"La Belgique doit se ressaisir !" Jean-Claude Juncker au sujet de la crise politique en Belgique

Le Soir: Et si, en cas de scission de la Belgique, la Communauté française Wallonie-Bruxelles et la Communauté germanophone unissaient leur destinée au Grand-Duché de Luxembourg? En ces heures agitées, le scénario a circulé, mi-gag, mi-sérieux... Il est tout de même parvenu jusqu'aux oreilles du Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker. Comment réagissez-vous à cette idée de "confédération"?

Jean-Claude Juncker: Cela me semble étrange. Le Grand-Duché n'a pas vocation à dépanner une Belgique qui se cherche. Je crois que la réponse à la question belge réside en Belgique. Je regrette beaucoup qu'en Europe, la Belgique soit le seul pays qui n 'est pas fier de lui-même. Je suis par ailleurs surpris que les hommes politiques belges, très souvent avec raison, donnent des leçons et font parvenir des recommandations aux autres alors qu'ils ne sont pas à même de résoudre les problèmes de cohabitation qui existent sur leur territoire... L'Europe est un ensemble de grands problèmes de cohabitation; la crédibilité européenne de la Belgique risque d'être mise à néant si on n 'arrive pas à faire en sorte que ce pays se ressaisisse. Pour en avoir déjà discuté avec les Allemands, les Français et d'autres, personne, hors Belgique, n'imagine une Belgique en pièces! Le "vouloir-vivre ensemble" doit donc trouver une réponse belgo-belge.

Le Soir: Comment cette crise politique est-elle perçue chez vous?

Jean-ClaudeJuncker: Nous ne sommes pas vraiment surpris. Mais depuis ce matin (vendredi matin, NDLR) je rencontre beaucoup de Luxembourgeois qui me disent: "Heureusement, on n'a plus le franc belge comme monnaie nationale!" En effet, les marchés financiers ne manqueraient pas de se manifester...

Le Soir: Mais prend-on la situation au sérieux?

Jean-Claude Juncker: Pour avoir beaucoup d'amis en Belgique - surtout en Wallonie, mais pas uniquement -, nous avons toujours cette impression que cette velléité de séparation n'est aucunement partagée par le citoyen belge. Je crois qu'il y a dans le peuple belge, au sein des deux communautés, une majorité écrasante pour rester ensemble et mieux organiser ce fameux "vouloir-vivre ensemble", qui est l'essentiel d'une Nation. On comprend donc mal ces débats.

Le Soir: Et vous, qu'en dites-vous?

Jean-Claude Juncker: Sans vouloir interférer dans ce genre de débat belgo-belge, j'ai beaucoup de sympathie pour la réaction de la Communauté wallonne et francophone face aux exigences flamandes. Mais il faudra que la Belgique se ressaisisse. Qu'elle donne, vers l'extérieur, l'image d'un pays le plus uni possible. Qu'elle sache que d'autres l'observent dans sa façon de régler ses problèmes.

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