"L'IVL n'est pas mort!". Jean-Marie Halsdorf au sujet du concept intégré des transports et du développement spatial pour le Luxembourg

Le Quotidien: Où en est-on avec l'aménagement du territoire et, en particulier, avec I'IVL, que d'aucuns disent "mort"?

Jean-Marie Halsdorf: Lorsque I'IVL (le concept intégré des transports et du développement spatial pour le Luxembourg) a été présenté, il s'agissait de créer une vision politique sur l'avenir de notre pays.

À l'époque, les estimations partaient d'une croissance du PIB de 4 %, en moyenne annuelle. Cela se traduisait par la création de 6.000 postes d'emploi nouveaux. Nous avions développé un "scénario résidents" et un "scénario frontaliers". Pour le "scénario résidents", 3.800 nouvelles unités d'habitation étaient requises, or nous devons constater que dans le pays nous arrivons à peine à en réaliser 3.000.

En ce qui concerne le "scénario frontaliers", le suivi des chiffres montre que nous avons déjà atteint les prévisions pour l'année 2010. Il n'y a pas 6.000 emplois nouveaux qui ont été créés annuellement, mais 8.500.

Le pacte logement a été développé pour répondre aux besoins du "scénario résidents", mais nous nous retrouvons plutôt et inévitablement dans un "scénario frontaliers".

D'autre part, "seulement" 66% des postes d'emploi nouveaux et non 75% sont occupés par des frontaliers. Mais, en chiffres absolus, les 66% réels sont plus importants que les 75% du scénario prévu. Il faut soulever de nouvelles questions, par exemple, celle de créer les nouveaux emplois à la proximité des frontières? Où habite-t-on? Où travaillera-t-on à l'avenir?

Le Quotidien: En quoi consiste le concept actuel?

Jean-Marie Halsdorf: Nous restons fidèles au concept des trois pôles de croissance: la capitale, le Sud, la Nordstad, ainsi qu'aux centres de développement (CDA); quatre plans sectoriels primaires (transport, grands ensembles paysagers, logement, zones d'activités économiques) seront développés. Le problème du projet Wickrange est sensible: dans la logique IVL il serait inconcevable d'abandonner la zone verte interurbaine au profit de 1.000 emplois et 3 millions de visiteurs se déplaçant en voitures.

J'ai conscience que nous devons réaliser aussi rapidement que possible les plans sectoriels. Il s'agit d'un processus de planification qui prend nécessairement du temps.

Nous avons donné, par exemple, cinq ans aux communes pour préparer leurs plans d'aménagement général communal. Une rallonge d'une année peut être accordée. Mais les communes affirment que les délais ne suffisent toujours pas.

Le Quotidien: Le fonctionnement du ministère a été vivement critiqué.

Jean-Marie Halsdorf: J'ai un rôle très ingrat, puisque je n'ai pas les moyens de "faire". Les Verts ont affirmé qu'ils auraient immédiatement conféré une force juridique à I'IVL. C'est une ânerie sans pareille. Ce qui existe légalement, c'est la loi concernant l'aménagement du territoire. Nous vivons dans un État de droit, dans lequel l'État ne peut pas gouverner en violant les lois. Je pense qu'un bon travail est fourni par le ministère et par la direction de l'aménagement du territoire.

Le plan sectoriel "Transports" sera publié prochainement, dans les mois à venir. Ensuite nous discuterons avec les communes. Il en sera de même avec le plan sectoriel "Ensembles paysagers". Les plans sectoriels "Logement" et "Zones économiques" pourraient tarder un peu plus, mais j'espère qu'ils seront publiés encore dans cette législature.

Il y a tellement d'intérêts en jeu. Il y a tellement de facteurs multiformes à respecter. Si nous voulons bien organiser le pays, et mettre en œuvre l'IVL, les structures, en particulier les communes, doivent pouvoir suivre. Souvent, les petites communes ne savent pas toujours suivre. Voilà pourquoi une réorganisation territoriale est indispensable. Les communes devraient atteindre la masse critique de 3.000 habitants pour pouvoir assurer des services techniques convenables.

Le Quotidien: On vous reproche personnellement les retards.

Jean-Marie Halsdorf: Je me retrouve entre le marteau et l'enclume. Il y a un programme gouvernemental que nous voulons réaliser; mais il y a aussi des freins circonstanciels dans le processus législatif. À la Chambre des députés, une commission spéciale de la réorganisation territoriale a été créée. Je n'ai pas pu émettre mes conclusions plus tôt.

Le Quotidien: Et les conclusions sont-elles prêtes maintenant?

Jean-Marie Halsdorf: Dans les mois prochains je présenterai un projet de loi-cadre sur les fusions, dans lequel les modalités des fusions communales seront arrêtées. Je lancerai dans les prochains mois l'idée de la communauté urbaine, qui se constituerait dans l'espace urbanistique. Une pareille structure est souhaitée par les six communes de la Nordstad. Je présenterai dans les prochains mois un projet de loi concernant les groupements européens de coopération territoriale (GECT). Ces groupements constituent un instrument élaboré par la Commission européenne, qui permettra la réalisation d'une coopération transfrontalière. Les GECT seront utiles dans la gestion des questions qui se posent. Je ne veux pas mettre la charrue devant les bœufs. Nous devons avancer pas à pas. Le chef (le Premier ministre) a dit que l'aménagement du territoire est prioritaire.

Le Quotidien: Où en est l'aménagement du territoire?

Jean-Marie Halsdorf: Il y a énormément d'émotions dans tout cela. J'avais le sentiment que tout le monde n'est pas prêt. Il y avait, par exemple, davantage de gens dans les réunions dans les zones rurales, que dans le Sud du pays. Il n'y avait que très peu de députés parmi les participants.

Je vous assure aussi, que mes collègues au gouvernement mettent la main à la pâte.

Le Quotidien: L'opinion publique critique que le projet de loi concernant le pacte logement est présenté, alors que le plan logement sectoriel est toujours inconnu.

Jean-Marie Halsdorf: Le pacte logement est né dans la logique du "scénario résidents" de l'IVL. Il s'agit d'une convention qui réunit trois parties: les communes, le ministre du Logement et le ministre de l'Intérieur. À l'heure actuelle, des discussions préparatoires, parfois controversées se déroulent entre les fonctionnaires du ministère et les représentants des communes. Nous adoptons une approche pragmatique. Dans un esprit de promouvoir la vision intégrée à propos des problèmes.

Le Quotidien: Est-ce que vous appréciez d'avoir reçu des avis très critiques, comme celui de la Chambre des employés privés, revendiquant une approche sociale à la fixation du prix de l'eau?

Jean-Marie Halsdorf: Il s'agit de la transposition d'une directive et nous devons étudier ce qui est faisable. Je n'ai pas de problème avec un débat politique, c'est-à-dire avec un débat contradictoire dans lequel de bonnes idées sont soulevées. Un bon débat nous permettra de dégager les bonnes solutions, dans l'intérêt du pays. Notre projet de loi n'admet pas la privatisation de la gestion de l'eau.

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