Xavier Bettel au sujet de la situation économique du Luxembourg

"Une priorité du gouvernement est de changer les mentalités"

"En ce qui concerne les finances publiques nous avons l'objectif de réinstaurer un climat de confiance dans l'économie par une consolidation budgétaire. Dans ce contexte, la réduction des dépenses courantes sera la priorité, li faut savoir qu'à politique inchangée, la dette publique brute risque d'atteindre 5 milliards d'euros en 2016. En comparaison, en 2003, on avait une dette publique brute de seulement 1,5 milliards d'euros. La "politique inchangée" n'est donc pas une option."

Écho des entreprises: Monsieur le Premier ministre, les défis auxquels notre pays est confronté sont nombreux et divers! Quelles sont les priorités de votre gouvernement pour y faire face ?

Xavier Bettel: Une priorité du gouvernement est de changer les mentalités, on ne peut tout simplement pas continuer comme on l'a fait ces dernières années. Cela est vrai pour la gérance pour la politique d'investissement ainsi que pour la gérance interministérielle. Nous avons une approche horizontale pour gouverner et promouvoir une politique cohérente. Le gouvernement a Fa responsabilité de moderniser le pays et d'assurer une stabilité politique et économique. Nous avons l'ambition de mettre notre pays sur une trajectoire promettant un développement durable au profit de chacun. Le premier défi du gouvernement est la création d'un environnement favorable à la modernisation du pays.

Écho des entreprises: Cela fait maintenant trois mois que vous êtes en poste. Vous avez eu l'occasion d'avoir un aperçu des finances publiques. Quelle est votre analyse et celle de votre gouvernement de la situation des finances publiques et que comptez-vous faire pour rétablir l'équilibre budgétaire et à travers quels outils?

Xavier Bettel: En ce qui concerne les finances publiques nous avons l'objectif de réinstaurer un climat de confiance dans l'économie par une consolidation budgétaire. Dans ce contexte, la réduction des dépenses courantes sera la priorité, li faut savoir qu'à politique inchangée, la dette publique brute risque d'atteindre 5 milliards d'euros en 2016. En comparaison, en 2003, on avait une dette publique brute de seulement 1,5 milliards d'euros. La "politique inchangée" n'est donc pas une option.

L'objectif est d'engager un processus de transformation de la culture budgétaire, d'élaborer un rééquilibrage et d'effectuer une modernisation des dépenses publiques. Les objectifs que nous nous sommes fixés en matière de finances publiques seront réalisés grâce à une nouvelle stratégie budgétaire qui sera axée sur la transparence, l’efficacité ainsi que les économies.

En étroite collaboration avec ses collègues dans le gouvernement, le ministre des Finances, Pierre Gramegna, est en train de revoir les budgets des administrations, services et ministères pour trouver des possibilités d'économies. Après, on procédera à la réforme structurelle car il ne suffit pas de réorganiser l'Etat à court terme. Nous avons besoin d'une réorientation générale.

Écho des entreprises: Selon tous les indicateurs, la compétitivité du Luxembourg se détériore depuis quelques années. Que comptez-vous faire pour inverser cette tendance? Quels sont vos objectifs et benchmarks?

Xavier Bettel: Le débat sur la compétitivité est régulièrement relancé à travers la publication de classements qui permettent de dresser une comparaison des meilleures pratiques internationales, Il n'y a aucun doute que ces classements constituent l'élément le plus fortement médiatisé mais leur interprétation va beaucoup plus loin que le simple classement final. Pour remédier aux déficiences identifiées, le Comité de coordination tripartite avait déjà reconnu en 2003 la nécessité d'un tableau d'indicateurs élargi afin de pouvoir mieux analyser la compétitivité du Luxembourg notamment à travers des indicateurs prenant en compte les spécificités du pays - que ne le font les benchmarks internationaux. Depuis l'Observatoire de la compétitivité du ministère de l'Economie procède à une mise à jour annuelle de ce tableau de bord national. Il faut souligner que tous les indicateurs stipulés dans ce tableau de bord national de la compétitivité ne montrent pas une détérioration de la compétitivité du Luxembourg.

En analysant par exemple plus concrètement la catégorie des performances macroéconomiques, le Luxembourg se situe encore dans le vert, ce qui met en évidence une situation macroéconomique encore relativement favorable par rapport aux autres Etats membres de l’UE. Pourtant on constate aussi une certaine baisse de la compétitivité par rapport aux années antérieures.

Afin d'assurer un meilleur suivi opérationnel et intégré de notre compétitivité, un nouveau système d'indicateurs au niveau national est actuellement en discussion au Luxembourg. L'Observatoire de la compétitivité est en effet en train de retravailler et d'enrichir le système d'indicateurs de son tableau de bord national, ensemble avec les partenaires sociaux, en incluant également des indicateurs de suivi macroéconomiques de l’UE voire même quelques indicateurs retenus dans l'avis commun du Conseil économique et social et du Conseil supérieur pour un développement durable concernant le projet PIB du bien-être.

Au sujet des objectifs et benchmarks, je ferai aussi référence à ceux fixés par le gouvernement dans le cadre de la stratégie Europe 2020 et ceux du Programme national de réforme (PNR) soumis annuellement à la Commission européenne. Le Luxembourg s'est en effet donné des objectifs ambitieux au niveau de la recherche et de l'innovation, de l'éducation, du changement climatique et de l'énergie, de l'emploi et de la réduction de la pauvreté.

Écho des entreprises: Sous le gouvernement précédent, la simplification administrative faisait partie des attributions du ministre d'Etat. Désormais, elle est intégrée au ministère de la Fonction publique. Est-ce qu'il faut comprendre que la simplification administrative ne figure pas parmi vos priorités?

Xavier Bettel: Sous le gouvernement précédent les compétences étaient partagées. La simplification administrative était attribuée au ministère d'État ainsi que la cellule de facilitation en matière d'urbanisme par exemple. D'autre part, la réforme administrative était dans la compétence du ministère de la Fonction publique. Justement parce que le gouvernement a fait de la simplification une priorité, tout l'effort est désormais concentré et centralisé au sein d'un même département. Le ministre en charge, Dan Kersch, est en train d'identifier les secteurs où les démarches administratives nécessaires freinent l'évolution économique. Une "task force" interministérielle a été mise en place et se réunit deux fois par mois. Le ministre fera régulièrement un état des lieux au Conseil de gouvernement. Donc, la simplification administrative reste certainement une priorité et les moyens pour la traduire dans les faits et pour produire de véritables résultats ont été améliorés.

Écho des entreprises: Vous êtes également ministre des Communications et des Médias. Quelles sont vos priorités dans ce domaine et par quelles mesures et actions comptez-vous pérenniser cette activité au-delà de 2015?

Xavier Bettel: Le Luxembourg a connu un coup d'accélérateur fantastique au cours des dernières années avec le développement au pays d'entreprises des médias, du commerce électronique, des contenus numériques, du cloud computing, etc., bref, le développement d'entreprises technologiques innovantes. Un travail considérable a été fait et continue d'être fourni quotidiennement pour faire du Luxembourg un pays hautement connecté et capable d'accueillir des entreprises nationales et internationales grâce à ses infrastructures, son cadre légal et ses compétences.

Mon objectif - certes en tant que ministre des Communications et des Médias, mais j'irais même jusqu'à dire en tant que Premier ministre, est de faire passer le Luxembourg à l'étape supérieure, à savoir: ne plus nous limiter à développer un secteur, celui des TIC, mais de tenter d'étendre les bénéfices des nouvelles technologies de l'information de manière horizontale vers tous les secteurs socio-économiques du pays, que ce soit à travers la modernisation de secteurs économiques tels que le secteur financier, ou l'utilisation des TIC dans un esprit de simplification, transparence et efficience pour les citoyens. Mon objectif est que nous vivions au quotidien ce que nous aimerions faire passer comme image du Luxembourg vers l'extérieur: un pays moderne, ouvert, hautement connecté et paré pour une économie et une société numériques.

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