la Russie contre l'Ukraine a entraîné un changement de paradigme majeur dans l'ordre géopolitique mondial et a des conséquences profondes à tous les niveaux, en Europe et dans le monde.

Le ministre Asselborn a indiqué qu'en ramenant la guerre sur le continent européen, la Russie a bafoué le droit international, dissous les conditions d'une cohabitation sereine et durable dans le cadre de l'architecture de sécurité en Europe et mis en danger l'ordre international mondial établi depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Pour le chef de la diplomatie luxembourgeoise, la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine ne relève pas exclusivement d'une opposition armée entre deux pays, mais constitue également une attaque contre les valeurs que défend l'UE, plus particulièrement la paix, la démocratie, l'Etat de droit et le multilatéralisme.

Jean Asselborn a réaffirmé le plein soutien du Luxembourg à l'Ukraine, aux côtés de ses partenaires européens et internationaux, pour aider l'Ukraine à se défendre conformément à l'article 51 de la Charte des Nations unies. Selon le ministre, il est primordial de s'opposer à la tentative de la Russie d'imposer la loi du plus fort, un principe qui remettrait en question l'ordre international. Dans ce contexte, il a déploré que la Russie entrave la capacité d'action des principaux forums multilatéraux tels que le Conseil de sécurité de l'ONU, au sein duquel la Russie dispose d'un droit de veto, qui n'est de ce fait plus en mesure de jouer pleinement son rôle pour préserver la paix et la sécurité internationales. Jean Asselborn a souligné qu'il était dès lors de la responsabilité du Luxembourg, en tant que partenaire fiable, crédible et sérieux au sein de la communauté internationale, aux côtés des partenaires européens et internationaux, de défendre les valeurs universelles de liberté et d'indépendance, d'égalité et d'humanité.

Impact de la guerre sur le Luxembourg et sa politique étrangère

Le ministre Asselborn a rappelé que l'agression militaire de la Russie contre l'Ukraine a également entraîné un changement de paradigme dans la politique étrangère du Luxembourg. Pour la première fois de son histoire, le Grand-Duché a fourni des armes et du matériel de défense à un pays en guerre, pour 72 millions d'euros, soit 16% du budget de la défense luxembourgeoise. En outre, en tant que membre de l'UE, le Luxembourg participe à l'effort commun dans le cadre du mécanisme européen pour la paix (MEP), par lequel 500 millions d'euros ont été mis à disposition pour le soutien à l'Ukraine à six reprises.

Accueil des personnes fuyant la guerre en Ukraine

La guerre qui sévit en Ukraine a forcé de nombreux civils – essentiellement des femmes et des enfants – à fuir le pays. Depuis fin février 2022, le Luxembourg a octroyé le statut de protection temporaire à 4500 personnes, conférant un droit de séjour jusqu'en mars 2024.

Dans ce contexte, Jean Asselborn, en sa qualité de ministre de l'Immigration et de l'Asile, a tenu à remercier tous les acteurs nationaux engagés dans l'accueil des personnes ayant fui la guerre en Ukraine, qu'il s'agisse des communes, des divers ministères et administrations ainsi que les ONG. Le ministre a salué le travail de l'Office national de l'accueil qui a mis en place un réseau parallèle de structures d'accueil pour les personnes ayant fui la guerre en Ukraine. Par ailleurs, il a souligné la bonne coordination entre les différents acteurs étatiques au travers du guichet unique qui permet aux personnes venant d'Ukraine d'effectuer en une seule fois leurs différentes démarches administratives de manière structurée et encadrée.

Au vu de l'escalade des attaques russes sur le territoire ukrainien, le ministre Asselborn a rappelé qu'il est important de renforcer les capacités d'accueil au Luxembourg pour être préparé en cas de nouveaux afflux de personnes fuyant la guerre en Ukraine. Dans le même sens, le Luxembourg connaissant une affluence de demandeurs de protection internationale depuis la fin de l'été 2022, le ministre a indiqué que le renforcement des capacités d'accueil serait également nécessaire à ce niveau.

Sur le plan européen, la crise humanitaire engendrée par la guerre en Ukraine a démontré la capacité de l'Union européenne à mener une politique de migration coordonnée, a souligné le ministre. Plus de 6 millions de personnes ont trouvé refuge au sein de l'Union européenne. Le ministre a soulevé le fait que le mécanisme de protection temporaire a été activé pour la première fois par la Commission européenne, permettant d'agir rapidement, et de manière humaine et pragmatique. Le ministre Asselborn a toutefois souligné que la solidarité européenne devait s'appliquer à toutes les personnes cherchant refuge dans l'Union européenne, conformément à la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés.

Sanctions de l'UE contre la Russie

Les huit paquets de sanctions imposés par l'UE, qui s'ajoutent aux mesures restrictives prises depuis 2014 en réponse à l'annexion de la Crimée par la Russie, ont pour but d'affaiblir la base économique de la Russie pour lui soustraire les capacités financières et matérielles nécessaires à la poursuite de la guerre. En ce sens, le ministre a souligné que les sanctions ne sont pas un choix, mais une nécessité, visant non pas la population russe, mais la verticale du pouvoir. De même, le ministre a rappelé que les sanctions européennes sont mises en place en coopération avec les partenaires internationaux de l'UE.

Le chef de la diplomatie luxembourgeoise a salué la solidarité et la cohésion dont l'UE a fait preuve dans ce contexte. L'UE a prouvé qu'elle pouvait agir de manière décisive en très peu de temps pour défendre la sécurité et les objectifs de l'UE. En outre, le ministre a mis en exergue l'importance pour l'UE et ses Etats membres de rester unis sur cette question afin de pouvoir maintenir la pression sur le régime de Poutine, tout en veillant à ce que les mesures puissent être supportées sur le long terme, si nécessaire, par l'UE. Le ministre Asselborn a aussi rappelé que la poursuite de la guerre par la Russie entraînera l'adoption de nouvelles sanctions par l'UE.

Concernant la mise en application des sanctions au niveau national, le ministre Asselborn a évoqué le travail du comité interministériel pour le suivi de mesures restrictives en matière financière.

Sécurité énergétique européenne

S'agissant des conséquences de la guerre sur le marché énergétique en Europe, le ministre Asselborn a indiqué que la guerre agit comme un accélérateur de changements déjà entamés au bénéfice de l'autonomie énergétique de l'UE vis-à-vis de la Russie. L'embargo de l'UE sur le pétrole et les produits pétroliers russes, qui entrera en vigueur en décembre 2022 et février 2023, s'inscrit dans le cadre des efforts européens visant à réduire la dépendance de l'UE face aux importations d'énergies en provenance de Russie.

Dans le contexte de la crise énergétique, le ministre Asselborn a abordé la nécessité pour les pays européens de réduire leur consommation en énergie. Un changement des habitudes en termes de mobilité et de chauffage constitue la meilleure solution à court terme pour éviter des pénuries d'énergie. L'adoption rapide du paquet Fit for 55, avec lequel l'UE veut mettre en œuvre ses objectifs climatiques, constitue l'une des meilleures réponses à la crise climatique et à la crise énergétique actuelle.

De même, le Luxembourg s'engage au niveau européen à un déploiement accéléré des énergies renouvelables, en ligne avec les propositions faites par la Commission européenne dans le cadre du plan REPowerEU.

Politique commerciale

Le chef de la diplomatie luxembourgeoise a rappelé que le Luxembourg et l'Union européenne évoluent dans un monde multipolaire marqué par de nouvelles rivalités régionales et des rapports de force changeants qui mettent en danger le système commercial international.

Au niveau européen, le ministre Asselborn a mentionné le rôle primordial que joue le marché intérieur qui fête ses 30 ans d'existence en 2022. L'intégrité du marché commun, qui a subi de fortes pressions pendant la pandémie de Covid-19, et les perturbations économiques actuelles dues à la guerre en Ukraine soulignent d'autant plus la nécessité d'un marché intérieur plus approfondi et plus intégré. Fondé sur les quatre libertés fondamentales de l'UE, le marché unique doit être renforcé, plus particulièrement dans les bassins de vie transfrontaliers, a estimé le ministre. En ce sens, le Luxembourg s'engage pour une harmonisation maximale et une reconnaissance mutuelle au sein du marché intérieur européen.

Jean Asselborn a déclaré que l'Europe nécessite un modèle économique ouvert et durable, qui repose principalement sur un solide réseau de partenariats commerciaux internationaux, en particulier avec les pays qui adhèrent au système commercial international fondé sur des règles. Il s'agit d'une condition préalable au renforcement de la résilience de l'économie européenne et à la réduction de sa dépendance à l'égard de produits d'importance stratégique, a estimé Jean Asselborn. Le ministre a souligné que le Luxembourg soutient l'approche de l'UE qui vise à garantir la transparence et la diversification des chaînes d'approvisionnement européens en identifiant et en réduisant ses dépendances stratégiques, tout en poursuivant la mise en œuvre de la double transition verte et numérique dans l'UE.

Dans le but de protéger l'économie et les entreprises européennes, le ministre Asselborn a signalé qu'un cadre européen a été créé pour l'examen des investissements directs étrangers. Pour la même raison, un nouvel instrument juridique au niveau européen est également développé pour éviter et contrer les mesures coercitives des pays tiers.

Le Luxembourg s'engage à promouvoir les standards et normes européens, fondés sur ses valeurs, au travers de ses relations commerciales avec ses partenaires internationaux. Dans ce contexte, le ministre Asselborn a indiqué que le Luxembourg contribue activement aux négociations au niveau européen concernant un projet de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité, visant à favoriser un comportement durable et responsable des entreprises tout au long des chaînes de valeur mondiales.

Etat de droit

Le chef de la diplomatie luxembourgeoise a évoqué la situation de l'État de droit au sein de l'Union européenne. Considérant que le respect des principes et des valeurs démocratiques garantit la sécurité et une coexistence pacifique, le ministre Asselborn a souligné l'importance de la mise en œuvre du régime de conditionnalité dans le cadre du budget européen, mécanisme permettant de conditionner le versement des aides européennes au respect de l'Etat de droit. En tant que communauté de valeurs, l'Union européenne doit défendre ses principes démocratiques, notamment face aux attaques limitant l'action de la justice, de la presse et de la société civile, a ajouté le ministre.

Elargissement de l'UE

Le chef de la diplomatie luxembourgeoise a poursuivi son intervention avec le processus d'élargissement de l'UE, auquel la guerre en Ukraine a apporté une nouvelle impulsion. Le 23 juin 2022, l'Ukraine et la République de Moldavie ont reçu le statut de pays candidats à l'UE. Dans ce contexte, le ministre Asselborn a souligné la perspective européenne de l'Ukraine comme un signal fort et juste envers la population ukrainienne.

Le Luxembourg s'engage à soutenir l'ensemble des pays candidats à l'UE dans l'adoption des réformes nécessaires pour la transcription de l'acquis communautaire dans les législations nationales. Pour le chef de la diplomatie luxembourgeoise, le processus d'adhésion est le même pour tous les candidats et seules les réformes en lien avec le respect de l'Etat de droit, l'indépendance de la justice, la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption déterminent la vitesse avec laquelle les pays avancent sur le chemin de l'adhésion. Dans ce contexte, le Luxembourg soutient la perspective d'élargissement des Balkans occidentaux et poursuit son engagement en faveur de l'ancrage des valeurs et des principes de l'UE dans la région. En même temps, dans le contexte de la guerre de la Russie contre l'Ukraine, le ministre Asselborn a rappelé que l'alignement complet sur la politique étrangère et de sécurité commune de l'UE, y compris les sanctions contre la Russie, est une composante essentielle du projet d'adhésion à l'UE pour les pays candidats.

Le ministre Asselborn a également abordé la capacité d'absorption de l'UE et la nécessité de réformer le fonctionnement des institutions dans une UE élargie, soulignant que l'UE devra veiller au bon équilibre entre le processus d'élargissement et le processus d'intégration à l'UE.

Conférence sur l'avenir de l'Europe

Le ministre des Affaires étrangères et européennes a souhaité revenir sur les propositions faites dans le cadre de la conférence sur l'avenir de l'Europe. Le Luxembourg souligne l'importance de prendre au sérieux les propositions des citoyens européens, dont une grande partie peuvent d'ores et déjà être mises en œuvre en vertu des traités existants.

Parmi les propositions des citoyens européens figure la facilitation de la prise de décision au sein des institutions européennes et notamment, dans certains cas, la modification des modalités de vote au sein du Conseil. Dans ce sens, le ministre Asselborn a indiqué que le Luxembourg soutient le vote à la majorité qualifiée dans la politique étrangère et de sécurité commune.

Luxembourg: capitale européenne

Jean Asselborn a ensuite évoqué la politique du siège active du Luxembourg. A l'instar de la première réunion de la Haute Autorité de la CECA, la Cour européenne de justice a célébré en 2022 son 70e anniversaire au Luxembourg. Rappelant l'importance du respect de l'État de droit, tant dans le monde qu'au sein de l'Union européenne, le ministre a également mentionné les travaux du Parquet européen et le recrutement en 2022 de davantage de personnels hautement spécialisés. Enfin, Jean Asselborn a déclaré que la Cour d'appel et la Juridiction unifiée du brevet (JUB) contribueront l'année prochaine à étoffer encore le pilier juridique européen à Luxembourg.

Le ministre a évoqué que, dans le domaine financier, le Global Green Growth Institute (GGGI) ouvrira un bureau régional au Luxembourg, consolidant ainsi la position du Grand-Duché dans le domaine de la finance durable.

De même, Jean Asselborn a rappelé que pour le numérique, troisième grand pilier de la politique de siège, le Comité international de la Croix-Rouge, le CICR, a décidé d'ouvrir sa première "Délégation pour le cyberespace" à Luxembourg.

Impact sur l'architecture de sécurité européenne

Le ministre des Affaires étrangères et européennes a ensuite porté son intervention sur l'impact de la guerre en Ukraine sur l'architecture de sécurité européenne. Dans ce contexte, Jean Asselborn a déclaré que l'architecture de sécurité qui repose sur les trois piliers de la sécurité, de la démocratie et des droits de l'homme a été bousculée par la Russie qui s'est retirée du Conseil de l'Europe et bloque présentement le fonctionnement normal à l'OSCE.

Le ministre a fait part de sa conviction que la politique de sécurité et de défense européenne doit se tourner vers un renforcement de la coopération complémentaire entre l'Union européenne et l'OTAN.

S'agissant de la lutte contre l'impunité, l'OSCE joue un rôle essentiel par l'invocation du mécanisme de Moscou qui est activé dans les cas où les États membres ne respectent pas leurs obligations dans le domaine de la démocratie, de l'État de droit et des droits de l'homme, pour documenter les faits. Des efforts sont également déployés par la Cour pénale internationale de La Haye par l'ouverture d'une enquête à l'encontre de la Russie afin d'investiguer sur les crimes de guerre et crimes contre l'humanité perpétrés en Ukraine. Rappelant que le Luxembourg soutient financièrement la CPI dans ses travaux, Jean Asselborn a martelé qu'il ne pouvait y avoir de paix sans justice.

Le ministre des Affaires étrangères et européennes a aussi évoqué le premier sommet de la nouvelle "Communauté politique européenne ", le 6 octobre à Prague, au cours duquel 44 pays d'Europe, à l'exception de la Russie, se sont réunis pour échanger sur les opportunités de convergence et de développement de projets concrets de coopération dans de nombreux domaines d'intérêt commun.

Etats-Unis

Le ministre Asselborn a ensuite évoqué le rôle joué par les Etats-Unis dans le système multilatéral actuel. Il s'est félicité de l'amélioration des relations transatlantiques depuis la prise de fonction de l'administration Biden, tout en exprimant son espoir de pouvoir continuer à compter sur un partenariat transatlantique fiable après les élections à mi-mandat qui ont lieu aux Etats-Unis en ce jour.

Multilatéralisme

Face à la crise du multilatéralisme et aux différentes interprétations que certains Etats peuvent avoir de l'application des droits humains, le ministre Asselborn a réitéré l'engagement ferme du Luxembourg en faveur de l'universalité, l'inaliénabilité, l'interdépendance et l'indivisibilité des droits humains.

Dans ce contexte, le ministre a évoqué la résolution aux Nations Unies visant à condamner l'annexion par la Russie de territoires ukrainiens, qui a été adoptée grâce au vote de 143 Etats membres. Face au nombre non négligeable d'abstentions, le ministre a plaidé pour un engagement et un dialogue plus prononcés avec ces Etats membres qui, pour certains, se trouvent dans une situation géopolitique difficile en souffrant d'une certaine dépendance de la Russie.

Chine

Après avoir rappelé l'importance du Partenariat oriental et l'importance pour l'Union européenne de rester engagée dans cette région, le ministre s'est penché sur la Chine, notamment en ce qui concerne ses relations avec la Russie et les Etats-Unis. Tandis que les relations sino-américaines sont de plus en plus empreintes de rivalité, les relations entre la Russie et la Chine sont parfois considérées comme une " alliance de circonstance ". Evoquant le positionnement de la Chine face à la guerre en Ukraine, le ministre Asselborn a rappelé que la Chine aussi a un intérêt à ce que la Russie cesse de faire la guerre. En effet, à moyen et à long terme, l'instabilité qui en découle, notamment dans le domaine économique et commercial, ne peut pas être souhaitée par la Chine.

Le chef de la diplomatie luxembourgeoise a ensuite souligné qu'il existe, d'une part, de vrais désaccords avec la Chine, notamment en ce qui concerne les droits humains. D'autre part, la Chine reste un acteur incontournable et un partenaire dans un certain nombre de domaines, par exemple dans la lutte contre le changement climatique. Au moment du 50e anniversaire des relations diplomatiques entre le Luxembourg et la Chine, le ministre a affirmé que le Luxembourg continuera à aborder tous les sujets dans le cadre d'un dialogue critique et constructif. La défense et la promotion des droits humains, notamment dans la région du Xinjiang, font pleinement partie de ce dialogue.

Droits humains

S'agissant de l'engagement en faveur des droits humains, le ministre Asselborn a abordé par la suite le travail du Luxembourg dans le cadre de son mandat au Conseil des droits de l'Homme des Nations Unies. A titre d'exemple, il a évoqué la résolution, présentée par le Luxembourg, visant à établir un rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Russie. L'adoption de cette résolution a été historique dans la mesure où c'est la première fois qu'une résolution a été votée sur la situation des droits humains dans l'un des pays membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies, soulignant ainsi que les droits humains doivent être respectés partout.

Rappelant que le respect du droit international et le multilatéralisme revêtent une importance existentielle pour les petits Etats, le ministre Asselborn a fortement regretté les violations du droit international commises par la Russie, qui nuisent non seulement au système multilatéral, mais aussi à la Russie elle-même.

Insécurité alimentaire

Le ministre des Affaires étrangères et européennes a saisi l'occasion de cette déclaration sur la politique étrangère pour souligner, une fois de plus, que la crise alimentaire mondiale actuelle a été déclenchée par la guerre d'agression menée par la Russie, et non par les sanctions prises en réponse à la guerre. Le ministre s'est montré fortement préoccupé par le fait que cette crise alimentaire ait un impact disproportionnel sur les pays vulnérables, d'autant plus que ceux-ci ont déjà beaucoup souffert de la pandémie de COVID-19. Dans ce contexte, le ministre a mis en exergue l'importance pour l'UE de renforcer sa communication avec nos partenaires dans les différents groupes régionaux.

Jean Asselborn a dans ce contexte tenu à féliciter le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, pour ses efforts qui ont permis, avec l'aide de la Turquie, de prolonger l'accord sur les céréales. Cet accord a permis de transporter des millions de tonnes de céréales en direction des personnes en besoin.

Sahel

La guerre qui règne en ce moment sur le continent européen ne doit cependant pas nous faire oublier qu'il existe, malheureusement, de nombreux autres conflits dans le monde, a mis en garde le ministre Asselborn. En Afrique, notamment, l'insécurité alimentaire et l'inflation ont aggravé des crises humanitaires existantes, à quoi s'ajoute la pire sécheresse depuis 40 ans, surtout dans la Corne de l'Afrique.

S'agissant de l'Afrique de l'Ouest, et notamment du Sahel où le Luxembourg est particulièrement engagé depuis de nombreuses années, le ministre a noté avec préoccupation la multiplication de coups d'Etat militaires, comme par exemple au Burkina Faso et au Mali. Tandis que la situation sécuritaire au Mali – avec la présence de groupes terroristes et de mercenaires, une armée affaiblie, et de millions de déplacés – fait de ce pays l'épicentre de la crise au Sahel, des pays comme la Mauritanie et le Niger font figure de pôles de stabilité.

Corne de l'Afrique

Le ministre Asselborn a salué l'accord sur un cessez-le-feu trouvé par les parties belliqueuses le 2 novembre 2022 en Afrique du Sud. Il a exprimé son espoir profond que cette étape positive puisse se traduire dans les prochaines semaines par une amélioration sur le terrain. En effet, des millions de gens dépendent actuellement de l'aide humanitaire en Ethiopie, ce dans un contexte marqué par des famines, des sécheresses et des maladies.

Iran

En se tournant vers les développements récents en Iran, Jean Asselborn a tenu à rendre hommage à Mahsa Amini, Niloofer Hamedi, Elaleh Mohammadi et aux milliers d'autres personnes emprisonnées ou tuées par la police iranienne dans le cadre des manifestations actuelles. Le ministre a exprimé toute sa solidarité aux femmes iraniennes qui demandent la liberté et l'égalité. Pour sa part, le Luxembourg continuera à appeler les autorités iraniennes à cesser cette répression brutale, et à soutenir les différents efforts entrepris au niveau européen et international pour protéger les défenseurs et défenseuses des droits humains. C'est dans cette optique que le ministre Asselborn et ses homologues européens ont récemment adopté des sanctions contre 11 individus et 4 entités impliqués dans la répression, et s'apprêtent à adopter de nouvelles sanctions dans les prochains jours.

Israël et Palestine

S'agissant de la situation en Palestine, le ministre Asselborn a déploré la répression croissante à laquelle la population palestinienne doit faire face, que ce soit celle exercée par l'armée israélienne, par les colons armés ou par l'Autorité palestinienne en Cisjordanie et par le Hamas à Gaza. Le ministre a regretté les bombardements répétés de la bande de Gaza, dont la population se trouve dans la plus grande prison du monde à ciel ouvert. Passant en revue les derniers développements, dont les questions liées au processus de paix, à la colonisation qui se poursuit chaque jour et aux tensions grandissantes, le ministre Asselborn a décrit un cercle vicieux qui rend impossible de facto la solution à deux Etats. Faute d'une solution politique juste et durable, il restera une occupation éternelle qui est la source de conflits répétés.

Syrie et Yémen

Le ministre a rappelé l'importance de ne pas oublier les conflits en Syrie et au Yémen, qui continuent à ravager même s'ils ne font plus la une de l'actualité. La situation au Yémen est considérée comme la pire catastrophe humanitaire dans le monde. En Syrie, Bachar al-Assad a détruit son propre pays, à l'aide de la Russie, afin de se maintenir au pouvoir. Les drones iraniens et les bombardements russes que l'on peut observer aujourd'hui en Ukraine - et qui ne laissent derrière eux que de la misère et de la destruction - ne sont malheureusement pas de phénomènes nouveaux: les populations civiles en Syrie et au Yémen en ont déjà été victimes ces dernières années. A cet égard le ministre a souligné l'importance de tenir responsables les auteurs de crimes de guerre – partout dans le monde.

Afghanistan

S'agissant de l'Afghanistan, le ministre a fait remarquer que, contrairement à ce que les Talibans ont affirmé lors de leur prise de pouvoir en 2021, la situation des filles et des femmes, qui sont privées de leur droit à l'éducation, ne s'est pas améliorée. Le Luxembourg s'engage pour l'amélioration de la situation des femmes en Afghanistan. Le ministre est ensuite revenu sur les développements depuis la prise de pouvoir par les Talibans, notamment en ce qui concerne l'évacuation de ressortissants afghans depuis l'Afghanistan et l'accueil de réfugiés afghans au Luxembourg. Ainsi, depuis 2021 et jusqu'à fin octobre, 210 Afghans ont obtenu une protection internationale au Luxembourg.

Migration

Face à l'augmentation ces derniers mois des flux migratoires en direction de l'UE, le ministre Asselborn a réaffirmé à nouveau la nécessité urgente pour l'UE de s'accorder sur une gestion ordonnée, automatique et obligatoire de la migration. Le Luxembourg continuera à s'engager pleinement pour faire avancer ces dossiers, que ce soit au sein de l'Union européenne, dans le cadre du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, ou encore au Conseil des droits de l'Homme où notre engagement pour les droits humains va de pair avec un engagement pour une politique migratoire humaine, a souligné le ministre.

La solidarité doit être primordiale, aussi bien avec les réfugiés qui fuient leurs pays qu'avec les pays européens de première entrée. Le Luxembourg participe ainsi régulièrement à des opérations de relocalisation pour soulager les Etats membres de l'UE qui se trouvent sous pression migratoire. Le fait que deux tiers des Etats membres n'ont pas encore participé du tout à une relocalisation montre, selon le ministre, qu'une solidarité obligatoire au sein de l'UE est indispensable.

Réseau diplomatique

Le ministre Asselborn a par la suite noté que les bouleversements mondiaux actuels nécessitent, encore davantage que par le passé, que nous passions régulièrement en revue nos méthodes de fonctionnement afin de nous donner les moyens nécessaires pour assumer nos responsabilités au niveau international, et en même temps être en mesure de défendre nos intérêts. L'adaptation de notre réseau diplomatique en fait partie. Dans cette optique, le ministre a fait savoir que la Représentation permanente du Luxembourg auprès de l'OTAN sera séparée de l'Ambassade bilatérale en Belgique, pour ainsi permettre à deux Ambassadeurs distincts de se focaliser davantage sur le travail à l'OTAN d'un côté, et sur les nombreux aspects des relations bilatérales avec notre voisin belge de l'autre. Le ministre a également annoncé que la décision a été prise d'ouvrir une ambassade résidente à Seoul en Corée du Sud.

Conclusion

En guise de conclusion, Jean Asselborn a noté que le 24 février 2022 a constitué un véritable changement de paradigme pour l'ordre international et surtout pour l'Europe. La paix sur le continent européen n'est plus une évidence. Le Président de la Russie a décidé, en lançant une agression militaire contre l'Ukraine, de rompre de manière unilatérale la coexistence pacifique en Europe.

Cela illustre une fois de plus à quel point le projet de paix qu'est l'Union européenne est précieux et indispensable. Une des leçons qu'il faudra en tirer est sûrement le besoin d'investir, à l'avenir, encore davantage dans la paix: pour protéger nos concitoyens, notre mode de vie, nos valeurs et idéaux de tolérance et de respect.

Dans ce sens, la situation actuelle peut être un accélérateur pour un bon nombre de projets déjà entamés, tels que la transition énergétique, le renforcement de notre résilience, la réduction de notre dépendance, la protection de nos infrastructures et le renforcement de nos capacités de défense.

Pour que l'UE et ses citoyens puissent réussir dans ces changements, et sortir renforcés de cette crise, l'unité au sein de l'Union européenne sera primordiale, a affirmé Jean Asselborn.

Le ministre Asselborn a conclu en soulignant avec fermeté l'importance de protéger l'Etat de droit, tant au Luxembourg que dans l'UE. Les développements en Russie nous ont montré ce qui peut advenir quand l'Etat de droit est peu à peu évidé au point qu'il n'y a pas plus de contre-pouvoirs.

Communiqué par le ministère des Affaires étrangères et européennes

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