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"Israël doit cesser la colonisation"
Jean Asselborn: Il y aura une large majorité à l'Assemblée générale de l'ONU pour soutenir la demande du président de l'Autorité palestinienne. Mais les Palestiniens insistent pour obtenir l'approbation de beaucoup d'Etats européens. Lundi dernier, nous avons fait un tour de table européen. Nous voulions éviter ce qui s'était produit lors du vote pour l'adhésion à l'Unesco où il y a eu un tiers de oui, un tiers de non et un tiers d'abstention, ce qui n'était pas une marque d'unité de la politique étrangère européenne. En fin de compte, il devrait y avoir une petite dizaine d'Etats qui diront oui et j'espère que les autres, dans leur majorité, s'abstiendront.
l'Humanité: Qu'est-ce qui empêche une position commune de l'Europe?
Jean Asselborn: C'est le poids de l'histoire. C'est en tout cas ce qu'expliquent certains pays, comme l'Allemagne. Mais Berlin ne devrait pas identifier les intérêts du peuple israélien et ceux du gouvernement Netanyahou. Tous les Etats européens devraient pousser ce gouvernement israélien vers une autre politique. La résolution présentée à l'ONU met sur un pied d'égalité les Palestiniens et le Vatican, avec un statut d'Etat non membre! Cela ne résoudra pas tout. Mais ce sera un signal de la communauté internationale vers le peuple palestinien. Je considère qu'il faut rester en phase avec le discours fondamental de l'Union européenne sur les droits de l'homme. On ne peut pas, par exemple, critiquer les conditions à Cuba et accepter les conditions de vie faites aux Palestiniens. C'est un double langage. Il faut défendre les droits de l'homme partout, et surtout dans les territoires palestiniens. Depuis que le gouvernement israélien est dirigé par Benyamin Netanyahou, une solution négociée est devenue impossible. La politique de colonisation est une provocation permanente. Je comprends que les Palestiniens refusent de négocier dans ces conditions. Si cela se poursuit, une solution à deux Etats sera impossible. La création d'un Etat palestinien ne serait pas un cadeau pour les Palestiniens. Ce serait la condition sine qua non pour qu'Israël puisse vivre durablement en paix et en sécurité. Or, que fait l'Union européenne? Elle rehausse le statut d'Israël.
l'Humanité: L'Union européenne n'a-t-elle pas les moyens de faire pression sur Israël, notamment avec l'accord d'association?
Jean Asselborn: Le moyen le plus simple est d'interdire à Israël de poursuivre sa politique de colonisation, seul moyen de reprendre les négociations. Mais ça ne se fera pas avant les élections israéliennes du mois de janvier. A la fin de l'année 2008, alors que la France présidait l'Union européenne (UE), juste avant l'opération "Plomb durci" contre Gaza, on avait accepté de rehausser le statut d'Israël avec l'UE. Tout le monde était d'accord, en pensant avoir une influence plus importante. Va arriver le moment où l'UE sera forcée de considérer les moyens de pression qu'elle a en mains. Mais avec cette génération d'hommes politiques, il n'y aura jamais unanimité sur cette question. II y a le poids de l'histoire d'un côté et l'influence des Etats-Unis sur les positions européennes. Il y a des pays qui veulent aller de l'avant, comme la Grande-Bretagne, mais les relations transatlantiques jouent un rôle dans leur positionnement. La France a maintenant une position claire. Si la Grande-Bretagne prend position pour le oui, cela pourrait aider à faire bouger l'Allemagne. Mais elle n'est pas encore prête à faire ce pas. Si on n'est même pas prêt à avoir une position commune sur une telle résolution, on n'arrivera jamais à avoir une position commune en ce qui concerne les moyens de pression dont nous disposons au niveau de l'accord d'association.