Intervention au débat général de Marie-Josée Jacobs lors du Sommet mondial pour le développement

Seul le texte prononcé fai foi

Monsieur le Président,

Permettez-moi de vous féliciter à mon tour pour votre élection. Je tiens également à confirmer que mon pays partage la position présentée à cette tribune par le Portugal au nom de l'Union européenne.

Cinq ans après le Sommet social de Copenhague il reste plus que jamais vrai qu'il faut doubler le nouvel ordre économique mondial d'un nouvel ordre social mondial.

A cette fin, trois engagements pris à Copenhague restent particulièrement importants:

1. la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale,
2. le respect des normes minimales de l'OIT, tels que les droits fondamentaux des travailleurs, l'égalité des chances ainsi que l'interdiction du travail des enfants,
3. l'accroissement de l'aide publique au développement jusqu'à 0,7% au moins du P.I.B. et le respect de l'objectif de l'initiative 20/20.

Nous devons constater aujourd'hui que ces trois engagements sont loin d'être remplis.

L'écart entre riches et pauvres se creuse, la pauvreté ne cesse de s'étendre, le chômage s'accroît, l'exclusion sociale marginalise un nombre de plus en plus grand de personnes et les conflits armés se multiplient.

Je ne voudrais pas que naisse l'impression que mes propos visent surtout les pays dits en développement. Au contraire, les pays dits développés sont également concernés. Leurs problèmes de développement social se posent certes d'une autre façon, mais ils existent bel et bien.

Même au Luxembourg la pauvreté mais surtout l'exclusion sociale ne sont pas totalement éradiquées. Aux nouvelles formes de développement correspondent de nouvelles formes d'exclusion.

Au Luxembourg, le sommet social de Copenhague a conduit à la mise en place d'un certain nombre de mesures législatives et d’un observatoire national du développement social. Avec les partenaires sociaux, nous avons défini des actions pour lutter contre le chômage et l'exclusion sociale et nous avons initié une politique active d'égalité des chances.

Au sein de l'Union européenne, Copenhague a induit une prise de conscience plus aiguë de la nécessité de promouvoir le développement social. En effet, la dimension sociale de l'Europe a trop longtemps été négligée, alors qu'elle est la dimension par excellence qui peut rapprocher l'Europe de ses citoyens.

En novembre 1997, sous présidence luxembourgeoise, l'Union européenne a, pour la première fois, mis en place une stratégie européenne pour l'emploi.

La Présidence portugaise a enchaîné en organisant en mars dernier à Lisbonne un Conseil européen consacré notamment à la cohésion sociale. L'emploi est un vecteur important d'intégration sociale. Mais beaucoup de personnes ne sont plus à même de travailler et ne peuvent plus être socialement intégrées par l'intermédiaire de l'emploi. Il faut donc des stratégies complémentaires contre l'exclusion sociale.

L'emploi ne peut d'autre part remplir son rôle d'intégration qu'à la condition de satisfaire aux critères de ce que Juan Somavia appelle le travail digne. L'adoption, à 175, de la Déclaration de 1998 sur les droits sociaux minimaux a été une avancée importante. Mais il faut aller au-delà. Nous devons intégrer formellement le respect des normes sociales dans le commerce international et instituer un processus de surveillance multinationale aussi contraignant que possible. Cet objectif demande une approche cohérente de l'ensemble des organisations internationales: il engage notamment la responsabilité collective des chefs d'agence à Genève et ailleurs. Seule une politique cohérente et volontariste, juridiquement encadrée, peut nous faire avancer vers un ordre mondial avec une économie performante, des démarches actives contre le chômage et des politiques efficaces contre l'exclusion sociale.

Si nous voulons que le développement social devienne une perspective pour tous, il faut que les pays industrialisés augmentent, comme convenu à Copenhague, l'aide publique envers les pays en développement.

Le Luxembourg atteint cette année l'objectif de consacrer 0,7% du PIB à l'aide au développement. Le gouvernement a prévu par ailleurs de porter ce taux à 1% du PIB d'ici 2005.

La coopération au développement du Luxembourg se concentre sur un nombre limité de pays qui sont choisis parmi ceux aux plus faibles indices de développement humain. Cette approche nous permet de répondre à une aspiration particulière, à savoir celle d'établir de véritables partenariats politiques, sociaux et économiques avec nos interlocuteurs et d'élaborer des programmes qui répondent directement à leurs problèmes. Ainsi le Luxembourg consacre plus de 60% de sa coopération au développement à des programmes sociaux, en particulier l'éducation de base, la santé primaire, la promotion de la femme et le développement rural intégré. Nous dépassons largement l'objectif de l'initiative 20/20.

Je rappelle par ailleurs que notre coopération au développement est dans sa quasi-totalité non liée, ceci afin d'accorder aux programmes la plus grande flexibilité possible. Mais notre action ne peut aboutir que si elle s'appuie sur des initiatives locales sous la responsabilité de nos pays partenaires. Les principes qui dirigent l'action du Luxembourg sont le respect de la démocratie, de la transparence et de la bonne gouvernance. S'y ajoute la participation de la société civile à l'élaboration et la mise en œuvre des politiques, particulièrement dans le domaine social. Cela implique enfin l'adhésion au modèle social européen.

La mondialisation sera ce que nous en ferons. Il importe pour cela de remettre l'économie au service du développement humain. C'est ce à quoi nous nous sommes engagés à Copenhague. C'est sur la mise en œuvre de nos engagements que nous serons jugés.

Je vous remercie.

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