Réunion des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Allemagne, de la France, du Luxembourg et de la Belgique concernant la défense européenne

Le 29 avril 2003 s'est tenue à Bruxelles une réunion des chefs d'Etat et de gouvernement de la République fédérale d'Allemagne, de la République française, du Grand-Duché du Luxembourg et du Royaume de Belgique. Le Luxembourg y était représenté par le Premier ministre Jean-Claude Juncker.

A l'ordre du jour de cette réunion figuraient les concepts de la défense européenne et sa relation avec l'OTAN, les moyens de réalisation de certains de ces concepts ainsi que l'appel à d'autres Etats pour se joindre à ce projet.

Questionné sur les raisons de la participation luxembourgeoise à cette réunion, Premier ministre luxembourgeois luxembourgeois a estimé: "Je ne suis pas venu à Bruxelles renforcer l'Europe de la défense avec le poids militaire luxembourgeois, mais je ne veux pas qu'une grande initiative européenne soit prise sans le Luxembourg, pays fondateur de l'Union."

Dans le papier de conclusions à l’issue de cette réunion, les quatre chefs d'Etat et de gouvernement réunis à Bruxelles ont insisté sur leur "conviction commune" que "l'Europe doit être capable de s'exprimer d'une seule voix et de jouer pleinement son rôle sur la scène internationale". Aussi sont-ils d'avis "qu'il est nécessaire de donner un nouvel élan à la construction de l'Europe de la sécurité et de la défense". L'Union européenne devrait disposer d'une "politique de sécurité et de défense crédible", et l'action diplomatique ne serait "crédible, et donc efficace, que si elle peut également s’appuyer sur des capacités civiles et militaires réelles".


Jean-Claude Juncker avec le président français Jacques Chirac

"Nous pensons que le moment est venu de franchir une nouvelle étape dans la construction de l’Europe de la sécurité et de la défense, fondée sur des capacités militaires européennes renforcées qui contribueront également à donner à l’Alliance atlantique une nouvelle vitalité et ouvriront la voie à une relation transatlantique renouvelée", affirment-ils dans cette déclaration commune.

Afin de donner un nouvel élan à la politique européenne de sécurité et de défense, les quatre protagonistes ont proposé dans ce contexte un certain nombre de principes qui pourraient être "endossés" par la Convention sur l’avenir de l’Union européenne et la Conférence intergouvernementale, afin d’être "intégrés dans le Traité constitutionnel":

  • la possibilité de conduire des coopérations renforcées en matière de défense;

  • une clause générale de solidarité et de sécurité commune liant tous les Etats membres de l’Union européenne et permettant de faire face aux risques de toute nature envers l’Union européenne;

  • la possibilité pour les Etats membres qui le souhaitent de souscrire des obligations supplémentaires, dans le cadre d’une coopération renforcée et sans que cela n’entraîne des obligations pour les tierces parties;

  • la reformulation des tâches Petersberg, permettant à l’Union européenne d’utiliser des moyens civils et militaires afin de prévenir les conflits, de gérer des crises, y compris les missions les plus exigeantes;

  • la création d’une Agence européenne de développement et d’acquisition de capacités militaires, avec comme objectif d’augmenter les capacités militaires européennes et de renforcer l’interopérabilité et la coopération entres les forces armées des Etats membres. Cette agence contribuera à la création d’un environnement favorable à une industrie de défense européenne compétitive;

  • la création d’un Collège européen de sécurité et de défense, afin de favoriser le développement et la diffusion d’une culture de sécurité européenne.

En outre, ils ont proposé que la Convention adopte "le concept d’Union européenne de sécurité et de défense (UESD)" qui devrait avoir comme vocation "de réunir les Etats intéressés qui sont prêts à aller plus rapidement et plus loin dans le renforcement de leur coopération en matière de défense".

Dans le domaine militaire, les quatre pays souhaitent mettre en œuvre "un certain nombre d’initiatives concrètes destinées à favoriser le rapprochement de nos outils de défense nationaux" afin d’éviter les duplications inutiles entre armées nationales et afin de renforcer ainsi l’efficacité des moyens de défense des Européens. Il s'agit notamment des initiatives suivantes:

  • le développement d'une capacité européenne de réaction rapide avec la création  d'une capacité de départ autour de la brigade franco-allemande dans laquelle seront intégrés des éléments commandos belges et des éléments de reconnaissance luxembourgeois;

  • la création, au plus tard en juin 2004, d’un commandement européen de transport aérien stratégique, disponible pour des opérations européennes et de l’OTAN et à plus long terme, la création d'une unité commune de transport aérien stratégique et de subordonner cette unité au commandement européen de transport aérien stratégique;

  • La création d’une capacité européenne de protection NBC conjointe avec comme objectif la protection des populations civiles et des troupes déployées dans des opérations européennes;

  • La création, en liaison avec la Commission et ECHO, d’un système européen d’aide humanitaire d’urgence lors de catastrophes (EU-FAST - European Union First Aid and Support Team) permettant à l’Union européenne d’associer des moyens civils et militaires pour dépêcher dans les 24 heures une première aide humanitaire d’urgence;

  • La création de centres européens de formation commune de pilotes et de marins;

  • Le renforcement des capacités européennes de planification opérationnelle et de conduite d’opérations pour éviter les duplications et concurrences inutiles entre capacités nationales et la création d’un noyau de capacité collective de planification et de conduite d’opérations pour l’Union européenne;

  • l'établissement d'un quartier-général multinational déployable pour des opérations conjointes et qui serait basé sur des quartiers-généraux déployables existants.

Lors de la conférence de presse à l’issue de la réunion les quatre dirigeants ont mis l’accent sur leur volonté d’associer les autres pays de l’Union européenne à leurs propositions sans faire de concurrence pour autant à l’OTAN: "Ces initiatives s’inscrivent toutes dans la perspective de notre participation commune à des opérations conduites dans le cadre de l’Union européenne ou de l’OTAN".

Jean-Claude Juncker a estimé dans ce contexte que "l'Europe avance au rythme de ses ambitions", avant de spécifier: "Notre initiative est une de ces grandes ambitions. L'Europe a toujours suivi la même évolution: au début nous étions trois seulement pour concevoir la monnaie unique. Chaque fois que l'Europe ne doute pas d'elle-même, qu'elle est capable de nourrir de grandes ambitions, elle surprend le monde." Jean-Claude Juncker s'est montré "convaincu que l'Union européenne de sécurité et de défense connaîtra le même succès que toutes nos précédentes grandes initiatives."

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