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Marie-Josée Jacobs à la session extraordinaire de l'Assemblée générale de New-York
Monsieur le Président,
Permettez-moi de vous féliciter alors qu’il vous appartient de nous guider dans notre effort de convergence. Nous vous adressons nos meilleurs vœux.
D’emblée, je tiens à relever que le Luxembourg donne son plein appui au discours prononcé par le Portugal au nom de l’Union européenne, dont nous sommes l’un des membres.
Monsieur le Président,
Mesdames,
Messieurs les Ministres,
Excellences,
Mesdames, Messieurs,
L'égalité entre femmes et hommes caractérise l'évolution de nos sociétés. Depuis Pékin le droit des femmes à une participation égale dans les domaines de la vie politique, économique, sociale, culturelle et civile a été visiblement renforcé.
Au Luxembourg, le Programme d’action, la Déclaration de Pékin et la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes nous ont fournis depuis 1995 les lignes directrices pour les politiques de promotion de la femme, et d’égalité entre femmes et hommes. Nous accordons une très grande importance à la Convention. C’est pourquoi le Luxembourg a été parmi les premiers à signer le Protocole additionnel et s’apprête à le ratifier.
Le concept de Pékin était le développement et la paix.
Le Luxembourg a accepté ses responsabilités de membre actif et solidaire de la communauté des nations. A l’heure actuelle nous contribuons 0,7% de notre PNB à la coopération officielle au développement. Ce pourcentage s’accroîtra encore pour atteindre 1% en l’an 2004. Mon pays contribue régulièrement aux efforts des organes des Nations Unies travaillant pour la promotion des femmes, tels que le Fonds des Nations Unies pour la population et le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme. Par ailleurs nous prenons notre part dans les programmes de l’Union européenne. Des projets bilatéraux ponctuels trouvent aussi notre appui.
Le Plan d’action 2000, plan de mise en œuvre du Programme d’action et de la déclaration de Pékin, implique tous les ministères ainsi que la société civile.
C’est là notre stratégie !
Nous la mettons en œuvre en créant un cadre législatif et en proposant des mesures d’accompagnement.
Ainsi en 1997 le Parlement a adopté une loi portant incrimination du révisionnisme et d’autres agissements fondés sur des discriminations illégales. Cette loi pénalise entre autres certains comportements discriminatoires fondés sur le sexe ou l’orientation sexuelle. Elle prévoit que toute association, d’importance nationale, dotée de la personnalité morale peut, après agrément par le ministre de la Justice, exercer les droits reconnus à la partie civile à l’occasion d’un procès en justice.
Je qualifierais cette loi de pas important en avant, car elle sera d’une grande aide pour lutter contre des mentalités dépassées et désormais inacceptables.
Une deuxième mesure législative fut l’institution d’un ou d’une délégué-e à l’égalité dans les entreprises du secteur privé. Cette personne a pour mission de défendre l’égalité de traitement entre les salariés féminins et masculins en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, ainsi que la rémunération et les conditions de travail.
La loi portant sur la mise en œuvre du Plan d’action national en faveur de l’emploi prévoit l’élaboration d’un plan d’égalité comme obligation de négociation des conventions collectives. Avant leur mise en œuvre, les projets d’actions positives, auxquelles cette loi a donné une base légale, sont à soumettre à l'avis des délégué-e-s à l'égalité.
Cette loi cadre accorde en outre aux entreprises une augmentation des subventions de l’Etat de 15% quand celles-ci engagent un jeune ou un chômeur adulte du sexe sous-représenté pour des stages d’insertion ou de réinsertion professionnelles. Elle ouvre l’accès à l’apprentissage à des personnes âgées de plus de dix-huit ans et permet ainsi aux femmes, qui ont consacré des années à l’éducation de leurs enfants, de reprendre leur formation professionnelle, de la terminer ou de se tourner vers un autre domaine professionnel. L’enseignement sera adapté à ces participant-e-s.
La loi précitée a également introduit un congé parental de 6 mois pour le père et la mère, non transférable, avec garantie de réemploi et avec indemnisation forfaitaire allouée par l’Etat. Un congé pour raisons familiales de 2 jours pour organiser les soins d’un enfant malade a été introduit en même temps.
L'accès à la formation continue de l’entreprise est ouvert aux travailleurs et travailleuses en interruption de carrière depuis l'entrée en vigueur le 1er janvier 2000 de la loi portant sur la formation professionnelle continue.
Je suis particulièrement heureuse de pouvoir vous annoncer l’adoption par le parlement de la loi portant sur la protection contre le harcèlement sexuel sur les lieux de travail. Cette loi vise toutes les formes de harcèlement sexuel que l’on puisse rencontrer. Elle prend en compte, non seulement le harcèlement d’un collègue de travail, mais aussi celui d’un client ou d’un fournisseur. La charge de la preuve est partagée entre la victime et l’auteur. L’employeur est obligé de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser un harcèlement dont il a connaissance et d'adopter des mesures préventives, notamment d’information. La loi s’applique au secteur privé et au secteur public.
Toutes ces mesures ont pour objectif de réduire la ségrégation entre hommes et femmes sur le marché du travail et notamment d’augmenter l’emploi féminin. Des mesures spécifiques d’orientation professionnelle et de formation aux nouvelles technologies pour femmes ont été mises en place.
La situation des femmes dans le monde du travail continue a être une de nos préoccupations majeures. Elles ne constituent que 38% de la population active à Luxembourg. Par contre leur taux de chômage est plus élevé que celui des hommes.
La lutte contre l’exclusion sociale et contre la violence qui n’épargnent pas les femmes dans un pays à aisance matérielle élevée, retient aussi toute mon attention.
Un groupe de travail pluridisciplinaire de représentante-e-s d’organisations gouvernementales et non gouvernementales s’est constitué sous l’initiative du ministère de la Promotion féminine suite à la campagne de lutte contre la violence à l'égard des femmes de l'année dernière. Il a pour mission de coordonner les interventions des divers corps professionnels dans l’intérêt des victimes de violence.
Un refuge pour jeunes filles a été ouvert ainsi qu’un dispensaire pour prostitué-e-s.
Le Parlement a adopté en 1999 une loi visant à renforcer les mesures contre la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que contre le tourisme sexuel.
Mesdames, Messieurs,
La distribution traditionnelle des rôles entre les sexes accorde encore souvent davantage de pouvoirs aux hommes. Ainsi le pouvoir politique, économique et financier reste majoritairement entre leurs mains.
En l’an 2000 les femmes dans mon pays n’arrivent guère à dépasser le cap de 20% dans la prise de décision politique, malgré toutes les actions de sensibilisation, d’information et de formation entreprises. Je considère pourtant que la prise en compte des intérêts de la moitié de la population ne peut être satisfaisante que si celle-ci est représentée à un taux proche ou égal à sa représentation dans la population.
Le Luxembourg a souscrit à la déclaration de la conférence des femmes de la Francophonie, intitulée "Femmes, pouvoir et développement" qui s'est déroulée le 4 et 5 février 2000 à Luxembourg. Visant l'objectif de garantir aux femmes une citoyenneté partagée, entière et active dans les domaines de la prise de décision, de l'éducation et de la formation, de la santé et de l'économie, tout comme dans le maintien de la paix, les 55 pays de la Francophonie ont adopté une double approche privilégiant:
o le changement et l'évolution des rôles et responsabilités des femmes et des hommes menant vers un partenariat nouveau, qui sera , je l'espère, l'égalité des sexes; et
o la prise en compte systématique de l'approche du genre dans toutes les politiques.
Regardant vers l’avenir, je citerais les domaines d’actions prioritaires suivants:
o La mise en œuvre du Plan d'action national en faveur de l'emploi avec toutes ses mesures à l'intention des femmes n’est pas achevée.
Nous allons renforcer notre stratégie d'accompagnement, en premier lieu en organisant des formations à l'égalité pour les responsables syndicaux, les délégué-e-s syndicaux et à l'égalité, tout comme pour le patronat afin de les sensibiliser toutes et tous à respecter la perspective du genre dans leurs initiatives en matière d'emploi. Lors du prochain remaniement du statut général du fonctionnaire, le gouvernement veillera à l’instauration d’une structure d'égalité dans la Fonction publique. L’Etat n’a pas encore réussi à jouer le rôle de précurseur dans ce domaine comme je l’avais annoncé à Pékin et je le regrette.
o L'évolution de la participation des femmes dans la prise de décision recevra une attention particulière de ma part. Je plaide pour la mise en place de mesures contraignantes en faveur des femmes notamment lors des nominations sur les listes électorales, même si l'accord de coalition entre les partis constituant le gouvernement ne prévoit pas de mesure de ce type.
Dans le cadre des actions de lutte contre la violence à l'égard des femmes, nous préparons une loi permettant l’expulsion du domicile conjugal de l’auteur de violence.
Enfin, nous allons nous concentrer avec intensité sur le changement des rôles attribués traditionnellement aux femmes et aux hommes. La question de l'égalité entre les sexes concerne les femmes et les hommes au même titre.
L’implication des hommes dans le processus de changement de société reste un défi et une condition pour la mise en œuvre de toute politique d’égalité de droit et de fait entre les femmes et les hommes. L’équilibre au niveau de l’exercice du pouvoir est une question clé caractérisant l’évolution des rapports entre les femmes et les hommes.
Nous avons développé une méthode pédagogique applicable dans l’enseignement et la formation qui tient compte de la socialisation différente des femmes et des hommes et leur permet de développer individuellement toutes leurs potentialités.
Nous veillerons à ce que la pédagogie du genre soit intégrée dans les curricula de formation du personnel enseignant et d'orientation professionnelle, ainsi que des agents sociaux et des forces de l'ordre.
Une campagne médiatique sensibilisera l'opinion publique au nouveau partenariat entre les femmes et les hommes, caractérisé par un partage des responsabilités publiques et privées.
Il m’importe beaucoup que cette question soit débattue au cours de cette session extraordinaire. Avec la participation des hommes à l’évolution de l’égalité entre les sexes, nous renforcerons le développement dans nos sociétés et la paix dans le monde.