Monsieur le Président,
La Grande-Duchesse et moi-même avons écouté avec gratitude les paroles de bienvenue si cordiales que vous venez de prononcer. L'accueil chaleureux que vous-même, votre épouse, les autorités et le peuple slovènes nous ont réservé nous a beaucoup touchés.
Nous apprécions d'autant plus votre invitation qu'elle nous permet de rencontrer un Homme d'Etat qui, dans des circonstances difficiles, a contribué à mener son pays à l'indépendance. Porté à deux reprises à la tête de l'Etat par un suffrage populaire massif, vous avez justifié la confiance que vos concitoyens ont placée en vous. En effet, vous avez dans votre action en faveur de la stabilité et de l'unité de votre pays toujours mis l'aspiration de l'être humain à la liberté et à la démocratie au centre de vos préoccupations.
Il y a trois mois les peuples amis se sont unis au vôtre pour célébrer le dixième anniversaire de l'indépendance de votre pays. C'était pour les Luxembourgeois l'occasion de se souvenir du Sommet de Luxembourg de juin 1991 qui avait dépêché en Slovénie une délégation de l'Union européenne, sous la conduite de notre ministre des Affaires étrangères de l'époque, pour contribuer à mettre un terme à la guerre et à chercher une solution pacifique au conflit.
Si nous pouvons nous réjouir du succès de cette opération, nous constatons avec tristesse que les efforts du continent tout entier n'ont pas encore permis de faire taire ailleurs les spectres du nationalisme outrancier et d'éviter le déchaînement de la haine.
L'indépendance a été à la base du succès politique, économique et social sans pareil qu'a connu la Slovénie. Il est vrai que par son zèle et par sa détermination exemplaires, le peuple slovène était déjà devenu dans l'ancienne Yougoslavie le phare du développement. Avec une dynamique accrue, la Slovénie s'est hissée à la tête du peloton des pays qui briguent à juste titre leur place dans l'Union européenne. Cette union constitue une communauté de valeurs partagées et est le garant de la paix pour un continent né des décombres de guerres fratricides séculaires. Elle n'a pas pour seul objectif l'intégration des économies, mais vise essentiellement la défense des libertés, de la justice et de la solidarité, valeurs qui sont à la base de toute démocratie. Les événements tragiques qui ont endeuillé les Etats-Unis d'Amérique et choqués tous les démocrates montrent à quel point il est nécessaire de nous unir pour combattre toutes formes de terrorisme.
Pour ce qui est de mon pays, je puis vous assurer que sa participation dès le début au mouvement d'intégration européenne a consolidé son indépendance. Alors qu'auparavant, nous avions craint de disparaître dans le tourbillon des antagonismes de nos puissants voisins. Nous vivons, depuis lors, dans une zone de paix et de stabilité en Europe occidentale. L'Union européenne est fondée sur la démocratie et le respect du droit plutôt que sur l'équilibre entre les puissants. Aussi nous a-t-elle permis de participer à la détermination de notre devenir tout en développant une économie performante.
La Slovénie est un Etat jeune, mais une très vieille nation d'Europe. Le sentiment de former une nation unie a toujours été enraciné dans la langue slovène. Elle a fleuri sous les dominations étrangères grâce à l'apport de grands écrivains et poètes tels que France Preseren. Aussi a-t-elle, dans une large mesure, engendré chez vous cette forte conscience d'une identité nationale.
Le Traité de Nice a le mérite de rendre possible l'élargissement de l'Union européenne. Nous aborderons bientôt la ligne droite conduisant à la destination où, tôt ou tard, toutes les démocraties de notre continent se trouveront réunies.
Mon gouvernement apprécie l'approche constructive que vous avez adopté pour négocier l'adhésion à l'Union européenne. Aussi est-il convaincu que la Slovénie fera son entrée dans l'Union parmi les premiers candidats à l'élargissement.
La Slovénie a fait partie durant des siècles de l'Europe centrale et elle a toujours tourné son regard vers l'Europe occidentale. L'expérience acquise durant de longues décennies au XXème siècle fait d'elle un partenaire extrêmement précieux qui ouvrira à ses futurs partenaires de nouvelles dimensions d'analyse et de compréhension de cette région aujourd'hui encore meurtrie. Aux peuples du Sud-Est européen qui ont connu un sort si cruel, le succès de la Slovénie montre la voie à suivre pour satisfaire leurs aspirations et leurs espoirs.
Le Luxembourg est certain de trouver en la Slovénie un partenaire apprécié et un allié sûr, lorsqu'il s'agira de mettre en œuvre les aspirations de nos peuples et d'apporter au continent tout entier la paix et la prospérité, la justice sociale et le respect de l'individu.
Cette Europe n'est - et ne sera pas - un simple amalgame de nations. Elle respectera l'identité nationale pour laquelle nos petits pays ont tellement lutté. Après cinquante années d'expérience en matière d'intégration européenne, le Luxembourg est un témoin vivant que cette Europe n'a pas ébranlé son sentiment d'identité nationale, mais qu'elle l'a préservé et même renforcé. L'Union est source d'une souveraineté authentique que les petits pays ne connaîtraient point s'ils restaient seuls à gérer leur avenir.
Mon gouvernement ne soutient pas seulement votre adhésion à l'Union européenne, mais il appuie également votre candidature à l'OTAN. Nous avions déjà plaidé résolument cette cause lors de l'élargissement de l'OTAN en 1999.
Etat jeune, votre pays a fait ses preuves sur l'échiquier mondial. Je tiens à citer ici notamment la façon exemplaire avec laquelle la Slovénie s'est récemment acquittée de son mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité.
Donc votre place est parmi nous en Europe.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Avec la Grande-Duchesse, je lève mon verre à la santé de Monsieur le Président et Madame Kuçan, à celle du peuple slovène et à l'avenir commun de nos pays dans l'Union européenne.