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Discours sur l'état de la Nation 2019 Continuer à agir au lieu de continuer à gérer
Le Premier ministre, ministre d'État, Xavier Bettel a prononcé le 8 octobre 2019, devant la chambre des députés la déclaration du gouvernement sur la situation économique, sociale et financière du pays 2019
Le discours fut prononcé en luxembourgeois et seul le texte prononcé fait foi.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Je vous le dis très honnêtement, personnellement, il m’est difficile de me trouver aujourd’hui devant vous et de vous parler de la situation actuelle de notre pays, des réalisations des mois et des années passés, ainsi que de notre avenir, de nos priorités et de notre orientation politique.
Il est difficile de parler de perspectives, alors qu’une des personnes qui ont contribué à élaborer les priorités des années à venir ne peut être parmi nous.
Felix Braz est non seulement une personne qui m’est extrêmement proche, un ami et un allié; Felix Braz était, au cours des années passées, un pilier, un élément important du fondement qui a rendu possible le succès de cette coalition, de même que le succès du Luxembourg.
Bien sûr, on ne partage pas tous les mêmes convictions.
L’opposition est, par définition, opposée à une grande partie des solutions que proposent les représentants de la majorité pour répondre à des questions importantes. De même, au sein de la coalition, nous ne sommes, bien sûr, pas toujours d’accord sur tous les points. Je crois cependant pouvoir affirmer que les projets centraux qui animent notre action politique font l’objet d’un large consensus.
Notre objectif est de créer des conditions optimales pour ceux qui habitent, vivent et travaillent dans notre pays.
Cet objectif est également partagé par Felix Braz. Le Vice-Premier ministre de ce gouvernement est un personnage dont nous apprécions l’intelligence, le dévouement, la loyauté et la volonté du consensus, un homme qui s’intéresse à tout et qui a le courage d’aborder des sujets plus difficiles.
Nous savons aujourd’hui que Felix Braz est très gravement atteint dans sa santé et que sa convalescence prendra beaucoup de temps. Nous savons également qu’actuellement, il lui est impossible de reprendre son rôle important au sein du gouvernement. Nous lui souhaitons courage et confiance pour prendre soin de sa santé. À sa famille, à ses amis et à ceux qui l’accompagnent, nous souhaitons la force et l’énergie dont ils auront besoin. Felix est entouré de personnes à qui il est cher et qui lui sont chères. Je suis convaincu qu’il trouvera la force nécessaire et qu’il est encadré de manière optimale pour se rétablir.
En tant que gouvernement, nous avons une responsabilité, un devoir et une mission. Les citoyens de ce pays nous ont élus pour que nous donnions le meilleur de nous-mêmes. Nous avons la mission de diriger le pays de manière à garantir que le Luxembourg est et sera, aujourd’hui et à l’avenir, un lieu où la vie vaut d’être vécue, en veillant à conserver la protection sociale, à préserver l’environnement, à faire fonctionner l’économie et à garantir prospérité et qualité de vie.
Il faut, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, que cet objectif soit un objectif commun et, pour l’atteindre, chacun a un rôle à jouer. Le gouvernement remplit sa mission en proposant des réponses aux défis de notre temps, tandis que la Chambre des députés remplit la sienne lorsqu’elle accompagne, contrôle ou critique le travail du gouvernement.
C’est bien qu’il en soit ainsi et il faut que ce soit ainsi.
Avec l’arrivée de M. Kox, un membre certes nouveau, mais très expérimenté, viendra rejoindre les rangs du gouvernement. Le ministre du Logement et ministre délégué à la Défense et à la Sécurité intérieure devra faire face à d’importants défis et je lui souhaite bonne chance dans l’exercice de ses fonctions.
Le gouvernement est en place depuis un an et, depuis son entrée en fonction, beaucoup a été fait. Nous avons mis sur le métier et réalisé d’importants projets.
"Cette coalition s’est formée non pas pour continuer à gérer, mais pour continuer à agir."
Nous traversons une phase cruciale pour l’avenir de notre pays. C’est aujourd’hui que nous décidons de l’évolution future de la société luxembourgeoise, de l’orientation de notre économie, de nos priorités en matière d’aménagement du territoire, des mesures permettant de conserver et de renforcer la prospérité et la qualité de vie. De même, c’est aujourd’hui que nous décidons de notre rôle futur au sein de l’Union européenne et de l’orientation à lui donner à l’avenir.
C’est également aujourd’hui que nous décidons au sein de la communauté internationale de la manière dont nous entendons gérer notre planète et faire face aux défis mondiaux que sont le changement climatique, la pauvreté et les conflits.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Le changement climatique est le sujet qui préoccupe les gens. Il les préoccupe à travers le monde entier.
Ceux qui, aujourd’hui, ne croient pas que le réchauffement de la planète et ses conséquences constituent un des défis majeurs de notre temps, méconnaissent la réalité.
Actuellement, le Luxembourg est déjà touché par le changement. Les violents orages et les inondations qui ont ravagé la vallée de l’Ernz et le Mullerthal ces dernières années en témoignent, tout comme les tempêtes et les inondations de plus en plus fréquentes dans nos régions. Dans le monde entier, on observe des phénomènes qui montrent que le climat a connu des changements dramatiques au cours des dernières années et décennies. Il est incontestable que la température moyenne de notre planète est en train d’augmenter, de même qu’il est incontestable que l’être humain y est pour quelque chose. Je suis conscient – et j’ai lu des articles qui soutiennent ce point de vue – qu’il existe des scientifiques qui mettent en doute certains aspects et qui sont d’avis que le rôle de l’homme est moins important. Cependant, il faut se demander si c’est vraiment ce qui compte.
Il est certain que nous assistons à un changement. Et il est certain que ce changement aura des répercussions sur notre vie.
Il y a deux semaines était publié le rapport GIEC de l’ONU sur l'impact du changement climatique sur les océans et la cryosphère. 130 experts du monde entier ont contribué à l’élaboration de ce rapport. Pendant deux ans, ils ont analysé les répercussions du changement climatique sur les océans, les îles, la glace des régions polaires et les glaciers. Si certaines formulations de ce rapport ont fait l’objet de longues discussions, l’analyse fondamentale et les constatations n’ont pas été remises en question. Les 195 pays membres du GIEC ont approuvé le rapport.
Différents scénarios sont présentés et il existe certainement différents points de vue sur la gravité des conséquences éventuelles. Cependant, ce qui choque, et ce qui doit choquer, c’est que même le scénario le plus favorable prévoit des conséquences extrêmes pour la vie sur notre planète.
"Si rien ne change, si nous ne changeons rien, cela aura des conséquences dramatiques pour nous et pour la génération à venir."
Ce serait irresponsable, ce serait tout simplement faux et injuste.
En 2100, 80% des glaciers alpins auront disparu. Le niveau de la mer aura augmenté d’un mètre au moins par rapport au niveau actuel. Dans les zones côtières, des régions entières, où vivent aujourd’hui quelque 700 millions de personnes, seront inhabitables. Cessant d’être des exceptions historiques, inondations et phénomènes météorologiques extrêmes, tempêtes et tornades seront des catastrophes régulières, surtout − mais pas uniquement − dans les régions côtières. Le système écologique est complètement déréglé, en raison de la hausse des températures et de l’acidification, un grand nombre d’animaux et de végétaux ne pourront plus vivre dans les océans.
Dans un grand nombre de régions, il sera tout simplement impossible de vivre.
On sera confronté à une pénurie d’eau potable et de terres arables. La nature ne parvient pas à s’adapter à ces conditions, parce que le changement est tout simplement trop brusque. La vitesse de réchauffement de la planète a doublé depuis le siècle passé. Nous avons depuis longtemps dépassé la limite du tolérable.
Cependant, il n’est pas trop tard. Là encore, la science est unanime.
Les êtres humains peuvent changer les choses. En changeant notre mode de vie, nous pouvons faire changer les choses. Les citoyens – et notamment les jeunes – exigent à juste titre que nous agissions, que nous nous engagions activement et avec détermination en faveur d’une réduction des émissions nuisibles de CO2.
Nous en sommes conscients. Le gouvernement est fermement décidé à atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés au Luxembourg.
"Nous sommes fermement décidés à réduire les émissions de gaz à effet de serre, d’ici à 2030, de 50 à 55% par rapport au niveau de 2005.
Il est prévu que la part des énergies renouvelables passe au cours des dix prochaines années à 23-25%."
Nous maintiendrons notre engagement à l’égard de l’accord de Paris, en poursuivant, non seulement pour le Luxembourg, mais également au niveau européen, l’objectif du « zéro net » d’ici à 2050, c’est-à-dire que les émissions de CO2 ne pourront dépasser les quantités qui pourront en même temps être absorbées.
Le Luxembourg traverse d’ores et déjà une transition énergétique. Au cours des dix dernières années, la part de l’énergie éolienne a augmenté d’un facteur 5. Dans le domaine de l’énergie solaire, l’évolution est similaire.
Rien que pour les ménages, nous sommes sur la bonne voie, 60% de l’électricité consommée provenant de sources d’énergie renouvelables. Cependant, notre population continue d’augmenter, et notre industrie compte également des entreprises grandes consommatrices d'énergie. C’est pourquoi nous voulons augmenter massivement la part des énergies renouvelables et soutenir cette évolution. Dans ce domaine, l’énergie solaire présente des potentiels considérables dans notre pays. Citoyens et entreprises portent un intérêt croissant aux installations de panneaux solaires, évolution que le gouvernement accompagne aussi grâce à l’augmentation des tarifs d’injection de l’énergie électrique solaire, que nous avons décidée au printemps.
De plus, nous introduirons, à l’avenir, la possibilité d’aides pour les installations photovoltaïques de petite taille et d’une puissance inférieure à 10 kilowatts. Nous ferons un effort national, auquel les citoyens peuvent participer et auquel ils sont invités à participer. À petite échelle et à grande échelle. Pour cette raison, nous avons mis en place un cadre prévoyant la création de coopératives plus importantes, permettant l’installation, sur des surfaces adaptées, de systèmes d’une puissance comprise entre 200 et 500 kilowatts et bénéficiant d’aides de l’État.
Parallèlement, un appel d’offres lancé chaque année et concernant la mise en place d’installations photovoltaïques sur des surfaces industrielles plus importantes, permettra également une transition au sein de l’économie.
Et il existe une forte demande de la part de la population et d’entreprises qui souhaitent y participer. Actuellement, quelque 700 demandes sont en cours de traitement; celles-ci présentent un potentiel supérieur à 50 mégawatts, ce qui correspond, dans notre pays, à la consommation d’environ 33.000 personnes.
Envisageant ainsi l’avenir avec confiance, nous nous attendons, pour les années à venir, à un nouveau boost considérable en matière d’énergie photovoltaïque. Comparé aux autres pays européens, le Luxembourg est d’ores et déjà un acteur important en matière d’énergie solaire.
Au sein de l’Union européenne, nous occupons la 7e place pour ce qui est de la part de puissance par habitant provenant de l’énergie photovoltaïque. Or, notre objectif est de continuer à nous améliorer dans ce domaine.
Parallèlement, nous devons bien sûr continuer à soutenir l’évolution positive en matière d’efficacité énergétique.
"La meilleure énergie est celle que nous n’avons pas besoin de produire."
Nous savons que, dans ce domaine, nous pouvons atteindre des résultats considérables. Nous le savons parce que les résultats des efforts des dernières années le prouvent. Au Luxembourg, les émissions par habitant de gaz à effet de serre ont baissé au cours des dix dernières années. Et ce, malgré une croissance économique constante.
Nous devons poursuivre dans cette voie, en alignant les normes applicables aux bâtiments fonctionnels à celles des maisons particulières − ce qui veut dire que l’efficacité énergétique des immeubles de bureaux devra également augmenter à l’avenir.
Le développement des transports en commun, le développement massif des infrastructures ferroviaires et des infrastructures de bus et de tramway, ainsi que la gratuité des transports en commun viennent compléter l’ensemble de mesures constituant notre effort national de réduction des émissions de CO2. De même, la promotion de l’électromobilité et, partant, le développement du réseau de bornes de recharge, est une initiative témoignant de la détermination de notre politique climatique.
Nous devons agir avec détermination en ne perdant pas de temps.
Toutefois − et je le dis non sans frustration, que je ne veux pas vous cacher − l’avenir ne dépend pas seulement de nous, ni du Luxembourg agissant au niveau national, ni de notre pays en tant que membre de l’Union européenne.
"Nos efforts seront insuffisants sans la Chine, sans les États-Unis, sans l’Inde, sans les pays en voie de développement économique. La situation n’est ni toute noire, ni toute blanche et il serait injuste de blâmer uniquement ces pays-là."
Je tiens à souligner qu’au Luxembourg, les émissions par habitant sont supérieures à celles de la Chine et correspondent plus ou moins à celles des États-Unis.
Il ne suffit dès lors pas de dire aux autres de faire leur devoir, et de rester les bras croisés jusqu’à ce que la courbe de ces pays rejoigne la nôtre.
Il ne s’agit pas de nous déresponsabiliser. Cependant, nous devons parvenir à impliquer nos partenaires des deux côtés de la mappemonde si nous voulons garantir la survie de tous.
C’est pourquoi le Luxembourg soutient les efforts de la Commission européenne visant à mettre le doigt sur la plaie lors des négociations avec des États tiers et à insister sur le caractère exigeant des normes. De même, nous assumons nos responsabilités en tant qu’un des pays ayant le taux le plus élevé au monde en matière d’aide au développement.
"La semaine passée, lors du sommet sur le climat à New York, j’ai annoncé qu’au cours des cinq prochaines années, le Luxembourg débloquerait 200 millions d’euros pour aider les pays qui seront les premiers et les plus concernés par le changement climatique."
Nos contributions annuelles au fonds pour le climat seront doublées, et ce, sans impact sur le budget de 1% du revenu national brut de toute façon prévu pour la coopération dans nos pays cibles.
Nous nous engageons. Au Luxembourg, en Europe et dans le reste du monde.
Cependant, nous allons plus loin.
Nous voulons une approche politique globale qui tienne compte des critères de durabilité.
Cette approche aura des répercussions sur différents domaines de notre vie. La question du changement climatique est aussi et surtout une question sociale, qui dépasse de loin le seul aspect écologique. À l’avenir, la question de la cohésion sociale, tant au Luxembourg qu’ailleurs, sera importante dans le contexte du changement climatique et des solutions que nous proposons.
Et, bien sûr, il y aura aussi des répercussions sur le développement économique de notre pays.
Cependant, l’évolution positive de l’économie n’est pas contraire à la définition d’objectifs ambitieux en matière de climat. Au contraire.
"L’histoire nous apprend que tous les progrès sont aussi dus à l’innovation, au développement, à la technologie et au développement industriel."
Cela vaut pour l’amélioration des conditions de travail, le progrès médical et l’amélioration de la qualité de vie.
En matière d’implantation d’activités économiques, notre pays a connu une forte diversification au cours des dernières années. Si la place financière est et restera l’un des secteurs-clés de notre économie, les nouvelles technologies ont connu, parallèlement, un développement fulgurant, tandis que les entreprises industrielles et, bien sûr, les PME restent des piliers de notre économie.
Les entreprises, grandes ou petites, implantées chez nous, sont actuellement en pleine mutation, investissant dans de nouvelles technologies permettant également d’économiser de l’énergie et de réduire les émissions. Accompagnant ces entreprises dans leurs efforts, l’État soutient de manière ciblée les investissements permettant d’améliorer l’efficacité énergétique. Parallèlement, nous soutenons la recherche et le développement de manière ciblée afin de permettre à l’avenir des modes de production plus durables. Cela vaut par exemple pour le secteur automobile, où le Luxembourg est et entend rester un important lieu d’implantation d’activités. L’Automotive Campus à Bissen est une initiative concrète prise par le gouvernement pour offrir à l’industrie un lieu permettant le développement de technologies entièrement nouvelles, et ce dans des infrastructures répondant aux critères de l’économie circulaire.
De même, les nouvelles entreprises envisageant de s’implanter au Luxembourg sont incitées à s’engager en faveur de la durabilité. Cela vaut également pour les centres de données.
Je sais que les gens attendent depuis longtemps des nouvelles sur le projet de Google à Bissen. L’entreprise américaine a acheté au centre du pays une surface de plus de 30 hectares. Et il est exact qu’un projet de centre de données y est en cours d’élaboration. Il y a différentes étapes à suivre avant que ce projet ne se concrétise, les procédures et délais requis étant respectés. Il est évident qu’un centre de données assez important aura un impact sur la consommation de ressources et je comprends que ce projet suscite des questions, auxquelles il faudra apporter des réponses. Et ces réponses seront données.
Dans ce contexte, il faut mentionner le fait que lors d’entretiens entre les responsables de l’entreprise et le gouvernement, il a été souligné qu’un centre de données doit avoir une efficacité énergétique maximale et que la consommation de ressources doit être réduite au minimum techniquement possible. C’est là une prémisse que nous maintiendrons et qui n’a d’ailleurs pas surpris Google.
Il n’en reste pas moins que la consommation énergétique d’un centre de données de cette taille est certainement élevée. Dans une telle situation, il faut peser le pour et le contre en nous demandant ce que nous voulons. Le besoin et la demande de centres de données augmentent dans le monde entier, et une entreprise qui traite chaque jour des quantités énormes de données augmentera ses capacités dans les années à venir. Partout dans le monde et aussi en Europe.
Le Luxembourg dispose d’importants atouts en matière de connectivité et le site de Bissen serait idéal. Il y aurait un impact largement positif sur le secteur des nouvelles technologies au Luxembourg, allant sans aucun doute de pair avec des créations d’emplois. Il s’agit d’un secteur qui s’inscrit également dans la logique d’une économie telle qu’elle a été formulée dans le cadre de la stratégie Rifkin.
Le gouvernement est par conséquent favorable à ce projet, parce qu’il convient à notre pays.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Au cours des dernières années, nous avons accompli un travail énorme en lançant des initiatives permettant d’améliorer l’efficacité énergétique du Luxembourg, de réduire les émissions de CO2 et d’augmenter la production d’électricité alternative.
C’est là un travail qu’il faut reconnaître, tout en étant conscient que nous ne voulons ni ne pouvons en rester là.
Pour cette raison, la coalition est actuellement en train d’élaborer une loi exhaustive sur la protection du climat. Nous avons décidé que ce texte doit définir de manière approfondie ce dont le Luxembourg aura besoin dans les années à venir pour atteindre ses objectifs ambitieux. Nous nous donnerons une feuille de route qui ne se limitera pas aux secteurs directement et manifestement concernés.
"Nous avons prouvé que nous comptons, au niveau mondial, parmi les pays pionniers et que nous ne freinons pas les efforts nécessaires pour offrir un avenir digne de ce nom à ceux qui viendront après nous."
L’Union européenne joue un rôle central dans ce contexte et, pour cette raison, nous avons besoin d’une UE forte qui puisse se concentrer durant les années à venir sur ses compétences réelles, c’est-à-dire l’amélioration de la vie des citoyens, la prise de mesures garantissant la sécurité et la création de perspectives sociales et économiques.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Ces derniers mois, on avait l’impression d’une UE concentrée davantage sur le passé que sur l’avenir. Le sujet dominant était et est malheureusement la conséquence d’un référendum organisé il y a plus de trois ans, le jour de la fête nationale luxembourgeoise.
La majorité des électeurs de la Grande-Bretagne a choisi de quitter l’Union européenne.
Je l’ai déjà dit à plusieurs reprises et je ne me lasserai pas de le répéter.
"C’est un choix regrettable. Nous aurions préféré un autre résultat. Le Royaume-Uni est historiquement un allié étroit du Luxembourg et il existe des liens économiques étroits avec Londres, des échanges importants dans le domaine de la sécurité, de la formation, de la recherche et de la culture."
Il est difficile de prévoir les effets d’un Brexit sans accord avec l’Union européenne – un Brexit "dur" –, mais il est clair que ses effets ne seront pas positifs – ni pour le Royaume-Uni, ni pour les autres pays, et encore moins pour nous.
Les négociations concernant les accords dans les différents domaines ayant une incidence directe sur la vie quotidienne des habitants de la Grande-Bretagne, mais aussi sur nous, sont menées par la Commission européenne. Pour nous, cela veut dire qu’après un éventuel scénario « no deal », nous aurons affaire à un pays tiers avec lequel il n’existe pas d’accords bilatéraux dans les domaines importants, dont notamment l’échange de marchandises. Très concrètement, cela veut dire qu’il faudra payer des droits de douane et que les marchandises tout comme les services provenant du Royaume-Uni seront soumis aux mêmes règles que ceux d’autres pays tiers.
À l’instar des autres États membres, le Luxembourg, respectant la solidarité au sein de l’Union européenne, n’a pas mené de négociations bilatérales de grande envergure. Cependant, nous avons réglé certains aspects, amortissant ainsi l’impact direct pour les Britanniques vivant chez nous et pour les Luxembourgeois vivant en Grande-Bretagne.
Nous voulons offrir à nos concitoyens britanniques vivant et travaillant dans notre pays un maximum de stabilité et de sécurité. Afin de leur garantir une certaine prévisibilité, nous avons décidé qu’en cas de "no deal", ils pourront continuer pendant un an à habiter et à travailler chez nous avec leur titre de séjour européen.
Grâce à cette phase de transition, ils auront la possibilité de demander ensuite une autorisation de séjour permanente pour États tiers − et ce également dans des conditions simplifiées. Cela nous permet d’éviter que certaines personnes perdent du jour au lendemain tous leurs droits.
En avril dernier, nous avons également adopté deux textes importants concernant la place financière. C’est ainsi que nous avons introduit un délai de transition de 21 mois pendant lequel les régulateurs luxembourgeois dans le domaine de la finance et de l’assurance pourront, même après le Brexit, autoriser des acteurs britanniques à proposer leurs services au Luxembourg. Le second texte prévoit les dispositions applicables au domaine des fonds. Là encore, il y aura un délai de transition pendant lequel les fonds britanniques pourront continuer à être commercialisés au Luxembourg, conformément aux règles actuellement applicables.
"Cependant, le Brexit sans accord n’est pas un scénario souhaité par le Luxembourg et, dans le cadre de sa visite au Luxembourg, j’ai dit au Premier ministre britannique que nous n’étions opposés à aucune tentative supplémentaire de trouver un accord de dernière minute."
Après que le gouvernement luxembourgeois, à l’instar d’un grand nombre d’autres gouvernements de l’UE, avait longuement insisté pour que les Britanniques soumettent une nouvelle proposition d’accord, cette dernière est finalement intervenue la semaine passée.
Nous saluons le fait qu’une proposition ait été présentée, car sans proposition de texte, il est impossible de négocier un accord de manière sérieuse. Nous sommes en train d’examiner de près les nouvelles propositions et leurs implications, notamment en ce qui concerne les points exposés en septembre dans le cadre de la visite du Premier ministre Boris Johnson: l’impact sur l’intégrité du marché intérieur, l’impact sur la frontière en Irlande et la nécessité de conditions de concurrence équitables entre l’UE et le Royaume-Uni et ce, notamment en vue d’un futur accord de libre-échange entre l’UE et le Royaume-Uni.
C’est ce que nous ferons en contact étroit avec le négociateur de l’Union européenne, Michel Barnier, à qui nous continuons de faire entièrement confiance.
En tout cas, je n’ai pas encore abandonné l’espoir d’un Brexit avec accord; néanmoins, je veillerai surtout, au cours des jours et des semaines à venir, à faire en sorte que notre pays et son économie soient préparés de manière optimale à un Brexit sans accord.
Nous avons besoin de stabilité, de stabilité au sein de l’Union européenne et au Luxembourg. Elle est le garant d’une évolution économique favorable, revêtant une importance centrale notamment dans le secteur des services financiers.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
La situation économique et financière du pays est bonne et les perspectives sont favorables. Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls à être de cet avis, c’est également le verdict des agences de notation internationales, qui attribuent toutes un triple A assorti d'une perspective stable à notre pays. C’est là un facteur important – qu’on le veuille ou non – parce que cette note renforce notre crédibilité tout en maintenant à un niveau historiquement bas les taux d’intérêt des emprunts publics.
"Nos finances publiques sont saines et bénéficient d’une gestion durable."
Au niveau de l’administration centrale nous avons, en 2018, enregistré pour la première fois depuis dix ans un excédent.
Cette année, la tendance reste tout à fait favorable. Fin juin, nous avons enregistré un excédent de 869 millions d’euros. Les recettes dépassent de 1,2 milliards d’euros celles du premier semestre 2018, soit une augmentation de 13,4%.
Par contre, les dépenses n’ont augmenté que de 2,8%, soit quelque 250 millions d’euros. Certes, il ne s’agit là que d’un instantané, mais il confirme la situation actuellement favorable de nos finances publiques, qui nous permet de maintenir les investissements à un niveau élevé et de créer ainsi des perspectives.
Je l’ai dit plus d’une fois dans cette enceinte:
Au cours des dernières années, le Luxembourg a connu une évolution démographique sans doute unique au monde. En l’espace de 10 ans, la population a augmenté de plus de 20%. Parallèlement, le nombre de frontaliers venant travailler dans notre pays a augmenté d’un tiers. Cette évolution nous a confrontés à des défis énormes, et il n’était pas toujours possible de répondre de manière appropriée aux exigences en matière d’infrastructures. Les bouchons sur nos routes, la pénurie de personnel dans les secteurs les plus divers, les temps d’attente aux urgences sont la conséquence d’une évolution du pays dont on n’a pas suffisamment tenu compte par le passé.
Cependant, au cours des dernières années, des mesures ont été prises pour remédier à cette situation; de même, à l’avenir, il n’y aura qu’une seule réponse possible: nous devons investir.
"Pour cette année, nous avons prévu de consacrer aux investissements quelque 2,6 milliards d’euros, soit un milliard de plus qu’en 2013. Et il est prévu de poursuivre cette évolution."
Nous devons et nous voulons préparer le Luxembourg aux défis de l’avenir. C’est pourquoi notre budget pluriannuel prévoit qu’en 2023, le niveau des investissements dépassera, pour la première fois, trois milliards d’euros.
Nous le faisons pour la génération à venir, et non au détriment de celle-ci.
L’année prochaine, la dette publique pourrait, pour la première fois depuis 2011, passer en dessous de la barre des 20% du PIB. Il est probable que cette tendance à la baisse se poursuivra de manière continue au cours de cette législature. Parmi les rares pays auxquels les trois principales agences de notation ont attribué un triple A, nous avons la dette publique la moins élevée.
Nous maintenons également notre système prévoyant de mettre de l’argent de côté pour l’avenir. Le Fonds intergénérationnel que nous avons créé au cours de la dernière législature s’élève actuellement à 317 millions d’euros. Cette année, nous avons versé une nouvelle dotation de 52,6 millions d’euros à ce fonds destiné aux générations futures.
Nos finances publiques se portent bien, de même, la situation de la caisse de pension et du Fonds de compensation est favorable, avec des réserves de près de 19 milliards d’euros, soit les prestations actuellement versées multipliées par 4,5.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Au Luxembourg, 100% des jeunes âgés entre 16 et 24 ans ont accès à Internet. Pour la tranche d’âge entre 65 et 74 ans, le taux reste supérieur à 80%.
Toute la journée, nous sommes, d’une manière ou d’une autre, connectés et, selon une étude du Statec de cet été, la moitié des gens recourent aujourd’hui également à des services externes pour stocker leurs données, leurs photos, leurs films, leurs documents, etc.
En outre, nous laissons des traces lors de nos activités quotidiennes sur Internet, qu’il s’agisse de recherches, d’achats, d’opérations bancaires, de l’envoi ou de la réception de messages, etc. Quoi que nous fassions, où que nous allions, quel que soit notre mode de déplacement, il est difficile, sinon impossible, d’éviter qu’il existe des données sur nous sous une forme ou une autre. Notre adresse est enregistrée, notre voiture est immatriculée, la photo du passeport est numérisée, notre compte bancaire est enregistré, les mémoires d’honoraires du médecin sont archivés par la CNS.
Il existe dans le monde entier des milliards de données sur des milliards de personnes, et l’existence de ces données présente des avantages, c’est-à-dire un potentiel pour notre développement, mais, bien sûr, elle présente aussi des risques. Parmi les avantages, il faut citer le progrès technologique.
Les données sont une matière première unique. Des calculs complexes, des analyses et l’intelligence artificielle permettent un traitement de données susceptible d’avoir un impact positif. Citons à titre d’exemple la recherche médicale. Des métadonnées sur des patients souffrant d’une maladie donnée permettent d’améliorer les diagnostics, de rendre possible la prévention et de poursuivre le développement de médicaments.
C’est une chance. Une chance que nous voulons saisir nous aussi. Pour cette raison, le gouvernement s’est donné une stratégie en matière d’intelligence artificielle et, dans ce domaine, nous voulons, au niveau européen, faire partie du peloton de tête. La première phase de cette stratégie a débuté et nous lancerons avant la fin de l’année la consultation publique dans ce cadre. Plutôt que d’ordonner les critères, nous voulons les définir de manière précise avec les acteurs de la recherche, mais aussi de la société civile.
"Il est important, voire indispensable que nous créions un cadre pour gérer cette nouvelle technologie et, avant de devenir client d’autrui, nous veillerons à pouvoir être notre propre prestataire."
Nous voulons et nous avons besoin de règles claires et cela, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, vaut pour la gestion des données dans leur ensemble – y compris les données personnelles de nos concitoyens.
Au cours des derniers mois, nous avons eu un débat public, et des questions légitimes ont été posées, questions auxquelles il est légitime d’attendre des réponses. Si ces questions se posent aujourd’hui, c’est surtout parce qu’il a fallu attendre l’année passée pour que nous disposions d’un cadre nouveau et clair en matière de protection des données, définissant la manière dont il faut gérer les données à caractère personnel. Bien sûr, une partie de ce cadre concerne l’État et d’autres autorités publiques, dont notamment les communes.
Dans ce contexte, il faut d’abord rappeler l’origine de cette loi – ou, plutôt, de ces lois. L’élément central, c’est le RGPD, le Règlement général sur la protection des données, qui définit les règles régissant, d’une part, le traitement et la protection des données à caractère personnel au sein de l’Union européenne et, d’autre part, la libre circulation des données ainsi que l’échange au sein du marché intérieur. Loin de se limiter à des interdictions, ce texte est un règlement définissant, pour le domaine des données, un des principes de base de l’UE, à savoir la libre circulation.
De plus, il faut savoir que le nouveau cadre de référence pour la protection des données se compose de deux volets.
C’est là un point crucial, notamment pour la discussion que nous avons menée ici avant l’été. Il y a d’une part, comme je viens de le dire, le RGPD, soit un texte général sur la protection des données, et, d’autre part, une directive européenne concernant les bases de données spéciales des autorités policières et judiciaires. L’année passée, en été, nous avons voté dans cette enceinte deux lois destinées respectivement à accompagner ledit règlement et à transposer en droit national la directive sur les bases de données des autorités policières et judiciaires.
Le RGPD a défini des principes qui s’appliquent de manière générale.
Le traitement de données n’est autorisé que conformément à des règles transparentes et fixées à l’avance. Il y a par exemple le principe d’exactitude − c’est-à-dire que les données collectées doivent être exactes. Il existe aussi le principe de nécessité selon lequel la durée de conservation des données doit se limiter à la durée strictement nécessaire. C’est là un cadre extrêmement important, de même qu’il est important qu’il existe une autorité qui contrôle le respect de ce cadre. Au Luxembourg, cette autorité est, comme on le sait, la Commission nationale pour la protection des données, la CNPD, laquelle peut également décider des sanctions en cas de non-respect.
À côté de cette législation générale en matière de protection des données, il existe, comme je viens de le dire, des règles spécifiques de protection des données pour le volet pénal ou le domaine des autorités policières et judiciaires et celui de la sécurité nationale.
Il s’agit de règles et de limites. Elles diffèrent des règles généralement applicables ailleurs.
Un des principes fondamentaux dans ce domaine, c’est notamment que les données à caractère personnel qui sont collectées et enregistrées doivent avoir une finalité – c’est-à-dire qu’il faut qu’elles soient pertinentes.
Un autre principe à mentionner est celui de la proportionnalité. Le volume des données et les mesures prises doivent être adaptés à la finalité. Cela veut dire par exemple que l’enregistrement automatique et généralisé d’informations passives comme par exemple les coordonnées GPS de toutes les voitures circulant dans notre pays, n’est pas autorisé. De plus, il existe l’obligation d’une procédure régissant l’accès aux bases de données, de même que la transmission de données est réglementée.
Les règles applicables au domaine des autorités judiciaires et de sécurité diffèrent des règles générales sur des points très logiques. C’est ainsi qu’il est évident qu’un suspect n’a pas besoin d’être informé lorsque des données sont collectées et stockées dans le cadre d’une enquête.
Mais il existe un cadre légal clair.
L’interprétation de ce cadre nous a occupés durant l’été et les ministres concernés ont fourni des explications exhaustives. Il a été souligné qu’on prend au sérieux les reproches et qu’on veut remédier à d’éventuels points faibles.
Pour cette raison, le ministre de la Sécurité intérieure a demandé à la Commission nationale pour la protection des données un avis qui a été présenté le mois dernier.
Il a tout d’abord été constaté que les bases de données en cause de la police reposent sur une base légale.
En même temps, il a été constaté que des améliorations sont nécessaires en vue de la conformité de la gestion. C’est ainsi qu’il faut faire des efforts supplémentaires en ce qui concerne les garanties relatives à la protection des données des mineurs.
"Ces efforts seront faits. Nous avons créé un comité de suivi où, assistés par la CNPD, nous sommes en train de travailler intensivement pour remédier à ces lacunes."
D’ici aux vacances de Noël, les grandes lignes des réformes devraient être fixées, la commission compétente de la Chambre des députés étant régulièrement tenue au courant. Dans les prochains jours, le Parlement se verra présenter un premier texte relatif à la vidéosurveillance, lequel tiendra compte de l’avis de la CNPD. En outre, la police elle-même poursuivra ses efforts et, d’ici à la fin du mois, le rapport de l’Inspection générale de la police sera présenté; celle-ci analyse des aspects internes de l’application de la loi sur la protection des données et ces conclusions seront également prises en compte dans le cadre du travail du comité de suivi.
De même, la justice a continué à travailler sur ce dossier durant l’été, notamment en ce qui concerne le fichier en cause, c’est-à-dire le fichier dit "JUCHA".
Les règles régissant le contenu du fichier, l’accès au fichier ainsi que la durée de conservation des informations, seront examinées. Là encore, l’objectif est de rendre ces règles plus précises, en les adaptant aux exigences de la protection des données.
De plus, tous les collaborateurs de la justice utilisant ce fichier ont entre-temps été sensibilisés une nouvelle fois.
L’établissement d’une liste complète de toutes les bases de données de la justice est en cours et sera finalisé dans les meilleurs délais.
En outre, l'autorité de contrôle de la protection des données judiciaires ("l’autorité de contrôle judiciaire") a décidé d’effectuer pour le fichier "JUCHA" un contrôle similaire à celui effectué par la CNPD pour le fichier central de la police.
Les autorités judiciaires sont également en train de faire des efforts en vue d’apporter leur contribution pour que, dans le cadre du contrôle des antécédents que certaines administrations doivent effectuer pour délivrer une autorisation ou pour engager de nouveaux collaborateurs, il puisse être légiféré dans les meilleurs délais.
Bien sûr, l’État et d’autres autorités publiques possèdent et gèrent d’autres bases de données fonctionnant en dehors du cadre de la sécurité nationale – de sorte qu’elles sont régies par les règles générales de protection des données telles qu’elles sont décrites dans le RGPD européen.
Il s’agit de toute une panoplie de registres, de fichiers et de bases de données différents, qui sont régis par la législation en matière de protection des données. En matière de gestion des informations, il existait déjà des règles avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la protection des données: l’accès est limité, tout agent de l’État a des obligations de confidentialité découlant de son statut, la vie privée des citoyens doit être respectée, il existe des règles de transparence, toute connexion électronique d’un agent de l’État est retraçable, etc. Bien sûr, ces règles sont, depuis l’année passée, plus précises.
C’est dans ce cadre que l’État s’est donné sa propre institution destinée à améliorer et à garantir la protection des données des citoyens. Le Commissariat à la protection des données auprès de l’État a pour mission principale d’accompagner et de conseiller les autorités de l’État en vue d’une application optimale des règles de protection des données. N’ayant pas attendu l’année passée pour commencer ses activités, cette institution a accompli un travail précieux dès avant l’entrée en vigueur du RGPD.
Actuellement, le Commissariat à la protection des données auprès de l’État recense quelque 1400 activités de traitement et registres de protection des données des différentes administrations. Ceux-ci concernent les domaines les plus divers, allant du registre des autorisations de commerce du ministère de l’Économie aux immatriculations des véhicules circulant sur nos routes.
Nous vivons entourés de bases de données qui sont toutes soumises à la loi sur la protection des données et au contrôle de la Commission nationale pour la protection des données (CNPD).
Il est dès lors évident que les efforts des ministères, des administrations et des services visant à garantir la conformité de l’application de la loi sur la protection des données ne sont pas récents. Ayant commencé ses activités en 2014, le commissariat responsable de la base de données auprès de l’État a accompli un important travail de sensibilisation.
Il y a trois ans, un groupe de travail interministériel destiné à préparer l’application des nouvelles dispositions a en plus été mis en place, de même, un plan d’action en vue de la sensibilisation des agents de l’État a été élaboré et de nouvelles formations ont par exemple été introduites à l’INAP.
La protection des données est essentielle et la confiance dans les autorités publiques est le pilier de toute démocratie.
Le citoyen doit être certain que l’État pratique une gestion prudente de ses données à caractère personnel. Et nous voulons absolument éviter qu’il ne perde cette confiance.
"Je propose à la Chambre des députés que le Commissariat à la protection des données auprès de l’État soit chargé d’établir un rapport sur l’état des lieux en matière d’application des règles de protection des données auprès de l’État même."
Cela veut dire que cet organisme effectue une vaste analyse des bases de données, en identifiant d’éventuels points faibles.
La commission compétente de la Chambre des députés sera régulièrement informée et, au terme du processus, je proposerai un débat de consultation dans cette enceinte afin de pouvoir discuter les conclusions du rapport. Au cas où il s’avérerait qu’il existe des lacunes – que ce soit au niveau de l’exécution de la loi ou de la loi elle-même – il faudra y remédier.
Ce processus n’équivaut pas à un moratoire dans les efforts visant à respecter les règles de protection des données. Bien au contraire. La loi est applicable et doit être respectée et son respect est contrôlé par la CNPD − tant auprès de l’État qu’ailleurs.
Ce que nous proposons dans ce domaine, c’est un effort supplémentaire et une analyse objective destinés à améliorer la situation et à renforcer la confiance.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Je ne vais pas faire le tour de tous les départements et ministères pour énumérer tous les projets de loi déposés à la Chambre des députés au cours des douze derniers mois ou ceux qui le seront dans les mois à venir. Je me suis concentré sur des sujets centraux de l’actualité et sur des défis imminents.
Le fait que je n’aborde pas aujourd’hui les différents domaines du travail politique ne veut pas dire que je leur attache moins d’importance.
Bien au contraire. La question sociale et la cohésion de notre société sont trop importantes pour être abordées dans quelques chapitres d’un discours. L’avenir de nos enfants, les priorités en matière d’éducation, de formation professionnelle et de recherche revêtent une importance centrale pour l’avenir du Luxembourg. La politique en matière de santé publique et la qualité des soins de santé, la sécurité et la lutte contre la criminalité constituent des aspects de la politique gouvernementale concernant directement tous les citoyens. La mise en œuvre du plan de développement culturel conduit à une revalorisation de l’artiste qui mérite d’être évoquée. La problématique du logement n’est pas résolue et les différentes initiatives, l’effort en cours de l’État et des communes, ne sauraient être présentés dans quelques paragraphes de mon discours requérant quelques minutes seulement de votre attention.
C’est pourquoi je renonce délibérément au modèle énumératif permettant à un aussi grand nombre de personnes que possible d’entendre l’orateur aborder certains points qu’ils pourront ensuite cocher.
Personnellement, j’ai coché aujourd’hui le sujet qui nous préoccupe actuellement le plus, parce qu’il doit nous préoccuper, à savoir l’avenir de notre planète. Cela nous oblige à nous remettre en question et à remettre en question ce que nous faisons.
Toutefois, je suis de ceux qui voient la situation d’un œil positif et la considèrent comme une chance. C’est une chance parce qu’elle nous permet de faire une analyse approfondie de ce que nous faisons et de ce que nous voulons. En fait, c’est une question de justice, une question de justice intergénérationnelle.
Nous nous occupons aujourd’hui de notre avenir, parce que c’est nécessaire.
Nous agissons sur le long terme, en prenant des mesures ayant un effet profond. Nous le faisons aussi par le biais de la politique fiscale.
Nous sommes en train d’élaborer une profonde réforme, qui prendra en considération différents aspects et éléments.
"Ce sera une réforme écologique qui s’inscrira dans la logique des objectifs ambitieux que le gouvernement s’est fixés en matière de politique climatique."
La fiscalité est un levier qui nous permet d’influer sur la fixation des priorités, sur le développement souhaité de notre pays, sur l’avenir de notre économie, mais aussi sur la vie quotidienne des personnes qui passeront leur quotidien au Luxembourg à l’avenir. C’est un levier dont nous devons profiter.
Cela vaut également sur le plan social et sociétal.
Notre pays et la manière dont nous vivons et travaillons ont changé au cours des dernières années et décennies. Le travail accompli par cette majorité au cours des six dernières années en a tenu compte. Dans des domaines très divers, nous avons adapté la politique aux réalités. Et c’est ce que nous continuerons de faire au cours de cette législature.
Continuer à agir au lieu de continuer à gérer.
"Pour cette raison, l’individualisation de l’imposition est un élément central d’une politique sociétale visant à supprimer les injustices et les vulnérabilités."
Il s’agit d’opérer un profond changement de mentalité, dont la mise en œuvre nécessitera beaucoup d’efforts et de temps.
Cependant, notre objectif est clair. Nous veillons à garantir une plus grande équité en plaçant l’individu au centre de notre démarche, et ce, indépendamment de la manière dont il a organisé sa vie et de l’évolution de sa situation au cours de sa vie.
L’élaboration et la mise en œuvre d’une telle réforme prennent du temps. Cela ne se fait pas du jour au lendemain, de plus, il faut respecter les décisions que les gens ont prises au cours de leur vie. C’est pourquoi nous travaillons à l’introduction progressive de l’imposition individuelle, et ce, sur une période aussi longue que possible.
Cependant, une réforme de la fiscalité comporte également des aspects qui rendent nécessaires des mesures immédiates, parce que des solutions plus urgentes restent nécessaires. C’est ainsi que la question de l’évolution des prix du logement est absolument prioritaire. Dans ce contexte, la transformation de l’impôt foncier est un élément-clé, qui sera très probablement pris en compte dans la réforme.
Nous devons soutenir et soulager les gens lorsque cela est nécessaire. Nous devons créer des perspectives, en veillant à ce que les gens se sentent à l’aise, qu’ils puissent se concentrer sur ce qui leur importe.
Créer des perspectives implique aussi que nous restions en mesure d’assurer la compétitivité de notre économie – dans un contexte adapté au pays.
Au cours des dernières années, nous avons régulièrement pris des initiatives visant à renforcer nos entreprises et à leur offrir un cadre qui leur permette de se développer positivement. Cela vaut aussi pour la fiscalité, avec, cette année, une baisse de l’impôt sur le revenu des collectivités de 18 à 17%, voire, pour les PME, à 15%.
Dans le cadre d’une réforme de la fiscalité, nous voulons également, avec les représentants du patronat, continuer à discuter de la compétitivité fiscale, en cherchant des solutions conçues dans un esprit de paix sociale, laquelle fait partie de l’ADN de notre pays, au même titre que l’innovation et la capacité d’adaptation dans un contexte international.
"Nous devons nous engager dans la voie de la communication constructive, et le gouvernement veille activement à ce que cette voie ne devienne ni une voie à sens unique ni une impasse."
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Nous vivons dans un pays de dialogue. Au Luxembourg, on se parle et tout le monde se parle. Nous parvenons à résoudre et à éviter problèmes et conflits parce que nous nous parlons. Nous nous parlons plutôt que de parler les uns des autres. C’est là une démarche qui a une longue tradition et qui, jusqu’ici, nous a toujours permis d’avancer.
Cela vaut pour le dialogue au niveau politique, pour le dialogue entre les partenaires sociaux et aussi pour le dialogue entre le monde politique et la société civile.
De plus, les défis auxquels nous devons faire face dans les années à venir exigent un consensus aussi large que possible et je suis confiant dans notre capacité à trouver ce consensus.
Il ne suffit pas de tirer tous sur la même corde, mais il faut, en plus, tirer dans le même sens.