Déclaration du gouvernement sur la situation économique, sociale et financière du pays 2012 (traduction française)

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Je ne vous apprends rien de nouveau en vous disant que nous vivons des temps anormalement incertains. Nous vivons dans un contexte d’incertitude au niveau mondial, au niveau continental et au niveau national. Et comme toujours lorsque les hommes et les nations cherchent leur voie, qu’ils sont à la recherche de nouvelles certitudes et demandent qu’on leur donne des indications claires pour l’avenir, on souhaite qu’il y ait une personne qui connaisse et nous montre avec précision la voie à suivre et l’avenir qui nous attend. Or, cette personne n’existe pas. D’ailleurs, c’est bien qu’elle n’existe pas. Car beaucoup de mains sont nécessaires pour préparer l’avenir, et pour l’organiser, beaucoup de talents et d’énergies doivent être mobilisés. La préparation de l’avenir ne doit pas être confiée à des solistes, la sculpture de l’avenir est une œuvre collective. Seul un effort de réflexion collectif nous permettra de tresser une corde solide pour assurer notre avenir, une corde qui ne se rompt pas, parce qu’elle se compose des milliers de fils que nous tous nous avons réunis et assemblés en faisant, chacun, appel à tout son savoir et savoir-faire.

Si, au Luxembourg, nous voulons relever les défis qui nous attendent, si, aujourd’hui, nous voulons bien régler les choses pour que, demain, elles ne se dérèglent pas, il faut regarder la réalité en face. Toute politique commence par l’observation de la réalité. Or, pour obtenir une image précise de la réalité, il faut enlever ses lunettes de soleil. En effet, les verres teintés noirs donnent une image différente, moins crue des choses, toutefois, cette image ne correspond pas à la réalité, elle ne reflète pas la nature réelle des choses. Pour voir correctement la réalité, il ne faut pas surfer sur ses vagues, mais il faut plonger dans ses profondeurs, il ne faut pas avoir peur de se mouiller.

En plongeant dans l’avenir, nous serons confrontés à des aspects de la réalité qui prennent une ampleur croissante, aspects qui, une fois qu’ils auront atteint leur envergure définitive, auront complètement changé le contexte dans lequel nous vivrons au cours des prochaines décennies.

La politique repose sur une multitude d’éléments, dont notamment la démographie et l’économie. Déterminant les cadres qui délimiteront notre avenir, la démographie et l’économie nous permettent de nous faire une idée des conditions de vie de demain et d’après-demain.

Nous assistons à une révolution démographique, à laquelle nous devons nous préparer parce qu’elle nous concerne.

Au début du XXe siècle, les Européens représentaient 20 % de la population mondiale. Au début de ce siècle, leur part n’était plus que de 11 %. En 2050, la part des Européens ne sera plus que de 7 % avant de baisser d’ici la fin du siècle à 4 %, pour une population mondiale de 10 milliards de personnes. En l’espace de 200 ans, la part démographique des Européens dans la population mondiale aura été divisée par cinq.

En même temps, l’architecture de l’économie planétaire connaîtra des glissements tectoniques qu’il ne faut pas sous-estimer. En 2010, les États-Unis et l’Europe ont réalisé à eux seuls 41 % du PIB mondial. En 2050, c’est-à-dire dans moins de 40 ans, cette part aura baissé à 18 % du PIB mondial, les États-Unis et l’Europe étant relayés par l’Asie, dont la contribution actuelle à l’activité économique mondiale, qui est de 27 %, passera à 49 % d’ici à 2050. Fin 2020 – dans quelques années seulement – la Chine, d’un point de vue purement économique, sera plus puissante que les États-Unis. Trente ans plus tard, c’est-à-dire vers 2050, l’Inde sera la première puissance économique mondiale. Parallèlement, le Brésil est en train de préparer son « brevet de natation » et, à l’instar d’un certain nombre d’autres pays dits émergents, il fera apparition dans nos eaux dans les prochaines années.

Pourquoi vous dire cela ? Si je vous parle de cette évolution, c’est parce que les conséquences qui découlent de ce changement démographique et économique sont d’une importance absolument déterminante pour l’avenir du Luxembourg. L’Europe de demain sera plus petite et moins puissante. Quant au Luxembourg, si sa taille aura du mal à se rétrécir davantage, il n’en reste pas moins qu’il pourra devenir considérablement plus faible.

Vu que l’Europe de demain sera plus petite et moins puissante, chaque Européen et chaque Luxembourgeois devrait comprendre que nous devons tout mettre en œuvre pour que l’Union européenne soit forte et qu’elle sache faire valoir ses positions plus efficacement. Dans ce contexte, la redivision de l’Union européenne en divisions nationales ne constitue pas la solution à adopter. Au contraire, nous avons besoin d’une division européenne qui agisse de manière offensive, d’une Europe plus intégrée. Non parce que nous devrions avoir peur des grands de demain, mais parce que nous savons et sentons qu’un État national européen – quelle que soit sa taille – n’arrivera pas, à lui seul, à s’imposer face à eux. En tant que minuscule pays du continent européen, nous avons tout à gagner d’une Europe qui va plus loin, alors que nous avons beaucoup à perdre si nous nous faisons leurrer par ceux qui veulent moins d’Europe. Nous devons rester des Européens qui gardent leur esprit critique. Nous ne devons pas participer à ce qui nous déplaît radicalement au niveau national. Mais fondamentalement, il faut que le Luxembourg fasse toujours partie des pays figurant en tête du mouvement d’intégration européenne. Notre place naturelle, celle qui s’impose logiquement, notre place inévitablement nécessaire est là où l’Europe va plus loin. À défaut d’occuper cette place, nous nous retrouverons en dehors de la réalité de demain. L’Europe est un aspect essentiel de la raison d’État luxembourgeoise. Si je vous dis cela aujourd’hui avec autant de détermination, c’est pour que tout le monde sache quelle est la position du gouvernement. Je sens – et je suppose que vous le sentez vous aussi – qu’au cours des prochaines années, le Luxembourg, tout comme le reste de l’Europe, connaîtra des discussions souvent polémiques et non objectives entre ceux qui, par commodité, veulent moins d’Europe et ceux qui savent que, pour des raisons d’efficacité, nous avons besoin de plus d’Europe.

Or, l’évolution démographique n’est pas le seul facteur qui nous oblige à changer nos mentalités. En effet, le nouveau tassement de l’économie mondiale nous oblige à modifier notre manière de penser et d’agir. Nous devons, dès aujourd’hui, ouvrir notre pays aux nouveaux acteurs de l’économie mondiale. Le Luxembourg a toujours eu besoin de capitaux étrangers pour faire tourner et développer son économie. Ces capitaux étrangers venaient traditionnellement d’Allemagne, de France et de Belgique, puis des États-Unis d’Amérique. Aujourd’hui, ils viennent également d’Asie, de Russie et des pays du golfe Persique. Nous n’hésitons pas à faire du commerce avec ces nouveaux acteurs, nous aimons gagner de l’argent, gagner beaucoup d’argent à travers nos exportations vers ces régions. Mais à ce qu’il paraît, nous avons très souvent des doutes fondamentaux quand il s’agit d’accueillir chez nous des entreprises et capitaux de ces régions du monde. Or, ce provincialisme, nous ne pouvons plus nous le permettre. Nous vendons nos produits et services au niveau international. Cela nous oblige en contrepartie à accueillir chez nous des activités commerciales internationales, sans pour autant remettre en question notre mode de vie économique et notre modèle social.

Monsieur le Président,

Il faut tirer une conséquence de cette évolution démographique et économique mondiale : il faut renforcer l’Europe sur le plan tant de son organisation que de la politique d’intégration. Nous devons amortir la perte de poids objective de l’Europe en réunissant ce qui doit et peut l’être. C’est ce que nous avons fait lorsque nous avons lancé l’euro en 1999. L’euro, notre monnaie commune, est l’atout qui nous permet de faire face à la concurrence mondiale. Comme pour d’autres domaines politiques, il faut savoir que seuls, les différents pays sont trop faibles pour faire face à la concurrence des nouveaux géants économiques. Le franc belgo-luxembourgeois – s’il existait toujours – n’aurait pas tardé à être écrasé entre les nouveaux blocs monétaires qui sont en train de se former au niveau mondial. Si tel est le cas, et c’est le cas, nos efforts européens et nationaux doivent avoir pour objectif de garantir l’importance de l’euro et d’élargir son influence sur la situation monétaire. En d’autres termes : nous devons reconsolider les finances publiques au niveau de la zone euro et nous devons, dans la zone euro et à travers elle, découvrir et activer des impulsions de croissance capables de remettre l’économie européenne sur le chemin de l’avenir. La consolidation et la croissance sont les deux faces de la même médaille économique et sociale.

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la consolidation des finances avance relativement bien. Les États de la zone euro qui, en 2007, avaient ramené leur déficit budgétaire à 0,7 % avant de le voir remonter à 4 % en 2010 à la suite de la crise, ont réussi, en 2011, à faire baisser le déficit moyen de l’ensemble de la zone à 2 %. Ce résultat a été atteint au prix d’efforts importants dans tous les pays, voire au prix d’efforts impressionnants en Grèce, en Irlande, au Portugal, en Espagne et en Italie. Or, il n’y a pas d’alternative viable à la consolidation. Il ne faut pas croire que l’on puisse lutter contre la dette par de nouvelles dettes, ni que l’on puisse lutter contre les déficits existants par de nouveaux déficits. En s’endettant davantage, en acceptant des déficits encore plus importants, on finira par entrer en collision frontale avec le mur de l’avenir. C’est pour cette raison qu’il est indiqué et important de faire des économies, toute autre politique mènerait au chaos absolu. La solidité, qui est confirmée par les progrès réalisés en matière de consolidation, est la condition nécessaire pour déclencher la solidarité des États de la zone euro qui conservent des marges budgétaires suffisantes. Les pays qui, à l’instar du Luxembourg, viennent au secours des Grecs, des Irlandais et des Portugais ne se lancent pas dans une aventure échappant à leur contrôle. Ce qu’ils font, c’est prendre un risque calculable. En plus, nous constatons d’ores et déjà que notamment en Irlande et au Portugal, la situation commence à s’améliorer, bien qu’elle reste difficile pour les personnes concernées.

Je sais que dans notre pays, comme ailleurs, un nombre toujours croissant de gens se méfient de tous ces mécanismes et plans de sauvetage. Je leur réponds qu’à défaut d’aider à étouffer le feu là où des incendies se sont déclarés, ceux-ci se propageraient et finiraient un jour par gagner nos forêts. Ce n’est pas une aventure que nous proposons aux gens, mais c’est un risque calculable que nous avons pris. Nous n’avons pas refusé de prendre des risques, mais le risque que nous avons pris est un risque calculable. Dans le contexte de l’euro et de l’Europe, refuser de prendre le moindre risque c’est en fait prendre le risque maximal.

Toutefois, il faudrait être aveugle pour ne pas voir que faire des économies sans offrir de perspectives d’amélioration des conditions de vie démoralise les gens, ce qui, bien sûr, ne contribue pas à relancer l’économie.

Si, en Europe, nous ne parvenons pas à garantir une croissance solide, le résultat global de tous les efforts d’économies réalisés ne sera pas dans l’intérêt de l’économie et des populations. C’est pour cette raison que les dernières réunions du Conseil européen et de l’Eurogroupe étaient consacrées quasi exclusivement à la croissance. La consolidation budgétaire relève de la compétence nationale des États et il en va de même, en grande partie, de la relance de la croissance. Les pays où la croissance est au plus bas et qui vont de récession en récession, doivent faire les réformes structurelles nécessaires pour redonner une chance à la croissance. Les pays dont les systèmes de pensions dérapent doivent les réformer. Lorsque des secteurs entiers de l’économie sont fermés à la concurrence, il faut démolir les clôtures protectionnistes. Lorsque le droit du travail protège exclusivement ceux qui ont un emploi en écartant du marché du travail ceux qui n’en ont pas, il faut adapter le droit du travail. Ce sont là des problèmes à régler par les pays concernés. L’Europe ne peut ni ne doit remplacer les pays dans leurs domaines de compétence exclusive.

Toutefois, le redémarrage de la croissance relève également, voire plus encore, de la compétence de l’Europe. C’est pourquoi le gouvernement luxembourgeois intervient avec d’autres gouvernements pour que les instruments européens de croissance soient intégralement activés. Nous plaidons en faveur d’une augmentation du capital de la Banque européenne d’investissement, qui permettra un renforcement considérable des investissements en Europe. Nous plaidons en faveur d’une utilisation plus concentrée, plus ciblée sur les pays faibles, des Fonds structurels de l’Union européenne. Nous voulons plus d’Europe dans le domaine de l’interconnexion des réseaux énergétiques, dans le domaine des technologies vertes, dans celui des réseaux de transports européens, dans celui de la recherche coordonnée au niveau européen et dans celui des énergies alternatives. C’est pour cette raison que nous ne faisons pas partie des gouvernements plaidant en faveur d’une réduction du budget européen, bien au contraire : nous voulons que l’Union européenne dispose d’une plus grande force d’investissement. C’est également pour cette raison que nous plaidons en faveur des euro-obligations, qui rendent plus supportables, pour les générations présentes et à venir, les efforts financiers énormes requis pour remobiliser la croissance européenne. Globalement, il découle de ce qui précède que pour surmonter les défis qui nous attendent, nous avons besoin d’un geste européen où économies et croissance vont de pair et qui évite les erreurs du passé en donnant une perspective d’avenir aux Européens qui, dans certains pays de l’Union européenne, traversent une situation très difficile.

Économies et consolidation, croissance et investissements sont nécessaires. Toutefois, ils ne sont pas suffisants. Il est évident que sur le plan mondial et européen, nous devons réaliser des progrès supplémentaires en matière de régulation des marchés financiers et de l’industrie financière. Nous contribuons à ces efforts. Quant à l’introduction d’une taxe sur les transactions financières, il y a actuellement lieu de douter du bien-fondé d’une telle mesure. Bien que je sois, en principe, favorable à l’introduction d’une telle taxe, je me rends à l’évidence qu’on ne saura l’imposer ni au niveau du G20 ni au niveau de l’UE 27, ni à l’échelle de la zone euro. Il n’en reste pas moins que je suis fermement convaincu que l’industrie financière doit contribuer à la maîtrise des conséquences financières de la crise. C’est l’industrie financière, son comportement insensé et sa cupidité sans gêne qui ont provoqué la crise. Pour cette raison, nous devons rechercher d’autres solutions permettant de garantir que le secteur financier, qui est à l’origine de la crise, accompagne la gestion de l’après-crise par des contributions financières appropriées.

Il faut poursuivre la régulation des marchés financiers sans pour autant étrangler les activités. Il faut ratifier, quant à sa substance, le Traité fiscal européen parce qu’il donne une nouvelle crédibilité à la politique de consolidation européenne. Ce traité, il faut le consolider par une stratégie européenne de croissance. Voilà les trois éléments qui devront déterminer l’action des prochains mois.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Le Luxembourg doit lui aussi, notamment en matière de consolidation et de croissance, tenir compte des nécessités européennes que je viens d’esquisser, et ce d’une manière adaptée à la situation spécifique du pays. Certes, notre situation financière est nettement plus favorable que celle des autres pays de la zone euro. Cependant, elle évolue dans une direction dangereuse. Certes, notre croissance économique est moins faible que celle d’autres pays. Toutefois, elle n’est pas suffisamment forte pour supporter financièrement et budgétairement les frais auxquels nous devrons faire face à l’avenir.

Si nous faisons des efforts de consolidation, si nous devons faire des efforts de consolidation, nous ne le faisons pas parce que nous serions sous la coupe des fanatiques de l’austérité installés à Bruxelles. Nous le faisons dans l’intérêt de notre propre pays et de son avenir. Quant à ceux qui croient que nous devons faire des économies au Luxembourg parce que Bruxelles l’exige, je leur réponds que ce n’est pas le cas. Même si l’Union européenne n’existait pas, même si l’euro n’existait pas, même s’il n’y avait pas de discipline commune en Europe, nous serions obligés de remédier à notre situation. Nous ne le faisons pas pour figurer parmi les bons élèves à Bruxelles, mais nous le faisons pour éviter d’être la cible des critiques et reproches des générations à venir.

Si le gouvernement a récemment présenté un paquet de consolidation, cela ne veut pas dire que nous nous mettons à genoux devant la bureaucratie bruxelloise, ce n’est pas la réaction à un quelconque diktat des technocrates bruxellois, mais c’est le résultat d’une réflexion autonome sur la problématique des économies et de la croissance au Luxembourg.

Je voudrais faire une remarque préliminaire d’ordre général sur les finances publiques. Je suis étonné de constater la controverse acharnée dont elles font l’objet. Quelle que soit l’évolution des chiffres, quel que soit l’état futur de l’économie, il existe une constante dans notre débat sur la politique financière : la réalité change, les chiffres changent avec elle, tout change, sauf les déclarations des protagonistes de la politique budgétaire qui, elles, n’évoluent pas. Les uns continuent à nous dire que les recettes fiscales sont supérieures aux prévisions et que, pour cette raison, la situation financière connaît une amélioration dramatique, tandis que d’autres continuent de brosser des fresques apocalyptiques. Je comprends ces réactions tant qu’il s’agit de se faire une idée de l’avenir sur la base de visions et de pronostics nationaux et internationaux. Personne ne connaît vraiment l’avenir. Cependant, ces réactions, je ne les comprends pas, quand il s’agit de commenter les chiffres définitifs, qui ne varient plus parce que les années budgétaires sont clôturées.

Je prends au sérieux les pronostics et prévisions, mais je n’en suis pas l’esclave. Les pronostics et prévisions reposent sur les résultats prévisibles à politique inchangée. Si on ne veut pas qu’ils deviennent réalité, il faut modifier la politique en conséquence. C’est ce qu’on a fait au cours des dernières années. Dans la déclaration gouvernementale du 29 juillet 2009, je vous ai expliqué que nous ne pourrions exclure que nous soyons obligés de contracter, jusque dans le courant de l’année 2014, de nouvelles dettes pour un montant total de 12 milliards d’euros. Comme je vous l’ai dit à l’époque, la conséquence en aurait été que la dette publique dans son ensemble aurait pu augmenter à 40 % du PIB et que les intérêts grevant le budget de l’administration centrale auraient pu s’élever à 427 millions d’euros en 2014. Or, la dette contractée pendant les années 2010 à 2014 s’élèvera probablement à 5 milliards d’euros, de sorte que le montant effectif des intérêts à payer en 2015 ne dépassera pas 328 millions d’euros, montant qui reste nettement en deçà des prévisions de juillet 2009. Ces résultats ont été rendus possibles par les économies que nous avons réalisées, l’expansion de certaines catégories d’impôts et la baisse des taux d’intérêt. Ces résultats sont nettement meilleurs que les prévisions, mais ils ne sont pas suffisamment bons pour être qualifiés de bons.

Si les prévisions sont susceptibles de faire l’objet de discussions, les résultats arrêtés après la clôture budgétaire ne le sont pas. Depuis le début de cette législature, les finances publiques dans leur ensemble n’ont plus été en équilibre. Le déficit de l’ensemble des finances publiques s’est élevé à 0,8 % en 2009, à 0,9 % en 2010 et à 0,6 % en 2011. L’équilibre budgétaire n’a pas été atteint, mais ce n’est pas non plus une catastrophe. Ces résultats étaient même plus favorables que ceux de 2004 – c’est-à-dire ceux du dernier budget d’une coalition autre que celle que nous connaissons actuellement – lorsque le déficit de l’ensemble des finances publiques s’élevait à 1,2 %.

Or, en examinant le résultat budgétaire de l’administration centrale, je constate une situation qui s’écarte davantage de l’équilibre pour se rapprocher plus de la catastrophe. Le déficit de l’administration centrale s’élevait à 2,6 % en 2009 et 2010 et à 2,4 % en 2011. Bien que ce résultat ne soit pas plus défavorable que celui de 2004, lorsque le déficit de l’administration centrale a atteint 2,6 %, ces chiffres sont loin d’être rassurants. En examinant le résultat des budgets 2009, 2010 et 2011, c’est-à-dire de budgets définitivement clôturés, on doit se rendre à l’évidence que pour les années 2009, 2010 et 2011, nos dépenses ont dépassé nos recettes et qu’en 2010 et 2011, un trou de plus d’un milliard d’euros a dû être comblé par le recours à l’emprunt. Comme je viens de le dire, je comprends que les pronostics fassent l’objet de discussions. Mais je ne comprends qu’on discute de résultats définitivement arrêtés.

Or, le résultat est que nous dépensons plus que nous gagnons, le résultat est que nos dépenses augmentent plus vite que nos recettes, le résultat est que, pour financer le budget, nous devons emprunter chaque année plus d’un milliard d’euros. J’invite cordialement les syndicats, la presse, les commentateurs qui, dans cette enceinte ou ailleurs, veulent nous faire croire que nous n’avons pas de problème budgétaire, à prendre enfin acte de ces chiffres. Et en ce qui concerne les prévisions d’avenir, il faut voir que, même au cas où l’évolution des prochaines années serait moins défavorable que les prévisions, nos recettes ne suffiront pas à financer les budgets des années à venir, de sorte que nous devrons encore recourir à l’emprunt. Nous voulons atténuer, ralentir et arrêter cette évolution. Or, pour l’atténuer, la ralentir et l’arrêter, nous ne voulons pas nous lancer dans une politique d’austérité aveugle. Nous voulons redresser notre situation financière en faisant des retouches et des ajustements et en pratiquant une rigueur économiquement et socialement responsable.

Permettez-moi une remarque supplémentaire au sujet des finances publiques : cette évolution de la dette que je viens de décrire n’est pas une surprise, car dans la déclaration sur l’état de la nation du 5 avril 2009, c’est-à-dire en pleine campagne électorale, j’avais annoncé pour 2009, c’est-à-dire pour l’année des élections, un déficit de l’ensemble des finances publiques de 1,7 % du PIB. Or, le déficit effectif de l’année 2009 s’élevait à 0,8 %, soit moins de la moitié du pourcentage annoncé. Si on prétend aujourd’hui que nous ne nous sommes pas prononcés clairement sur l’état des finances publiques, on n’est pas très pointilleux sur la vérité. Dans cette même déclaration, j’ai dit que la prochaine législature – c’est-à-dire la législature actuelle – verrait augmenter les déficits et la dette publique. Si, aujourd’hui, on fait comme si nous ne nous étions pas prononcés clairement sur l’évolution future des finances publiques, on n’est vraiment pas très pointilleux sur la vérité.

Quant à la tendance générale, tout y était, ce qui s’est réalisé, ce qui a été moins alarmant que nous ne l’avions craint, mais ce qui n’en était pas moins suffisamment inquiétant pour nous obliger à faire des efforts pour renverser la tendance, efforts réalisés ou à réaliser au cours de l’année dernière, au cours de l’année d’avant et au cours des années à venir. Cet effort de consolidation que nous sommes en train de réaliser et que nous devons renforcer au cours des prochaines années, ne prendra pas fin à l’échéance électorale de 2014. Cet effort – même si, à partir d’un certain moment, il sera atténué un peu – doit être poursuivi. Tout comme les efforts de croissance, qui doivent eux aussi continuer.

Toute politique s’explique par son origine et doit être conçue en fonction de sa fin. Pour cette raison, nous avons besoin de deux lignes d’explication : qu’est-ce que nous voulons faire et pourquoi voulons-nous le faire, qu’est-ce que nous ne voulons pas faire et pourquoi ne le voulons-nous pas ?

Il existe un poste de dépenses qu’il faut continuer à réduire, ce sont les dépenses de consommation de l’État. Tout le monde exige que l’État adapte son train de vie en fonction des nouvelles contraintes financières. Toutefois, cette revendication peut donner lieu à différentes interprétations. En plus, rares sont ceux qui savent que lorsque l’État a une meilleure maîtrise de ses dépenses de consommation, c’est-à-dire lorsqu’il réalise des économies sur son train de vie, certaines entreprises établies dans notre pays connaîtront des pertes de recettes.

La majeure partie des frais de fonctionnement se répartissent sur les frais de personnel. La modulation de l’indexation, qui, comme vous le savez, avait également une finalité budgétaire, nous permet de réaliser, pour l’année en cours, des économies de l’ordre de 34 millions d’euros sur les frais de personnel. L’année prochaine, ces économies s’élèveront à 36 millions d’euros. L’année prochaine, les dépenses de consommation diminueront donc de 36 millions d’euros par le seul effet de la loi. Pour que le calcul soit vraiment exact, il faudrait ajouter ces 36 millions d’euros aux 60 millions d’euros correspondant à l’enveloppe annoncée par le ministre des Finances pour réduire les dépenses de consommation de l’année 2013. Les économies de l’ordre de 60 millions d’euros sur les dépenses de consommation que le ministre des Finances envisage pour 2013 viennent donc s’ajouter aux 36 millions d’euros économisés sur les frais de personnel.

Pour réduire les dépenses de consommation, il faut faire des économies à tous les niveaux. Il ne suffit pas de prévoir des économies globales. Chaque jour, il faut essayer de réduire les dépenses de consommation. C’est pour cette raison qu’on poursuit en principe les économies que nous avons réalisées l’année passée et cette année. C’est pour cette raison que nous réduirons les frais de déplacement. C’est pour cette raison que la gestion du parc automobile de l’État sera réorganisée : si nous optons pour d’autres formules d’achat, les voitures nous coûteront moins cher. C’est également pour cette raison que, dans la mesure du possible, nous centraliserons les achats d’énergie, d’électricité, de mazout, afin de bénéficier, à travers l’augmentation des volumes, de prix plus intéressants. C’est encore pour cette raison que les frais d’expertises et d’avis seront bloqués. C’est pour la même raison que le nombre de campagnes de publicité et d’information sera sensiblement réduit. C’est pour cette raison que nous réduirons les frais liés aux examens internes des différentes administrations, et ce entre autres en revoyant à la baisse l’effectif des commissions d’examen. Et c’est également pour cette raison que nous procéderons moins souvent que par le passé au remplacement du matériel et des équipements des administrations de l’État : achetés en bloc, les ordinateurs et photocopieuses nous coûteront moins cher. Si tout cela n’a l’air de rien, toutes ces mesures n’en sont pas moins difficiles à mettre en œuvre. Or, il faut les mettre en œuvre.

Je viens de dire que les traitements représentaient la majeure partie des frais de fonctionnement. Dans ce contexte, je voudrais parler brièvement de la Fonction publique.

Grâce aux efforts énergiques des ministres Biltgen et Modert, nous avons réussi à trouver avec la CGFP un accord global de réforme structurelle de la Fonction publique ainsi qu’un accord sur les traitements pour les années à venir.

Vous avez constaté − parfois en le critiquant − que ce processus a fait quelquefois des zigzags. Cela n’est pas anormal quand des négociations se révèlent difficiles. En été 2011, après un bond des recettes fiscales et après que beaucoup, y compris dans cette enceinte, avaient annoncé la fin de la crise, le gouvernement a conclu avec la CGFP un accord sur les traitements qui, bien qu’évitant tout excès, n’était plus approprié dans un paysage économique marqué par une nouvelle accentuation des problèmes budgétaires. C’est pourquoi, dans le cadre d’un effort conjoint avec notre partenaire social du secteur public, nous l’avons à nouveau supprimé de ce paysage. L’attitude de la CGFP mérite du respect parce que, pour la première fois depuis les années 80, il a été possible de nous mettre d’accord sur un gel des traitements pour une période de cinq ans. L’augmentation de la valeur du point indiciaire entrant en vigueur en 2015, nous avons conféré à la politique des traitements de la Fonction publique un profil prévisible jusque dans le courant de l’année 2017. Il s’ensuit bien sûr qu’il ne saurait y avoir d’ajustement des pensions en 2013 : si on décide un gel des traitements des fonctionnaires actifs, on ne peut augmenter les pensions. C’est une question de justice intergénérationnelle.

Or, ce qui est plus important que l’accord sur les traitements, c’est l’accord de réforme structurelle de la Fonction publique. Cette réforme renforce l’efficacité de la Fonction publique et contribue à sa modernisation par l’introduction de la gestion par objectif et en prévoyant des espaces appropriés entre les entretiens avec les collaborateurs, elle permet, si nécessaire, de mettre fin à l’emploi d’un collaborateur qui fait preuve d’une performance insuffisante, elle revalorise certaines carrières, elle prévoit une augmentation de la durée de stage de 2 à 3 ans et une diminution des indemnités de stage, elle supprime la majoration d'indice en retransformant les annales en biennales, elle réorganisera l’allocation de famille et prévoit un système d’appréciation acceptable. Il s’agit d’une réforme importante, de loin la plus importante depuis plusieurs décennies. Entrant en vigueur en deux étapes, elle permet de réaliser des économies substantielles. Combinant réforme structurelle et accord sur les traitements, les mesures prévues permettront de respecter la neutralité budgétaire de l’ensemble du paquet d’ici fin 2017. Grâce à un gel des traitements de cinq ans et aux économies budgétaires rendues possibles par la réforme, la Fonction publique apporte sa contribution à la consolidation budgétaire. C’est pourquoi le gouvernement renonce à d’autres réductions affectant les structures classiques du système de rémunération des fonctionnaires de l’État.

Monsieur le Président,

Je viens de m’étendre sur les frais de personnel de l’État. Or, les investissements directs et indirects de l’État constituent un autre poste de dépenses important. Un État qui n’investit pas dans le développement de ses infrastructures collectives est un État qui ne croit plus en son avenir. Un État qui n’investit pas est un État qui a renoncé à poursuivre sa croissance. Nous voulons poursuivre notre croissance, et pour cette raison, nous avons besoin d’un niveau élevé d’investissements publics. Ce niveau d’investissements élevé sera maintenu au cours des prochaines années. Les interventions directes et indirectes de l’État dépasseront 1.800 millions d’euros, soit 400 millions d’euros de plus qu’en 2009, quand le pays était en pleine crise. Nous ne ferons donc pas d’économies sur les investissements si on compare le niveau d’investissements de cette année et de l’année prochaine avec celui des années précédentes. Cependant, le rétrécissement des marges financières de l’État nous oblige à réduire le volume des investissements par rapport aux montants initialement prévus pour les prochaines années. Les investissements prévus pour les prochaines années seront donc réduits de 125 millions d’euros.

Quels domaines seront concernés par cette réduction des investissements initialement prévus ?

On dit toujours – en rapport avec les frais de fonctionnement – que l’État devrait commencer par faire des économies sur ses propres dépenses. Bien sûr, cela vaut également pour les dépenses d’investissement. C’est pourquoi un certain nombre de bâtiments administratifs ne seront pas construits. Citons à titre d’exemples certains dépôts de l’Administration des Ponts et Chaussées, les centres douaniers d’Esch et de Birelerhof, le Service Régional Ouest de l’Administration de la Gestion de l’Eau . Les économies prévues concerneront également la construction routière. C’est ainsi que l’échangeur de Livange ne sera pas construit, quand bien même cette décision serait due au seul fait que, les prochaines années, nous ne voulons pas investir des fonds publics dans la construction d’un stade de football, tout comme nous reportons la construction d’un vélodrome. De même, nous ne procéderons pas à l’élargissement de l’autoroute A3 en direction de la France. Par contre, la mise à trois voies en direction de Luxembourg sera réalisée pour des raisons de sécurité. Nous renoncerons aussi à la construction de nouvelles infrastructures de foire au Kirchberg. D’une manière générale, nous construirons des bâtiments plus petits et plus fonctionnels. Partout où cela est possible, nous opterons pour des constructions préfabriquées. Cela nous permettra de réaliser des économies, car une école préfabriquée coûte la moitié du prix d’un bâtiment scolaire classique.

Cependant, il existe également des projets d’investissements où nous ne pouvons ni ne voulons faire des économies. Nous ne voulons pas faire d’économies sur les infrastructures scolaires et pour cette raison, aucun projet scolaire ne sera reporté. De même, le site universitaire de Belval est absolument prioritaire pour le gouvernement. On fera tout, y compris au niveau des investissements, pour qu’il puisse ouvrir ses portes en 2014. En 2011, nous avons investi 38 millions d’euros dans les bâtiments universitaires de Belval, les investissements prévus s’élevant à 59 millions d’euros pour 2012, à 106 millions pour 2013 et à 140 millions pour 2014. L’université fait partie du programme d’avenir du Luxembourg. C’est là un domaine où nous ne pouvons faire d’économies. Il en va de même pour la mobilité, la mise en place de chaînes de mobilité efficaces et la réorganisation multimodale des transports. Nous devons doter notre réseau ferroviaire de capacités supplémentaires. C’est pour cette raison que nous construirons une nouvelle ligne de chemin de fer entre Luxembourg et Bettembourg, c’est pour cette raison que nous procéderons à la mise à deux voies de la ligne Luxembourg-Pétange, c’est pour la même raison que nous investissons dans l’amélioration des lignes de chemin de fer reliant le Luxembourg à la Belgique et c’est encore pour cette raison que nous procéderons à la mise à deux voies du tronçon Pulvermühl-Sandweiler afin d’accélérer le trafic ferroviaire vers l’Allemagne. C’est également pour cette raison que nous construirons en coopération avec la Ville de Luxembourg un tramway à Luxembourg-Ville. La Ville de Luxembourg prendra en charge un tiers des frais d’investissement et de fonctionnement de la ligne de tramway reliant la gare à LuxExpo.

Nous avons donc réduit le volume de nos investissements par rapport au niveau initialement prévu. En effet, le volume d’investissements prévu pour 2013 et 2014, qui était de 1.931 millions d’euros, est réduit de 125 millions à 1.806 millions d’euros. En même temps, ce volume dépasse de plus de 120 millions d’euros celui de 2011. Bien que nous réalisions des économies sur nos investissements, ceux-ci resteront substantiels, parce qu’ils s’élèveront à l’avenir à 3,74 % de notre produit intérieur brut. Au Luxembourg, la part des investissements publics dans le PIB est plus importante que dans aucun autre pays de la zone euro.

Permettez-moi une remarque complémentaire sur les investissements. J’entends dire, je lis qu’au Luxembourg, les décisions portant sur les investissements privés et publics se prennent trop lentement. J’entends dire, je lis qu’une fois les décisions prises, la réalisation des projets d’investissements publics et privés prend un temps énorme. Cette discussion me contrarie, elle m’énerve, elle me dérange. Pour cette raison, je convoquerai au début de l’automne une table ronde nationale réunissant tous les acteurs concernés par les investissements publics et privés, y compris les communes, table ronde que je présiderai moi-même afin de décider des mesures permettant d’accélérer les investissements au Luxembourg. Les conclusions de cette table ronde seront présentées avant la fin de l’année.

Si nous voulons organiser la croissance dans ce pays, nous ne devons pas réaliser d’économies sur la recherche et le développement. A l’ère industrielle, notre richesse reposait sur les terres rouges. Lorsque cette richesse s’est peu à peu tarie, nous nous sommes réfugiés dans ce qu’on appelle les niches de souveraineté. Les terres rouges – qui conservent leur importance –, les niches de souveraineté, que nous devons préserver là où cela est possible, doivent être relayées aujourd’hui et demain par des niches de compétence. Ces niches de compétence, nous les trouverons uniquement si nous investissons dans la recherche et l’innovation. La recherche et l’innovation sont les éléments moteurs de notre future compétitivité. C’est pourquoi nous envisageons, pour l’année 2012, d’investir encore 280 millions dans la recherche publique et privée, soit dix fois le montant de l’an 2000. Aujourd’hui, la recherche publique et privée occupe 2.500 chercheurs. Outre qu’il produit des idées d’avenir, le secteur de la recherche crée d’ores et déjà des emplois. Au cours des prochaines années, le développement du secteur de la recherche et de l’innovation sera poursuivi avec énergie et détermination. Le CRP Lippmann et le CRP Tudor seront regroupés. En effet, dans le domaine de la recherche, nous avons besoin de moins de concurrence et de plus de complémentarité. Nous nous concentrerons sur les sciences des matériaux, les technologies de la santé et la biomédecine. Le gouvernement a mis en place deux fonds d’investissement dont un de 25 millions d’euros, qui est actif dans le domaine des biotechnologies, et un fonds de 150 millions d’euros, qui est appelé à encourager des entreprises innovantes. Ces fonds sont alimentés à raison de 120 millions d’euros par les revenus de notre participation dans BGL-BNP Paribas. Nous avons sauvé une banque. Les bénéfices générés, c’est-à-dire les dividendes, doivent servir à préparer l’avenir de notre pays.

La gestion énergétique constitue un autre aspect de notre stratégie de croissance. Dans ce domaine, la préparation de l’avenir s’articule autour de deux axes : les économies d’énergie et le doublement des énergies renouvelables.

Il existe, Monsieur le Président, un secteur de notre économie nationale, auquel, trop souvent, nous accordons une attention insuffisante. Ce secteur est celui du tourisme. Contrairement à une opinion assez répandue, il s’agit d’un pilier important de l’économie luxembourgeoise. Notre place sur l’échelle touristique est tout à fait respectable. Selon les critères de l’indice de compétitivité touristique 2011 du Forum économique mondial, le Luxembourg s’est classé en 15e position sur 139 pays et en 10e position des pays européens. Avec 2 millions de nuitées par an, la contribution indirecte du tourisme représente 5,7 % de notre PIB, contribution qui, à notre avis, pourrait augmenter de plus d’un pour cent. Le secteur touristique occupe 18.000 personnes. Or, il est regrettable que les Luxembourgeois jugent que ces emplois ne leur conviennent pas. Il faut que ces emplois conviennent également aux Luxembourgeois. Une personne sans emploi qui en cherche un doit être prêt à accepter un emploi dans l’industrie du tourisme. Travailler dans le secteur du tourisme, de la restauration, de l’hôtellerie n’a rien de déshonorant pourvu que les conditions de travail soient correctes. Au cours des prochaines années, nous accorderons une plus grande importance au tourisme d’affaires et de congrès, qui représente d’ores et déjà 60 % des nuitées enregistrées dans notre pays. C’est là un domaine qui comporte des poches de croissance que nous devons exploiter.

Celui qui pense à l’avenir de notre économie, celui qui prépare l’avenir de notre économie, ne peut contourner les questions liées aux technologies de l’information et de la communication. Le Luxembourg est en passe de devenir un centre de premier ordre dans le domaine des technologies de l’information et de la communication. Notre pays compte d’ores et déjà 1.000 nouveaux emplois dans le secteur de la communication et du commerce électronique. Cette évolution continue, et même si les nouvelles dispositions européennes en matière de TVA conduisent à une baisse progressive des recettes fiscales liées au secteur du commerce électronique, les emplois resteront au Luxembourg. Les emplois resteront – voire se multiplieront – parce que les entreprises du secteur de la communication sont attirées non seulement par le régime de TVA luxembourgeois, mais aussi par l’environnement intéressant que nous leur offrons. Nos liaisons Internet sont développées en permanence. Entre 2008 et 2012, l’État, par l’intermédiaire de Luxconnect et l’Entreprise des P&T a investi plus de 500 millions d’euros dans le développement des liaisons Internet et la mise en place de centres de données ultramodernes et hautement sécurisés. Ces investissements seront poursuivis à l’avenir. Les centres de données sont les entrepôts de l’économie Internet. En 2006, nous disposions de trois grandes lignes de données vers l’étranger. Cette année, nous avons fait passer ce nombre à 16, ce qui veut dire que nous sommes desservis par le TGV européen de l’internet. Nos centres de données, et notamment ceux que nous venons de construire, comptent parmi les plus modernes, les mieux sécurisés, les plus efficaces sur le plan énergétique et les plus écologiques au monde. Les spécialistes ne cessent de le confirmer. D’ici à 2013, nous voulons que 80 % des ménages et 100 % des entreprises aient accès à l’internet ultrarapide. Grâce à cette mesure, le Luxembourg est catapulté dans le peloton de tête, figurant parmi les trois pays européens les plus performants. En plus, nous voulons créer des liens plus étroits entre l’industrie des satellites et l’économie Internet. Satellites et Internet vont bien ensemble. Nous avançons bien dans ces domaines, que nous devons surveiller en permanence. Ce sont les investissements dans ce domaine qui créent la richesse économique de demain.

Monsieur le Président,

Nous avons essayé par le passé de combiner un grand nombre d’atouts. La culture et la politique culturelle en font certainement partie.

Avant de s’établir au Luxembourg, les entreprises étrangères et les gens qui viennent de l’étranger proche et lointain se posent deux questions : quelle est l’infrastructure scolaire du Luxembourg ? Quelle est l’infrastructure culturelle de ce petit pays ? Même si elle n’est pas encore complète, nous disposons d’une excellente infrastructure culturelle. La culture a un impact sur l’image de marque d’un pays. Seul un pays qui existe sur le plan culturel, seul un pays qui investit dans son identité et sa multidiversité culturelles est un pays attractif. Un pays qui ne propose pas d’offres culturelles est un site incomplet. Et pourtant, des observateurs et politiciens superficiels soucieux de l’équilibre budgétaire oublient souvent l’importance de la contribution économique de la culture. Ceux qui veulent faire des économies sur le plan culturel – et ils sont nombreux à le vouloir – oublient souvent que le secteur culturel occupe 6.300 personnes, soit 1,8 % de la population active. La culture et le tourisme – deux secteurs souvent complémentaires – occupent plus de 24.000 personnes au Luxembourg. Nous avons tout intérêt à ne pas réduire notre budget culturel. C’est pourquoi ce budget restera, au cours des prochaines années, supérieur à 1 % de la masse budgétaire totale.

Un autre comportement irresponsable consiste à réclamer une réduction du budget de la coopération, revendication qui séduit beaucoup de gens qui ne font pas l’effort d’une réflexion approfondie. Or, ce serait là commettre une erreur. Le gouvernement ne veut pas réduire l’effort du pays en matière de politique de coopération. À l’avenir, le budget de la coopération luxembourgeoise restera supérieur à 1 % de notre produit intérieur brut. C’est là un effort qui contribue à promouvoir l’image de marque de notre pays dans le monde. En plus, cet effort revêt une dimension morale : même si l’un des pays les plus riches au monde doit faire des économies, il ne doit pas le faire aux dépens de la coopération. Tant que j’assumerai des responsabilités au Luxembourg, le budget de la coopération ne sera pas revu à la baisse. Le budget luxembourgeois de la coopération sera maintenu à 1 % de notre PIB.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Je viens d’évoquer les atouts du Luxembourg. C’étaient principalement des éléments qui constituent des atouts pour les entreprises et investisseurs envisageant de développer leurs activités au Luxembourg. Cependant, il existe également des atouts ou des inconvénients ayant un impact sur la situation des Luxembourgeois eux-mêmes. Un des inconvénients relatifs auxquels sont confrontés les habitants de notre pays réside dans le coût du logement. C’est là un sujet dont j’ai beaucoup parlé ces dernières années, y compris l’année passée.

Au cours des dernières années, nous avons construit un grand nombre de logements au Luxembourg. 3.023 logements ont été créés en 2007, 4.444 en 2008 – ce qui représente un record absolu dans l’histoire du logement au Luxembourg – et 3.740 en 2009. Les deux dernières années dépassent donc nettement le niveau requis, qui, selon les prévisions en matière de besoins de logements, devrait s’établir à 3.400 logements. C’est avec beaucoup de détermination que le gouvernement met en œuvre les 21 mesures du Pacte Logement. Depuis l’année passée, nous avons renforcé les subventions d’intérêt. La Société nationale de développement urbain annoncée l’année passée sera présentée la semaine prochaine : elle contribuera à la stabilisation des prix sur le marché du logement. En plus, elle permettra à l’État de viabiliser des terrains non bâtis situés à l’intérieur ou en dehors des zones PAG en vue de la réalisation d’importants projets de construction de logements. Vendredi passé, le Conseil de gouvernement a pris une décision portant sur 552 hectares qui, s’inscrivant dans le Plan sectoriel Logement, seront destinés à la construction de 18.000 logements accueillant 44.000 personnes, et ce dans le parfait respect des règles en vigueur en matière d’aménagement du territoire et de préservation de la nature. En ajoutant ce chiffre aux 52.000 projets de construction de logements préconisés dans le cadre du Pacte Logement par un nombre total de 98 communes, le nombre de nouveaux logements s’élève à près de 70.000, auxquels il faut ajouter les 3.000 à 4.000 logements prévus sur les friches de Wiltz, dans la Nordstad et sur le terrain de l’Agrocenter à Mersch.

Franchement, je ne me fais pas de souci quant à notre capacité à construire suffisamment de logements au cours des prochaines années, tâche qui sera d’autant plus aisée lorsque l’État, par le biais d’une politique d’achat intelligente, met à disposition des terrains. Le souci que je me fais est d’une autre nature, il est triple.

Je trouve qu’il n’est pas normal que dans ce pays, un aussi grand nombre de logements soient inoccupés. Je ne connais pas leur nombre, mais en parcourant le pays et en regardant les rues et les maisons, je constate qu’il existe au Luxembourg un grand nombre de maisons inoccupées. C’est là une situation qui, à mon avis, n’est pas normale. Je trouve que cette situation n’est pas normale à un moment où un grand nombre de gens sont à la recherche d’un logement. Pour cette raison, je veux que les maisons inoccupées fassent l’objet d’un impôt spécial. C’est une possibilité prévue par les lois, mais dont peu de communes seulement profitent. On m’a expliqué que les communes avaient du mal à définir elles-mêmes un système d’imposition des maisons inoccupées. Pour cette raison, le ministre du Logement et le ministre de l’Intérieur présenteront avant la fin de l’année un vade-mecum contenant les critères et les règles qui régissent la fixation de cet impôt. Je suppose qu’avec cet outil, les communes introduiront effectivement cet impôt.

Un autre problème qui me donne du souci concerne les prix des terrains, que nous ne parvenons pas à maîtriser au Luxembourg. Ce qui coûte cher au Luxembourg, ce n’est pas la construction, mais ce sont les terrains. Au risque de passer pour un naïf, je répète que le fait que les Luxembourgeois possédant des terrains vendent ces terrains à des prix exorbitants à d’autres Luxembourgeois qui en ont besoin pour construire un logement, n’est pas compatible avec le naturel des Luxembourgeois. Les personnes vendant des terrains à bâtir aux Luxembourgeois ne sont pas des Russes, ni des Qataris, ni des Indiens, etc. Ce sont des Luxembourgeois qui vendent des terrains à des Luxembourgeois, ce sont des résidents qui en vendent à d’autres résidents. Est-ce vraiment nécessaire que ceux qui possèdent des terrains exploitent jusqu’à la dernière goutte de sang ceux qui en ont besoin ? Est-ce vraiment nécessaire ? Ne serait-il pas possible que les habitants du pays se mettent d’accord pour vendre des terrains à bâtir à des prix permettant aux jeunes gens d’en bénéficier sans dépenser la fortune de leurs grands-parents et sans fragiliser celle de leurs enfants ? Ce n’est là qu’une question que je pose. Mais c’est une question qui est profondément liée à la manière dont les habitants de ce pays envisagent de vivre ensemble. Des Luxembourgeois exploitent d’autres Luxembourgeois. Il ne faut pas s’étonner qu’un grand nombre de Luxembourgeois préfèrent s’établir à l’étranger. Nous nous détruisons nous-mêmes. C’est là une remarque qui, bien sûr, vaut également pour l’État. L’État doit explorer des voies lui permettant de pratiquer des loyers raisonnables et non maximaux quand il met en location des maisons.

Le troisième problème qui me donne du souci concerne la situation des ménages à faible revenu, qui doivent faire un effort énorme pour subvenir aux frais de logement. Les frais de logement augmentent plus rapidement que le revenu de ces ménages. Les ménages vivant en dessous du seuil de risque de pauvreté et louant un logement sur le marché libre doivent affecter en moyenne 35 % de leur revenu au paiement du loyer. Le gouvernement veut ramener de 35 à 30 % le taux représentant l’effort à consentir par le ménage lui-même pour faire face aux frais de logement. C’est pourquoi nous introduirons une subvention appelée allocation de loyer . Nous le faisons dans l’espoir que cette allocation de loyer accordée aux familles objectivement plus pauvres ne sera pas grignotée par une augmentation des loyers. En principe, cette allocation de loyer pourrait être régie par les mêmes conditions que les subventions d’intérêt accordées en vue de l’achat d’un logement. Le montant moyen par famille s’élèverait ainsi à 95 euros par mois. Avec une limite de revenu de quelque 2.590 euros pour une mère de famille monoparentale avec deux enfants, la subvention s’élèverait ainsi à 106 euros par mois maximum. Pour un couple sans enfants, elle s’élèverait à 100 euros maximum pour un revenu maximal de 2.420 euros et pour un couple avec deux enfants, elle serait de 139 euros pour un revenu maximum de 3.400 euros. Vous me direz que ce n’est pas beaucoup. Je vous répondrai qu’il y a beaucoup de gens et beaucoup de ménages pour qui cette allocation de loyer représente une somme tout à fait considérable. Au total, cette mesure, cette allocation de loyer, nous coûtera 15 millions d’euros par an. Il va de soi – vu la situation financière de l’État – que cette mesure doit être financée par la réduction d’autres aides au logement actuellement accordées par l’État.

Monsieur le Président,

Il y a des gens qui veulent faire des économies sur la coopération, il y a des gens qui veulent faire des économies sur le budget de la culture. Ce sont là des idées simples, des vues simples, des réflexions naïves qui ne tiennent pas compte de la complexité du contexte de l’action politique. Les vues simples se manifestent parfois là où on ne s’y attendrait pas. Ces derniers jours, j’ai lu dans un journal, qui, par le passé, a lancé des campagnes contre le Renteklau (le vol des pensions) qu’il était tout à fait possible de réviser le financement de nos pensions en revoyant à la baisse la contribution étatique au système de pensions. C’est vrai qu’on peut se poser la question de savoir si l’État doit vraiment contribuer 2,5 milliards d’euros au financement de l’ensemble des prestations sociales existant au Luxembourg. De même, on peut se poser la question de savoir s’il est vraiment nécessaire que nous tous, l’État, les salariés et les patrons contribuent 24 % des salaires à la caisse de pension, même si 21 % sont suffisants. Je comprends qu’on se pose la question de savoir s’il est vraiment nécessaire que l’État fournisse 45 % des recettes de nos systèmes d’assurance sociale, alors la contribution de l’État s’élève à 33 % en Belgique, à 35 % en Allemagne et à 32 % en France. Il est vrai qu’en ramenant le volume de nos contributions à la moyenne de nos voisins – qui est de 33 % –, la contribution étatique au financement des prestations sociales au Luxembourg passerait de 10,5 % à 7,8 % du PIB et les dépenses pesant sur le budget de l’État diminueraient d’un milliard d’euros. Et on a tout à fait raison de dire que, dans cette hypothèse, le Luxembourg n’aurait pas de problèmes budgétaires. Toutefois, la réalité est plus complexe : si l’État revoyait à la baisse ses contributions au financement des prestations sociales en les ramenant au niveau pratiqué par nos voisins, nous ne tarderions pas à rencontrer des problèmes de financement de nos pensions et retraites et on verrait fondre les réserves de nos caisses de pension comme la neige sous le soleil. Au Luxembourg, nous avons fait le choix d’une fiscalisation maximale de la Sécurité sociale, pour employer le terme utilisé par les spécialistes. Nous voulons conserver ce système. Car ce système a pour conséquence – et j’invite les organisations patronales à dresser l’oreille – qu’au Luxembourg, la contribution des patrons au financement des prestations sociales n’est que de 27 %, contre 35 % en Allemagne, 43 % en Belgique et 44 % en France. Ceux qui, comme je viens de le dire, veulent changer le système de financement de la Sécurité sociale doivent se rendre à l’évidence qu’un tel changement entraînerait des charges plus importantes, considérablement plus importantes pour les patrons, qu’il ferait augmenter la contribution des salariés et qu’il compromettrait le financement durable de nos systèmes de pensions et retraites. Pour ces raisons, le gouvernement n’est pas prêt à s’engager dans la voie d’une réduction des contributions fiscales au financement des prestations sociales.

Par contre, nous proposons une réforme du système de pensions amortissant les risques de financement pesant sur notre système de pensions et retraites et prévoyant des possibilités – le ministre de la Sécurité sociale parle de vis –, dont on peut profiter ou qu’on peut faire tourner si le financement du système de pensions et retraites dérape. Nous voulons réaliser cette réforme. Nous voulons continuer à discuter cette réforme avec la Chambre des députés et les partenaires sociaux. Mais indépendamment de ces discussions, il est clair que nous avons besoin d’une réforme du système de pensions. La réforme du système de pensions fait partie des grandes réformes structurelles que le gouvernement veut réaliser. Et ces réformes, le gouvernement les réalisera. En attendant – la situation financière étant ce qu’elle est –, il n’y aura pas d’ajustement des pensions au 1er janvier 2013. L’évolution salariale des années 2010 et 2011 ne se prolongera pas au niveau des pensions. Par contre, nous voulons adapter le salaire social minimum au 1er janvier 2013. Je prends acte du fait que dans certains milieux patronaux et politiques, on est opposé à cette augmentation. Je leur dis calmement que le 1er janvier 2013, les salaires sociaux minimums seront ajustés. Ils seront ajustés parce qu’au Luxembourg, vivre du salaire social minimum est difficile. Le salaire social minimum sera ajusté bien qu’il soit nettement supérieur au salaire minimum versé en France – ce qui m’amuse un peu dans ce contexte, c’est que le Front de gauche réclame un salaire minimum de 1.700 euros, alors que notre salaire social minimum est nettement plus élevé.

Laissez-moi vous dire une chose : je suis contrarié par le fait que des gens, qui, au Luxembourg, engrangent des salaires parfois exorbitants, pensent que le Luxembourg irait mieux si l’on réduisait le salaire social minimum. La situation des Luxembourgeois, la situation de l’économie luxembourgeoise ne sera pas plus favorable si nous réduisons les salaires sociaux minimums. Tout comme elle ne sera pas plus favorable si on plafonne les supersalaires des managers. Toutefois, j’aurais moins de mal à accepter une baisse des supersalaires des managers qu’une baisse ou une stagnation des salaires sociaux minimums. Dans ce pays, certaines personnes feraient bien de faire preuve d’un minimum de pudeur ! Tout comme il serait souhaitable que l’Union des Entreprises Luxembourgeoises – l'UEL – adopte une position cohérente en matière de préretraites. Les organisations patronales demandent la suppression des préretraites. Toutefois, lorsqu’une entreprise est confrontée à un important problème d’ajustement, les mêmes représentants patronaux n’hésitent pas à solliciter le droit de recourir à la préretraite-ajustement. C’est ce qui s’est passé, il y a plusieurs semaines, chez ArcelorMittal. ArcelorMittal sollicite l’admission de son personnel à la préretraite-ajustement au motif que la situation mondiale du groupe exige la réduction de certaines activités au Luxembourg. Or, ArcelorMittal réalise des bénéfices énormes à l’échelle mondiale. Pourquoi le groupe ArcelorMittal ne peut-il pas financer lui-même la préretraite-ajustement ? ArcelorMittal ne le fait pas, parce que notre législation considère la préretraite-ajustement comme un mécanisme permettant d’amortir et de prévenir le licenciement de personnel. J’ai lu que l’ABBL juge inadmissible le fait que l’État paie la préretraite du personnel d’ArcelorMittal. Plutôt que de réclamer sans cesse la suppression de la préretraite, l’UEL ferait bien d’adopter elle-même une position cohérente. Quoi qu’il en soit, je suis d’avis qu’ArcelorMittal, une entreprise qui touche 55 millions d’euros au titre du financement de la préretraite-ajustement, devrait, en contrepartie, mettre gratuitement des terrains à la disposition de l’État en vue de l’implantation de PME ou de la construction de logements. Les grands patrons ne peuvent pas que prendre. Ils doivent aussi être prêts à donner.

Ou plutôt : il faut qu’ils soient prêts à rendre ce qu’ils ont reçu, parce qu’ArcelorMittal a reçu beaucoup des Luxembourgeois.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Quand on parle d’économies, on entend formuler des idées simples, qui, bien qu’à première vue convaincantes, ne sont pas réalisables.

Une de ces idées qui semblent à première vue convaincantes concerne l’imposition des allocations familiales. Le gouvernement n’a pas retenu cette option, parce que cette option n’en est pas une.

Si je suis opposé à une telle solution, ce n’est pas pour des raisons d’idéologie fiscale, parce qu’il est vrai que la justice sociale passe aussi et souvent par la fiscalité. Toutefois, l’imposition des allocations familiales nous confronterait à d’importants problèmes de gestion fiscale. Si nous introduisions l’imposition des allocations familiales, les gens, qui, aujourd’hui, ne paient pas d’impôts, verraient les allocations familiales s’ajouter à leur revenu, ce qui aurait pour conséquence qu’ils devraient payer des impôts. Les personnes à faible revenu et un grand nombre de personnes appartenant aux classes dites moyennes seraient les premières victimes de l’imposition des allocations familiales. En plus, les familles qui, aujourd’hui, ne paient pas d’impôts, devraient faire des déclarations d’impôts, ce qui confronterait l’Administration des contributions directes à des problèmes gigantesques. On oublie également que cette mesure nous obligerait à négocier de nouvelles conventions de non-double imposition avec nos trois voisins, parce que ce régime d’imposition s’appliquerait aussi aux allocations familiales versées aux frontaliers. En d’autres termes : je suis d’avis que nous ne devrions plus continuer à étudier ce projet extrêmement complexe sur le plan technique, à moins que nous ne trouvions une solution susceptible d’apporter une réponse à toutes les questions. Or, après avoir examiné cette problématique plusieurs années durant, je ne vois pas quelle pourrait être cette réponse globale.

Une autre idée simple que le gouvernement n’a pas voulu retenir est celle d’une réduction globale de 10 % des allocations familiales. Nous n’avons pas retenu cette idée, parce qu’une baisse globale des allocations familiales aurait touché de manière disproportionnée les familles à faible revenu. En plus, depuis 2006, les allocations familiales n’ont plus été indexées. Cette mesure permet de réaliser en 2012 des économies de l’ordre de 136 millions d’euros. Comme nous l’avions promis, ces économies ne se sont pas volatilisées, mais elles ont été affectées au développement massif des infrastructures de garde d’enfants. En 2012, le montant consacré à la garde d’enfants dépasse de 172 millions d’euros celui de 2006, soit un montant supérieur de 40 millions à l’effet de la désindexation des allocations familiales. Pour le reste, le développement des services de garde d’enfants sera poursuivi au cours des prochaines années. Plutôt que de recourir à l’imposition ou à une réduction des allocations familiales, nous nous sommes prononcés en faveur d’une autre solution. Cette solution prévoit la réorganisation des chèques-services. Deux mesures permettront de réaliser des économies supérieures à 8 millions par an. La première mesure prévoit une augmentation de la participation des parents au taux horaire et au prix des repas, alors que la seconde prévoit une réduction de la participation étatique aux frais des structures d’éducation et d’accueil commerciales. Par manque de temps, je ne peux pas vous présenter cette mesure en détail, toutefois, je ferai distribuer un document explicatif sur le détail des mesures en question.

Je me permets de vous rappeler que dans le cadre de la modulation de l’indexation, nous avons décidé d’accorder une aide supplémentaire aux élèves de lycée issus de familles à faible revenu et ne bénéficiant pas des chèques-services. Ces familles touchent une prime de 500 euros ainsi qu’un chèque de 300 euros en vue de l’achat de livres et de matériel scolaire. Cette mesure sera appliquée pour la première fois à la rentrée scolaire 2012. 5.000 élèves pourront bénéficier de cette aide. Là encore, la présentation détaillée de la mesure prévue nous mènerait trop loin. C’est pourquoi elle sera également présentée sous forme d’un tableau explicatif que je ferai distribuer.

Lors de la déclaration de l’année passée, j’avais annoncé la création massive de postes permettant d’assurer un meilleur encadrement des familles et enfants en difficulté. Depuis, nous avons créé 178 postes supplémentaires et nous poursuivrons dans cette voie. En plus, j’avais annoncé l’année passée que des efforts intenses étaient nécessaires pour aider les enfants présentant des troubles du comportement. Depuis septembre, une infrastructure établie à Luxembourg-Ville est à la disposition des enfants présentant des troubles du comportement. Dans ce contexte, je tiens à remercier vivement la Ville de Luxembourg d’avoir soutenu ce projet.

Bref : nous évitons de faire des économies excessives aux dépens des seules familles. Nous continuons à développer les services de garde d’enfants. Nous appliquons les décisions que j’ai annoncées l’année passée. Nous réorganisons le système des chèques-services dans un esprit de justice sociale.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Il y a quelques semaines, le ministre des Finances vous a expliqué que le paquet de consolidation du gouvernement reposait pour deux tiers sur des économies et pour un tiers sur des augmentations d’impôts. Dans ce contexte, je voudrais donner quelques explications concernant la politique fiscale.

J’ai lu que le gouvernement avait l’intention d’augmenter le taux normal de TVA. Le gouvernement n’a à aucun moment envisagé une telle augmentation, et ce bien que notre taux de TVA soit le plus bas de l’Union européenne. La TVA n’augmentera pas au cours de cette législature. Cependant, je ne peux exclure – et qui, dans cette enceinte, peut exclure cette éventualité ? –, qu’au cours de la prochaine législature, lorsque les recettes du commerce électronique diminueront, nous soyons contraints de prendre une telle mesure et de rapprocher notre taux de TVA de la moyenne de l’Union européenne. Or, c’est là une décision qui incombera au prochain gouvernement. Le gouvernement actuel ne procédera en aucun cas à une augmentation de la TVA.

L’année passée nous avons – toujours dans le contexte de la modulation de l’indexation – décidé la suppression de l’impôt anti-crise. Nous l’avons fait pour amortir un peu les effets de la modulation de l’indexation. Sa réintroduction n’a jamais été sérieusement envisagée par le gouvernement. Il ne faut pas zigzaguer en matière de politique fiscale.

En revanche, nous avons décidé de proposer à la Chambre des députés une augmentation de l’impôt de solidarité. Nous le faisons parce que les dépenses du Fonds pour l’emploi augmentent – du fait de l’augmentation du chômage – et parce que l’impôt de solidarité est un impôt à finalité fixe servant au financement des indemnités de chômage et de la politique active de l’emploi. La solidarité avec les sans-emploi est nécessaire. Or, elle a un prix, et ce prix, c’est la hausse de l’impôt de solidarité. Il augmentera au 1er janvier 2013 de deux points de pourcentage. Pour les personnes physiques, il passera de 4 % à 6 %, et pour les personnes physiques ayant un revenu imposable supérieur à 150.000 euros en classe I et à 300.000 euros en classe II, il passera à 8 %. Quant aux entreprises, elles paieront à partir du 1er janvier 2013 7 % au lieu de 5 % au titre de l’impôt de solidarité. Pour les communes, qui, depuis des années, ne sont pas soumises au paiement de l’impôt de solidarité, le taux sera de 2 % à partir du 1er janvier 2013. Leur contribution s’élèvera à 12 millions d’euros, celle des personnes physiques à 147 millions et celle des entreprises à 82 millions. Le montant supplémentaire ainsi versé au Fonds pour l’emploi s’élève à 68 millions pour les personnes physiques, à 32 millions pour les entreprises et à 12 millions pour les communes. Au total, les recettes ainsi générées s’élèvent à 112 millions d’euros − montant dont le Fonds pour l’emploi a absolument besoin.

En augmentant l’impôt de solidarité, nous faisons passer le taux d’imposition maximal effectif en fait à 42,12 %. Nous avons dit plus d’une fois que ceux qui sont plus forts doivent contribuer davantage que ceux qui sont moins forts. Et ceux qui sont plus forts fourniront une contribution plus importante.

Pour terminer, on peut dire que globalement, nous faisons des économies parce que nous y sommes contraints. Nous savons où nous faisons des économies et à quoi elles serviront. Loin de nous ruiner, les économies que nous faisons cette année, l’année prochaine et les années suivantes, permettront de redresser notre situation. Nous faisons des économies parce que nous sommes l’un des seuls pays européens à avoir conservé des marges de manœuvre suffisantes pour faire des économies. Nos économies ne se feront pas aux dépens des plus faibles. Elles ne se feront pas aux dépens de la croissance. Elles se feront de manière à permettre à notre économie de poursuivre sa croissance.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Ces dernières années, je vous ai souvent parlé du grave problème que constitue le chômage. La lutte contre le chômage reste la préoccupation essentielle du gouvernement, de sorte que vous serez peut-être étonnés de constater que je m’étends moins longuement sur ce sujet que d’habitude. Or, beaucoup a été dit, presque tout a été dit et il s’agit à présent de poursuivre la mise en œuvre des mesures annoncées. À l’automne, un débat sur le chômage en général et le chômage des jeunes en particulier aura lieu à la Chambre des députés. C’est là un débat important sur lequel je ne veux pas anticiper aujourd’hui. Je me contente d’esquisser les grandes lignes de la politique gouvernementale dans ce domaine important de la politique nationale .

Ce qui nous inquiète le plus, c’est le chômage des jeunes. Dans notre pays, plus de 2.000 jeunes sont au chômage, soit 2.000 de trop. Nous ne devons pas les abandonner à leur sort. C’est pourquoi le ministre du Travail a raison d’exiger avec insistance que dans les quatre mois de leur inscription à l’Administration de l’emploi, les jeunes doivent se voir proposer une offre d’emploi, éventuellement sous forme de stage, sous forme de formation ou sous forme de réinsertion scolaire. C’est cet objectif que poursuit le plan national de lutte contre le chômage des jeunes. Une prise en charge rapide des jeunes chômeurs est essentielle. L’amélioration de leur employabilité est le seul moyen de leur donner accès au marché du travail. Ces questions – parmi d’autres – seront discutées à l’automne. Nous devrons alors examiner la question de savoir dans quelle mesure la participation étatique au salaire des jeunes chômeurs entrant dans une entreprise est nécessaire et dans quelle mesure elle doit être renforcée pour soutenir durablement l’insertion en entreprise.

Une autre question sur laquelle je me suis étendu longuement ces dernières années concerne l’enseignement et notre système d’éducation nationale. Tous les pays européens connaissent des débats intenses sur des projets de réforme du système d’enseignement et d’éducation. De telles réformes sont partout à l’ordre du jour et c’est là un fait symptomatique. C’est un fait qui semble indiquer que dans ces pays comme dans le nôtre le système d’enseignement ne fonctionne pas de manière optimale. Le fait que, dans certains milieux, la réforme scolaire prévue fasse l’objet de vives critiques, ne nous empêchera pas de mettre en œuvre cette réforme. Il y aura certes des détails qui seront modifiés par rapport au projet initial. Toutefois, personne ne doit penser que le gouvernement renonce à la réforme scolaire.

La loi de 2009 sur l’enseignement fondamental fera l’objet d’un bilan actuellement en cours d’élaboration, qui sera présenté en décembre de cette année. Une fois ce bilan présenté, nous déterminerons si et, le cas échéant, de quelle manière la loi et les règlements sur l’enseignement fondamental devront être amendés. Le nouveau régime de la formation professionnelle fonctionne depuis cette année pour la quasi-totalité des formations. Les éléments qui se sont avérés concluants sont salués. En cas de problèmes, la ministre de l’Éducation nationale consulte tous les acteurs concernés afin d’y remédier.

Le débat sur la modernisation de l’enseignement secondaire sera poursuivi. En décembre, la ministre compétente a présenté un texte exposant ses propositions. À ce jour, ce texte a fait l’objet de 74 avis. Ces avis sont analysés. Les entretiens avec les élèves, les parents, les chambres professionnelles et les professeurs seront poursuivis. L’analyse porte sur les points forts et les faiblesses de notre système d’enseignement et on en tire les conclusions qui s’imposent. Toutes les mesures proposées seront discutées. Mais indépendamment de ce débat, il est certain que nous devons adapter nos lycées aux exigences du XXIe siècle. L’objectif est d’assurer un encadrement efficace des jeunes élèves fréquentant les classes inférieures, de la 7e à la 5e, et de leur proposer un accompagnement approprié afin qu’ils soient capables de décider de leur future formation et d’obtenir une qualification. Quant aux classes supérieures, de la 4e à la 1re, de l’enseignement secondaire et de l’enseignement technique, nous devons veiller à préparer les élèves de manière optimale aux études supérieures et à leur future activité professionnelle. Nous voulons stimuler la performance des élèves plus forts tout en aidant les élèves moins forts. Vu le multilinguisme de notre pays, cette tâche est plus difficile chez nous que dans d’autres pays, où les enfants et les élèves sont scolarisés dans leur langue maternelle. Les éléments qui s’avèrent concluants seront maintenus voire développés. En effet, à côté d’un certain nombre d’échecs partiels, nous connaissons des succès importants. C’est ainsi que nous sommes heureux qu’une équipe luxembourgeoise d’élèves de 16 ans ait remporté en avril une médaille d’argent à l’Olympiade de l'Union européenne des sciences naturelles. En même temps, nous sommes heureux que le nombre de décrocheurs, c’est-à-dire le nombre de jeunes quittant l’école sans diplôme, reste en recul et s’est stabilisé autour de 9 %.

Une fois tous les avis analysés et tous les travaux préliminaires achevés, la ministre de l’Éducation nationale présentera en avril prochain un texte de loi définitif qui sera discuté dans cette enceinte et ailleurs.

Monsieur le Président,

Il existe dans notre pays un autre problème que je voudrais brièvement aborder. Ce problème concerne l’eau. Depuis des années, nous discutons deux questions portant respectivement sur le prix social de l’eau et l’introduction d’un prix unique de l’eau. Je ne vous ai jamais caché que je suis en faveur d’un prix unique de l’eau à l’échelle nationale. Je suis conscient des difficultés liées à cette question, mais vous admettrez qu’un petit pays comme le Luxembourg a besoin d’un prix unique de l’eau. La solidarité nationale s’organise également à travers un prix unique de l’eau. Les modalités précises qui régiront ce prix unique et la distinction entre eau potable et eaux usées doivent faire l’objet d’un débat. Cependant, il me paraît évident que nous devons nous diriger vers un prix unique de l’eau, que nous devons introduire en plusieurs étapes. Le gouvernement, après concertation avec tous les acteurs, dont notamment le Syvicol, présentera à l’automne un modèle susceptible d’aboutir à un prix unique de l’eau.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Ce discours trop long se terminera par une conclusion trop brève.

Quel est en fait le Luxembourg que nous voulons ? Aujourd’hui et pour les prochaines années ?

Nous voulons un Luxembourg qui ait une orientation claire en matière de politique européenne. Un Luxembourg qui fasse partie d’une Europe qui ne doit pas être une Europe de l’austérité aveugle. Une Europe qui prenne au sérieux sa mission sociale, une Europe qui accorde une importance centrale au modèle social européen, une Europe dont le discours ne se limite pas aux économies, mais qui fasse preuve d’une réelle volonté de croissance.

Nous voulons un Luxembourg qui reste économiquement fort. Pour garantir que nous restions économiquement forts, pour assurer la pérennité de notre croissance demain et après-demain, il ne suffit pas de compter sur la seule importance de notre secteur financier. Nous devons mettre fin à notre dépendance par rapport au secteur financier. Nous voulons y arriver en poursuivant le développement des niches de souveraineté dont nous pouvons bénéficier. Nous voulons y arriver surtout en explorant de nouvelles niches de compétence. Ces nouvelles niches de compétence, le ministre de l’Économie les a citées dans le discours qu’il a tenu à l’occasion de la Foire de printemps. Il s’agit de la logistique, des technologies de l’information et de la communication, des biotechnologies, de la recherche et de l’innovation. Un pays qui veut éviter la stagnation doit explorer de nouvelles possibilités de développement.

Nous voulons un Luxembourg qui, grâce à sa petite taille, parvienne à rétablir l’équilibre de ses finances publiques. La qualité de notre signature internationale est en effet fonction de la qualité de nos finances publiques. Pour cette raison, nous devons faire des économies dans les domaines où nous avons exagéré par le passé. Nous devons consolider les domaines où les finances dérapent. Toutefois, pour la même raison – car faire des économies constitue pour l´État une nécessité et non pas une fin en soi – nous devons également investir dans les secteurs d’avenir et les infrastructures.

Nous voulons un Luxembourg qui n’ait pas peur des réformes. Nous voulons un Luxembourg où le mot réforme ne soit plus considéré comme obscène. Nous ne voulons pas d’un Luxembourg qui s’enfonce dans la stagnation, nous voulons un Luxembourg qui réalise des progrès ordonnés. Pour cette raison, nous avons besoin d’une réforme du système de pensions, car l’absence de réforme dans ce domaine nous fera entrer en collision avec le mur. Pour la même raison, nous procéderons à une réforme du système d’enseignement, parce que nous le devons aux jeunes d’aujourd’hui et aux adultes de demain.

Nous ne voulons pas d’un Luxembourg qui se ferme aux autres. Nous devons être ouverts pour accueillir chez nous des investisseurs venant d’autres régions du monde. Nous devons nous ouvrir également quand il s’agit d’intégrer des citoyens de l’Union européenne dans notre administration publique.

Il faut que nous restions le pays de la solidarité. Le pays de la solidarité vis-à-vis de l’extérieur, qui partage ses richesses avec d’autres régions du monde. Il faut que notre pays reste le pays de la solidarité sur le plan intérieur, un pays qui demande plus d’efforts à ceux qui sont capables de fournir ces efforts qu’à ceux dont la force individuelle est insuffisante pour leur permettre de fournir des efforts comparables.

Il faut que notre pays reste un pays de solidarité. Cependant, il faut savoir que la solidarité a un prix. Le prix de la solidarité, c’est la participation de tous. On ne lutte pas contre le chômage en combattant les chômeurs. Cependant, on ne lutte pas non plus contre le chômage en acceptant qu’il y ait des sans-emploi qui font tout pour ne pas devoir accepter d’emploi. Dans un pays qui veut avancer, il est permis d’exiger que les chômeurs fournissent un effort propre. Il est inadmissible que des indemnités de chômage généreuses incitent un nombre croissant de chômeurs à s’installer dans le fauteuil de la solidarité en attendant de meilleurs jours.

Il ne faut pas confondre lutte contre la pauvreté et lutte contre les pauvres. Cependant, il n’est pas normal qu’un pays bien organisé et – pour le dire franchement – un pays riche compte autant de personnes bénéficiant du RMG. Le revenu minimum n’a pas été introduit pour inciter les gens à rester pauvres. Le revenu minimum a été introduit pour aider les gens à sortir de la pauvreté. Nous voulons que les personnes vivant dans la pauvreté sortent de la pauvreté. C’est pour cette raison – même si cela nous coûte – que nous devons continuer à les aider et – si c’est la seule possibilité – nous devons les secouer pour qu’ils acceptent qu’on continue à les aider.

Nous avons besoin d’un pays qui réussisse sa transformation écologique. Nous avons besoin d’une réorientation de notre politique énergétique sur le plan intérieur. C’est pourquoi nous devons nous concentrer et miser de manière ciblée sur les énergies alternatives, la rénovation des bâtiments existants et un changement systématique des mentalités.

Nous voulons être un pays qui conserve sa propre manière d’aborder les choses. Cette manière spécifique d’aborder les choses, c’est le modèle du dialogue permanent. Dans ce pays, tout le monde réclame le dialogue. Cependant, tout le monde n’est pas capable de participer au dialogue. Il ne faut pas confondre dialogue et duel. Entrer en dialogue, c’est se rapprocher l’un de l’autre. Le gouvernement est prêt à le faire, ce que, du reste, il prouve chaque jour. Toutefois, nous voulons que ceux qui ne sont pas d’accord avec le gouvernement, qui n’approuvent pas sa politique, parviennent à dépasser leur propre point de vue plutôt que de s’enfermer dans leur pensée cloisonnée.

Nous voulons être un pays qui pratique le dialogue social. Au Luxembourg, l’état de santé du dialogue social laisse actuellement à désirer. J’invite les patrons – qui me croient entièrement engagé aux côtés des syndicats – à attacher plus d’importance au dialogue social. Et j’invite les syndicats – qui me croient entièrement engagé aux côtés du patronat – à revenir à la table des négociations et à remplir leur mission dans l’intérêt de la population active de notre pays. Si les partenaires sociaux continuent à se fixer l’un l’autre sans se parler, comme deux chiens de porcelaine, si – dans une situation critique – les deux partenaires refusent le dialogue avec le gouvernement, l’avenir de notre pays s’annonce difficile.

En essayant d’entrer dans le monde d’aujourd’hui, en essayant de préparer ensemble le monde de demain, en retrouvant le respect de l’autre – policiers, agents de chemins de fer, pompiers et bien d’autres personnes ne méritent pas qu’on les agresse –, en nous efforçant de nous rapprocher les uns des autres plutôt que de créer des distances artificielles qui nous séparent, en supprimant le clivage entre Fonction publique et secteur privé et en nous rendant compte que nous faisons tous partie du même pays, en faisant tous ces efforts et bien d’autres encore, nous parviendrons à redevenir ce que nous sommes.

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