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Déclaration de politique étrangère 2004 (traduction française)
- Le texte du discours parlé prévaut -
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
J'ai aujourd’hui, et pour la 5ème fois, l’honneur et l’occasion de faire devant la Chambre des Députés la déclaration de politique étrangère luxembourgeoise et de vous présenter les principes, les objectifs et les perspectives pour l’avenir tels que je les vois et tels que je voudrais les mettre en oeuvre avec votre soutien.
Cette déclaration intervient à un moment très particulier. Dans 39 jours, le 1er mai, l’adhésion de 10 nouveaux pays à l’Union clôturera définitivement un chapitre de l’histoire de notre continent. La séparation artificielle - résultat de guerres, de confrontations, du manque de confiance, de la peur et de l’intolérance - que l’Europe a connue pendant un demi-siècle cessera d’exister de manière officielle à cette date. Je suis dès lors particulièrement fière de l'unanimité avec laquelle les 60 députés de la Chambre ont, le 10 février, voté en faveur de cet élargissement. Il s’agit là de la meilleure preuve de ce que nous, Luxembourgeois, non seulement saluons cette évolution mais la favorisons dans toute la mesure du possible car nous y voyons la base d’une Union nouvelle, plus grande mais aussi plus forte et plus dynamique.
Nous nous rallions ainsi à Robert Schuman qui, en 1959 déjà, déclarait : "Nous ne devons pas construire l'Europe uniquement dans l'intérêt des peuples libres, nous devons être en mesure d'accueillir les peuples de l'Est le jour où ils nous le demanderont." L’environnement politique, économique, culturel et social dans lequel s'inscrivaient nos relations avec nos voisins, avec les partenaires de l’Union et au-delà, va changer, avec davantage de possibilités mais aussi de nouveaux défis.
Cette déclaration est également la dernière avant la Présidence luxembourgeoise de l’Union européenne, qui sera pour nous l'occasion de prouver que le Luxembourg, ses hommes politiques et ses fonctionnaires sont à même d’organiser, de structurer, de diriger et de faire progresser les travaux de la nouvelle Europe à 25. Nous avons une longue tradition de présidences réussies, qui ont fait la réputation de notre pays au sein de l’Union. Et nous savons que, cette fois encore, nos partenaires attendent de nous un résultat comparable à ces succès qui, par le passé, ont traduit et exprimé l’engagement de notre pays pour l'Europe. Nous allons tout mettre en œuvre pour rencontrer ces attentes et exploiter au mieux les initiatives et processus déjà en cours.
Vous ne serez donc pas surpris si, cette année, l'Europe nouvelle, avec ses chances et possibilités mais aussi avec ses défis et ses problèmes, occupe une place particulière dans ma déclaration.
Un monde en évolution et une époque d’incertitude
Regarder de l’avant, c'est avoir le courage de penser et de planifier. Non seulement l’Europe, mais aussi le monde autour de nous, sont soumis à des évolutions de plus en plus rapides. Par notre action et celle de nos partenaires en Amérique, en Asie et en Afrique, avec lesquels nous partageons des ambitions et des perspectives pour l’avenir, nous pouvons contribuer ensemble à faire de ce monde, de l’Union Européenne et ainsi de notre “chez nous” un endroit meilleur et plus sûr pour tout un chacun. En unissant nos efforts, nous pourrons orienter le développement dans la bonne direction.
Regardons en arrière : au milieu de 20ème siècle, les régimes démocratiques n’étaient l'apanage que d'un nombre très restreint de pays. Aujourd’hui, la démocratie - avec ses corollaires obligés que sont le respect des droits de l’homme, la liberté et la paix, le progrès économique et social - s’est imposée dans la grande majorité des pays.
15 ans plus tard, l’équilibre de la dissuasion et la Guerre Froide structuraient et cimentaient les relations internationales. Il aura fallu attendre la chute du Mur – ce Mur qui a divisé l'Europe en 2 – pour que l’espoir de démocratie et de paix puisse enfin éclore, et pas seulement en Europe : nombreux sont les pays d’Europe de l’est, d'Asie, d'Afrique et d'Amérique Latine qui se sont engagés sur la voie de la liberté.
Grâce aux avancées de la démocratie, le spectre d’une guerre classique en Europe, avec ses confrontations entre forces armées, a presque disparu de nos esprits.
Et pourtant, en ces temps d'espoirs nouveaux, alors que nous avons réussi à surmonter l’antagonisme des vues, certains développements nous montrent que l’engagement pour la liberté et la démocratie, pour la sécurité et la prospérité est un ouvrage qu'il faut sans cesse remettre sur le métier. Les dernières décennies ne manquent pas de nous en fournir des exemples : de la confrontation entre Israël et la Palestine au génocide du Rwanda, en passant par les conflits sanglants au Congo et, en Europe, ceux des Balkans.
Notre réponse : un multilatéralisme efficace
Depuis 1990, guerres et conflits ont fait 4 millions de victimes – dont 90% de civils – et 20 millions de réfugiés. Nous ne pouvons tolérer cette situation. Il nous faut au contraire y réagir tous ensemble en tant que communauté internationale. Pour cette raison, nous devons unir efficacement nos efforts et nous engager de manière conséquente en faveur d'un multilatéralisme efficace, pour un rôle clairement défini des Nations Unies et pour une politique extérieure européenne efficace et cohérente, qui intègre les aspects de la sécurité, de la défense et du développement.
Nous devons assumer notre responsabilité en tant que communauté internationale lorsque, dans de nombreuses parties du monde, des êtres humains sont exposés à la menace du terrorisme, de la faim, de la brutalité et des armes de destruction massive mais aussi à la maladie, à la violence ethnique ou religieuse, à la traite des êtres humains et autres formes de crime organisé et d’exploitation.
Les attentats du 11 septembre, les nombreuses attaques terroristes perpétrées de par le monde, mais aussi l’insoutenable massacre du 11 mars à Madrid nous ont révélé la dimension nouvelle des problèmes sécuritaires. Nous devons être prêts à relever ces nouveaux défis, nous devons trouver des réponses – des réponses qu’aucun pays, grand ou petit, ne peut apporter seul – mais aussi assumer des devoirs qu’aucun pays, grand ou petit, ne peut éviter.
Nous ne vivons pas encore dans ces temps bibliques où les épées se transforment en charrues. Au contraire, les moyens dont disposent les groupes ou régimes prêts à recourir à la violence ont atteint une nouvelle dimension de dangerosité, et l’acceptation de plus en plus forte de la violence, notamment dans les milieux extrémistes, effraye aujourd'hui. Les attentats de Madrid ont une nouvelle fois démontré que des civils innocents peuvent devenir les victimes d’une violence aveugle.
Pour cette raison, il est de notre devoir d'être pleinement conscients des réalités qui nous entourent – celles d'une époque faite d’insécurité et de remous qui nous oblige tous à être responsables et dans laquelle la politique extérieure est, plus que jamais, un élément clé de notre sécurité.
Il n’y a pas, ici, d’alternative à une coopération internationale résolue et déterminée. Soit nous imposons tous ensemble les principes de l’état de droit au niveau mondial, soit nous devrons admettre que le système du droit international est sapé. Pour notre sécurité directe, nous sommes tous dépendants d’une coopération internationale efficace. Cet effort, le Luxembourg est prêt à y contribuer, en tant que membre de l’Union européenne, en tant que partenaire de l’OTAN et de l’OSCE et, bien entendu, aussi en tant que membre de l’ONU.
Alors que certains conflits régionaux – dont celui du Proche-Orient – ne trouvent aucune solution, allant même jusqu'à s'intensifier ces dernières années, force est de constater qu'ils génèrent dans leur sillage de nouveaux dangers. Ce n’est pas un hasard si la criminalité organisée, la corruption, le trafic de drogue et la traite des êtres humains, le terrorisme international et les violations flagrantes des droits de l’homme frappent précisément des pays et des régions plongés dans une crise profonde ou en marge des évolutions de la communauté internationale.
La menace du terrorisme
Les nouvelles menaces, à l'instar des défis de la mondialisation, demandent des réponses volontaristes.
Prenons ici l’exemple du terrorisme, et de son nouveau visage. Si, dans les années 70, il s’agissait d’un phénomène politique et local qui, à la limite, ne nous interpellait pas directement, il est aujourd’hui devenu mondial et frappe de manière aveugle et non différenciée. Son but est la destruction des valeurs à la base de toute société libre : tolérance, liberté et progrès. Ses motivations sont la haine et la négation de la dignité humaine. Ses viviers sont les conflits non résolus, les frustrations et les humiliations, de même que les injustices face auxquelles la communauté des Etats reste impuissante à trouver une solution.
Ce terrorisme nouveau ne pratique pas le respect de l’être humain. Vous connaissez les exemples aux Etats-Unis, au Proche-Orient, en Irak, en Asie du sud-est, en Turquie, au Maroc, en Tunisie ou plus récemment à Madrid. Aucun pays, aucune communauté, aucune ville ne peut avoir la certitude d'être épargné. Ce terrorisme cherche ses cibles là où il a la certitude de choquer l'opinion, d'avoir un impact maximal et de faire le plus grand nombre possible de victimes.
Le terrorisme, peu importe ses objectifs ou ses convictions, ne saurait bénéficier de la moindre reconnaissance politique. L’assassinat aveugle de victimes innocentes constituer in fine une violation grave du droit fondamental à la vie et à la sécurité. C'est pourquoi je condamne sans appel toute forme de terrorisme, quels que soient ses auteurs et ses objectifs. La violence n’est et ne sera jamais pour nous un moyen de politique.
Par son mépris absolu de la vie, ce terrorisme représente aussi une violation absolue des Droits de l’Homme et de l'humanité.
Pour cette raison justement – et peu importe la violence des images que l’actualité nous a récemment montrées – nous ne devons pas tomber dans le piège que le terrorisme nous tend. Nous devons préserver notre modèle d’une société ouverte où le respect des Droits de l’Homme a droit de cité. Nous devons lutter énergiquement pour que les droits de l’homme ne soient pas la victime directe du terrorisme et de son mépris des êtres humains. Notre engagement conséquent en faveur de ces droits universels reconnus à tout être humain nous confère in fine la force et la légitimité morales qui nous permettront de venir à bout de ce danger.
Comment faire face au terrorisme
La nature même du terrorisme fait que nous ne pouvons lui opposer une réponse exclusivement militaire. La multiplicité des sources dont il tire sa force et sa motivation oblige à la prise de mesures diverses et complémentaires.
La présidence irlandaise a fait dans ce contexte une série de nouvelles propositions qui s'appuient sur les structures et les dispositions du plan d’action adopté le 21 septembre 2001. Le Conseil européen d’après-demain procédera à l’adoption définitive du plan qui a été complété par les Ministres de la Justice et de l’Intérieur et par les Ministres des Affaires étrangères.
Ce plan prévoit, en première ligne, une collaboration plus étroite des services et police et de justice dans le cadre d’Europol et d’Eurojust, ainsi que des services d’information et de sécurité. Sont ici visés, entre autres, l’échange et l’évaluation des informations sur les activités terroristes recueillies par la police et les services secrets ainsi que la détermination de caractéristiques biométriques qui seront mentionnées dans les passeports. Dans ce contexte, la nomination d’un responsable pour la coordination et la lutte contre le terrorisme, qui serait délégué auprès du Haut Représentant, pourrait constituer une mesure d'accompagnement de ces efforts. Une coopération intensifiée avec les pays tiers doit tenir compte de la dimension mondiale de la menace.
Je voudrais juste indiquer que le mandat d'arrêt européen, récemment voté par la Chambre, est un des éléments qui contribuent à rendre cette coopération plus simple et plus efficace. La mise en place d'un Parquet européen pourrait en constituer une nouvelle étape importante.
Par ailleurs, le problème du financement du terrorisme est lui aussi un élément important dans la lutte contre ce fléau, tout comme le renforcement des contrôles aux frontières externes et une surveillance accrue des infrastructures de transport.
L'engagement pris par la communauté internationale de désamorcer et de résoudre les conflits en cours constitue un autre moyen de la lutte contre le terrorisme, notamment au Moyen-Orient. Les entretiens que j’ai eus en Syrie, au Liban et en Egypte, ont très nettement confirmé la contribution majeure qu'une solution à ce conflit apporterait à la sécurité internationale. Afin de concrétiser notre engagement pour la recherche d’une solution, nous avons soutenu financièrement l"Initiative de Genève", laquelle a démontré la possibilité d'une solution négociée.
Des paroles et des voeux pieux ne suffisent toutefois pas : nous devons en outre, chacun pour soi et tous ensemble, apporter notre contribution à l’aide au développement, à l’éducation, à la prévention et à la gestion de crise en sachant que seuls cet ensemble de mesures et un effort sur le long terme peuvent nous mener au but.
Nous devons aussi tout mettre en oeuvre pour que les thèses de lutte culturelle et de confrontation des civilisations ne se concrétisent pas. Nous ne devons pas tomber dans le piège posé par ceux qui espèrent tirer profit d’une telle confrontation. Après avoir surmonté l'épreuve douloureuse de la division Est-Ouest, laquelle se nourrissait d'idéologies antagonistes, nous ne pouvons accepter qu’une scission plus dangereuse encore naisse aujourd'hui de l’appartenance religieuse ou culturelle.
La manière la plus efficace de faire face à ce danger est de s’engager de manière conséquente pour le respect des Droits de l’Homme et de la dignité de chaque homme, femme et enfant ; de rechercher la discussion et de ne pas fuir le dialogue. De cette manière, nous soulignons l’unité de l’humanité et l’universalité de ses valeurs.
Ni la supériorité numérique, technologique ou économique, ni l'érection de nouveaux murs n'offrent une protection contre les flux de réfugiés, les attentats suicide ou les voitures piégées. La réalité ne cesse de nous montrer combien est vulnérable aussi celui qui se croit fort. Les meilleures armes au service de notre sécurité ne sont autres qu'un multilatéralisme efficace et effectif et une solidarité internationale basée sur le respect et la confiance mutuels.
C’est ce qui détermine notre approche. C’est notre choix pour une vie en commun entre les pays.
A problèmes globaux, approche globale
La protection de notre environnement, la lutte contre les maladies et les épidémies, contre les flux illégaux de capitaux ou contre l’intolérance – autant de phénomènes dont l’impact est amplifié par la mondialisation – ne sont possibles que dans le cadre d'une vaste coopération internationale. La clé pour un monde nouveau et meilleur réside dans la collaboration de la communauté internationale dans son ensemble. Les Nations Unies ont ici un rôle particulier à jouer. Nous espérons pour cela que la réforme annoncée de l’ONU pourra se réaliser et se traduira par une rapidité et une efficacité accrues de l'Organisation.
Mais l’Union européenne a, elle aussi, en tant que l'un des grands acteurs de la scène mondiale, une responsabilité particulière, qu’elle peut assumer au mieux par le biais d'actions communes et concertées. Pour satisfaire à cette exigence, le Conseil européen a voté, en décembre 2003, la première stratégie européenne de sécurité, qui analyse les menaces globales auxquelles nous sommes confrontés et les moyens d'y répondre. Ainsi l’Europe a-t-elle fait un pas qualitatif important dans le sens d’une politique extérieure et de sécurité commune.
Les dangers analysés ici ont pour noms terrorisme, prolifération d’armes de destruction massive, conflits régionaux à travers le monde et leurs effets directs et indirects sur l’Europe, criminalité organisée.
Nous voyons dans un multilatéralisme efficace et dans une politique européenne extérieure active et cohérente, munie de tous les moyens pour réaliser ses ambitions, les réponses à ces problèmes.
L'Europe au cœur de la politique extérieure luxembourgeoise
Pour le Luxembourg, la coopération internationale s'inscrit dans le cadre européen et l’Union européenne est et reste l'axe central de notre politique extérieure. C’est dans le cadre de l’Union que nous définissons notre politique extérieure et c’est par l’Union que nous nous donnons les moyens et le poids pour réaliser nos attentes.
Pour nous et pour l’Union, la relation transatlantique est un élément clé de la stabilité internationale car elle contribue de manière significative à la force de la communauté internationale. La solidarité au sein de l’OTAN est, pour nous, une expression particulière de cette forte relation. Pour cette raison, nous nous félicitons de ce que, parallèlement à celui de l'UE, l’élargissement de l’OTAN vienne compléter les structures de sécurité en Europe.
L'Union 9 mois avant notre présidence
Si aujourd’hui, 9 mois avant la Présidence luxembourgeoise du Conseil, nous analysons l’état de l’Union européenne, il n’en résulte pas une image uniforme.
L'Union européenne est avant tout une formidable réussite : 450 millions de personnes ont surmonté les divisions du passé et donné une nouvelle dimension aux idéaux de liberté, tolérance et fraternité. Nous ne pouvons plus nous imaginer un monde sans Union européenne, ni même l'éventualité d'un conflit entre les membres de l’Union. Ce succès repose aussi sur une force économique, monétaire et commerciale. Le Marché commun génère 1/4 du produit social brut au niveau mondial et notre monnaie unique, l’euro, s’est affirmée comme 2ème monnaie mondiale aux côtés du dollar.
Forte d'un tel poids, une Union de 25 pays se doit d'être un acteur engagé sur la scène internationale, prêt à assumer sa part de responsabilité dans des questions globales telles que l’organisation du commerce international, l’environnement, les Droits de l’Homme et la sécurité.
Et pourtant, l'image que véhicule l'Union à l'extérieur n’a pas encore atteint cette unité qui lui permettrait d’exploiter tout le potentiel de ses capacités.
Notre division ouverte sur la question irakienne, il y a juste un an, en est l’illustration parfaite. L’Europe est en proie aux hésitations dès lors qu'il s’agit de représenter avec unité nos intérêts communs à l’extérieur et de définir une politique extérieure et de sécurité commune.
Mais soyons honnêtes dans notre jugement. Cette faiblesse actuelle de l’Union n'a en définitive rien de surprenant. L’Europe ne s’est pas encore donné les moyens d’une politique extérieure européenne qui soit à la hauteur des défis. Plus d’une fois, la volonté politique nous a fait défaut, mais aussi les moyens adéquats et des structures améliorées pour mettre en œuvre de manière cohérente et conséquente cette politique extérieure européenne commune et une politique européenne de sécurité et de défense commune.
Et pourtant : l’expérience de la guerre en Irak a sensiblement contribué à déclencher en Europe une réflexion dont il convient de ne pas sous-estimer l’importance. Une réflexion commune sur nos intérêts en tant qu’Européens a été lancée sur la base de nos valeurs et objectifs ainsi que des moyens de leur réalisation. La stratégie de sécurité qui en a résulté se concrétise peu à peu par le biais des plans d’action européens, tels que le plan d'action contre le terrorisme, le plan d'action pour la Bosnie ou encore le plan d'action contre la prolifération des armes de destruction massive.
Pour concrétiser et mettre en oeuvre cette nouvelle pensée, nous avons toutefois besoin des structures adéquates. C’est ainsi qu'il faut comprendre l’initiative commune prise par la France, l’Allemagne, la Belgique et le Luxembourg, le 29 avril, dans le but de donner à l’Union une structure de défense claire et un meilleur cadre pour la collaboration de tous les pays de l’Union européenne et avec l’OTAN.
La CIG et la constitution
L’image complexe que l’Union donne pour le moment tient également au fait que le Conseil européen de décembre dernier n’a pas réussi à s'accorder sur le texte d’une première constitution.
Disons-le une fois encore clairement : nous voyons dans une constitution européenne un moyen de rendre l’Europe plus forte et plus cohérente. Pour cette raison, nous regrettons ce résultat et nous sommes disposés à mettre tout en œuvre avec nos partenaires pour qu’un accord définitif voie le jour avant la fin de cette année encore.
Je ne veux donc voir dans l’impossibilité des chefs d’Etat et de gouvernement à trouver un consensus ni une crise de l’Europe, ni une crise pour l’Europe.
Je comprends le Conseil européen de décembre plutôt comme un rendez-vous manqué que nous devons rattraper au plus vite.
On ne pourrait parler véritablement de crise que si l’Union n'était plus en mesure d’agir. Mais ce n’est pas le cas. L’Union continue à fonctionner sur la base des dispositions que nous avons négociées à Nice, justement pour rendre possible l’élargissement et assurer la transition de mai 2004.
S’il fallait encore une preuve que la capacité d’agir de l’Union n’est pas directement remise en question, la voici : le projet élaboré par la convention – et qui constitue la base des travaux de la CIG – prévoit de toutes façons le maintien des dispositions institutionnelles essentielles du Traité de Nice jusqu’en 2009. Ces dispositions concernent notamment la composition de la Commission, les règles de vote au Conseil et la composition du Parlement européen.
Pour moi, il est essentiel que le vote de la constitution s'accompagne d'une réforme en profondeur de l’Union qui permette de clôturer durablement le chapitre de ces modifications institutionnelles.
La présidence irlandaise a repris le dossier et présentera, sur la base des consultations qu’elle mène actuellement, un premier état des lieux lors du prochain Conseil européen.
Mais il est un fait que, lors d’une conférence gouvernementale, rien n’est décidé avant que tout ne soit décidé. Un consensus général, comme celui constaté par le président de la convention au terme de sa mission, ne suffit pas. Nous avons, au sein de la CIG, besoin de l'accord ferme et définitif de toutes les délégations, de tous les pays, sur un texte précis et, ceci, pour toutes les propositions.
Notre coopération dans le cadre du Benelux, à laquelle – comme vous le savez – j’accorde beaucoup d’importance depuis que je suis ministre, a porté ses fruits, de sorte que nous pouvons être pleinement satisfaits du résultat acquis au terme de la convention et lors du conclave de Naples.
Nos positions au sein de la CIG et concernant la constitution
Vous connaissez les positions adoptées tant lors de la convention que lors de la conférence du gouvernement, car j'ai veillé à ce que la Chambre soit tenue informée des travaux de la CIG. Permettez-moi de les rappeler brièvement.
En ce qui concerne nos représentants au Parlement européen, nous étions d’accord d’insister pour que leur nombre reste inchangé.
En ce qui concerne la composition de la Commission, nous nous sommes mis d’accord avec les partenaires du Benelux pour accepter à terme une Commission réduite à condition que tous les Etats se rallient au principe d'une rotation égalitaire entre tous les pays. Nous pourrions alors accepter, après un délai de transition, un système de représentation à la Commission prévoyant de faire suivre l'exercice de deux mandats consécutifs d'une période sans mandat.
Mais, bien plus important que le nombre des commissaires, l'égalité de tous les Etats membres doit être pleinement respectée au sein de cette assemblée, dédiée à la défense des intérêts communs et non nationaux. La Commission doit en outre pouvoir assumer le rôle majeur qui lui incombe dans la construction institutionnelle de l’Union. En d'autres termes : la Commission doit être et rester le lieu où se formule et se définit l’intérêt général de l’Union et non pas devenir la tribune où s'expriment les positions nationales.
La méthode communautaire, c'est-à-dire l’égalité de principe entre tous les pays membres et la recherche de solutions qui se basent sur un compromis général, de même que la collégialité de la Commission, ne sont pas à notre disposition.
La Commission ne doit pas dévier de ce principe d’organisation et de fonctionnement. Ces éléments sont constitutifs de l’acquis communautaire, ainsi que du succès et d'une large acceptation de l’intégration européenne.
Le Conseil est et reste ainsi, pour nous, le lieu de la prise de décisions communes et celui où s'exprime de la spécificité même de l’Union – à savoir la réunion de 25 pays qui collaborent de manière très étroite et poursuivent des buts communs.
En ce qui concerne la présidence du Conseil de l’Union, nous maintenons notre attitude de principe selon laquelle tous les pays doivent assumer cette tâche de manière égale. Nous comprenons néanmoins aussi les efforts visant à ne pas laisser peser l'entièreté de cette charge sur un seul pays. Ce mode de fonctionnement a certainement, par rapport à la rotation semestrielle telle que nous la connaissons actuellement, le désavantage d'être moins transparente et plus difficile à expliquer.
Mais dans la mesure où la charge de travail augmente avec l’élargissement, il est compréhensible que cette charge soit répartie entre différents pays. Que les pays à se partager le travail pendant 18 mois ou une année soient au nombre de trois, cela reste encore à discuter.
Il importe, en conséquence, de redéfinir la présidence du Conseil européen. Nous savons ici l’importance que plusieurs pays accordent à la stabilité d’une présidence dotée d'un mandat de 2 ans et demi renouvelable. Nous, les pays du Benelux, avons eu du mal à admettre cette idée et notre adhésion à celle-ci dépend en définitive de la définition du rôle et de la compétence de cette présidence.
En ce qui concerne le débat sur le Ministre européen des Affaires étrangères, nous avons toujours dit clairement y voir une fonction “à double chapeau” où, à la fois, il serait Commissaire en charge des relations extérieures et – en tant que membre du Conseil – présiderait les réunions des Ministres des Affaires étrangères dont il mettrait en oeuvre les décisions. Nous voyons dans cette proposition la possibilité de réunir sous un chapeau les deux intervenants de la politique extérieure commune, la Commission et le Conseil, et ceci afin de garantir avec la plus grande cohérence et efficacité possibles notre représentation commune à l’extérieur. Autrement dit : le Ministre européen des Affaires étrangères dispose de tous les instruments nécessaires pour représenter nos positions communes de manière efficace et cohérente à l’extérieur et vers l’extérieur.
A côté de cela, nous voulons aussi que l’instrument des coopérations renforcées, un concept qui a trouvé son entrée dans le Traité de Nice grâce à l'action insistante du Benelux, soit repris dans la nouvelle constitution comme un moyen d'organiser la collaboration avec les pays souhaitant s’intégrer dans les structures de l’Union. Aujourd'hui encore, nous insistons néanmoins pour que cette coopération soit ouverte aux autres pays, ce qui veut dire que personne ne pourra en être exclu et qu'elle doit fonctionner dans les structures et selon les règles de l’Union. C’est là une meilleure réponse que celle d'un noyau européen à l'inévitable confrontation d'une Union à 25 avec différents stades d’évolution. Une solution à l’extérieur du cadre de l’Union serait vue comme un affaiblissement de l’Europe à une époque où les Européens et, peut-être aussi, le monde pourraient au contraire avoir plutôt besoin d’une bonne dose “d’Europe en plus”.
La défense pourrait être un des domaines où, sur la base de critères clairs, certains pays pourront progresser en termes d'intégration. La coopération structurée devrait être mise en œuvre dès que possible dans ce domaine particulièrement sensible et stratégique. Elle est d'ailleurs d'ores et déjà inscrite dans la version actuelle du projet de constitution.
Un de nos grands soucis au moment de finaliser le texte de la constitution sera également de garantir la capacité d'action d’une Union de 25 membres et plus. C’est précisément ce que nous permet de réaliser le projet de la double majorité, telle qu'elle est inscrite dans le projet de convention.
Nous voulons que l’Europe se dote d'un système simple qui lui permette de prendre des décisions de manière transparente et compréhensible mais aussi, et surtout, de manière démocratique. Une manière qui réponde aussi à la double nature de l’Union, composée de pays et de citoyens.
Ce modèle, qui a été décidé à Nice, est marqué par le souci de pouvoir bloquer les décisions. L’essence du travail en commun dans l’Union ne peut pourtant pas être d’entraver aisément la prise de décisions.
Ainsi, nous saluons les efforts engagés pour modifier le mécanisme de décision élaboré dans le cadre du Traité de Nice et établissant que toute prise de décision à la majorité qualifiée doit recueillir 72% des voix du Conseil, la majorité des Etats membres et, le cas échéant, comme condition supplémentaire, représenter au moins 62% de la population de l’Union.
La proposition de la convention, avec le principe de la double majorité, vise à réduire les possibilités de blocage. Premier élément de ce système : la majorité des pays souligne l’égalité entre tous les Etats membres. Tous les membres de l’Union disposent d’une voix. Deuxième élément : la majorité des citoyens de l’Union applique le principe fondamental de toute démocratie, à savoir que chaque citoyen compte. La combinaison de ces deux éléments reflète alors le véritable caractère de l’Union, une Union de pays membres mais aussi une Union de citoyens européens.
En ce qui concerne les résultats des négociations, il serait bon que les progrès qui se dessinent en matière de "vote à majorité qualifiée" bénéficient aussi à la justice et aux affaires intérieures.
Pour ce qui est des articles sur la fiscalité et la sécurité sociale, nous allons faire tout notre possible pour que la clarté nécessaire y soit faite. Au vu des discussions qui ont eu lieu à ce jour en la matière, il semble que ce domaine ne sera pas, à l'avenir non plus, soumis en bloc à la majorité qualifiée ; le principe de l'unanimité restera acquis pour les décisions en matière d'impôts et de sécurité sociale.
Il ne faut pas nécessairement y voir un échec. Nous avons pu réaliser des progrès sur des dossiers difficiles, avec – et peut être même en raison – du principe de l'unanimité, qui nous a forcé à rechercher le compromis acceptable pour tous. Je voudrais seulement rappeler ici que l’unanimité ne nous a pas empêché de négocier et de voter une directive sur la fiscalité des intérêts sans que l’Union dans son ensemble ou certains pays membres y perdent.
La politique extérieure et de sécurité européenne
Si j’ai dit auparavant que nous allons tout mettre en oeuvre pour donner vie et corps à la politique européenne en matière d'affaires étrangères, de sécurité et de défense, c’est parce qu’une intégration plus poussée dans ces domaines est dans notre intérêt direct. En tant que partenaire de l’Union, nous avions depuis toujours l’ambition d’être un pionnier de l’intégration européenne. Il n’existe pas d’autre alternative pour le Luxembourg que celle de se positionner au coeur de ces pays qui veulent faire une réalité vécue de la vision de Schuman d’une “Communauté plus large et plus profonde entre des peuples longtemps opposés par des divisions sanglantes". Les moyens pour y arriver sont déjà nommés dans le préambule du premier traité européen : "des institutions capables d'orienter un destin désormais partagé".
Nous continuons à prendre cette mission très au sérieux. Nous avons toujours été de ceux qui ont favorisé une coopération plus étroite. Ce fut le cas pour les questions monétaires, un développement qui nous a conduit à l’euro, ou pour la libre circulation et les Accords de Schengen. Ce fut aussi le cas récemment, le 29 avril de l’an dernier, lorsque – avec nos voisins la France, l’Allemagne et la Belgique – nous avons élaboré une proposition portant collaboration européenne dans les domaines de la coopération militaire et de la politique de sécurité et de défense. Une coopération dans laquelle – c’est ainsi que nous la voyons évoluer – tous les pays de l’Union devraient pouvoir se retrouver. Beaucoup a été fait déjà en ce sens ; ainsi, le dernier Conseil européen a débattu du Quartier Général opérationnel, et la CIG a avancé des propositions dans le domaine de la politique de sécurité et de défense.
L’acquis de la politique extérieure et de sécurité
Nous continuons à assumer entièrement et pleinement les engagements que nous avons pris en 1999 dans le programme du gouvernement, où nous avons apporté la réponse suivante à une situation nouvelle : “Le développement d’une véritable politique de sécurité et de défense européenne dans le cadre de l’Alliance atlantique apparaît comme une nécessité”.
Nous restons convaincu de la justesse de cette approche. Nous sommes d’avis que nous devons, pour assumer notre responsabilité nationale, renforcer tous les aspects civils de la gestion de crise et de la prévention.
Mais ce n’est pas suffisant. Nous voulons que l’Union soit aussi en mesure de prendre entièrement et pleinement sa responsabilité, ce qui signifie en fin de compte – si tous les autres moyens sont épuisés – aussi par des interventions avec des moyens militaires propres, lorsqu’il s’agit d’éviter des conflits et de désamorcer des crises.
Dans ce domaine, nous avons, au cours des dernières années, fait beaucoup d’efforts et obtenu bon nombre de succès et de progrès.
Depuis l'entrée en vigueur, en 1999, du Traité d’Amsterdam – dont les articles 11 à 28 définissent la portée et les moyens de la politique étrangère et de sécurité commune, l’Union dispose des moyens d’être active dans ce domaine, et de mettre notamment l'accent sur la prévention de conflits. Après le Conseil de Cologne en juin 1999, qui a placé les missions de gestion de crise, de maintien ou de rétablissement de la paix au centre de la PESD, cette volonté s'est concrétisée par la création, dans un premier temps, d’une force de réaction rapide de 60 000 hommes qui intervient en cas de crise, sans préjudice des actions entreprises par l'OTAN, donnant ainsi à notre politique extérieure et de sécurité commune une dimension opérationnelle dans un domaine essentiel.
Le Conseil de Nice a créé les nouvelles structures militaires et politiques permanentes – notamment le Comité politique et de sécurité et le Comité militaire – chargées d'assurer le contrôle politique et la coordination nécessaire des opérations et des actions.
En décembre 2002, à Copenhague, des arrangements ont été définis qui permettent de clarifier et de réglementer la collaboration de l’Union Européenne et de l’OTAN en cas d’intervention et l'accès aux moyens de l’OTAN. Ceci a permis l'application de l'Arrangement de Berlin et l’Union a obtenu de conduire des missions propres, comme en Macédoine ou, à la fin de cette année, en Bosnie.
Auparavant, à Feira, nous avions déjà trouvé un accord pour développer les aspects civils de la gestion de crise. Les Etats membres se sont engagés à mettre à disposition de l'Union 5 000 policiers pour des missions internationales, ainsi que des moyens permettant de renforcer l’état de droit, l'administration civile et la protection civile dans le cadre de telles missions.
Je rappelle cette évolution, car il en découle pour nous – en tant qu’Union et pour le Luxembourg – aussi de nouvelles obligations et tâches, que nous prenons au sérieux et pour lesquelles nous devons nous donner à l'avenir de meilleurs moyens.
Nous avons témoigné de notre engagement par notre participation aux missions lancées par l’Union suite à ces décisions. Citons, à titre d'exemple, l'envoi de la première mission de police européenne fin 2002 en Bosnie-Herzégovine, ou la reprise de la mission de l’OTAN en Macédoine au printemps 2003.
Pour nous préparer à la redéfinition de ces tâches, déjà ébauchée à l'époque, nous avons décidé lors de la constitution du gouvernement, d’intégrer la défense et l’armée dans le Ministère des affaires étrangères. Une décision qui s’est révélée être juste et qui nous a permis une approche plus globale et cohérente dans de nombreuses régions de crise.
Ainsi, notre armée a, dans le cadre d’une unité belgo-luxembourgeoise participé à toutes les missions de paix dans les Balkans. Nous sommes également présents depuis 1999 au Kosovo, où un peloton de soldats luxembourgeois aide à y assurer la stabilité nécessaire. La difficulté de cette mission a encore été mise en évidence ces derniers jours.
Nous participons également à une série de missions de police multinationales dans la région, ce qui prouve que – pour assurer la stabilité dans cette région si importante pour toute l’Europe – il convient d’avoir recours à des instruments divers.
Depuis août 2003, 10 soldats luxembourgeois ont intégré les unités en charge de la sécurité de l’aéroport de Kaboul. Depuis l'année dernière, deux démineurs luxembourgeois ont également rejoint leurs collègues belges au Cambodge. Nous avons aidé à financer la mission de paix européenne au Congo tout comme nous aidons financièrement et avec des formateurs à préparer la police de Kinshasa à ses tâches et à mettre sur pied une brigade pour le maintien de la paix.
Voilà une première série de succès communs, que nous pouvons afficher et qui prouvent que nous sommes disposés à assurer notre engagement pour la stabilité et la sécurité à l’extérieur de l’Europe – un engagement qui a aussi des répercussions positives directes chez nous car nous contribuons à désamorcer à leur source les problèmes potentiels.
De cette manière, nous affirmons notre crédibilité comme membre à part entière de l’Union et l’Union confirme son engagement et sa valeur ajoutée comme producteur de stabilité et de sécurité.
Une Europe unie et forte est dans notre intérêt
Une Europe plus unie, une Europe rendue plus forte par cette unité, est de notre plus grand intérêt.
A partir de juin cette année, en tant membre de la Troïka, et surtout durant le premier semestre 2005, au cours duquel nous assurerons la Présidence de l'UE, nous ferons de cette exigence le fil rouge de notre engagement.
Cette Europe que nous aspirons à ériger ne sera pas une Europe-puissance qui chercherait à imposer une quelconque hégémonie. Notre aspiration et notre vision est celle d'une Europe-partenaire, non pas observateur d’un monde en mutation, mais acteur engagé sur la scène internationale. Un acteur qui est pris au sérieux, qui est disposé à renforcer ses intérêts et se donne les moyens d'y parvenir.
Après l'expérience de la guerre froide et de la division de notre continent nos citoyens ne veulent pas non plus d’une Europe - ou d'un monde - des fractures ou des séparations. Ils réclament une Europe enfin réunie dans toutes ses composantes, qui a tiré les leçons de son histoire et véhicule ses valeurs. Une majorité d'Européens aspirent à réaliser une Europe fondée sur l'équilibre entre unité et diversité, entre fédéralisme et souveraineté nationale, entre progrès économique et justice sociale. Une Europe finalement qui s'agrandit sans défaire les acquis de 50 ans de solidarité concrète et d'intégrations successives.
Seule une Europe aux valeurs fortes est en mesure de soutenir, dans ces pays candidats qui n'adhéreront pas à l'UE au 1er mai parce que les négociations ne sont pas encore clôturées, cette dynamique qui les aidera aussi à l’avenir à mettre en oeuvre des réformes souvent difficiles. Seule une Europe de cette trempe est capable d'établir une solidarité efficace avec nos partenaires.
La préparation de la présidence luxembourgeoise
Nous voulons aider à consolider une telle Europe tout au long de la présidence que nous assurerons dès janvier prochain. Je ne veux pas vous cacher que la présidence à laquelle nous nous préparons actuellement représente un énorme défi pour nous, un défi que nous voulons transposer en succès grâce à l'engagement et à la meilleure coopération possibles de tous les ministères et services concernés.
Mais le succès ne vient pas seul. Il est le résultat d’une longue et bonne préparation, d’un travail dur sur le terrain et d’un "engagement sans faille" dans les dossiers.
Pour cette raison, j’ai accordé depuis le début une importance particulière à la coopération entre tous les ministères lorsqu’il s’agissait de coordonner et de préparer tant les aspects de contenu qu’organisationnels. Le Comité interministériel mis sur pied à cet effet apparaît comme une instance de coordination vers laquelle convergent les rouages essentiels de l’organisation de tous les ministères et services concernés.
Nous sommes également en train de renforcer nos différents ministères, nos représentations à Bruxelles et nos ambassades en y délégant des chargés de mission afin d'assurer le contrôle et la maîtrise des flux de travail supplémentaires qui nous arriverons pendant la phase de préparation et, ensuite, pendant la présidence.
De manière globale, nous allons avoir recours à 190 chargés de mission, dont 120 sont actuellement déjà engagés, 75 pour le Ministère des Affaires étrangères, nos représentations et ambassades et 45 en renfort pour d’autres ministères. Même si ce chiffre semble impressionnant maintenant, nous devons reconnaître que notre cadre en personnel, à l'approche de cette présidence, est nettement plus limité que celui de nos partenaires de l’Union. Pour cette raison, j’ai insisté pour soumettre le Ministère des Affaires étrangères à une modernisation générale tant au niveau des technologies qu’au niveau de l’organisation des processus de travail.
Nous le savons déjà, notre présidence ne sera pas chose aisée. Nous serons une des premières présidences de l’Union élargie à 25, nous serons la première présidence à collaborer tant avec le Parlement européen nouvellement élu qu’avec la nouvelle Commission. Tous ces éléments ne faciliteront certainement pas notre travail au cours de ces 6 mois.
Le Ministère des Affaires étrangères assume donc une fonction de coordination importante dans le cadre de cette présidence, qui nécessitera toutefois l'engagement et l'effort de tout notre gouvernement, de toute notre administration. La meilleure coopération possible entre les services et tous les membres du gouvernement sera un facteur déterminant de notre réussite commune.
Les dossiers à traiter
Quels sont maintenant les dossiers majeurs sur lesquels nous allons travailler pendant notre présidence ?
En 2000, avec le “processus de Lisbonne”, les pays membres de l’Union européenne se sont donné comme objectif de devenir, par le biais de réformes et d'investissements dans l’économie et les infrastructures, l’économie la compétitive au monde d'ici 2010. C’est à la présidence luxembourgeoise qu'il reviendra, dans ce cadre, de dresser au printemps 2005 un bilan intermédiaire de ce qui aura été réalisé jusqu'alors, de ce qui fonctionne ou ne fonctionne pas. Il s’agira aussi de faire une analyse et de mener les débats afin de déterminer comment mieux exploiter les potentiels de l’économie européenne. Bref, un bilan de santé de l'économie européenne trois années après l’introduction de l’euro.
Dans un contexte de faible croissance pour la plupart des pays européens, et notamment dans la zone de l’euro, il s’agira et il devra s’agir pour nous de poser des priorités et de tracer des pistes en vue de renforcer la coordination des politiques économiques en Europe, de créer de meilleures conditions structurelles et conjoncturelles et de garantir ainsi la stabilité des emplois, de meilleures conditions de travail et des perspectives d’avenir.
Une part importante de l’exercice consistera aussi à préserver et à renforcer le modèle social européen, basé sur le principe organisationnel du partage de la responsabilité entre tous les partenaires du processus économique. Nous voulons ainsi atteindre la croissance économique dans l’intérêt de chaque individu. Il n'est pas dans les habitudes de l'Europe de soumettre l’individu et ses besoins à l’économie, d'autant que ce mode de fonctionnement ne saurait permettre un développement soutenu à long terme.
Dans le contexte d’une économie dynamique, il s’agit surtout de savoir comment l’action de l’Etat, par le biais d'une gestion efficace des finances publiques, peut contribuer à la réalisation de cet objectif.
Parmi les dossiers que nous aurons à traiter au cours de la présidence de l'Union se trouve également celui des perspectives financières réalistes dont l'Union doit se doter pour les années 2007 à 2013. J'entends par là un cadre financier qui soit adapté aux tâches que l’Union se donne. Les discussions qui ont démarré lors du conseil des Ministres des Affaires étrangères en février risquent de se compliquer. Divers pays ont proposé de fixer le budget de l’Union pour cette période à 1% du produit national brut. Le Luxembourg ne peut et ne veut pas soutenir cette approche.
Le budget réel de l’Union pour l’année 2004 prévoit des crédits de paiements à hauteur de 99,53 milliards d’euro, ce qui correspond à 0,98% du RNB de l’Union. Si l'on considère ce chiffre, il en résulte que – sans une adaptation des moyens que nous mettons à disposition de l’Union – il est difficilement envisageable d’étendre les politiques communes. La part du Luxembourg dans le budget tel qu’il a été clôturé en 2002 s’élevait à 183,8 millions d’euros, soit 0,2% de l’enveloppe budgétaire globale.
En ce qui concerne la planification financière pour le futur, nous voulons en premier lieu définir les tâches que l’Union – et chacun de nous individuellement – peut réaliser d’une manière plus efficace et plus structurée. Lorsque nous saurons ce que nous devrions et devons raisonnablement accomplir ensemble, nous serons en mesure d'effectuer une évaluation réaliste du budget requis pour ce faire. A terme, cela ne générera pas de frais supplémentaires car les budgets nationaux seront amputés des montants correspondants pour les tâches considérées.
Ce qui importe néanmoins, tant au niveau européen qu'au niveau national, c'est d'adapter les moyens que l’on se donne aux tâches envisagées. Si cette équation n’est pas résolue, nous irons droit à l'échec.
Les moyens financiers de l’UE ne servent donc pas seulement à supporter des coûts. Il s'agit surtout d'instruments concrets de soutien des politiques communautaires. Certaines de ces politiques seront renforcées, comme le nouveau rôle de l’Europe sur la scène internationale. D’autres sont de nature plus classique, comme la solidarité européenne traditionnelle dans l’Union élargie. Ce qui ne doit pas changer, par contre, est l'adaptation des moyens aux tâches, pour que l’Europe conserve à l’avenir aussi sa capacité d'agir. En fin de compte, il devrait en résulter un cadre financier respectueux de l’équité dans le traitement des pays. Ce sont les paramètres dans le cadre desquels la présidence luxembourgeoise mettra tout en oeuvre pour arriver à un accord politique sur ces nouvelles perspectives financières.
A plus long terme, je ne vois pas non plus de problème à remplacer le système actuel des contributions des budgets nationaux par un impôt européen correspondant. Un tel modèle aurait l’avantage de permettre à chacun de calculer directement à combien – ou combien peu – lui coûte la collaboration européenne et les bénéfices qui en résultent pour les pays et chaque citoyen. Par ailleurs, ceci peut contribuer à une plus grande transparence et à une objectivisation du débat.
Les dossiers européens qui vont nous accompagner pendant notre présidence incluent aussi celui des négociations d’adhésion avec la Bulgarie et la Roumaine, qu'il nous faudra clôturer avec succès et pour lesquelles nous restons convaincus des avantages que comporte, pour le succès du processus, l’approche sur la base des mérites propres. Il est important que les mêmes règles et conditions s’appliquent pour tous les candidats et que les engagements pris soient respectés.
Ceci s’applique notamment à la Turquie qui, en 1999, lors du sommet d’Helsinki, a obtenu le statut de candidat. Les négociations avaient à ce moment pourtant de nouveau été suspendues pour permettre à la Turquie d'engager une série de réformes en vue de remplir les critères de Copenhague. Il y a eu des pas importants et significatifs dans cette direction et le Conseil de décembre devrait, sur la base du rapport établi par la Commission, décider d'engager ou non les négociations sous notre présidence. Nous allons en tout cas nous préparer à cette mission et nous sommes prêts à lancer ces négociations qui devraient s’étendre sur plusieurs années.
Notre responsabilité pour le développement et le commerce équitable
L’engagement plus marqué de l’Union européenne face aux problèmes de ce monde renforce son poids et son influence sur le plan économique en tant que marché de 450 millions de consommateurs – presque 2 fois plus que les Etats-Unis, 4 fois plus que le Japon – et premier acteur sur le marché mondial, avec plus de 20% du total des exportations. S’y ajoute aussi le fait que les pays de l’Union sont le premier partenaire mondial de l’aide au développement. Ils fournissent pas moins de 55% des moyens de la coopération internationale au développement.
En Europe et au Luxembourg aussi, nous considérons cet engagement pour le développement comme une obligation morale. Nous voyons également cet effort comme un investissement direct pour une plus grande stabilité et prévention des crises.
Nous avons assumé notre responsabilité. Je voulais, dans ce contexte, juste rappeler que ce gouvernement a augmenté les moyens de la coopération de 0,7% à 0,84% du revenu national brut entre 2000 et 2004. Le débat récent sur notre politique de coopération vous a permis d’analyser en détail tous les aspects de cette politique et je vous suis reconnaissante du soutien unanime que vous avez exprimé au gouvernement à cette occasion pour son approche.
En ce qui concerne la politique commerciale et les négociations de l’Organisation mondiale du commerce, je tiens à souligner que la délégation luxembourgeoise a soutenu sans réserve les positions définies au niveau de l’Union et visant à aller à la rencontre des pays en voie de développement et de leurs besoins. Nous voyons aussi dans une politique commerciale adéquate et équilibrée un moyen de stimuler le développement futur dans tous les pays. Pour cette raison, je regrette que la dynamique de Doha n'ait pas permis de parvenir à un accord global à Cancun. Il est dans l’intérêt de tous les participants, mais surtout des petits pays, de clôturer ces négociations le plus rapidement possible. L’alternative à un cadre multilatéral, à savoir une multitude d’accords bilatéraux, ne saurait servir leurs intérêts.
Néanmoins, je voudrais souligner encore une fois que l’enjeu, pour nous, n’est pas la déréglementation du commerce mondial. Ce qui importe, c'est un accès garanti et amélioré pour chacun au marché mondial et l’adoption d’un cadre dans lequel discrimination nationale et distorsions de la concurrence n'ont plus leur place, mais où des normes minimales sont définies et respectées en matière sociale et environnementale.
Fidèle à ses traditions pluralistes et sociales, l’Europe – et surtout l'Union – se doit d'être le catalyseur d'une mondialisation maîtrisée. Elle doit prouver que notre modèle social est capable de protéger les citoyens – en Europe et ailleurs – sans remettre en cause la force motrice des marchés.
Dans cette optique, je souhaite que la présidence luxembourgeoise aide à prendre conscience de ce que notre Europe est plus qu’un simple bloc commercial. Notre sensibilité pour l’équilibre de notre environnement, notre engagement pour un développement durable font partie intégrante des réflexes d'un nombre croissant d’Européens. En même temps, le réflexe solidaire de l'Europe nous amène à venir en aide aux plus pauvres à travers une coopération qui, depuis les conventions de Yaoundé et de Lomé, et désormais de Cotonou, nous lie à nos partenaires d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et témoigne de notre volonté de rechercher, avec eux, un développement plus juste et par conséquent plus harmonieux sur une base de partenariat.
C’est cette Europe que nous voulons renforcer et à laquelle – dans le cadre de notre présidence – nous allons donner la priorité.
Notre commerce extérieur bénéficie des nouveaux marchés
Un autre aspect important de l’intégration européenne est, pour nous, celui du commerce extérieur. En tant que petite économie ouverte nous profitons particulièrement du grand marché que représente l’Union ainsi que des accords qu’elle négocie et signe au nom de tous les pays. L’élargissement est donc synonyme, pour nos entreprises, de nouvelles opportunités – d’autant plus que l’intégration économique a déjà commencé avant l’adhésion effective des nouveaux pays.
Nos commerçants et nos exportateurs n’ont pas attendu le 1er mai 2004 pour s’intéresser aux nouveaux pays membres. Au cours des 10 dernières années, c.-à-d. depuis que le processus d’élargissement de l’Union a été décidé à Copenhague, nos exportations vers des marchés aussi importants que la Pologne ou la République tchèque ont augmenté de plus de mille pour cent. A titre de comparaison, nos autres exportations ont à peine doublé pendant cette même période.
Les opportunités que l’élargissement du marché intérieur à 10 nouveaux pays ouvre pour notre économie ont donc déjà été exploitées. Mais l'élargissement n'en conserve pas moins un important potentiel d'avenir. Ceci apparaît très clairement dans l'exemple suivant : nous n'exportons vers la Pologne qu'1/4 des quantités que nous exportons vers l’Espagne, un marché qui a sensiblement la même taille.
En raison du potentiel économique, mais aussi politique, inhérent à l’approfondissement des relations avec les nouveaux Etats membres de l’Union, j’ai – au cours des 5 dernières années – insisté pour établir de nombreux contacts avec ces pays. J’ai donné la priorité à ces pays lors des visites officielles et des missions économiques. Nous avons aidé nos entreprises à s’établir dans ces marchés ; le succès est aujourd'hui au rendez-vous et une croissance solide de nos exportations en est la preuve. Ces 4 dernières années, nos exportations vers les nouveaux Etats membres ont augmenté de 45%, soit une progression plus de deux fois supérieure à celle de nos exportations vers le reste du monde pour la même période.
Par ailleurs, certaines de nos entreprises ont développé leurs activités dans des proportions telles qu’elles se sont établies sur place afin de pouvoir mieux servir leurs clients.
Mais les marchés plus lointains sont eux aussi importants. C’est justement dans ces pays, où le Luxembourg est peut-être moins connu, que le gouvernement peut contribuer, dans le cadre de missions officielles, à une visibilité qu’une entreprise privée n’obtiendrait que difficilement. Nous travaillons ici en étroite collaboration avec les Ministères concernés afin de présenter notre pays et son économie dans sa diversité. L’industrie, le secteur des services et la place financière font partie de cet ensemble. Pour cette raison, nous avons veillé tout particulièrement, lors de ces missions économiques, à cibler un public de spécialistes en organisant des séminaires sectoriels. La dernière manifestation d’envergure dans ce style a été organisée le 3 septembre de l’année dernière lors de la visite du Grand-Duc à Tokyo. Je voudrais simplement vous citer ce qu’un banquier anglais a dit à propos de cet événement à notre ambassadeur: "You had more people at your event than Tony Blair". Pour être précis, il y en avait 750.
Mais ces missions commerciales ne sont pas seulement une occasion pour nos entreprises d'établir des contacts locaux. Elles permettent également de discuter de problèmes éventuels au niveau le plus élevé ou encore de décider ensemble de projets qui ne pourraient voir le jour sans l’aide de l’Etat. C'est essentiellement dans les pays où le gouvernement conserve une certaine emprise sur l’économie que le Ministère des Affaires étrangères peut, bien souvent, donner le "coup de pouce" nécessaire à nos entreprises. Je pense que ceci est une possibilité que nous devrions aussi exploiter de manière conséquente à l’avenir. Notre collaboration pragmatique et directe, au sein du Comité consultatif du Commerce extérieur, avec tous les secteurs de notre économie a fait ses preuves depuis la réforme de ce comité. Les échos positifs des entreprises nous encouragent à persévérer dans cette voie.
Luxembourg : siège des institutions européennes
L'un des défis de ce gouvernement était d’assurer, par une stratégie cohérente, par une dynamique "politique du siège", la présence des institutions européennes et, si possible, de l’étendre. Nous, Luxembourgeois, avons accompli depuis 1952 un long chemin avec les institutions européennes et les fonctionnaires européens. Pour cette raison, j'avais particulièrement à coeur d’assurer définitivement l’avenir du Luxembourg en tant que l'une des trois grandes villes-siège des institutions, et ce avant l’élargissement encore. Je suis fière d'y avoir réussi.
Pour les seules 2 dernières années, les effectifs de l’UE basés au Luxembourg ont progressé de près de 1.500 unités, pour un total de 9.391 fonctionnaires européens en janvier de cette année, contre 7.963 il y a deux ans. Les effets de l’élargissement ne sont pas encore comptabilisés ici. Dans l'Union à 25, et par le seul fait des recrutements supplémentaires, il faudra s'attendre, au Luxembourg, à une progression de 12% du nombre de fonctionnaires européens.
L’année 2003 a été une année importante pour consolider l’extension de différents piliers ou „pôles d’excellence“ à Luxembourg.
Grâce à un engagement exemplaire et patient, le Luxembourg a été une nouvelle fois confirmé dans son rôle de capitale juridique et quasi-juridictionnelle lorsque le Conseil européen, réuni en décembre dernier à Bruxelles, a décidé, après de longues tractations, que le siège d’un futur Parquet européen serait à Luxembourg. Cette décision est très importante, car elle confirme l’interprétation des décisions historiques significatives dans le sens de notre intérêt. Concernant le volet juridique, ajoutons que les instances juridictionnelles du nouveau brevet communautaire et le Tribunal de la fonction publique européenne seront installés au Luxembourg.
J’ai déjà eu l’occasion, l’année dernière, de présenter ici les grandes lignes de l’accord conclu avec la Commission européenne sur l’avenir de ses services implantés au Luxembourg. Cet accord, signé il y aura de cela un an demain par le Commissaire Kinnock et moi-même, garantit que la Commission emploiera à l’avenir un minimum de 3.400 personnes au Luxembourg.
En plus de l’augmentation normale des postes due à l’élargissement, il y aura sans doute environ 300 nouveaux postes disponibles au Luxembourg. Conformément à nos ambitions, nous avons notamment réussi, lors de nos négociations avec la Commission, à renforcer les services autonomes dans le domaine des finances et de l’énergie et à étendre le pôle linguistique. De cette manière, nous avons pu, tant qualitativement que quantitativement, consolider l'implantation d'importants services de la Commission au Luxembourg.
Je vais, bien entendu, en collaboration avec la nouvelle Commission, surveiller le développement du site Luxembourg et mettre tout en œuvre pour que l’ancrage des services de la Commission au Luxembourg, qui est plus fort que jamais, soit garanti à l’avenir aussi.
En ce qui concerne le Parlement européen, on peut dire que l’année 2003 a été celle du “pacte de stabilité pour le siège du secrétariat général” au Luxembourg. La visite officielle du président Pat Cox à Luxembourg, au mois de juillet, nous a permis de conclure un accord politique sur un „paquet immobilier“ pour le Parlement UE, accord formalisé par la suite dans une série d’actes. L’accord que nous avons trouvé vise l’achat, par le Parlement, du bâtiment Konrad Adenauer et de ses extensions et la location des deux nouvelles tours au Kirchberg jusqu’à ce que les travaux du BAK soient terminés. Ce „paquet“ devrait permettre à terme au Parlement de loger ses services dans un seul bâtiment. Après de longues négociations techniques, le président Cox et moi-même avons signé, le 17 décembre à Strasbourg, l’acte de vente du bâtiment Konrad Adenauer au Kirchberg. Nous n’aurions pu recevoir de meilleure garantie pour l’ancrage du Parlement chez nous.
Et parce que nous voulons être, en tant que l'une des trois capitales européennes, à la hauteur des défis qui se posent à nous, ce sont – outre le projet d’une deuxième école européenne à Mamer, les grands projets de rénovation et d’extension du Centre de Conférences, les extensions de la Cour européenne, de la Cour des comptes, du bâtiment „BAK“ et de la Banque européenne d’investissement qui animent aujourd'hui le plateau du Kirchberg.
Conclusion
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs
Dans cette déclaration, je n’ai pas traité tous les aspects avec un même approfondissement et je me suis principalement concentrée sur l’Union européenne comme le garant de notre souveraineté et du cadre dans lequel nous définissons notre politique extérieure et de sécurité, ce cadre aussi, qui nous permet de représenter et de défendre nos intérêts de manière efficace dans un monde globalisé.
Cette stabilité et cette sécurité que ce cadre nous assure désormais depuis plus de 50 ans nous ont permis de créer de la prospérité et de la sécurité – y compris de la sécurité sociale – dans une proportion jamais atteinte auparavant par notre pays.
Mais notre poids politique, notre influence sur les affaires de ce monde, n’ont encore jamais été aussi marqués et aussi garantis qu'à ce jour. C’est là aussi un développement que nous devons à notre participation engagée dans l’unification européenne et les institutions multilatérales.
Maintenir ce cadre, l’accepter de telle manière qu’en tant que pays nous puissions continuer à envisager l’avenir avec confiance – garantir que le Luxembourg pourra non seulement affirmer sa place dans une Europe plus grande, dans le monde globalisé, mais aussi la renforcer, est la première et plus importante mission de notre politique extérieure telle que je la comprends.
Cette mission souligne aussi l’importance de notre politique extérieure pour la vie quotidienne de tous les citoyens de ce pays. Les accords que nous avons définis avec nos partenaires, les engagements que nous prenons, que d’autres prennent, définissent le cadre dans lequel notre économie se développe et reste compétitive.
Elle pose aussi le cadre de notre sécurité. Une sécurité, que les moyens militaires ne suffisent plus à réaliser car elle s'inscrit dans un environnement global et est – à ce titre – fonction d'innombrables facteurs sur lesquels il nous faut influer. Une sécurité aussi, qui ne commence pas seulement aux frontières de l’Europe et encore moins aux frontières de notre pays.
Défendre notre stabilité et notre sécurité ici, c'est nous engager au niveau mondial pour le respect des Droits de l’Homme, pour la paix, pour plus de prospérité, pour désamorcer et résoudre les conflits qui se poursuivent à travers le monde.
Pour cette raison, il est important et dans l’intérêt de chaque citoyen ici au Luxembourg que nous nous donnions les moyens pour être un partenaire actif, engagé et, partant, respecté dans l’Union et dans la Communauté internationale.
Et nous le serons si nous assumons notre part de responsabilité globale, si nous montrons et vivons notre solidarité, si nous mettons en oeuvre cette politique et aidons à ce que s’impose l’esprit que je vous ai esquissé dans cette déclaration.