Lucien Lux: "Des radars en fonction dès 2008!" Le ministre des Transports fait le point des thèmes prédominants en matière des transports

La Voix du Luxembourg: Le système de permis à points est opérationnel depuis 2003. Quel est le bilan?

Lucien Lux: Il est plutôt positif puisque nous assistons à une nette régression du nombre de morts sur nos routes. A ce titre, nous nous classons même à la deuxième place européenne en ce qui concerne l'importance de l'évolution. Mais au-delà de ce constat, il faut bien admettre que le chiffre global des accidents est en stagnation. Tout ne se règle pas d'un coup de baguette magique. Il faut travailler sur le civisme, la répression et la prévention. La diminution du taux d'alcool permis nous aidera à aller dans le bon sens, tout comme la mise en place de radars automatiques. Nous avons récemment tenu une réunion rassemblant le parquet, la police, le ministère des Travaux publics et des Transports à ce sujet, et je peux vous annoncer qu'une série de radars automatiques, fixes et mobiles, sera en fonction dès 2008. Un automobiliste averti en vaut deux...

La Voix du Luxembourg: Envisagez-vous toujours l'abaissement du taux d'alcoolémie de 0,8 à 0,5?

Lucien Lux: Bien sûr que nous l'envisageons toujours, et plus que jamais. Les amendements parlementaires passent en ce moment devant le Conseil d'Etat et son avis sera ensuite déposé à la chambre des députés. Nous voulons même aller plus loin que la norme de 0,5: en ce qui concerne les jeunes (en période de stage pour deux ans) et les professionnels de la route (camions, bus, taxis), nous voulons fixer la limite à 0,2.

La Voix du Luxembourg: Comment résoudre les problèmes de congestion (parkings de délestage, nouveaux aménagements urbains, développement de la mobilité douce, etc.)?

Lucien Lux: En ce qui concerne les parkings de délestage, il suffit de se rendre au centre-ville pour se rendre compte que beaucoup d'efforts ont déjà été consentis à ce niveau. Quant à la mobilité douce, elle fait l'objet d'un plan d'action national pour 2007. On assiste, dans beaucoup de communes, à la renaissance des vélos. Pour la première fois en quinze ans, la ville de Luxembourg et l'Etat se sont mis d'accord (c'était en avril 2006) sur la construction d'une première ligne de tram qui reliera le plateau du Kirchberg à la gare centrale. Mais ce n'est pas pour tout de suite...

La Voix du Luxembourg: La nouvelle taxe CO2 est entrée en vigueur le 1er janvier. Pourquoi avoir pris une telle mesure?

Lucien Lux: La réponse à cette question peut se faire en deux temps. Tout d'abord, il s'agit de savoir si, de manière volontariste (via la taxe Kyoto sur les carburants), le Luxembourg peut influencer la vente de carburant au niveau du transport dans les pays limitrophes. Je m'explique: actuellement, 5,7 millions de tonnes sur les 12,7 millions de tonnes de CO2 que nous produisons sont exportés. En d'autres termes, 40% de notre bilan Kyoto est exporté. Nous voulons stabiliser, voir diminuer ce bilan. Le second point part du principe du pollueur-payeur: nous cherchons à avoir une influence directe sur nos résidents. La taxe CO2 va générer des recettes qui seront versées au fonds Kyoto pour financer toutes les mesures nationales et internationales visant à réduire nos émissions de 28% par rapport à 1990. Cette nouvelle fiscalité, qui ne taxera plus uniquement la cylindrée mais bien l'impact écologique réel des voitures, va générer 30 millions d'euros de recettes supplémentaires. Additionnée à la taxe Kyoto sur les carburants, cela donnera de 70 à 80 millions d'euros en plus pour l'environnement en 2007.

La Voix du Luxembourg: Quelle importance accordez-vous à l'environnement dans votre projet politique?

Lucien Lux: Le changement climatique est devenu un défi horizontal qui doit être géré par les politiques menées dans les différents ministères. Prenez la mobilité douce, par exemple. Actuellement, seuls 12% des trajets se font en transport public, contre 88% en voiture. Il nous reste donc beaucoup de travail à accomplir.

La Voix du Luxembourg: Certains axes sont particulièrement engorgés à Luxembourg-Ville, ce qui engendre de la pollution. Que comptez-vous faire?

Lucien Lux: Nous sommes actuellement en train de mener une étude sur la pollution dans l'agglomération de Luxembourg ville. Notre problème principal se situe au niveau du Boulevard Royal où nous avons dépassé à cinq reprises le taux de pollution maximal fixé par la directive européenne. Le texte prévoit qu'on ne peut pas dépasser cette norme plus de 35 fois par an. Nous sommes donc encore loin du compte, mais tout de même: c'est déjà trop. Lorsque l'étude sera terminée (fin janvier, début février), nous devrons analyser quels seront les modes de décongestionnement idéaux.

La Voix du Luxembourg: Outre la nouvelle taxe CO2, les automobilistes doivent-ils craindre d'autres impacts dans leur portefeuille?

Lucien Lux: Vous savez, la taxe sur les voitures n'a pas évolué d'un iota depuis 1984! Lorsqu'un état a de l'argent, comme c'est le cas chez nous, il peut se permettre quelques libertés de ce genre. Cela dit, le nouveau mode de taxation va faire passer la taxe de 80 à 100 ou 120 euros en moyenne pour les petites cylindrées, et de 200 à 500 ou 600 euros en moyenne pour les gros cubes. C'est déjà un fameux bouleversement, et nous n'envisageons pas de prendre d'autres mesures à court terme.

La Voix du Luxembourg: L'utilisation du réseau (auto-)routier du Luxembourg est toujours gratuite. Que pensez-vous de l'idée de l'utilisateur-payeur?

Lucien Lux: Nous observons avec le plus grand intérêt ce qui se passe actuellement chez nos voisins belges. Ce point a d'ailleurs été abordé lors du dernier sommet belgo-luxembourgeois. La formule de la vignette, dont le coût serait compensé par une réduction de taxe pour les nationaux, semble se dessiner alors qu'en Allemagne, on s'oriente aussi vers un péage des autoroutes. Bien évidemment, nous ne nous laisserons pas encercler sans réagir... Quant au principe de l'utilisateur-payeur, la taxe Kyoto sur les carburants combinée à la taxe CO2 sont autant de pas dans ce sens.

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