Memorandum Benelux sur l'avenir de l'Europe

I. Le débat
II. Relever les défis de l'Union européenne
III. Se fonder sur des valeurs communes
IV. Gérer l'Europe de demain
V. La voie à suivre

I. Le débat

L’Union se prépare à un élargissement sans précédent. Cet élargissement engendrera une mutation profonde de la construction européenne. L’Union doit saisir cette chance historique pour établir durablement la stabilité, la sécurité et la prospérité sur le continent.

Au-delà du Traité de Nice, dont la ratification s’impose pour ouvrir la voie à l’élargissement, l’Union doit affirmer son identité dans un monde en pleine évolution politique, économique et technologique. Elle doit développer ses politiques pour mieux répondre aux attentes des européens.

L’importance de l’enjeu justifie le lancement du vaste débat sur l’avenir de l’Europe. En y associant étroitement les citoyens et la société civile, nous donnons un nouvel élan au processus d’intégration européenne. Ce débat permettra de définir les objectifs, de délimiter les compétences, d’approfondir les politiques et d’améliorer la méthode et les instruments de l’Union.

Nous devons adapter les institutions qui permettront à l’Union européenne élargie d’être mieux comprise et de mieux fonctionner afin que le citoyen puisse s’y reconnaître davantage.

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II. Relever les défis de l’Union européenne

Répondre aux attentes des citoyens

L'opinion publique manifeste une désaffectation croissante à l’égard de l'Union européenne. L’Union doit mieux répondre aux préoccupations des citoyens. Nous devons surtout renforcer les politiques et éviter de nous cantonner au seul développement institutionnel.

Pour être mieux perçus par le citoyen européen, les objectifs et le fonctionnement de l’Union nécessitent la poursuite de nos efforts pour assurer une meilleure transparence et une meilleure communication.

Le développement futur de l'Union européenne passe par la prise en compte des préoccupations des Européens. La réalisation d’objectifs concrets ayant un impact direct sur la vie quotidienne à l’instar de l’amélioration de la sécurité alimentaire, de la sécurité intérieure, de la protection de la santé et de l’environnement contribuera à rendre l’Union plus proche du citoyen. La mise en place d’un véritable modèle social européen et l’objectif d’un plein emploi, répondent au même souci.

S’affirmer dans un monde globalisé

       

L’Union doit pouvoir influencer les développements monétaires, commerciaux, économiques, sociaux et écologiques mondiaux. A cette fin, elle a développé ses capacités d'innovation, de création d'emplois et d’inclusion sociale. Elle s’est aussi investie dans une économie de la connaissance. Ces efforts permettront à l’Union de mieux affirmer ses spécificités dans un monde globalisé.

En matière de politique internationale, l’Union se dote de nouveaux  instruments pour accroître son influence et pour affirmer sa responsabilité. Le soutien manifesté par l’opinion publique  à la poursuite du développement d’une politique étrangère, de sécurité et de défense commune montre l’importance que le citoyen attache aux progrès politiques de la construction européenne. 

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III. Se fonder sur des valeurs communes.

Ces valeurs sont celles de l’Etat de droit, du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de la démocratie. L’Union se fonde sur un modèle de société soucieux du bien être commun et de la qualité de l’environnement et qui combat l’exclusion. L’Union respecte la diversité des cultures et des peuples qui constituent sa richesse. L’Union doit continuer à développer une solidarité avec les autres nations. Elle participe activement à la promotion de la paix dans le monde.

Ces valeurs définissent notre identité. Elles constituent le fondement de la construction européenne.

La proclamation de la Charte des droits fondamentaux a mis en relief l’importance que l’Union attache à ces valeurs. L’Union doit adhérer à la Convention européenne des droits de l’homme.

C’est à partir de ces valeurs que les objectifs de l’Union doivent être définis, que les moyens pour les atteindre doivent être trouvés, que les défis auxquels nous sommes confrontés peuvent être relevés.

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IV. Gérer l’Europe de demain

Pour maintenir la dynamique de l’intégration dans une Europe élargie, les gouvernements du Benelux estiment qu’une constitutionalisation du projet européen s’impose. En outre, la structure institutionnelle de l’Union devra être adaptée à la nouvelle configuration de l’Union. A cet égard, les gouvernements du Benelux réitèrent leur attachement à la coopération renforcée.

Une Constitutionalisation de l’Union

Les gouvernements du Benelux optent pour un ancrage constitutionnel du projet européen et soumettent les questions suivantes à l’examen :

a) Une meilleure description des compétences de l'Union européenne et des Etats membres, de leur exercice et de l’application des principes de subsidiarité et de proportionalité. Cet examen ne doit porter atteinte à des acquis essentiels comme le marché intérieur, la monnaie unique ou la politique de concurrence ni faire obstacle au développement dynamique de l'Union européenne, entre autres sur la base de l’art. 308 du Traité.

b) Une simplification des traités européens regroupés en un traité constitutionnel de base et  une partie consacrée aux politiques, avec des procédures de révision spécifiques. Le Traité constitutionnel comprendrait les valeurs de l’Union et les droits fondamentaux du citoyen, les compétences de l’Union, les dispositions institutionnelles communes, les règles régissant la prise de décision. Ces travaux pourraient se baser sur l’étude réalisée par l’Institut européen de Florence.

Une structure institutionnelle adaptée

Les trois gouvernements du Benelux recherchent un système institutionnel plus équilibré, plus démocratique et plus efficace et transparent :

c) Le renforcement et l’extension de la méthode communautaire.

d) L’octroi de la personnalité juridique à l’Union.

e) Un Parlement européen qui, avec un Conseil exerçant sa fonction législative, doit se développer comme une institution législative à part entière, y compris en matière de dépenses budgétaires.

f) Un renforcement de la Commission européenne, moteur de l'intégration, dont l’action  doit pouvoir se concentrer sur les tâches qui lui sont confiées par le Traité.

g) L'élection du Président de la Commission européenne par le citoyen européen à l’occasion des élections européennes.

h) Les modalités de la démission collective et individuelle des membres de la Commission européenne et comme corollaire la dissolution du Parlement européen dans le cadre de l'équilibre interinstitutionnel.

i) Une rationalisation des travaux du Conseil, notamment en établissant une distinction entre les fonctions législatives, politiques et délibératives.

j) Le recours en règle générale à la majorité qualifiée qui, en matière législative doit aller de pair avec la procédure de codécision.

k) Un renforcement de la cohérence et de l’efficacité de l’action et de la représentation extérieure de l’Union.

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V. La voie à suivre

Un agenda large

Les thèmes de la déclaration de Nice conduisent à une réflexion plus large.

La Charte des droits fondamentaux renvoie à l’identité européenne et au caractère contraignant des valeurs de l’Union. Délimiter les compétences revient à se pencher sur les objectifs et les moyens de nos politiques ainsi que sur le niveau où se situe la responsabilité pour les mener à bien.

Mieux associer les parlements nationaux c’est entamer une réflexion sur le contrôle démocratique de l’Union, tout en veillant à l’équilibre entre les institutions européennes : la Commission, le Conseil, le Parlement européen, la Cour européenne de justice et le Comité des Régions.

Simplifier les traités c’est rendre l’Union plus compréhensible et ouvrir la voie à une constitution de l’Union.

L'identification des défis auxquels l'Union européenne est confrontée, les premières indications du débat public, ainsi que les prises de positions de plusieurs dirigeants sur l'avenir de l'Europe confirment le dynamisme de l’entreprise. Ces éléments amènent les gouvernements du Benelux à conclure que le Conseil européen de Laeken devra arrêter un agenda concret et ambitieux, permettant de relever les défis identifiés, de mieux incorporer les valeurs de l’Union, de gérer l’Europe de demain et de promouvoir la place de l’Europe dans le monde .

Calendrier et méthode

Les trois gouvernements ont décidé de viser les objectifs cités conformément au calendrier et à la méthode suivants.

(1) Le débat sur le développement futur de l'Union européenne est divisé en trois phases distinctes : la phase de l'échange de vues ouvert et du large débat (2001) ; la phase du débat structuré avec en parallèle le Forum (2002-2003), la phase d'une brève Conférence intergouvernementale qui arrête les modifications à apporter aux traités (2004)

(2) Le Conseil européen de Laeken fera des recommandations sur la poursuite structurée du large débat et pour sa clôture en 2003. Les gouvernements Benelux estiment que la société civile dans son ensemble doit pouvoir participer au débat et que des synthèses régulières du débat sont nécessaires.

(3) Le Conseil européen de Laeken de décembre aura pour responsabilité de clarifier vis à vis du citoyen quelle est la direction du processus d'intégration. Cela suppose une explication aux questions du "quoi" et du "pourquoi" de l'Union européenne.

(4) Le Conseil européen de Laeken définira aussi la procédure à suivre. Pour les gouvernements Benelux, la responsabilité de préparer le travail d'une CIG doit reposer sur un Forum présidé par une personnalité politique européenne d’envergure.

(5) Le Forum sera composé de représentants des parlements nationaux, du Parlement européen, de la Commission européenne et des gouvernements des Etats membres. Les pays candidats pourront contribuer aux travaux selon des modalités à convenir. Le Président pourra prendre des initiatives pour la consultation des régions. Il veillera à établir les contacts avec la société civile et les partenaires sociaux.

(6) Le Président du Forum sera responsable de l'organisation générale et de la coordination des travaux, en fonction de la nature des questions à traiter. Il fera régulièrement rapport de l’état des travaux au Conseil de l’Union et au Conseil européen et maintiendra le contact avec le débat public parallèle qui se poursuivra.

(7) Le Forum recevra un mandat large mais précis du Conseil européen. L'agenda comportera aussi bien des questions de fond que de questions institutionnelles.

(8) Le Forum élaborera des recommandations et des options en vue d’une modification ultérieure des traités au sein de la prochaine CIG.

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