Octavie Modert à l'occasion de la réouverture de l'exposition "The Family of Man"

Altesses Royales,

Le hasard ne fait-il pas parfois bien les choses, car qui aurait pu savoir qu’aujourd’hui une
boucle se bouclerait, puisque, Madame, Vos ancêtres, la famille de Lannoy, étaient les
propriétaires de ce beau château de Clervaux de 1631 à 1856. Votre venue aujourd’hui nous
honore particulièrement ; et je suis persuadée, Monseigneur, que Vous acclamez ce cours
de l’histoire qui à présent Vous ramène en couple sur ce site patrimonial extraordinaire,
hébergeant à nouveau cette grande oeuvre de l’humanité conçue par Edward Steichen, né
en 1879 à "Béiwen op der Atert" pour émigrer avec ses parents aux Etats�?Unis où il est
devenu un des pionniers de la photographie mondialement connu et reconnu.

Frau Kulturministerin der Deutschsprachigen Gemeinschaft Belgiens, Isabelle Weykmans,
unsere Länder und Regionen sind in enger Freundschaft und Zusammenarbeit verbunden, la
preuve: zum 2. Mal in 3 Wochen bist Du, liebe Isabelle, in der Gemeinde Klerf zugegen, weil
hier die Kultur lebt und Neues mit grosser Dynamik in die Regionen hineinträgt. Unsere
beiden Gemeinschaften dies- und jenseits der gemeinsamen Grenze wirken stärker
zusammen als in manch grossen Gefilden. Diese regionale Zusammenarbeit werden wir
weiterentwickeln, dies ist unser beider Ziel!

Excellences, Senator

Chers collègues Ministres, Députés-Maires, Députés, Bourgmestres, échevins, conseillers
communaux

Madame Marie-Josée Jacobs

Dear Maria Calderone, Dear Ariana Stahmer

Chers invités d’honneur venus des quatre coins du monde, liés par et dans la culture

Mesdames, Messieurs les Directeurs, Chers collaborateurs

Mesdames et Messieurs, Chers amis

Comment trouver les justes mots pour honorer la sympathie, la confiance et la tendresse
qui se mêlent à chaque parole que nous venons d’entendre de Francesca Calderone
Steichen, la petite-fille d’Edward Steichen, à laquelle j’aimerais adresser mes plus
chaleureuses pensées pour avoir choisi de partager avec nous ses souvenirs et ses émotions.

Dear Maria, chère Ariana,

We are deeply honored and touched by the support your family continuously gives to
Luxembourg, native country of your grand-father and great-grand-father Edward Steichen.
You are remarkable ambassadors of his heritage: généreuses, passionnées et humanistes. Je
vous remercie de tout coeur de votre profond attachement au Luxembourg.

Altesses Royales,

Mesdames et Messieurs,

„There is more love in the world than hate. If there was more hate, we would no longer
exist.“

Telles ont été les phrases du regretté "fils honoraire de Steichen" Wayne Miller, qu’Ariane
Stahmer a déjà mentionné, qui les avait citées à Toulouse en 1992 lors de la présentation de
The Family of Man au Réfectoire des Jacobins. Ces paroles rappellent la motivation
profonde d’Edward Steichen pour créer "l’oeuvre la plus importante de sa carrière". Il s’agit
en effet de son oeuvre la plus emblématique, la plus connue, la plus humaniste, la plus
discutée, une des plus controversées. En tant que mise en scène monumentale de
photographies, créant de nouveaux dialogues entre les images, elle est entrée dans
l’histoire. En incitant encore et toujours des discussions, tant artistiques qu’humanistes, elle
garde son actualité par le débat. C’était l’argument le plus fort pour justifier son inscription
dans le registre Mémoire du Monde de l’UNESCO en 2003 (où elle figure en bonne
compagnie avec les témoignages du Yad Vashem, la mémoire du Che, …).

L’exposition The Family of Man continue à accomplir un trajet des plus étonnants, une
balade qui parvient à éveiller en nous des émotions nobles et merveilleuses. Ne fallait�?il pas
viser à l’époque les étoiles pour atteindre le sommet de l’arbre ? The Family of Man n’est
pas une exposition comme les autres. Edward Steichen, aidé par son équipe, l’avait réalisé
en 1955, après la Guerre mondiale et en pleine guerre froide. Par son ambition de message
de paix et sa mise en scène, par le courage et la hardiesse de son dialogue, elle défiait le
goût conservateur de l’époque, autant que l’attente des professionnels. Acclamée et
contestée à la fois, elle s’érigeait dès les premières semaines comme un mile stone
incontournable dans l’histoire de la photographie. Son tour du monde à travers plus de 70
pays - des Etats�?Unis vers le Canada, au Japon et en Union Soviétique, en passant par Israël,
l’Afghanistan, l’Italie, Paris et Berlin tout comme Vienne - a mobilisé plus de 10 millions de
visiteurs.

Depuis 1994, la collection a trouvé son domicile permanent à Clervaux, après que le
gouvernement américain en ait fait don au Grand-Duché de Luxembourg en 1964. Et je
salue ici Mme Marie-Josée Jacobs, qui l’avait inauguré en 1994 en sa qualité de ministre
déléguée à la culture en présence de M. Jacques Santer, Premier Ministre et ministre de la
Culture de l’époque. Steichen lui-même a d’ailleurs approuvé l’installation définitive en ce
lieu-ci de son oeuvre monumentale. "It would be a nice place" s’exprimait-il en 1966, lors
de son voyage au Luxembourg.

Mesdames, Messieurs,

La manière dont nous manions l’héritage de Steichen traduit aussi la politique patrimoniale
dynamique et volontariste du Gouvernement. Une politique culturelle responsable envers
un patrimoine artistique qui compte parmi les collections photographiques les plus
légendaires de tous les temps, The Family of Man. Une politique culturelle circonspecte
envers un patrimoine qui place le Luxembourg sur la carte internationale de la
photographie, puisque nous sommes le seul pays au monde qui expose de manière
permanente les oeuvres de Steichen.

La valorisation de l’artiste Steichen par son pays natal n’est pas seulement conçue comme
une ou plusieurs expositions de ses oeuvres personnelles, si belles et intéressantes soientelles.
Celles-ci restent forcément des projets éphémères. Mon idée était d’encourager le
lancement d’un processus dynamique de réflexions et de discussions autour de la
photographie, médium extrêmement populaire. Il fallait, pour ce faire, 1° et se servir du
nom de Steichen, 2° et attendre la bonne occasion. Celle-ci s’est présentée avec la
restauration nécessaire de l’exposition The Family of Man. En même temps elle s’est offerte
à travers la collection de The Bitter Years exposée depuis septembre dernier à Dudelange,
où l’héritage de Steichen est placé dans un dialogue constant avec la création
photographique contemporaine.

Pourquoi fallait-il fermer provisoirement?

‘A nice place’: Pourquoi a-t-il donc fallu fermer temporairement ce lieu magnifique de la
FOM au Château de Clervaux ? Parce qu’après 16 ans d’ouverture permanente au public, j’ai
pris la décision qu’il était temps de repenser la sauvegarde de ce patrimoine
photographique mondial en profondeur et dans son ensemble.

Les défis étaient de taille mais les opportunités multiples. Nous avons dû et voulu respecter
cette légendaire collection dans son essence historique, en l’adaptant et en l’intégrant dans
l’époque contemporaine, en revisitant les anciennes restaurations sur les photographies
suite au conseil des experts, en respectant les normes internationales pour la sauvegarde
physique des photographies historiques. Il était donc inévitable d’investir dans une
protection patrimoniale adaptée à la fragilité des oeuvres (un système de climatisation
combiné à une forte isolation des murs et un chauffage installé dans les murs et dans le sol,
des fenêtres à protection maximale UV).

Hériter d’un tel patrimoine inclut le devoir de garantir son accès à tous. Cette fois-ci, les
travaux de rénovation ont pris soin des droits des personnes à mobilité réduite. La
médiation jouera dorénavant un grand rôle, en prenant recours aux méthodes les plus
modernes, adaptées au lieu et au contenu de l’exposition (des interviews, des films, des
explications supplémentaires sur Ipad mini, les guides multimédia de notre temps, un
nouveau livre, une bibliothèque, seront désormais le cadre didactique.)

Et puis, nous avons évidemment profité de l’occasion pour créer une enveloppe
muséographique, élégante et belle, digne des standards internationaux en matière de
présentation des photographies et de l’accueil du public, ainsi que du meilleur savoir-faire
des spécialistes de la mise en valeur des bâtisses historiques au Luxembourg, mes
collaborateurs du SSMN avec leur Directeur Sanavia. Je les remercie en cette occasion tout
autant que mes collaborateurs du Centre national de l’audiovisuel, autour de leur Directeur
Jean Back, tous des collaborateurs très passionnés et qui se sont donnés corps et âme aux
deux projets FoM et TBY; ils sont, au CNA, les gardiens des collections Steichen qui ont été
confiées à notre pays. Ensuite, nous avons eu le soutien actif et intéressant de
l’Administration des Bâtiments Publics et je les remercie avec leurs Ministres C Wiseler et M
Schank, représentés par le Directeur Leyder, pour leur bienveillance à l’égard de ce projet.

Merci aux architectes et entreprises spécialistes, leurs artisans et ouvriers, les restauratrices
des oeuvres, toutes les personnes qui ont mis la main à la pâte depuis 2010. Merci à tous
nos partenaires locaux qui ont prêté main forte dans le groupe de travail,

Car la restauration de la collection Steichen est vitale pour le développement de la Ville de
Clervaux et de toute la région. Le rendre accessible au plus grand nombre et procéder à une
décentralisation culturelle pour stimuler l’essor régional et pour favoriser le dialogue
transfrontalier: l’exposition The Family of Man dynamise la culture et l’art à Clervaux, Cité
de l’image. Le patrimoine est un outil de la croissance et une résultante de la croissance; il
implique parfois des coûts considérables, mais constitue un formidable levier pour le
redressement de l’image d’un pays et l’attractivité de toute une région. La culture investit
dans le Nord du pays, dans l’Oesling.

Mais je dois des remerciements particuliers à notre grand partenaire sur place, la Commune
de Clervaux avec ses services sous le Député-Maire Emile Eicher après Yves Arendt ; ils ont
dû subir des restrictions importantes pendant la durée du chantier qu’ils ont en partie
surveillé pour nous, ils ont énormément contribué aux festivités d’ouverture y compris de
façon financière, et j’espère qu’ils retrouveront un nouveau plaisir avec la FOM plus
splendide encore. Villmols Merci Emile, Dir, Deim Schäffen a Gemiinerot an all Aere
Matarbechter! Merci am Interessi vun iim Projet, dee mir um Härz läit.

Une chose est certaine: on ne travaille pas avec The Family of Man sans la porter
profondément dans son coeur, et sans être marquée par elle, d’une manière ou d’une autre.

The Bitter Years

Mesdames, Messieurs,

A côté de la collection The Family of Man, Edward Steichen nous a également légué celle
des The Bitter Years, la dernière exposition qu’il avait réalisé pour le MoMA en 1962. C’était
son regard personnel sur l’époque difficile de la Grande Dépression dans les années trente
aux Etats�?Unis. Nous avons donc transformé l’ancien Château d’eau de Dudelange en un lieu
original et époustouflant pour y accueillir The Bitter Years en septembre dernier. Ce lieu est
né de notre volonté de rappeler, tout comme ici à Clervaux, l’art curateur de Steichen et son
ambition de discours humaniste, où il met en dialogue, une fois de plus, les oeuvres d’autres
photographes de son époque.

Je salue à l’occasion la présence d’A. Bodry, Député-Maire de Dudelange, ville désormais
liée non seulement par des liens d’amitié à la Ville de Clervaux, mais également par le
partage de la qualité de lieux d’accueil dévoués à ce patrimoine artistique hors pair.

Le Steichen trail

Mesdames, Messieurs,

Le Luxembourg est un pays aujourd’hui très ouvert sur l’art et la culture. Nombreux sont ses
trésors historiques, artistiques et culturels. Nombreux sont également nos atouts pour un
tourisme culturel. Avec la future création d’un Steichen Trail, j’invite désormais le public
international à venir à la rencontre d’Edward Steichen au Luxembourg. Nous lui donnerons
forme et visibilité sous peu.

Je voudrais également m’adresser à Rosch Krieps en ce jour particulier pour lui qui a
développé la reconnaissance de Steichen au Luxembourg pendant de très longues années.
Je le remercie d’avoir flanqué notre travail de manière critique, passionnée et constructive.
Him e besonnesche Merci fir säin onerméidlechen Asaz. Wann hënn, sou wéi de Pierre
Wurth an anerer, d‘Bréck net geschloen hätt zwëschen dem Steichen a seim
Heemechtsland, wäre mir ëm e groussen humanistesche Patrimoine méi arm.

Un message d’amitié

Chère Maria, chère Ariana,

vous nous avez offert un message de votre soeur, de votre mère. Vous avez souligné la
provenance modeste d’Edward Steichen et la force de ses parents luxembourgeois. Ceux-ci
ont su éclairer son parcours et l’encourager à choisir sa vie d’artiste. Vous avez mis l’accent
sur l’amitié entre la famille du célèbre artiste et ses amis au Luxembourg.
Et si à votre exemple, le message profond, immuable, universel de l’exposition The Family of
Man était celui de l’invitation à la générosité ? L’acte est sacré : behold this and always love
it! est cité l’indien Sioux dans l’exposition. N’est-ce pas précisément un jalon précieux, qui
fait si souvent et si cruellement défaut sur le chemin de l’homme?

La réouverture en ce jourd’hui nous replonge dans la passionnante aventure de The Family
of Man, dans ce pèlerinage sans fin avec son discours humaniste jeune, malgré l’âge des
oeuvres dans lesquels il reste inscrit.

The Family of Man constitue pour nous une mission, une mission non seulement de
conserver, restaurer et exposer ; mais une mission humaniste d’induire et de susciter des
réflexions et des débats autour de l’humanité, de la paix, de l’action contre toute guerre,
prenant appui sur la force de l’image qu’avait compris Steichen. C’est ainsi que la FoM nous
parlera toujours, même au 21e s.

Altesses Royales,

Dir Dammen an Dir Hären,

Ech sinn iwwerzeegt, dat dis Ausstellung iis och nach am 21. Jh. eppes ze soen hott. Trotz
aller Naïvitéit vun der Duerstellong solle mir hiere Message vu Fridden a géint Gewalt net
geréngschätzen an ënnerschätzen, mee en notzen fir dis sou néideg Diskussioun ze fërderen
mat der Generatioun vum 21. Jh.

Och deen Débat stärkt iin Regioun, och dat ass en Atout fir d’Éisléck, och dat ass iin weider
Chance fir den Norden, gestärkt dorch d’Kultur an dorch Dezentraliséirung an der Kultur. An
esou kann nët nëmmen éis ganz Land, mee och Är Regioun, sech dorch Kultur international
positionnéiren. Ech sinn zouversiichtlech, dat Dir den intellektuellen an kulturtouristesche
„Blockbuster“ FoM notze wärt an am richtege Geescht dis nei Nisch „Steichenland“
virunentwéckele waert fir Är Gemiin a fir Är Regioun. Ech freee mech, als Kulturministerin
dorch dise Projet an dorch esou e Patrimoine dozou bäidroen ze kënnen, dis Regioun elei
nach méi attraktiv maachen ze kënnen.

Léif Frënn,

Mir verbannen jarhonnertelaang Geschicht mat dem Bléck no vir a mat dem Wëllen zum
Nodenken unzereegen op Basis vun humanisteschen Thesen; Thesen, déi éise Bléck op
d’Menschheet net verkläre sollen, mee déi hellefe sollen, d’Menschheet oder op d’mannst
d’Gesellschaft awer e bëssche besser ze maachen. Och dat, a besonnesch dat, ass Kultur:
den Denkprozess an d‘Auserneeseetzung aktiv fërderen an ënnerstëtzen. Déi wichteg
Erwschaft vu gläich 2 Patrimoines mateneen, ass Missioun a Verflichtung zugläich! Loosst iis
zesummen dis Vermächtnis unhollen an ugoen! Ech soen Iech Merci.

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