Déclaration de politique étrangère 2000 (version originale française)

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,

Soumettre à la réflexion de la Chambre des députés les orientations de politique étrangère du gouvernement est un privilège en toutes circonstances. Le faire à l'aube du troisième millénaire, du nouveau siècle, à l'aube d'une nouvelle décennie, ou plus modestement au début d'une nouvelle législature est un défi que je relève avec détermination et enthousiasme.

Avec détermination, car le Luxembourg a besoin plus que jamais d'une politique étrangère faite de continuité et d'engagement, de solidarité et de responsabilité.

Avec enthousiasme, car je suis consciente que dans notre pays, la politique étrangère tire sa force d'un large consensus national, que j'entends approfondir à travers un dialogue suivi avec la Chambre, avec les forces vives du pays et avec nos concitoyens.

Aujourd'hui, tirant bénéfice de la globalisation des connaissances, les Luxembourgeois entendent participer de façon de plus en plus active à la formulation et à la mise en oeuvre de notre politique étrangère. Ils le font par leur contribution au débat public ainsi que par le biais du volontariat en faveur du développement des pays les plus démunis, des opérations de maintien de la paix ou encore de la consolidation des démocraties émergentes. Je me félicite qu'à travers cette participation, souvent des plus jeunes, le consensus national ait pris une dimension plus profonde et plus active.

Notre société prend de plus en plus conscience que l'étroite interrelation entre le devenir de notre pays et les évolutions au-delà de nos frontières affectent désormais directement notre vie quotidienne, et que chacun a un rôle à y jouer. Il s'agit d'un phénomène nouveau que les pouvoirs publics devront accompagner.

Cette année, le Luxembourg atteindra l'objectif qu'il s'était fixé de consacrer 0,7% de son PNB à l'aide publique au développement. Il s'agit là d'un effort considérable qui a été voulu par nos concitoyens, et démontre notre souci de solidarité avec les plus défavorisés, et qui ouvre à notre pays la porte du cénacle restreint des cinq pays ayant atteint cet objectif central recommandé par les Nations Unies.

Cette volonté de participer à l'effort international de solidarité se manifeste également dans les actions individuelles des Luxembourgeois :

Quand, en quelques semaines, l'appel public de six ONG en faveur des réfugiés de la crise du Kosovo suscite la plus importante collecte de fonds privés dans l'histoire de notre pays,

  • quand, par roulement, 75% des effectifs de l'armée luxembourgeois ont servi dans les opérations de maintien de la paix dans les Balkans,
  • quand, stimulés par le cadre offert par notre politique d'aide humanitaire et de coopération au développement, les ONG et les bénévoles font preuve d'un engagement toujours croissant dans notre politique d'appui aux populations les plus démunies,
  • quand, lors d'une récente mission d'observation électorale, le Luxembourg a fourni, en chiffres absolus, le 4e contingent d'observateurs volontaires parmi les pays de l'OSCE,

la participation de ces hommes et de ces femmes rend possible et crédible notre politique d'engagement en faveur des libertés fondamentales et de la démocratie. Souvent, nos concitoyens - qu'il soient Luxembourgeois ou non - excellent dans cet engagement international, car ils sont bien servis par le multilinguisme, l'ouverture d'esprit et l'appréhension d'une société multiculturelle qui caractérisent notre pays.

Cette participation directe des Luxembourgeois en appui de la politique étrangère du pays est très encourageante. Elle constituera un complément appréciable à l'appui que cette Chambre voudra apporter à l'action du gouvernement. Celui-ci a d'ores et déjà démontré sa disponibilité d'apporter à la Chambre, à ses commissions et à ses membres une information qui soit systématique, régulière et substantielle. Je me félicite de l'accueil que vous avez bien voulu réserver à ce souci de transparence et de dialogue.

A un moment où notre environnement international connaît les évolutions les plus profondes qu'il ait subies depuis la fin de la 2e Guerre Mondiale, nous sommes placés devant la responsabilité de définir quelle est la place que notre pays entendra occuper sur la scène internationale en ce début du 21e siècle. Les objectifs de la politique étrangère que nous entendons mener s'inscrivent dans la continuité : Il s'agira de garantir la pérennité des engagements qui, durant les décennies passées, nous ont permis d'assurer notre place en tant qu'Etat souverain qui joue son rôle en Europe et dans le monde. Notre action extérieure visera donc à :

  • préserver notre souveraineté et notre indépendance à travers notre intégration dans l'Union européenne
  • garantir notre sécurité extérieure et contribuer à la construction d'un monde en paix
  • défendre et propager nos valeurs fondamentales
  • contribuer au développement économique du pays.

Notre pays a toujours été ouvert sur le monde extérieur : ouverture d'esprit lorsqu'il s'agissait d'inclure des apports extérieurs dans notre réflexion et dans notre politique, ouverture d'action quand il s'agissait de défendre nos intérêts politiques et économiques au-dehors de nos frontières.

Nous devons cependant prendre conscience que dans un monde en voie de globalisation, l'avantage comparatif de notre ouverture sur le monde ira en s'amenuisant. Une politique étrangère qui se contenterait de vouloir préserver les acquis ne saurait répondre à l'attente du pays. Nous serons appelés à concevoir une politique étrangère plus affirmée que par le passé, une politique d'engagement sur la scène internationale.

Le Luxembourg aura la chance d'aborder les défis de demain de concert avec des pays amis alliés et partenaires. Nous attacherons un soin tout particulier au développement de nos relations internationales, en tout premier lieu avec nos voisins immédiats, auxquels nous lient des liens intenses et confiants.

En second lieu nous veillerons à maintenir nos liens privilégiés avec nos amis européens et transatlantiques avec lesquels nous partageons des valeurs fondamentales.

Ces relations privilégiées ne se concevront jamais au détriment d'un approfondissement de nos relations avec les autres nations du monde qui nous honorent de leur amitié, et avec lesquelles nous entretenons des relations empreintes de cordialité et de respect mutuels.

Le Gouvernement est pleinement conscient de l'importance d'assurer la cohésion de son action à l'extérieur. La création d'un ministère qui intègre les Affaires étrangères, le Commerce extérieur, la Coopération au développement, l'Action humanitaire et la Défense illustre la façon coopérative et cohérente dont nous entendons mettre en œuvre la politique extérieure de notre pays.

Faire l'usage le plus efficace des ressources limitées qui sont à notre disposition, est une des priorités que nous nous sommes fixées dans la gestion de l'action diplomatique du pays. L'accord de coalition du présent gouvernement souligne à juste titre la nécessité d'une politique d'adéquation des moyens de notre politique extérieure. Lors des discussions budgétaires, je ne manquerai pas de soumettre à la Chambre des propositions visant à mettre en œuvre la politique d'engagement sur la scène internationale que le gouvernement entend mener.

Notre engagement en faveur de l'Europe

L'engagement premier du Luxembourg est, a été et sera en Europe. Au cours des années à venir nous entendons continuer à être des partenaires actifs et déterminés dans le processus d'approfondissement et d'élargissement de l'Union européenne qui est en cours.

Le Grand-Duché de Luxembourg a progressivement développé son identité tout au cours du dernier millénaire. Son caractère spécifique en Europe découle de son expérience multi-séculaire du pluri-culturalisme ainsi que de sa situation géographique à cheval sur les civilisations française et germanique. Il y a dix siècles le Luxembourg fut érigé en tant qu'entité politique autonome. La période qui suivit ne s'avéra pas forcément facile pour le territoire qui avait ainsi été constitué.

Toujours est-il qu'il y a cinq siècles, en l'an 1500, naissait à Gand le Prince sur l'empire duquel le soleil ne devait jamais se coucher, Charles Quint, qui reçut à sa naissance le titre de Duc de Luxembourg. L'époque d'occupation étrangère ne fut pas favorable à la constitution d'une identité propre. Il y a deux siècles encore, personne au Luxembourg ne songeait à une existence souveraine et indépendante. L'Autriche venait d'être relayée par la France de Napoléon, en attendant…. le Congrès de Vienne.

Et pourtant, un siècle plus tard notre pays figurait parmi les Etats participant aux Conférences de La Haye, qui ont posé les fondements du droit international public moderne.

Ce sont là des réalités contrastées, observées à l'échelle des siècles. L'on hésite dès lors à projeter le regard vers le prochain siècle, l'avenir lointain. Il en reste qu'en cette année charnière entre deux siècles, nous savons que nous avons voix au chapitre au sein de l'Europe.

Il nous appartient de dire en premier lieu que nous sommes, et que nous entendons rester les maîtres de notre propre sort. C'est à nous, à tous ceux qui vivons au Luxembourg, qui y travaillons, et dont les familles se retrouvent dans une communauté de destin, qu'il appartient d'explorer, de consolider et de développer cette détermination. Ce que nous voulions au 19e et 20e siècles, nous le voulons encore au 21e : nous voulons rester ce que nous sommes. Nous voulons rester Luxembourgeois au sein d'une Europe démocratique, pacifique et prospère. Partenaire à l'histoire et à la personnalité complexe, partenaire confiant dans son héritage et dans son présent multiculturel, le Luxembourg a gagné le droit de formuler ce qu'il pense, souhaite et propose pour construire l'avenir dans un contexte européen qui ne sera pas immobile.

Pareille affirmation représente tout le contraire d'un repli frileux sur les acquis du passé. Au contraire, elle est à nos yeux une condition essentielle pour assurer la paix en Europe. Souvenons-nous en effet que le respect de l'égalité du plus petit Etat fut l'un des fondements de l'Europe unie et qu'il contribua grandement à la stabilité du nouvel ensemble. Parce que nous sommes déterminés à assurer la pérennité de l'identité luxembourgeoise dans une Europe en paix avec elle-même, nous sommes prêts à accepter le mouvement, et à procéder aux évolutions et aux adaptations nécessaires.

Le Luxembourg du 21e siècle trouve également ses racines le 9 mai 1950, lorsque Robert Schuman développa la vision qui allait donner naissance à l'Union européenne. L'Europe fut, est et demeurera le garant de notre souveraineté, de notre liberté de choix, de notre prospérité et, en fin de compte, de la défense des valeurs fondamentales qui font parti de notre identité.

Dans deux mois, nous aurons l'occasion de commémorer le 50e anniversaire de ce véritable tournant dans l'histoire de notre nation et de notre continent que représente l'unification européenne. Le hasard du calendrier fera que cette date coïncidera avec le 60e anniversaire du 10 mai 1940, qui fut l'un des moments les plus douloureux de notre histoire. Coïncidence opportune, dirais-je, car quelle meilleure leçon que celle donnée par les générations de nos parents et de nos grands-parents, qui nous ont appris que l'union doit prévaloir sur l'exclusion et que l'avenir ne peut se construire que sur une coopération confiante avec nos voisins.

Le processus d'unification européenne a connu le succès que l'on sait, et a été accepté par les populations de l'Europe, parce qu'il se fondait sur la participation de tous les Etats, y compris du plus petit d'entre eux, au processus de décision. L'Europe élargie aux limites géographiques du continent qui est en train de prendre forme fera bien de se souvenir de ce principe. A l'heure actuelle il n'existe, en effet, pas de base en Europe sur laquelle on pourrait remplacer la majorité des Etats par la majorité des citoyens. En fait, un tel saut qualitatif reste impensable dans une Europe dont l'Histoire enseigne qu'une telle évolution ne saurait recueillir l'assentiment et la confiance des Etats. La présence de chacun des Etats membres dans les mécanismes de décision garantit la stabilité et le dynamisme de l'ensemble, ce qui bénéficie aux membres d'aujourd'hui ainsi qu'à ceux de demain.

L'Union européenne ne saurait fonctionner de façon adéquate sans qu'un juste équilibre soit trouvé entre ces divers éléments, dans le respect de l'équilibre entre les nations européennes, et avec le bénéfice de l'adhésion de ses citoyens. Sur ces bases, le Luxembourg, qui fut l'un des pays fondateurs de l'Europe au départ se doit également d'être l'un de ses fondateurs à l'avenir.

La réussite du processus d'élargissement de l'Union européenne qui est en cours représente l'un des défis majeurs pour son devenir. Il est indissociablement lié à l'éclatement des carcans imposés aux peuples de l'Europe depuis la dernière guerre et reflète l'impatience de ces millions d'Européens pressés de rejoindre au plus vite cette autre Europe libre, démocratique et prospère.

L'élargissement ouvre aux peuples de l'Europe la perspective d'une identité forte, ayant atteint ses frontières géographiques nouvelles, maîtresse de sa monnaie et de son économie.

En contrepoint, l'élargissement fait également surgir devant nous le spectre d'une construction assemblée à la hâte, qui ne serait pas en mesure de fonctionner, parce que ses gouvernements et citoyens ne seraient plus en mesure de prendre des décisions en commun faute de se connaître et de s'intéresser suffisamment les uns aux autres. Trop souvent encore l'Europe est celle des ignorances ; or l'on ne peut aimer et comprendre que ce que l'on connaît.

C'est pourquoi je souhaite lancer un appel pour faire de nécessité vertu, par initiative individuelle et par devoir moral : ce serait, ce sera tellement vitalisant de voir nos concitoyens aller les uns vers les autres, chez les autres, pour découvrir des diversités insoupçonnées et saisir des complexités qui ouvriront la voie à une compréhension et à une coopération, enfin, solidement ancrées.

Les gouvernements ont également leur contribution à faire : il convient de soutenir les candidats dans leur effort de préparation en leur transmettant le savoir-faire qui facilitera leur insertion dans l'Union. Je me réjouis de pouvoir dire que le Luxembourg s'est engagé résolument sur cette voie en lançant des programmes de coopération en matière de formation institutionnelle et bancaire.

Les décisions prises en décembre dernier à Helsinki s'inscrivent dans la logique ouverte par le Conseil européen de Luxembourg en décembre 1997. Cette logique regroupe désormais les candidats dans un cadre unique au sein duquel ils s'attacheront à partager les valeurs et les objectifs de l'Union européenne. Dans ce contexte nous saluons la détermination de la Turquie à poursuivre des réformes internes en vue de satisfaire aux critères de Copenhague et de transformer son système politique et économique de sorte à faciliter sa future intégration dans l'ensemble européen.

Dans le processus d'élargissement, les aspirations sont immenses tout comme les enjeux pour la préservation de la stabilité et de la démocratie sur le continent. L'Europe élargie sera plus diverse et éprouvera de ce fait davantage de difficultés à dégager, formuler et mettre en œuvre un programme d'intérêt général. La réussite de l'entreprise dépendra de notre capacité à préserver à l'Union sa cohésion et sa dynamique.

Jusqu'à présent, les Européens se sont abstenus de définir la finalité de leur projet, ce qui présentait l'avantage de conserver à la construction européenne le caractère d'un processus dynamique et en devenir. Mais la question de la finalité du projet européen ne saurait être éludée indéfiniment. C'est à la Conférence intergouvernementale qu'il appartiendra de donner à l'Union élargie une perspective d'identité et de cohésion.

La CIG, appelée à concilier élargissement et approfondissement, ne pourra se passer d'une réflexion sur le fonctionnement et l'organisation future d'une Europe élargie. Les contacts réguliers que le gouvernement entretient avec la Chambre et sa Commission des Affaires étrangères m'ont déjà offert maintes occasions de vous exposer nos vues sur les questions qui sont pour nous d'un intérêt particulier : l'équilibre institutionnel au sein de l'Union, la représentation dans la Commission et dans les autres institutions européennes, la pondération des votes ainsi que les domaines du vote à majorité qualifiée.

Une idée-force plus fondamentale que nous partageons avec nos partenaires du Benelux, et à laquelle le gouvernement attache beaucoup d'importance, est la coopération renforcée qui permet de gérer la diversité et d'éviter l'enlisement. Nos idées en la matière ont d'ailleurs été largement reprises par la Commission et nous nous en réjouissons.

L'Europe n'est pas seulement une grande vision, et elle ne saurait se limiter au grand chantier que je viens d'esquisser. Notre politique européenne c'est, aussi, évidemment, la défense de nos intérêts nationaux. Cette défense nous l'assumons avec détermination. Mais elle ne saurait suffire à elle seule. Si nous voulons être perçus en tant que partenaires constructifs et fiables, nos devons inscrire la défense de nos intérêts dans une politique de responsabilité et de participation constructive à la construction européenne. Les intérêts nationaux du Luxembourg et ceux de l'Europe sont inextricablement liés, ce sont les deux faces d'une même médaille.

C'est pourquoi, dès la prise de fonction j'ai initié la mise en place de procédures destinées à assurer une transposition plus rapide de la législation communautaire en droit luxembourgeois. Le retard que nous avons connu au cours de ces dernières années ne sied ni à nos convictions européennes ni à nos intérêts nationaux. Je ne saurais m'en satisfaire.

Depuis les premiers jours de la construction européenne, le Luxembourg est siège d'institutions européennes. Cette tâche nos honore. Nous continuerons à l'assumer dans un esprit d'hospitalité, de responsabilité et de respect des Traités. L'Union européenne, élargie et intégrée, trouvera à Luxembourg des conditions de travail qui sont à l'image de notre ambition commune.

C'est également notre attachement à l'Europe qui nous guide dans le domaine de la fiscalité, où les malentendus et les procès d'intention à notre égard sont légion. En matière de fiscalité de l'épargne nous continuerons de préconiser le modèle de coexistence qui a été défini par le Conseil Ecofin en décembre 1997. Le lien entre la fiscalité de l'épargne et le code de conduite en matière d'impôts sur les sociétés garde toute sa valeur, dans la mesure où il s'agit d'éviter des distorsions de concurrence. Dans ce débat, il importe de garder à l'esprit l'intérêt financier de l'Europe, qui, au moment de son élargissement et de l'accueil en son sein de nouvelles économies ne saurait s'accommoder d'un risque de fuites de capitaux. Aussi, est-il indispensable de s'assurer que toute solution dans ce dossier soit assortie d'un accord négocié avec des pays-tiers. De même, l'équité exige que toute solution s'applique à l'ensemble du territoire de l'Union européenne et de ses territoires dépendants.

Notre engagement en vue de préserver notre sécurité extérieure

Les événements de la dernière décennie ont clairement montré que la paix relative que l'Europe avait connue durant le demi-siècle écoulé, avait été construite sur des bases illusoires. Une fois levé le couvercle de la dissuasion réciproque, il est très rapidement apparu que les anciennes lignes de fracture étaient encore vivaces sur notre continent, et que les plaies héritées de l'Histoire pouvaient se rouvrir à tout moment. La crise des Balkans a servi à cet égard de révélateur. La paix, la sécurité et la stabilité en Europe doivent être obtenues au prix d'efforts constants et ne pourront être préservées qu'au prix d'une extrême vigilance.

L'engagement du Luxembourg en faveur du maintien de la sécurité en Europe et dans le monde constitue, à côté de l'engagement européen, un pilier essentiel de notre action internationale. Il se traduit par le choix fort que nous avons fait de participer dès le début, et en tant que membre à part entière, à l'Alliance Atlantique et à l'OTAN.

L'Alliance est désormais appelée à s'adapter aux mutations de l'environnement international en Europe. Outre sa fonction originelle d'autodéfense collective contre une éventuelle agression extérieure, elle est désormais prête à assumer des missions de gestion de crise et de maintien de la paix sur le territoire de l'Alliance et de son voisinage immédiat.

Le sommet de Washington a clairement défini quelles étaient ces nouvelles missions. "Cette nouvelle Alliance sera plus large, plus performante et plus souple, déterminée à assurer la défense collective et capable d'entreprendre de nouvelles missions, notamment en contribuant à la prévention efficace des conflits et en s'engageant activement dans la gestion des crises".

Mais l'OTAN n'est désormais plus la seule organisation à œuvrer en faveur de la sécurité et de la stabilité en Europe : l'OSCE et le Conseil de l'Europe ont renforcé leur action en matière de prévention des crises et de réhabilitation de la société civile ainsi que du fonctionnement démocratique de l'Etat après conflit.

Les événements de ces dernières années en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo ont montré combien était complexe et hasardeuse la tâche de restauration de la paix entreprise par la communauté internationale. Il ne s'agit non seulement de mettre fin à des conflits souvent sauvages, mais d'offrir à ces populations déchirées par des haines ataviques et le rejet de l'autre un cadre nouveau dans lequel elles puissent coexister. Pareil objectif ne pourra être atteint que si les différents partis et organisations internationales engagés dans la reconstruction coopèrent de manière cohérente et complémentaire sous l'égide du Conseil de Sécurité des Nations Unies, qui a une responsabilité globale pour le maintien de la paix et de la sécurité internationale :

  • ONU et OTAN pour la restauration de la paix et de la stabilité ;
  • OSCE et Conseil de l'Europe pour l'instauration de l'état de droit et la réhabilitation d'une société fonctionnant selon des règles démocratiques ;
  • Union européenne, organisations humanitaires et ONG pour la reconstruction économique et sociale, ainsi que pour le pansement des plaies psychologiques.

Le Luxembourg n'a pas ménagé ses efforts dans l'action concertée des organisations internationales et des pays européens en faveur de la stabilisation des Balkans puisqu'en 1999 il a déboursé la somme de quelque 600 millions de flux pour la restauration de la paix dans de cette région.

La lenteur des progrès accomplis reflète combien est difficile et complexe la tâche dans laquelle nous sommes engagés. Il est cependant clair que la voie choisie est la seule possible si nous voulons éviter que les crises ne se reproduisent indéfiniment. Notre objectif est de créer des conditions pour une coexistence dans la prospérité retrouvée, au sein de sociétés multiethniques et multiculturelles, démocratiques et respectueuses des droits des minorités, qui soient solidement ancrées dans des solidarités pan-européennes vigoureuses. Ainsi les Balkans pourront retrouver la perspective d'un avenir viable et porteur d'espoir pour sa population.

L'Union européenne s'efforce pour sa part de tirer les leçons des difficultés rencontrées notamment durant les événements du Kosovo, qui ont révélé ses lacunes dans le domaine de la gestion militaire des crises, ainsi que les insuffisances dans la conduite de sa politique étrangère.

Les Conseils européens de Cologne et de Helsinki ont pris à ce sujet des décisions importantes qui visent à renforcer la politique étrangère de l'Union . L'Union s'est ainsi dotée des instruments nécessaires pour mieux gérer la définition au jour le jour de sa politique étrangère et de sécurité commune. Cette politique a acquis une plus grande visibilité depuis la désignation de M. Javier Solana en tant que Haut Représentant pour la Politique étrangère de l'Union, fonction qu'il cumule d'ailleurs avec celle de secrétaire général de l'UEO. Le tandem formé par M. Solana et la Présidence devrait permettre à l'Union de faire valoir ses vues avec davantage de force vers l'extérieur.

Par ailleurs, les chefs d'Etat et de gouvernement ont reconnu qu'il était désormais indispensable d'adjoindre aux politiques existantes de l'Union européenne une dimension de sécurité et de défense en tant qu'instrument et prolongation indispensables de la politique étrangère commune.

Ainsi l'Union européenne a-t-elle pris la décision de se doter d'ici l'an 2003 d'une force militaire d'intervention rapide qui la mettra en mesure d'apporter une réponse aux crises en Europe avec la célérité et l'autorité requises.

Si le Luxembourg veut continuer de s'acquitter de ses responsabilités dans ce domaine et rester un acteur de la politique étrangère et de sécurité de l'Union, il ne pourra pas se soustraire à l'obligation de procéder à une adaptation de son outil militaire à ces nouvelles tâches de maintien de la paix. Nous devons prendre conscience que la participation de notre pays aux opérations de gestion de crises en Europe ne pourra pas se faire sans que nous procédions à un accroissement significatif des ressources budgétaires que nous consacrons à notre effort de défense, qui devra, à l'avenir, se situer à un niveau qui reflète nos ambitions et nos responsabilités.

Pour préserver la stabilité et la sécurité du continent européen, nous avons besoin d'une interaction concertée et solide entre l'Amérique du Nord, la Russie et l'Europe. Si le lien transatlantique reste d'une importance existentielle pour le Luxembourg et l'Europe, il est essentiel d'établir par ailleurs un partenariat solide avec la Russie. Sans un tel partenariat, basé sur des valeurs partagées entre les deux pôles stratégiques que constituent l'Europe occidentale et atlantique et la Russie, il n'y aura en Europe ni paix ni stabilité ni prospérité garanties.

Les adversaires de jadis coopèrent désormais dans de nombreux domaines, politique, économique et militaire. En dépit du dialogue engagé sur une large échelle et l'indéniable rapprochement des valeurs qui s'en est suivi, la voie choisie reste pavée d'obstacles. Un tel obstacle sont les événements en Tchétchénie. Les informations de plus en plus précises que nous recevons sur les massacres et atrocités qui auraient été perpétrés dans cette région ne sauraient nous laisser indifférents. Quelle que soit la complexité de la situation, nous ne pouvons admettre que, sous prétexte de rétablissement de l'ordre et de lutte contre le terrorisme, des forces militaires s'en prennent de manière massive et systématique à des populations civiles, en contrevenant gravement aux règles du droit humanitaire international.

Aussi en appelons-nous à la coopération des autorités russes :

  • pour qu'elles établissent la transparence en autorisant la présence sur place d'observateurs internationaux et des médias
  • pour qu'elles offrent aux organisations humanitaires internationales les conditions qui leur permettent de subvenir aux besoins immédiats de la population tchétchène, des réfugiés et des personnes déplacées, et de rétablir en leur faveur les conditions de vie décentes sur les territoires dont ils sont originaires
  • pour qu'elles identifient les responsables de violations graves des droits de l'homme et du droit international humanitaire, et qu'elles veillent à ce que ceux-ci soient jugés pour leurs crimes.

Notre engagement pour la défense et la promotion de nos valeurs

Nous l'avons indiqué dans la Déclaration gouvernementale : Le respect et la promotion des droits de l'homme représentent un élément essentiel de la politique du gouvernement luxembourgeois ; à ce titre la dimension des droits de l'homme sous-tend l'ensemble de nos relations extérieures.

A l'heure actuelle, nul gouvernement ne saurait plus se prévaloir du respect du principe de souveraineté ou de la non-ingérence dans les affaires intérieures pour prétendre violer impunément les droits de l'homme à l'intérieur de ses frontières. Les différents pactes et conventions internationales en matière des droits de l'homme le proclament, les mécanismes intergouvernementaux de contrôle de la mise en œuvre de ces conventions le confirment : les droits de l'homme ont valeur universelle et les Etats sont solidairement et collectivement responsables de leur mise en oeuvre partout dans le monde.

A la tribune de l'Assemblée générale des Nations Unies, M. Kofi Annan a plaidé en faveur de la reconnaissance internationale d'un droit voire d'un devoir d'intervention humanitaire par la communauté internationale aux fins de faire cesser la perpétration de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité dans un pays donné. En restant passifs devant de telles situations, les Etats se rendraient coupables de non-assistance à peuple en danger.

L'institution, par le Conseil de sécurité des Nations Unies, des tribunaux pénaux internationaux pour l'Ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, l'adoption du statut de la Cour criminelle internationale, les discussions autour de l'ex-dictateur chilien Pinochet démontrent clairement que l'opinion publique internationale n'est plus disposée à permettre que les personnes responsables d'atteintes graves aux droits de l'homme invoquent le respect de la souveraineté pour assurer leur propre impunité.

La promotion des droits de l'homme représente un facteur important dans nos relations avec les autres pays : ainsi il arrive que nous limitions ou que nous suspendions nos relations d'Etat à Etat dans le domaine politique, le domaine économique et dans le domaine de la coopération au développement en cas de violation grave et répétée des droits de l'homme par un gouvernement donné. Ceci ne signifie pas que nous nous arrogions le droit de nous ériger en juges des actions de gouvernements dans d'autres parties du monde : sauf dans des cas exceptionnellement graves qui appellent à la condamnation, voire à des sanctions, nous avons choisi de pratiquer un dialogue constructif avec les pays concernés. Par l'institution d'un tel dialogue, qui peut être complété le cas échéant par une assistance technique et financière, nous favorisons la compréhension mutuelle et nous nous efforçons d'accompagner les pays concernés dans la mise en pratique des engagements auxquels ils ont souscrit en matière de promotion des droits de l'homme. Tel est p.ex. le cas avec la République populaire de Chine et la République islamique d'Iran.

Notre engagement en faveur des droits de l'homme se manifeste également dans les organisations internationales dont le Luxembourg est membre, en particulier à l'ONU et, en ce moment, à la Commission des Droits de l'homme, où nous achevons un mandat de trois années. Le Luxembourg y promeut activement des initiatives de lutte contre le travail forcé des enfants, en matière des droits de la femme et en faveur de l'abolition de la peine de mort. En coopération avec des organisations internationales ou avec des ONG, nous finançons par ailleurs des projets concrets favorisant la liberté d'expression, la protection des droits des femmes et la formation d'une presse indépendante en Afrique, en Europe orientale et en Amérique latine.

Depuis 1992, les crises successives en Ex-Yougoslavie ont confronté le Luxembourg au problème des réfugiés en provenance des Balkans. Le printemps 1999 a donné lieu à un afflux d'une envergure sans précédent. Notre pays se trouve dans une situation particulière par rapport à tous nos partenaires européens du fait que la très grande majorité de ces réfugiés sont originaires de la République yougoslave du Monténégro. Aujourd'hui, nos comptons sur cent habitants un réfugié yougoslave arrivé au Luxembourg au cours des 26 derniers mois.

La politique que nous menons à l'égard des réfugiés est et restera une politique de générosité et de responsabilité. Notre pays sera une terre d'asile pour ceux dont les droits de l'homme ne peuvent plus être garantis dans un avenir prévisible dans leur pays d'origine. Il sera une terre d'accueil pour ceux qui cherchent un refuge momentané pour échapper aux affres d'une crise. Nous aidons financièrement et matériellement les réfugiés à retourner et à se réinstaller dans leur pays d'origine. Ces aides individuelles sont assorties d'une aide humanitaire collective aux communes et pays d'origine, ainsi qu'aux autres pays de la région qui accueillent des réfugiés. Par ailleurs nous apportons une contribution substantielle aux programmes de stabilité de l'Union européenne, de l'ONU et d'autres organisations internationales. Sur les 14 derniers mois, le total de ces aides publiques en faveur des réfugiés - qui ne comprennent pas les programmes d'accueil, d'hébergement et de scolarisation au Luxembourg - s'élèvent à 425 millions de francs luxembourgeois. A ce montant, il convient d'ajouter des fonds privés de 127 millions de francs qui résultent de la collecte lors de la crise du Kosovo.

Depuis octobre 1999, le ministère des Affaires étrangères a établi un bureau luxembourgeois au Kosovo, qui prépare le retour des réfugiés et gère les divers programmes luxembourgeois d'aide humanitaire dans cette province.

Aider à retourner dans leurs foyers ceux qui ne bénéficieront pas du statut d'asile à Luxembourg est pour le gouvernement une responsabilité grave :

  • responsabilité vis-à-vis des réfugiés à rapatrier, à qui il faut expliquer l'intérêt d'une réinsertion assistée et rapide dans leur région d'origine, ce qui évitera un déracinement de longue durée ;
  • responsabilité vis-à-vis de ceux qui bénéficient de l'asile, dont la situation mérite tout notre appui matériel et psychologique ;
  • responsabilité vis-à-vis des réfugiés de demain et d'après-demain à qui nous devons assurer notre disponibilité d'accueil.

Au-delà de la responsabilité politique du gouvernement, il s'agit aussi d'une responsabilité partagée qui fait appel à la conscience de toute la société. Pour nous tous, cette responsabilité est douloureuse à assumer. Ne pas l'assumer et faire croire que nos disponibilités sont illimitées, serait irresponsable. Evitons d'étouffer par nos bonnes intentions d'aujourd'hui la générosité dont auront besoin les persécutés de demain.

Les valeurs que nous défendons incluent la responsabilité et la solidarité à l'égard des plus démunis. A l'ère de l'interdépendance chaque jour plus grande entre les économies, les sociétés et les cultures, la solidarité reste plus que jamais une partie intégrante de notre politique étrangère. Le Luxembourg ne saurait se désintéresser des pays en développement ni du sort des populations les plus démunies de la planète. La mondialisation rapproche les peuples en même temps qu'elle les confronte aux immenses inégalités qui existent entre elles. Pour que la globalisation bénéficie à tous les pays et à tous les êtres humains, le fossé qui sépare riches et pauvres doit être réduit. Personne ne gagne à laisser s'aggraver les tensions entre le Nord et le Sud, à laisser se multiplier les conflits ethniques et augmenter les flux migratoires. C'est dans cet esprit que nous intervenons dans les organisations inter-gouvernementales.

Notre aide publique au développement s'élève cette année à 5,1 milliards de francs, ce qui correspond à 0,7% de notre produit national brut. Nous nous proposons de dépasser ce pourcentage et de porter notre aide au développement à 1% en termes de PNB d'ici l'année 2005. Ces chiffres quelque peu abstraits traduisent le fait que nous nous efforçons d'aider les plus déshérités à prendre eux-mêmes leur avenir en main. La grande priorité de notre politique de coopération reste la lutte contre la pauvreté. Pour cette raison, nous avons concentré notre action dans le secteur de l'éducation, de la santé de base, de l'eau et du développement rural intégré. Nous attachons une attention accrue à la protection de l'environnement et au rôle économique et social crucial que jouent les femmes dans les sociétés en développement.

Chaque année, de trop nombreux conflits armés, des catastrophes naturelles d'une grande ampleur, font des milliers de victimes. Face à cette immense détresse, l'aide humanitaire est un devoir de solidarité humaine, qui fait appel à chaque homme et à chaque femme. Les Luxembourgeois qui ont su se montrer généreux dans le passé, continueront, j'en suis convaincue, d'agir avec désintéressement et humanité à l'avenir.

La déclaration de M. le ministre de la Coopération et de l'Aide humanitaire offrira l'occasion d'aller plus au fond de nos initiatives et d'exposer en détail la politique du gouvernement en la matière.

J'aimerais à ce stade partager avec vous un certain nombre de réflexions au sujet de la résurgence de tendances xénophobes et racistes en Europe.

Ensemble avec l'immense majorité de mes compatriotes, je considère que la banalisation des opinions de nature raciste et xénophobe et leur acception dans le discours politique constitue une immense menace pour la cohésion sociale de notre continent. Ce danger, qui a gravement affecté le destin de l'Europe dans le passé, ne devrait lasser indifférent aucun d'entre nous. Même des pays comme le Luxembourg, où de pareilles idées n'ont heureusement jamais trouvé de terrain fertile, ont vis-à-vis des générations futures un devoir de mémoire devant les grands échecs passés de l'Europe : la montée des nationalismes, les horreurs des deux guerres mondiales, les désordres économiques et sociaux, le fascisme et les dérives du communisme, le racisme institutionnalisé et l'holocauste. La liste est longue des erreurs commises par les Européens, et c'est aussi sur cette part de l'héritage que s'est construite l'Union européenne.

Omettre d'apprendre et de comprendre serait ouvrir la voie au retour de la division et de la destruction, comme le montrent les événements récents en Ex-Yougoslavie. Le phénomène de l'immigration en Europe suscite des craintes parfois irrationnelles. Ces réactions sont exploitées à leur profit par des hommes politiques ou par des partis qui font carrière sur l'exaspération des antagonismes sociaux. Il est de notre devoir à toutes et à tous, de demeurer vigilants et de dénoncer et de combattre dès les débuts toute résurgence de ces concepts nauséabonds. Le racisme et la xénophobie n'ont plus droit de cité dans l'Europe à laquelle nous œuvrons. Ce souci est au cœur de notre avenir européen, avenir dont nous devons bien nous rendre compte qu'il sera fait de migrations et d'immigrations.

Notre engagement à l'appui du développement économique du pays

Les relations économiques internationales jouent un rôle clé dans nos contacts avec le reste du monde. Dans le contexte de la mondialisation, elles prennent chaque jour un peu plus d'importance. La promotion de nos exportations et de notre pays en tant que terre d'investissements étrangers constitue dès lors un volet naturel et important de notre action sur la scène internationale. Dès ma prise de fonction, j'ai décidé de consacrer une part importante de mon emploi du temps aux questions du commerce extérieur.

Il est vrai que notre balance commerciale a enregistré un déficit record en 1999 ; ceci n'est certes pas une évolution souhaitable, mais si l'on veut si l'on veut se faire une idée concrète de l'état de nos échanges avec l'extérieur, il faut situer ces chiffres dans leur contexte. La progression de notre déficit de 81 milliards en 1998 à 121 milliards de francs en 1999 s'explique en effet en grande partie par une augmentation exceptionnelle de l'importation de biens d'équipement ainsi que par la flambée des prix du pétrole. D'un point de vue plus positif il importe de souligner qu'une part importante de notre déficit commercial est en fait le fruit de la vitalité et de l'expansion de notre économie, et en particulier du secteur des services. Ainsi, grâce à l'extraordinaire dynamisme des services financiers, la balance courante qui tient compte de la balance commerciale, renseigne un excédent de 58 milliards sur les neuf premiers mois de 1999.

Pour l'avenir, il faut bien se rendre compte que, sous l'effet de la globalisation, la concurrence se fait chaque jour un peu plus âpre. Le Luxembourg devra nécessairement s'adapter à cette évolution. L'effort principal devra venir des forces vives de la nation et il appartiendra au gouvernement d'accompagner et d'encadrer cet effort. Dans le domaine du commerce extérieur et de la présentation du Luxembourg à l'étranger, ceci comportera d'abord un effort renforcé de coordination et d'organisation. A cette fin, nous avons procédé à une réorganisation en profondeur du Comité consultatif du commerce extérieur. Cet organe constitue dorénavant un forum unique de dialogue où sont représentés tous les secteurs voués à l'exportation. Il fournit un cadre privilégié pour arrêter notre stratégie, définir notre message, réfléchir sur notre image de marque et coordonner nos actions concrètes.

Une des conclusions que nous avons pu tirer des discussions au sein de ce comité est que dans notre démarche extérieure nous devons procéder de façon plus ciblée et plus systématique.

Au niveau de nos missions de promotion, cela signifie que pour le moins les missions officielles doivent se concentrer essentiellement sur les pays où la participation du secteur public peut apporter une véritable valeur ajoutée. De même, il est important de privilégier les destinations qui offrent le potentiel le plus intéressant et nos actions doivent s'inscrire dans une approche à long terme, où seul le suivi systématique peut garantir des résultats. Inutile d'ajouter que les destinations qui correspondent à ces critères sont arrêtées en étroite concertation avec nos entreprises, car c'est dans leur intérêt que nous organisons ces missions. Il n'y a pas de doute, pour citer un exemple concret, que les nouveaux partenaires de l'UE, à savoir les pays d'Europe centrale et orientale, correspondent à ce profil.

Au sein du Département, nous avons également entamé un effort de réflexion sur les autres instruments de promotion. Il apparaît en effet que les instruments financiers de promotion du commerce extérieur sont en grande partie dépassés. Ceci est dû en large partie à l'évolution des taux d'intérêt au cours des dernières années, mais aussi à un cadre réglementaire international qui n'arrête pas de se resserrer.

Les relations économiques multilatérales constituent une autre dimension importante du commerce extérieur. C'est pour cette raison que nous attachons une importance considérable à l'OMC et nous regrettons que le nouveau round n'ait pas été lancé à Seattle. L'approche globale, telle que préconisée par l'Union européenne et qui, au-delà de la libéralisation des échanges, insiste sur le développement durable, une meilleure intégration des pays en voie de développement, les normes sociales etc. nous paraît être le meilleur moyen de gagner une certaine emprise sur la globalisation.

Conclusion

Assurer notre place en Europe, participer à la construction d'un monde en paix, défendre nos valeurs fondamentales, contribuer au bien-être économique, tels sont les principaux objectifs de notre politique étrangère. Ces objectifs sont parfaitement complémentaires avec notre mission d'assurer la défense de nos intérêts nationaux. Cette complémentarité des objectifs se voit doublée d'une complémentarité croissante des moyens d'action. Ainsi, nos efforts en faveur de la paix et de la stabilité ne se limitent plus à l'action politique et militaire voire économique. Elle englobe la promotion de la démocratie et des droits de l'homme. Elle est également sous-tendue par un effort de solidarité avec les pays les plus pauvres.

En nous donnant les moyens et les instruments de conduire une politique extérieure cohérente et inclusive, nous offrons à notre pays et à nos concitoyens de mieux répondre aux nouvelles donnes du jeu économique et politique. Le monde du 21e siècle qui s'ouvre devant nous, la révolution technologique sans pareille dont nous sommes les témoins, nous ouvrent d'immenses opportunités, mais ils comportent aussi des dangers qu'il nous faudra prévenir. Pour y faire face, nous devons impérativement faire preuve à la fois d'imagination et de prudence, afin de développer ensemble avec tous les pays concernés les mécanismes nécessaires pour canaliser et contrôler les évolutions en cours au bénéfice du plus grand nombre.

Le Luxembourg a la chance d'aborder les défis de demain de concert avec des pays amis, alliés et partenaires. Il se montrera dans cette aventure un partenaire ouvert et solidaire, et également un partenaire exigeant, dans une Europe dont les frontières doivent être dessinées dans nos esprits et nos cœurs avant de se dessiner sur les cartes géographiques. Je ne pense pas me tromper lorsque je dis que le Luxembourg entend figurer sur cette carte et qu'en toute modestie il s'estime en mesure de contribuer à sa configuration, en partenaire égal.

(Publié le 14 mars 2000)

Dernière mise à jour