La ministre de la Culture, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Erna Hennicot-Schoepges lors de la présentation devant le Conseil de l'Europe du portail web de l'Institut européen des instituts culturels

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs,

C’est pour moi un grand plaisir de me retrouver dans cette enceinte  quelques années après avoir fait partie, en tant que députée luxembourgeoise, de votre Assemblée Parlementaire.

Avant de participer à vos débats parlementaires, j’étais persuadée que le Conseil de l’Europe avait joué un rôle considérable dans la réconciliation des peuples et des nations après la fin des conflits de la Seconde Guerre Mondiale, et en garantissant dans notre Europe de l’Ouest le respect des valeurs de démocratie et le respect des droits de l’homme.

En tant que membre de l'Assemblée parlementaire de 1984 à 1989, j'ai pu être témoin des grands changements qui se préparaient à l'Est. Gorbatchev a utilisé devant l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe le terme de "grande maison commune" et le pape Jean-Paul II a fait un vibrant appel pour la paix devant notre assemblée. Était-ce prémonitoire: la Commission de la culture de l'époque avait proposé le premier itinéraire culturel à Saint-Jacques de Compostelle.

Je me suis aussi persuadée qu’à côté des Conventions, des Chartes, des Recommandations qui amenaient à un partage du Droit, il nous fallait des outils de travail pratiques et concrets, si je peux dire "touchables" par les Européens là où ils vivent et qui les réconcilient avec l’idée d’une intégration qui leur fait souvent peur.

Vous comprendrez donc pourquoi, lorsqu’en 1995 le Conseil de l’Europe a souhaité trouver un pays qui accueille et amplifie l’expérience considérable du programme des itinéraires culturels, le Grand-Duché de Luxembourg a donné les moyens nécessaires à un nouvel Institut Européen des Itinéraires culturels pour remplir cette mission. Six années après son ouverture dans un patrimoine historique de la Ville de Luxembourg, sur le parcours même d’un des itinéraires les plus fréquentés - plus de cent-vingt mille visiteurs par an -, l’itinéraire "Wenceslas", mon Gouvernement n'a pas regretté son action.

Il a aménagé un local - la Tour Jacob - pour y accueillir un Centre de Ressources, aujourd’hui incontournable et auquel l’Europe entière fait appel chaque jour. Il a dégagé les moyens pour la rémunération d’un personnel  compétent et particulièrement dévoué compte tenu de l’énorme tâche dont il a la responsabilité. Il a demandé à cet Institut de travailler également, à partir du Luxembourg, à renforcer de manière pratique, dans le cadre des thèmes des itinéraires culturels, les accords de coopération bilatérale que nous entretenons avec d’autres pays européens, comme la Roumanie, la Bulgarie ou la Lituanie, pour n’en citer que trois parmi les plus ardents supporters de ce programme.

Il a enfin dégagé des moyens complémentaires, pendant la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’Europe, pour que cet Institut dispose d’un outil moderne d’information à distance par la mise en place d’un site web qui permet déjà aujourd’hui au grand public, comme aux porteurs de projets, collectivités territoriales ou structures privées, de bénéficier, là où ils travaillent, de la majeure partie de l’information non seulement documentaire, mais pratique dont ils ont besoin.

Lors de l’inauguration de ce site en mars dernier, j’ai été convaincue qu’il fallait absolument que votre attention soit attirée sur une réalisation qui donne enfin toute la visibilité nécessaire à un travail quotidien, acharné, mais par essence modeste et silencieux. La presse et les médias s’attachent à juste titre à parler des événements et des célébrations symboliques, comme les Journées Européennes du Patrimoine, dont vous recueillez les échos. Elle parle forcément moins de ce qui se déroule chaque jour pour aménager un itinéraire et le valoriser en termes européens, faire travailler ensemble dans le cadre de grande diagonales européennes des porteurs de projets venus de cultures et d’horizons dont, il y a encore quelques temps, les pays étaient en guerre, comme c’est le cas pour le Sud-Est Européen. De ce fait les gouvernements ne connaissent et ne reconnaissent pas toujours ce travail à sa juste valeur, parce qu’il se déroule au sein même des territoires, et dans le cadre de politiques décentralisées.

L’Institut Européen des Itinéraires culturels est un exemple démonstratif que nos pays, quand ils le souhaitent, peuvent résoudre, en bonne entente avec le Conseil de l’Europe, la question de la pérennité des programmes les plus pertinents qu’a lancés l’Institution. Et je pense que mon pays n’est pas le seul à l’avoir compris, si j’en juge par les réactions positives que l’Institut a enregistrées pour que cette expérience soit transférée et adaptée dans d’autres territoires géographiques de l’Europe.

A chaque fois que cela a été possible, l’Institut a donc travaillé en étroite collaboration et par le biais de Conventions - les dernières en date ont été signées la semaine passée avec la Région Toscane et avec l’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard - avec des relais territoriaux, des centres de recherche, des réseaux culturels et patrimoniaux qui font que tous les thèmes élus sont mis en œuvre par des actions concrètes, illustratives, utiles pour le développement culturel et le tourisme local, en s’articulant à la recherche universitaire qui leur donne un contenu actualisé et fondé sur la recherche des valeurs européennes. Je souligne au passage que l’Institut sait aussi mobiliser avec ses partenaires, les jeunes Européens.

L’Institut a de plus reçu mission de son Conseil d’Administration d’amplifier et de conforter encore mieux ces réseaux de partenaires en les accueillant au sein d’un Groupement Européen d’Intérêt Economique pour assurer encore mieux les tâches d’assistance technique et de formation. Là encore le Ministère de la Culture, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche du Grand-Duché de Luxembourg s’implique fortement, avec à ses côtés, le Ministère des Affaires Etrangères et celui du Tourisme.

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs,

Si j’ai souhaité venir vous rencontrer aujourd’hui, ce n’est pas seulement pour faire la démonstration concrète devant vous d’un exemple réussi du transfert et de l’amplification d’un programme, grâce à la mise en place d’un Accord politique bilatéral efficace entre un pays et le Conseil de l’Europe. 

C’est que nous sommes, ensemble, devant une décision d’importance.

Il s’agit de décider si cet Accord bilatéral peut devenir un Accord Partiel élargi portant création d’un "Centre Européen des itinéraires et du paysage culturel", reliant deux initiatives du Conseil de l’Europe qui s’adressent tout autant à la coopération transfrontalière, au dialogue entre les cultures et les religions, à l’aménagement du territoire, au bien être de nos concitoyens, qu’au partage des valeurs intellectuelles et à la mise en valeur d’un patrimoine commun.

Il s’agit certainement d’un enjeu culturel et territorial, mais il s’agit d’abord d’un enjeu politique.

Ce n’est certes pas un hasard si la grande majorité des pays de l’Europe centrale et orientale et si les pays du Caucase ont été parmi les premiers à soutenir cette initiative de la Présidence luxembourgeoise.

Soyez persuadés que je comprends parfaitement les réticences ou les hésitations de certains pays de l’Ouest de l’Europe. Je l’ai dit tout à l’heure, cette initiative trouve d’abord son application la plus concrète dans le cadre des politiques de décentralisation, ce qui veut dire que certains Etats centraux n’ont parfois même pas de compétence directe sur ces questions. Je comprends tout autant la contrainte que peut représenter le fait que dans ce type d’Accord les quotas imposés font que certains pays ont l’impression d’être obligés d’apporter des contributions beaucoup plus fortes que les autres. Je comprends enfin que certains pays qui ne souhaitent pas s’associer à ce nouvel Accord aient acquis l’impression qu’ils ne seront plus concernés à l’avenir par ce programme dans lequel des porteurs de projets de leur pays sont pourtant partie prenante.

Je voudrais d’abord rassurer ces derniers. Les itinéraires culturels sont et resteront transfrontaliers et pan-européens et les réseaux qui les portent continueront à intégrer autant de partenaires qu’il le faut pour les mettre en œuvre. C’est dans la nature même d’un programme fondé sur les échanges d’expérience et l’assistance mutuelle.

Mais je voulais porter un message qui me tient à cœur : donnons nous ensemble les moyens d’étendre une expérience positive dont les résultats sont tangibles. Faisons en sorte qu’elle profite à de nouveaux territoires de l’Europe! C’est dans la découverte mutuelle, par le voyage des Européens vers de nouveaux horizons de l’Europe, des "anciens" pays membres du conseil de l’Europe vers les "nouveaux", tout autant que l’inverse, que nous entraînerons l’adhésion des citoyens aux valeurs que nous défendons depuis si longtemps.

La Convention Européenne de la Culture fêtera l’année prochaine en décembre ses cinquante ans. Je crois que ce serait particulièrement fort et symbolique qu’un des programmes les plus concrets qu’elle a générés soit renforcé par une nouvelle mobilisation politique pour laquelle le Luxembourg peut vous assurer qu’il fera en sorte de renforcer sa contribution et son aide.

Laissez moi terminer enfin par le fait que je suis de plus en plus persuadée que l’Union Européenne peut se joindre à cette nouvelle initiative. Madame Viviane Reding, Commissair européenne chargée de la Culture, de l'Education, de la Jeunesse et des Sports, qui a déjà participé à certaines réunions organisées par l’Institut Européen des Itinéraires culturels, vient très récemment de rendre une visite à l’Institut pour, au-delà de la bonne volonté qu’elle a déjà affirmée, se rendre compte de plus près des développements des ressources, de la qualité du site web et des conséquences pratiques de ce programme. Autant que je le sache, sa réaction est très positive. Elle attend maintenant un signal de notre part pour envisager sur le plan administratif des mesures concrètes. En tout cas, notre site web sera accessible à partir du portail Culture de la Commission, ce que je considère comme un très grand progères des relations entre les deux institutions.

Je voudrais vous dire également qu’en attendant la décision du Comité des Ministres sur le projet de texte de l’Accord Partiel, le Luxembourg a déjà fait en sorte de continuer son effort en ce qui concerne l’Institut. Celui-ci doit s’agrandir dans quelques semaines en s’installant dans un équipement dont nous sommes particulièrement fiers: le Centre Culturel de Rencontre de l’Abbaye de Neumünster. Deux structures y auront leur activité permanente, dans le cadre d’un programme que nous avons intitulé: "Dialogue des cultures - Culture du dialogue": l’Institut des itinéraires culturels - et le secrétariat de l’Accord Partiel que j’appelle de mes vœux - ainsi que le récent Institut Pierre Werner qui sera le premier exemple en Europe de fusion entre les centres culturels de trois pays: l’Allemagne, la France et le Luxembourg. Il s’agit là d’une complémentarité de missions et de travail à laquelle je pense que nos deux grands voisins sont sensibles.

Deux autres événements pourront apporter à l'Institut une visibilité internationale:

- la Présidence luxembourgeoise du Conseil des Ministres de l'Union européenne en 2005, et

- l'année 2007 où Luxembourg sera la Capitale européenne de la Culture, projet que nous étendrons à la Grande Région SarLorLux, Rhénanie-Palatinat, Communautés francophone et germanophone de Belgique.

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs

Je suis certaine que vous comprendrez avec moi l’enjeu devant lequel nous sommes placés et j’espère que, même en cette période où les budgets de nos pays ne permettent pas toujours d’affronter de nouvelles dépenses, vous réalisez que nous parlons ici d’un patrimoine partagé, mais aussi de dialogue culturel, d’amélioration des conditions de vie de nos concitoyens et de l’aménagement durable des territoires. Toutes choses qui méritent un investissement et qui génèrent non seulement du bien être mais des emplois.

Je vous remercie de votre attention, j’espère vos questions et demande vos remarques. Mais avant cela je donnerai la parole au Directeur de l’Institut, Monsieur Michel Thomas-Penette qui vous présentera brièvement le site web que l’Institut a préparé pour la valorisation de nos efforts communs.

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