Déclaration de politique générale 2005 (traduction française)

Introduction
Débat européen
Intégration des étrangers dans la société luxembourgeoise
Accompagnement de fin de vie
Éducation
Compétitivité
Indexation des salaires
Diversification économique
Recherche et université
Aéroport et chemin de fer
Fiscalité des entreprises
Investissements publics
Politique de l'énergie
Transports publics
Aménagement du territoire
Emploi
Logement
Finances publiques

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Introduction

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

L’état de la nation aurait mérité un discours approfondi. Cependant, ce discours ne se penchera pas sur la situation globale du pays. Il se contentera de fournir une description des priorités politiques du gouvernement pour les mois à venir. C’est ainsi que l’a voulu la Chambre des députés et je respecte cette volonté.

De toute façon, le calendrier politique n’aurait guère permis de faire autrement.

  • Dans huit jours, le projet de budget 2006 sera déposé à la Chambre des députés, budget qui fera certainement l’objet d’un débat plus approfondi et plus sujet à controverse que les budgets précédents. Il y aura des débats budgétaires où il faudra jouer cartes sur table.
  • Le 24 octobre débuteront la Tripartite ferroviaire sectorielle et la grande Tripartite sur la compétitivité, qui se prolongeront jusqu’aux premiers mois de l’année prochaine. Il y aura beaucoup de points à discuter et pas mal de choses à mettre en œuvre.
  • En novembre, la Chambre des députés débattra de l'édition luxembourgeoise de l’agenda des réformes de Lisbonne. Ce n'est qu’au terme de ce débat que le gouvernement transmettra à Bruxelles le programme national de réformes, programme appelé à devenir un plan national pour l’innovation et le plein emploi.
  • Pour le 1er décembre prochain, nous devrons présenter l’actualisation de notre programme de stabilité, qui sera ensuite soumis, en janvier-février 2006, à l’appréciation de la Commission européenne et des ministres des Finances de l’UE. L’appréciation devrait rester bienveillante, mais moins bienveillante que les années précédentes. Les recommandations seront plus strictes et les critiques plus sévères qu’elles ne l’ont été jusqu’ici.

Ces dates et rendez-vous, c’est du sérieux. Le gouvernement les affrontera avec une attitude offensive et volontariste.

Nos exigences, nos ambitions pour les temps à venir et les années suivantes sont claires. Nous avons besoin de modernisation dans les domaines où nous n’avançons pas et nous avons besoin de remodernisation dans les domaines où nous reculons. Innovation, transformation, intégration: voilà les mots-clés autour desquels s’articuleront la modernisation et la remodernisation, la méthode de réalisation alliant conviction et modération.

Nous sentons et nous savons – même si, parfois, nous refusons de le reconnaître – que notre pays, lui aussi, ne saura plus éviter des changements et des transformations. Or nous ne voulons pas imposer ces changements selon une logique brutale à la Rambo, mais en plaidant notre cause avec des arguments. Certes, la modération nécessite du temps et donne une impression d’hésitation comme si l’on cherchait sa voie. Ce risque, nous l’assumons tant que nous sommes d’accord sur l’objectif de nos efforts, qui est de renforcer la compétitivité de notre économie à court et à moyen terme et d’utiliser ses atouts pour renforcer plus durablement la solidarité et la cohésion sociales pour les décennies à venir, aussi et surtout pour la nouvelle génération.

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Débat européen

Pour agir avec modération, il faut savoir écouter.

Certes, nous avons beaucoup parlé pendant la campagne sur le référendum européen, mais nous avons aussi su écouter. Tout ce que nous avons entendu dire n’était pas forcément en rapport avec le sujet. Soit! Il n’en reste pas moins que beaucoup de choses ont été dites qui étaient bel et bien en rapport avec le sujet. Et nous sommes déterminés à continuer le débat sur ce sujet, à savoir la manière dont se développe l'Union européenne et la manière dont nous, Luxembourgeois, voyons ce développement. Le débat sur l’Europe ne s’est pas achevé le 10 juillet, et nous n’avons pas classé sans suite tout ce qui a été dit au cours de ce débat. Le débat européen ne fait que commencer et il ne faut pas lâcher le ballon européen si l’on veut jouer convenablement. Les partenaires sociaux, la société civile, le Parlement, les partis, les éléments moins organisés de la société, les artistes, les écrivains, les penseurs du possible et de l’impossible, tous devront aller sur le terrain et participer au jeu. Cependant, il faut qu’ils aient la volonté de participer au jeu. Quand nous organisons une réunion d’information sur la directive Bolkestein – pour rappel, nous rejetons toute forme de dumping social –, il faut qu’ils viennent et qu’ils prennent la parole. Quand nous menons un débat public sur les possibilités de renforcer la dimension sociale de l’Europe, il nous faut des interlocuteurs qui rangent leurs bibles et manuels – qui sont des lectures faciles – pour étudier les textes législatifs européens – qui sont des lectures difficiles. Quand, à la Chambre des députés et au sein des commissions parlementaires, nous voulons préparer les rendez-vous européens – et nous voulons le faire de manière systématique –, il nous faut des indications claires et non pas des slogans. En tout cas, il faudra du franc-parler, même si, gênés, on préférerait parfois pratiquer la langue de bois. C’est ainsi que le gouvernement – et nous le disons sans la moindre gêne – est fermement déterminé à rejeter et à combattre toute forme de xénophobie et de racisme – dont on a vu d’ailleurs des exemples pendant la campagne sur le référendum. Ces attitudes sont incompatibles avec le fonds de commerce éthique de notre pays. Faites attention aux effets inattendus de dérapages apparemment insignifiants dans ce que nous pensons et disons!

Le débat quotidien, nécessaire, sur l’Europe doit converger dans un véritable forum national sur l’Europe, animé par le ministre Nicolas Schmit qui proposera des mesures d’action concrètes. Nous constaterons alors que l'Europe, malgré les apparences de glamour, est en fait le fruit d'un véritable travail d'Hercule qui demande beaucoup de temps et d’efforts.

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Intégration des étrangers dans la société luxembourgeoise

Ces débats ainsi que leurs prolongements doivent inclure nos réflexions sur nos rapports avec les non-Luxembourgeois.

On aimerait bien croire ceux qui disent que l’intégration des étrangers dans notre pays est réussie. Or la réalité est parfois tout à fait différente: ici, comme ailleurs en Europe, il se forme de véritables sociétés parallèles. Nous avons besoin d’une nouvelle loi sur l’immigration, remplaçant celle de 1972 et basée sur un nouveau concept plus volontariste de l’intégration. Le débat sur cette loi tout comme le débat sur notre langue et notre système linguistique débuteront cet hiver et devraient être achevés l’hiver prochain. À la fin du printemps prochain, le ministre de la Justice présentera un projet de loi sur la double nationalité, alors que la ministre de l’Éducation nationale accompagnera le débat sur notre langue dans les rangs du gouvernement.

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Accompagnement de fin de vie

Une question qui concerne – et consterne – les Luxembourgeois au même titre que les non-Luxembourgeois est celle de la vie et de la mort. Nous ne réglementerons pas la manière de mourir au Luxembourg. L’État a intérêt à s’imposer des limites là où chacun est seul avec lui-même. En revanche, il faut qu’il s’intéresse à la question de savoir comment chacun veut mourir. C’est pourquoi le ministre de la Santé présentera en novembre un projet de loi sur l’accompagnement de fin de vie qui remplacera celui du gouvernement précédent.

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Éducation

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

L’école, l’éducation et la formation sont encore des domaines qui concernent tant les Luxembourgeois que les non-Luxembourgeois. Et ce à plus d’un titre. En effet, les échecs subis à l’école ou pendant les années de scolarité ne peuvent souvent plus être redressés.

Nous voulons préserver les grands atouts de notre système scolaire. C’est pourquoi, avec les élèves, les parents et surtout les enseignants, nous voulons faire progresser l’école. En parlant à des enseignants, on constate que nombre d’entre eux ont l’impression que leur travail, leur engagement et leur dévouement ne sont pas vraiment reconnus par la société. Or le travail qu’ils font est un travail noble, ce sont eux qui tiennent une grande partie de l’avenir de notre pays entre leurs mains. Il ne faut pas les rendre responsables de toutes les évolutions négatives dans l’enseignement. Ce qu’il faut faire, c’est essayer, ensemble, de donner à chaque enfant une chance de réussir.

Cependant, tous les enfants ne réussissent pas. C’est ainsi qu’entre novembre 2003 et novembre 2004, 1.200 élèves ont interrompu leur parcours scolaire. Un quart d’entre eux s’est inscrit à une école étrangère, un autre quart a trouvé un emploi, le troisième quart a participé à des mesures de formation. Or il reste un dernier quart d’élèves qui n’est pas à l’étranger, n’a pas trouvé d’emploi, ne suit pas de formation. Ce quart-là passe ses journées à ne rien faire, à la maison ou ailleurs. C’est leur échec, c’est aussi le nôtre. Un échec qui, chaque année, se répète 300 fois.

Notre société, y compris celle des jeunes, est extrêmement hétérogène. Il appartient à l’école de gérer cette hétérogénéité. Il faut nous libérer de l’idée selon laquelle tous les élèves seraient en mesure de suivre le même programme au même rythme. C’est la raison pour laquelle l’enseignement public doit élargir l’offre scolaire. C’est un projet que le gouvernement précédent a entamé et que le gouvernement actuel poursuivra. Le Neie Lycée marque une étape importante sur cette voie, de même que l’introduction d’un «socle de compétences» pour chaque niveau de la formation scolaire, du préscolaire à la fin de la scolarité. La ministre de l’Éducation nationale, avec tous les acteurs de l’enseignement, fixera des socles de compétences, notamment en ce qui concerne les connaissances linguistiques exigées.

La loi scolaire de 1912 sera réformée. Un nouvel avant-projet de loi sera soumis à débat dans les prochains jours et devrait être déposé avant l'été 2006.

La réforme de la formation professionnelle suivra prochainement. La nouvelle loi sur la formation professionnelle s'inscrit dans une logique de formation continue, en redéfinissant le profil de chaque métier et en organisant la formation modulaire.

L’école n’a pas lieu à côté de la vie. D’où la nécessité de tenir compte autant que possible des habitudes et de la situation de vie des parents et des enfants. Nous avons besoin d’une offre facultative en matière d’écoles à journée continue, également au niveau communal, et nous devons continuer à offrir plus de structures de prise en charge et d’accompagnement des enfants avant et après l’école. Famille et activité professionnelle ne peuvent être envisagées séparément, mais doivent faire l’objet d’une approche globale.

L’apprentissage ne s'arrête pas avec l'école. Acquérir et élargir des connaissances est devenu une activité qui nous accompagne tout au long de notre vie. Plus de 53.000 personnes ont suivi des formations continues l’année passée. Ce sont là des efforts que nous poursuivrons avec détermination. Une économie compétitive a en effet besoin de la qualification de ceux qui y travaillent.

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La Compétitivité

Monsieur le Président,

La compétitivité est un mot-clé sur lequel il y aurait beaucoup à dire. Dans le cadre de la déclaration gouvernementale du 4 août 2004, j'ai dit au sujet de ce mot-clé – qui est en fait un terme de travail – tout ce qu’il y avait à dire à ce sujet pour l’ensemble de la législature.

La compétitivité est une notion très vaste, qui englobe beaucoup de choses.

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Indexation des salaires

  • Dans notre pays, on considère dans certains milieux que la question de la compétitivité se réduit à celle de l’index. C’est certes une question qu’il faut aborder, mais qu’il faut aborder toujours dans le contexte de la préservation de la paix sociale, car la paix sociale est, elle aussi, un argument pour la place économique. L’index permet un minimum de politique salariale nationale organisée – tous les salaires sont adaptés en fonction de l’inflation. L’indexation offre ainsi une marge de manœuvre permettant une politique tarifaire décentralisée et, partant, adaptée à la situation des entreprises. Si l’on supprime l’index, l’ensemble de la politique tarifaire se fera au niveau national et sera de ce fait moins proche des entreprises. L’économie – et notamment le patronat – ne peuvent en sortir que perdants.

Le gouvernement est pour le maintien de l’indexation automatique des salaires et traitements. Cependant, nous ne nous opposons pas à un débat sur une réforme limitée de l’index qui respecte le principe de l’indexation, laquelle ne constitue en principe aucun danger pour la compétitivité. Nous sommes prêts à discuter avec les partenaires sociaux sur la composition du panier des biens et services à la base de l’index: l’alcool et le tabac ne doivent pas forcément figurer dans le panier, alors que les produits pétroliers devront y rester parce que l’augmentation de leur prix entraîne une augmentation considérable du coût de la vie pour le citoyen moyen. Nous sommes également prêts à discuter de l’introduction d’une tranche d’indexation maximale, pourvu qu’elle parte d’un niveau suffisamment élevé de l’échelle des salaires. Les personnes touchant un salaire ou traitement élevé n’ont pas forcément besoin de l’indexation complète de leur salaire ou traitement. Par contre, ceux qui gagnent moins en ont besoin. Ils en ont d’autant plus besoin que nous sommes d’avis, au sein du gouvernement, que notre pays doit continuer à pratiquer une politique salariale modérée tenant strictement compte de l’augmentation de la productivité.

Voilà les points sur lesquels nous voulons engager des négociations ciblées avec les partenaires sociaux au sein de la Tripartite.

  • Si nous voulons rester compétitifs, nous devons compléter en permanence notre infrastructure économique. Jusqu’ici, tous les gouvernements ont essayé d’atteindre cet objectif. Ce gouvernement en fait de même. Mais il ne le fait pas n’importe comment. Il le fait sur la base des principes exposés dans le cadre de la déclaration gouvernementale.

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Diversification économique

Dans le courant des mois à venir, nous articulerons la diversification économique autour de plusieurs axes:

  • La promotion de la place économique et financière continuera à un rythme accéléré. En novembre prochain, le ministre du Trésor et le ministre de l’Économie se rendront avec le Grand-Duc dans plusieurs pays arabes afin de promouvoir l’intérêt pour le Luxembourg dans cette région jusqu’ici négligée par nous. En octobre, le ministre du Trésor est aux États-Unis pour faire de la prospection pour notre place financière, qui est en train de se rétablir.
  • Nous voulons faire du Luxembourg l’une des premières adresses, en Europe et dans le monde entier, dans le domaine des technologies électroniques. Des grands noms comme AOL et Amazon sont d’ores et déjà les produits phares d’une politique concentrée menée par le ministre des Finances et d'autres acteurs. Le siège de SKYPE, premier opérateur international de téléphonie Internet, récemment repris par E-bay, est et restera établi chez nous. Des contacts très prometteurs avec d’autres acteurs internationaux sont actuellement en cours. Cette activité prometteuse se déroule, bien que non exclusivement, dans l’environnement fiscal favorable que nous avons créé au Luxembourg. C’est cet environnement que nous voulons préserver et c’est pourquoi nous sommes contre la proposition de directive européenne sur la modification des règles de fiscalité indirecte en matière de commerce électronique. Mais nous n’en resterons pas là: dans les mois à venir, nous simplifierons la législation sur la protection des données, nous remédierons aux déficits de connectivité que nous connaissons et nous nous occuperons de l’amélioration des structures de prix. Nous voulons mener une politique intensive et offensive pour nous imposer sur le plan mondial comme «centre d’excellence» dans le domaine des technologies de l’information et de la communication.

Afin de promouvoir les services de communication et notamment la télévision numérique, le taux de TVA sur les services numériques sera ramené à 3% à partir du 1er janvier 2006.

Pour ce qui est de la CLT, nous entamons des négociations sur la reconduction du contrat de concession, bien qu’il ne vienne à échéance qu’en 2010. Nous voulons que le site médiatique luxembourgeois bénéficie d’une sûreté de planification.

  • L’économie luxembourgeoise conserve toutes ses chances. Nous transformons la SNCI en véritable instrument d’organisation de notre développement économique, en en faisant une véritable banque pour la promotion de la diversification et de la consolidation. Ce faisant, nous poursuivons les efforts qu’elle a mis en œuvre au cours des derniers mois, pendant lesquels elle s’est donné de nouveaux moyens grâce à la convention de coopération avec le Fonds européen d’investissement et la modernisation de ses instruments de crédit.

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Recherche et Université

  • Dans le domaine de la recherche, la SNCI a également élargi son champ d’intervention grâce à l’introduction d’une facilité de recherche. La recherche reste l'une des priorités du gouvernement: son volume a été multiplié par six au cours des cinq dernières années, dans le budget 2006, les fonds consacrés à la recherche publique correspondront à 0,3% du PIB. L’objectif reste de les faire passer à 1% et de rapprocher la recherche globale – privée et publique – de 3% de notre PIB. La recherche, au Luxembourg, s’organise autour de l’Université du Luxembourg, qui mettra l’accent plutôt sur les doctorats et les masters spécialisés. En même temps, l’université sera une «usine de compétitivité». Son objectif n’est pas de proposer une offre restreinte dans un grand nombre de domaines, mais une large offre dans un nombre restreint de domaines. La focalisation académique et non pas la mégalomanie universitaire la caractérisera. En 2006, notre université comptera 3.400 étudiants – 200 de plus qu’actuellement –, en 2010, elle accueillera un nombre maximal de 4.800 étudiants, avec, en principe, un nombre maximal de 6.000 étudiants en 2015.

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Aéroport et chemin de fer

  • Nous voulons également dynamiser l’aéroport avec tout son potentiel. Notre objectif n’est pas l’augmentation du nombre de vols, mais la croissance au niveau des activités, surtout en matière d’activités logistiques: voilà notre objectif pour l’aéroport, mais aussi pour le transport ferroviaire. En ce qui concerne ce dernier, la Tripartite ferroviaire, qui débutera le 24 octobre, donnera lieu à un débat sur l’avenir du transport de fret et la structure des chemins de fer en général. Nous sommes confrontés, en Europe, à un contexte de libéralisation, mais nous cherchons des solutions typiquement luxembourgeoises. Nous ne sommes pas des fanatiques de la libéralisation, nous ne voulons pas le démantèlement des CFL, mais une adaptation équilibrée aux exigences de l'avenir, tout en tenant compte des aspects sociaux.

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Fiscalité des entreprises

  • La compétitivité de notre économie et la préservation des atouts de notre site de production et de services tiennent largement à la fiscalité des entreprises. Au cours des quinze dernières années, nous avons fondamentalement amélioré la fiscalité des entreprises dans notre pays. Et nous continuerons à procéder à des ajustements supplémentaires là où ils s’avéreront nécessaires. Toutefois, je n'annoncerai pas de baisse substantielle des impôts sur les entreprises pour l’année prochaine. À l’échelle internationale, notre système fiscal n’est pas optimal à cent pour cent, mais il est bon. Toute baisse supplémentaire dans l’intérêt des entreprises doit faire l’objet d’un examen approfondi tenant compte du contexte européen global. Voilà nos considérations en la matière. Elles n’entraîneront pas de modification de la fiscalité des entreprises en 2006.

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Investissements publics

  • Pour une économie efficace, il faut des infrastructures efficaces. Malgré une situation financière serrée, les crédits d’investissement seront maintenus à un niveau élevé en 2006, et ce dans tous les domaines des infrastructures. Il faut toutefois savoir que le financement intégral via le budget ordinaire de l’État, des dépenses d'investissement prévues et nécessaires n’est plus possible. À partir du budget 2007, nous serons contraints de recourir, pour une partie des investissements publics, à d’autres modes de financement. Ce qui ne peut être financé par le seul budget doit l’être dans le cadre d’une coopération entre les secteurs public et privé. L’État n’est pas obligé de tout construire et de tout financer lui-même. Il peut aussi faire construire. C’est ce que nous ferons, parce que nous n’avons pas d'autre choix. Nous discuterons avec la Chambre des députés sur la meilleure manière de le faire et sur les instruments adéquats.

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Politique de l'énergie

  • Nous ne parlons pas assez de politique énergétique au Luxembourg. Ceci est d’autant plus étonnant que la facture énergétique de notre pays est lourde, tout comme celle du coût de l’énergie auquel doivent faire face les entreprises. Nous dépendons à 99% des importations d’énergie depuis nos trois pays voisins. Il est évident que pendant les mois à venir, il faudra discuter et prendre des décisions en matière de sécurité d’approvisionnement en énergie. Ce débat doit s’articuler autour de la diversification de nos voies d’approvisionnement, en tenant compte de l’évolution de nos infrastructures de production et de distribution. Tant le protocole de Kyoto que le bon sens nous obligent à atteindre une organisation plus efficace dans le domaine de l’énergie. Dans tous les domaines, y compris celui de l’agriculture, il faut arrêter de tourner en ridicule la promotion de sources d’énergie alternatives. Bien au contraire, elle doit être poursuivie avec détermination, bien qu’il faille tenir compte du rapport entre les frais à assumer par le secteur public et la maximisation de l'efficacité énergétique. Il est tout à fait évident que nous devons économiser de l’énergie, et ce notamment dans le domaine de la construction de logements. À terme, nous devons respecter des normes favorisant les économies d’énergie introduites via un nouveau règlement sur l'isolation thermique. Dans les mois à venir, nous présenterons des propositions visant une taxation plus importante des voitures à forte émission de CO2.

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Transports publics

  • Le développement des transports publics se poursuivra: le budget 2006 prévoit une augmentation du volume de crédits dans ce domaine. Nous sommes d’avis que la Ville de Luxembourg devrait disposer d'un tramway. Et nous sommes fermement convaincus que le nouveau conseil échevinal de la Ville de Luxembourg partage notre point de vue.

Un environnement sain, une croissance durable, une utilisation responsable des ressources énergétiques, des investissements systématiques en faveur d’une mobilité accrue: voilà également des atouts pour une place économique. Que ceux qui ne sont pas d’accord le disent. Et, surtout, qu’ils le prouvent.

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Aménagement du territoire

  • Il n’y aura pas d’économie moderne dans un pays qui ne relève pas avec détermination les défis du XXIe siècle. La mise en œuvre de l’IVL (Integratives Verkehrs- und Landesplanungskonzept), le concept intégré des transports et de l’aménagement du territoire, devrait faciliter la vague de modernisation que devra connaître notre pays. Nous sommes d’avis qu’un débat d’orientation sur la mise en œuvre des plans IVL devrait avoir lieu chaque automne à la Chambre des députés. Les points principaux de ces débats apparaissent d’ores et déjà clairement: le développement de Belval – un projet qui a une priorité absolue aux yeux du gouvernement –, la «Nordstad», des plans sectoriels dans les domaines les plus divers. L’élaboration des plans sectoriels prendra du temps. Et pendant ce temps, il ne faut pas décréter l’interruption du développement dans les domaines concernés. Le développement économique continue et n’attend pas les derniers raffinements de nos plans de développement. Cependant, il devra en respecter les grandes lignes. Nous devons prendre en main la réorganisation politique et administrative de notre pays. Le chef du gouvernement participera lui-même intensément à ces réflexions. Une chose est claire: il n'y aura pas de fusions forcées de communes. Et, ce qui est tout aussi clair, c’est que chaque habitant de ce pays, où qu’il habite, a droit à la satisfaction des mêmes besoins élémentaires.

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Emploi

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

La modernisation du pays, l’amélioration de notre compétitivité, l’optimisation de notre environnement fiscal ne sont que des paroles en l’air si les efforts politiques qui s’articulent autour de ces concepts n’atteignent pas leur objectif. Et cet objectif, c’est le plein emploi. Je fais partie de ces hommes politiques vieux jeu qui croient en la possibilité et la nécessité du plein emploi. Plein emploi ne veut pas dire que chacun a à tout moment un emploi. J’en suis tout à fait conscient. Le plein emploi, c’est la possibilité pour tous ceux qui veulent travailler et qui en sont capables de pouvoir trouver un emploi. Je ne dis pas que la valeur d’un homme dépend du fait qu’il a un emploi. Mais je crois que celui qui travaille est plus conscient de sa valeur. Et c’est pourquoi il ne faut pas nous résigner au chômage de masse en Europe. Et c’est pour la même raison qu’il ne faut pas non plus nous résigner à la montée constante du chômage au Luxembourg. Le chômage n’est pas une fatalité qui doit nous rendre inactifs. La lutte contre le chômage est une nécessité qui doit nous inciter à une activité permanente.

Le chômage augmente aussi chez nous. Certes, il est moins élevé que dans les pays qui nous entourent. Mais il reste trop élevé. Il faut qu’il baisse. Or cela ne se fera pas tout seul ni du jour au lendemain. Nous devrons mobiliser nos efforts, ceux de l’État, des entreprises, des syndicats, les efforts de ceux qui ont un emploi et de ceux qui n’en ont pas pour lutter efficacement contre le chômage.

J’ai dit que le chômage n’était pas une fatalité. Il ne faut donc pas le traiter comme s’il en était une. Lorsque des restructurations d’entreprises s’imposent, lorsque des réductions du personnel sont nécessaires pour des raisons économiques, il y a deux chemins à suivre: des licenciements sans nuance ou des restructurations intelligentes. Il y a plus de deux ans, le ministre du Travail a soumis aux partenaires sociaux des réflexions sur la consolidation de l’emploi en cas de restructuration. Il a pris l’initiative d’une loi concernant, comme on dit en bon luxembourgeois, le «maintien de l'emploi». Le gouvernement est d’avis que la réponse des partenaires sociaux à cette initiative ministérielle s’était trop fait attendre et qu’elle était inadéquate. Nous voulons tenir compte de ces réflexions dans un projet de loi qui devrait être déposé au Parlement sous peu. L’introduction d’un audit social, l’encouragement des prestations de travail intérimaire, l’outplacement, les réductions temporaires du temps de travail et d’autres formes de restructuration intelligente seront les éléments-clés de ce projet de loi.

Lorsque le taux de chômage augmente, lorsque les emplois deviennent de plus en plus précaires, lorsque les gens ont peur de perdre leur emploi, l’heure est aux recettes faciles. À ceux qui interviennent en faveur du morcellement et du démantèlement de notre législation du travail, nous disons: nous ne suivrons pas cette mode qu’on pratique dans certains pays voisins. À ceux qui croient que la solution des problèmes de l’emploi réside dans une réduction générale du temps de travail, nous répondons: nulle part, elle n’a abouti à des résultats durables, et pour cette raison, nous n’avons pas besoin de l’essayer. À ceux qui disent qu’il suffit de revoir à la baisse les indemnités de chômage pour que les personnes sans emploi deviennent actives, nous répondons: nous ne procédons pas à une baisse radicale des indemnités de chômage, parce que la plupart de ceux qui n'ont pas de travail cherchent un emploi et font des efforts réels pour en trouver un. Pendant la période d'inactivité à laquelle ils doivent faire face, l’État doit les accompagner financièrement pour les empêcher de tomber en dessous du seuil de pauvreté.

Nous sommes bien évidemment prêts à soumettre les instruments de création d’emplois existants à un examen critique au sein de la Tripartite et du Comité permanent pour l’emploi. Nous constatons souvent, non sans mécontentement, que dans beaucoup de cas, les mesures de création d’emplois dites actives, notamment celles qui relèvent de l’État ou des communes, n’entraînent pas de progrès en termes d’aptitude à occuper un emploi, mais une passivité accrue dans la recherche d’un nouvel emploi. C’est pourquoi il faut se demander s’il n’y a pas lieu de revoir à la baisse les indemnités relativement élevées liées à ces emplois temporaires. Beaucoup de personnes, surtout beaucoup de jeunes personnes, qui occupent de tels emplois temporaires auprès de l'État ou d'une commune font tout pour y rester définitivement. Ils arrêtent de chercher un autre emploi. Or ces emplois à caractère temporaire ne doivent pas dégénérer en emplois «stationnement» qu’on n’est plus prêt à quitter une fois qu’on en a bénéficié. C’est un point sur lequel nous allons discuter avec les partenaires sociaux.

Je ne suis pas d’avis qu’il faille rendre inacceptables les critères d’acceptabilité d’un emploi. Toutefois, chez nous aussi, il faut se rendre compte qu’actuellement, tout un chacun ne trouvera pas sans problème l’emploi auquel il estime avoir droit. Les Luxembourgeois aussi doivent être prêts à faire les trois-huit. Les Luxembourgeois aussi doivent être prêts à accepter des trajets plus longs si nécessaire. Les critères d’acceptabilité, au lieu de faire l’objet de modifications radicales, seront plutôt soumis à un examen nuancé.

On ne cesse de s’étonner de l’empressement avec lequel les entreprises essaient de se débarrasser de leur personnel par des mesures de préretraite, de prépension. Et on est d’autant plus surpris que dans les milieux influents du patronat, on continue de revendiquer un débat sur l'augmentation de la durée de vie active. Je ne m’oppose pas à un débat serein sur la durée de vie active. La consolidation financière future de nos systèmes de couverture vieillesse l'exigera probablement. Nous, c’est-à-dire le gouvernement, le Parlement, le patronat et les syndicats, nous devrons discuter ensemble de la question de savoir s’il n’est pas raisonnable de travailler, à partir d’une année à fixer, après 2012, chaque année un ou deux mois supplémentaires. Toutefois, je veux que ce débat ne soit achevé qu’après avoir tout essayé pour maintenir dans la vie active les hommes et les femmes en âge de travailler. Au Luxembourg, le nombre de personnes âgées de plus de cinquante ans qui, bien que capables de travailler, ne peuvent plus travailler ou ne doivent plus travailler ou qu’on ne veut plus laisser travailler ou dont on ne veut plus dans le processus de travail est extrêmement élevé. Ceux qui réclament un débat sur l’augmentation de la durée de vie active doivent tout d’abord prouver qu’ils ont l’intention de maintenir dans la vie active les personnes âgées de plus de cinquante ans qui veulent encore travailler et qui cherchent un emploi sans en trouver, qui cherchent un emploi et qui voudraient travailler. Quant aux mécanismes de préretraite, ils doivent être revus pour des raisons liées à la politique de l'emploi et des raisons de politique financière. Il y a cependant un point sur lequel on ne discutera pas: c’est la préretraite pour le travail posté et le travail de nuit. Mais les solutions de facilité pour lesquelles ont opté nombre d'entreprises en cas de restructuration sont rendues plus difficiles. Cela concerne notamment la préretraite-ajustement. Le gouvernement discutera avec les partenaires sociaux d'une augmentation de la participation des entreprises aux frais de la préretraite, frais qui doivent être portés par tous.

Il faut discuter avec les partenaires sociaux sur les possibilités de recourir au travail intérimaire pour procurer un emploi à ceux qui n’en ont pas. Si on est au chômage, il vaut mieux accepter un emploi temporaire offrant de nouvelles chances sur le marché du travail plutôt que de rester sans emploi pendant un an ou un an et demi. Au Luxembourg, les emplois intérimaires sont occupés par des frontaliers. Nous voulons que les personnes qui, dans notre pays, n’ont pas de travail, recourent elles aussi plus régulièrement au travail intérimaire pour rester capables d’occuper un emploi. C’est un point dont il faudra parler.

L’abolition du salaire social minimum est un autre slogan qui revient régulièrement. Le gouvernement n’abolira pas la législation sur le salaire social minimum. Dans d’autres pays, on parle de l’introduction d’un salaire minimum, au Luxembourg, on ne discutera pas de son abolition. Cependant, il faut que nous nous demandions tous si, parfois, on ne ferait pas mieux d’offrir un salaire social minimum de recrutement aux jeunes qui, bien que sans formation, peuvent trouver un emploi comportant des éléments de formation. Ce salaire, nous l’appellerions salaire social minimum de qualification et de formation et les personnes concernées le toucheraient pendant la durée de leur formation postscolaire au sein de l'entreprise avec, comme condition, la perspective d’un emploi définitif au terme de leur formation en entreprise. Voilà encore un point qui fera l’objet des débats des mois à venir.

Il faut également rouvrir le débat sur l'accès des citoyens de l’Union européenne à certains domaines de la fonction publique. Il est inadmissible que les Luxembourgeois fassent tout pour trouver un emploi auprès de l’État ou des communes en laissant surtout les non-Luxembourgeois occuper les emplois du secteur industriel privé. Cela entraîne un déséquilibre qui, un jour, finira par faire le malheur de notre pays. C’est un point qui fera l’objet de débats et de négociations.

Il y a de nombreuses entreprises où la collaboration avec l’Administration de l’emploi fonctionne bien. Mais il n’y en a pas assez. Bien sûr, le marché du travail ne peut pas s'adapter à l’Administration de l’emploi. Il est clair que c’est l’Administration de l’emploi qui doit s’adapter au marché du travail. Cependant, sans une collaboration intense entre les entreprises et l’Administration de l’emploi, le marché du travail manque de dynamisme. C’est pourquoi nous instaurons un prix qui sera décerné annuellement à une entreprise s’étant distinguée par une collaboration particulièrement réussie avec l'Administration de l’emploi.

Les initiatives dites pour l’emploi sont souvent critiquées. Certes, leur fonctionnement doit faire l’objet d’une révision à maints égards. Mais il faut que les initiatives pour l’emploi subsistent. Elles offrent en principe du travail à des personnes qui n'ont pas ou pas encore la moindre chance de trouver un emploi sur le marché du travail régulier. En supprimant les initiatives pour l’emploi, on produit des chômeurs qui n’ont pas la moindre chance d’être placés, causant ainsi beaucoup de peine aux familles des jeunes gens qui ont bénéficié de ces initiatives pour l’emploi.

Toutes ces questions et bien d’autres encore, que je ne peux pas aborder ici pour des raisons de temps, doivent être discutées. Nous ne devons pas nous résigner au chômage. Le chômage n’est pas une fatalité. Il est plutôt le sort d’un grand nombre de gens qui aimeraient bien travailler ou qui feraient mieux de travailler.

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Logement

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Je vous ai parlé de la compétitivité de notre économie, de l’élan modernisateur dont nous avons besoin, de la manière dont on peut et dont on doit envisager le travail au Luxembourg. Or il reste à parler du logement au Luxembourg, parce que le logement, c’est une chose importante.

Je dois avouer franchement que c’est avec une certaine gêne que je parle du logement. En tant que ministre d’État et ministre des Finances, j’ai tout fait, depuis 1991, pour garantir au Luxembourg à chacun un logement à un prix abordable. Or mes efforts ont échoué. Si je devais dresser aujourd’hui le bilan de mon activité politique – bien que le moment de le faire soit loin d'être venu –, je penserais, et cela ne vous étonnera pas, à beaucoup de choses positives que j’ai réalisées. Mais je pense, et je considère cela comme un grand échec personnel, avoir échoué sur la question du logement.

Les prix du logement et les prix de construction se situent à un niveau effrayant au Luxembourg. Sur le marché du logement, les petites gens se contentent souvent de regarder ce que font les autres, ne voyant plus ce qu'ils pourraient faire eux-mêmes.

Je ne me résigne pas à cette évolution négative sur le marché du logement luxembourgeois. C’est pourquoi j’aimerais que, tous ensemble, nous abordions de manière ciblée ce problème.

Dans le domaine de la construction de logements, on n'aboutit à rien si la collaboration entre l'État et les communes n'est pas optimale. Dans le passé, plus d’une idée a été évoquée, mais peu ont été réalisées. Je veux que tant l’État que les communes assument à nouveau leur responsabilité envers les gens. Ils ne le font pas actuellement. C'est avec insistance que je le dis à l’égard du gouvernement, et c'est sans indulgence que je le dis à l’égard des communes.

Je propose une nouvelle fois un véritable pacte pour le logement entre l'État et les communes. J’aimerais que, dans la mesure du possible, dans la mesure du nécessaire – et c’est presque partout nécessaire –, l’État et les communes élaborent ensemble des plans de développement pour la construction de logements. Des plans de développement pour la construction de logements prévoyant que l’État décide dans quelle mesure et en fonction de quels critères il soutient les communes qui approuvent une augmentation de l’offre de logements sur leur territoire. Les communes ne peuvent porter à elles seules les frais générés par l’explosion démographique et l’expansion en matière de logement. Il faut que l’État intervienne ici. Ensemble, nous devons créer des réserves foncières.

Sur le marché du logement, nous devons davantage soutenir l'offre et non la demande. La demande bénéficie d’un soutien plus que suffisant. C’est l’offre qu'il faut augmenter. À l’instar de ce que fait le ministre du Logement, je plaide pour un élargissement massif du bail emphytéotique – un instrument pour lequel il n’existe malheureusement pas de terme en luxembourgeois. Je plaide pour le droit de préemption des communes. Je plaide pour une flexibilisation de la législation sur l’impôt foncier communal de façon à permettre aux communes de prélever un impôt plus élevé sur les terrains constructibles non utilisés à des fins de construction. Nous n’envisageons pas d'appliquer cet impôt aux terrains à bâtir que les parents gardent pour leurs enfants. En revanche, nous sommes fermement déterminés à créer des conditions permettant aux communes de lutter énergiquement contre la spéculation immobilière et de mettre définitivement un terme à la hausse des prix des terrains à bâtir.

Les mesures fiscales introduites par la loi du 20 juillet 2004 sur l’aide au logement seront prolongées jusqu’en 2007. Nous continuons à élargir nos efforts dans le domaine des logements locatifs. Je le répète encore une fois: les terrains constructibles que possède l'État, il les mettra sur le marché de la construction à des prix réduits. Nous avons besoin, dans les années à venir, de 15.000 unités de logement supplémentaires. Nous ferons tout pour y arriver.

Je serais content de voir la Chambre des députés interpeller régulièrement et sévèrement le gouvernement sur les progrès réalisés grâce à nos efforts. Je suis prêt à affronter ce débat, ensemble avec le ministre du Logement.


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Finances publiques

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Tout ce que je viens de dire – et bien d’autres choses encore – convergent dans le budget de l’État et, plus généralement, les finances publiques. Les finances publiques nous renseignent sur notre situation, sur notre avenir, sur nos possibilités, celles que nous n’avons plus et celles que nous n’aurons pas de sitôt.

Pour résumer brièvement un long discours: nous avons réalisé un déficit l’année passée, déficit qui sera plus important cette année-ci et qui sera encore plus important l’année prochaine.

Pour résumer brièvement une longue description: je l’ai annoncé dans cette salle, au nom du gouvernement précédent d’ailleurs, en septembre 2003, lors de la présentation du budget 2004, en disant que les budgets 2004, 2005 et 2006 seraient les plus difficiles que nous ayons connus depuis le milieu des années 80. En novembre 2003, nous avions annoncé un déficit de 1,8% pour l’année 2004. C’était avant le débat budgétaire, longtemps avant les dernières élections. Tous ceux qui nous reprochent d’avoir caché les chiffres avant les élections ont une certaine distance par rapport à la vérité. En 2004, le déficit était de 0,6%, soit un tiers de ce que nous avions annoncé. En novembre 2003, avant le débat budgétaire et avant les élections, nous avons annoncé à Bruxelles un déficit probable de 2,3% pour l’année 2005, ce qui correspond plus ou moins au déficit réel.

Les déficits pour les années 2005 et 2006 ne constituent pas une violation des critères de stabilité de l’union monétaire. L’analyse détaillée que fera la Commission montrera que le niveau élevé des réserves pour l’ensemble de l’État et la faible dette publique font que notre situation ne se présente toujours pas si mal.

Mais je ne vous cacherai pas que lundi, lors de la réunion de l’Eurogroupe, la Commission nous a fait un début de remontrance, tout en sachant qu'en 2004 – notre déficit était de 0,6% – le déficit moyen des pays de la zone euro était de 2,7% et qu’en moyenne, la dette publique de ces mêmes pays était dix fois supérieure à la nôtre. C’était surtout l’année 2005 qui l’intéressait, année où nous risquons d’atteindre un déficit de 2,3% contre une moyenne de 2,8 chez nos partenaires. Et elle pense à 2006 et aux années suivantes, où notre situation, bien que meilleure que celle des autres, n’est pas ce qu’elle devrait être.

Pour résumer brièvement une longue explication:

La raison première de nos problèmes budgétaires n’a rien avoir avec le Luxembourg, mais avec l’Europe qui ne parvient pas à suivre le rythme d’une croissance économique mondiale robuste. Cependant, le problème se situe aussi au niveau national. Il ne concerne pas seulement les recettes, bien que certaines d’entre elles, comme la TVA, aient connu une baisse inattendue et incompréhensible – l’impact de remboursements individuels et spécifiques ne suffit pas vraiment pour expliquer ce phénomène. Il concerne plutôt les dépenses – et le phénomène des hausses automatiques des dépenses explique ce problème presque entièrement.

Les recettes, à l’exception de celles liées à la TVA et à l’UEBL, connaissent une évolution plus ou moins normale, alors que l’impôt sur les traitements et les salaires connaît même une évolution positive inattendue, et ce malgré la réforme fiscale.

Or au niveau des dépenses, il y a des problèmes.

En examinant le budget de l’État dit central, c’est-à-dire celui que vous votez ici, je constate que les dépenses ont connu une hausse de 10,8% en 2004 contre 8% seulement du côté des recettes. Vous n’avez qu’à remplacer ces chiffres par ceux prévus pour 2005 – 10,6% au niveau des dépenses, plus 5,3% du côté des recettes – pour constater l’ampleur du problème.

Et maintenant imaginez la situation en 2006.

Le contexte économique n’est pas favorable. La croissance de l’économie européenne est de seulement 1,2%. Même si la nôtre peut atteindre jusqu’à 4%, nous continuerons à souffrir de la faible demande en Allemagne, en Belgique et en France. Les prix pétroliers ont connu une hausse énorme et le prix du baril restera supérieur à 60 dollars en 2006. Ceci a des répercussions négatives sur les revenus des particuliers et des entreprises, entraînant une baisse des recettes fiscales alors que les dépenses courantes restent inchangées.

Le ministre du Budget a exécuté scrupuleusement le budget 2004. C’est pourquoi nous avons réalisé en 2004 un déficit trois fois moins important que celui que nous avions annoncé à Bruxelles.

Le ministre du Budget exécute le budget actuel d’une main ferme, sinon le déficit serait plus important que celui que nous avons annoncé à Bruxelles et chez nous.

Le ministre du Budget établit le budget 2006 avec une rigueur maniaque, sinon le déficit dépasserait de très loin les déficits auxquels nous sommes habitués au Luxembourg.

Et pourtant, nous réaliserons en 2006 un déficit important qui devra nous interpeller, parce qu’il sera supérieur à celui de l’année 2005.

Compte tenu de cette évolution, nous avons deux possibilités.

Nous pouvons attendre et voir venir en espérant que le problème se résoudra tout seul. Ou bien nous pouvons agir en veillant nous-mêmes à ne pas dépenser trop vite ce dont nous disposons. Peut-être qu’il sera plus facile de nous contenter de moins que nous ne le croyons.

Le gouvernement est d’avis qu’il serait faux de décider dans la situation présente une hausse des impôts. Ce serait facile, on se fâcherait contre le ministre des Finances, au début les recettes seraient abondantes, mais au bout de quelques années, notre économie commencerait à boiter, ce qui aurait des répercussions sur la vie d’un chacun. Nous n’augmentons pas les impôts, mais nous ne pouvons pas non plus adapter le tarif d’imposition à l’inflation. C’est un effort qu’il faudra demander au contribuable. Il n’est pas content. Moi non plus d’ailleurs. Mais c’est comme ça.

Quant aux économies à réaliser, nous ne pouvons pas en faire n’importe où et n’importe comment. Les investissements doivent rester élevés. Nous sommes le pays au taux d’investissement le plus élevé d’Europe, et nous voulons le garder. Mais comme je vous l’ai dit, il faudra trouver un autre mode de financement – en fait plus moderne – dans le cadre d’un processus d’économies sur plusieurs années, par le biais d’un partenariat entre les secteurs public et privé.

Toutefois, dans les années à venir, nous ne pouvons pas – comme certains d’entre nous l’ont dit d’ailleurs très clairement avant les élections – augmenter les prestations sociales financées via le budget de l'État. C’est ainsi qu’une augmentation des allocations familiales n’est pas possible dans les années à venir.

Cependant, dans certains domaines, nous devons réfléchir ensemble sur les économies à réaliser ou, plutôt, sur les possibilités de mettre un frein à l’augmentation automatique des dépenses de l’État.

Le gouvernement aurait pu prendre une telle décision ex cathedra, d’un budget à l’autre, quasiment du jour au lendemain. Or cette manière de procéder entraînerait des troubles et conflits que nous voulons éviter, parce que la provocation entraîne des antagonismes qui nous divisent. C’est pourquoi – et rappelez-vous la description des méthodes que nous avons fournie en août 2004 lors de la déclaration gouvernementale – nous misons sur le dialogue, la négociation et la modération.

Nous voulons engager des négociations sur les économies à réaliser. D’abord dans cette salle, bien évidemment. Au sein de la majorité. Avec l’opposition. Puis ailleurs, avec les partenaires sociaux, au sein de la Tripartite et dans le cadre de négociations bilatérales.

Nous devons engager des négociations sur le financement de notre Sécurité sociale. Chaque année, 2,4 milliards d’euros sont transférés via le budget de l’État à la Sécurité sociale, près de 900 millions vers les seules caisses de retraite. La Sécurité sociale, et notamment les caisses de retraite, ont des réserves et excédents provenant en grande partie du budget de l’État. Sans l’État, il n’y aurait ni excédents ni réserves. Ce flux financier devra être discuté: les contributions de l’État aux caisses de retraite, le financement des pensions par l'État, la participation de l’État aux caisses de maladie et à l’assurance dépendance, tout comme le financement du forfait d’éducation («Mammerent») et des années consacrées à l’éducation des enfants devront faire l’objet d’un débat serein. Sans a priori de notre part. Et sans tabous excessifs chez les autres.

Nous voulons discuter la question de savoir si toutes les prestations sociales financées, directement ou indirectement, par le budget, doivent toujours être intégralement adaptées en fonction de l’index si des solutions intermédiaires sont envisageables.

Avec les partenaires sociaux, nous devrons chercher des possibilités d’économies au niveau du Fonds de l’emploi.

Nous devons examiner, avec le Syvicol, les rapports entre l’État et les communes en matière de financement, et notamment pour ce qui est de la rémunération des enseignants.

Nous devons arriver à comprendre que ceux qui profitent de prestations de l’État pourraient très bien fournir une contribution couvrant dans une mesure plus ou moins large les frais réels. Cela vaut pour la garde des enfants, tout comme pour le prix de revient de la distribution d’eau.

Il faudra aborder avec les syndicats concernés la réorganisation des tâches des enseignants de manière à réaliser des économies budgétaires, tout en répondant de manière adéquate aux besoins en matière de personnel.

Nous devons discuter avec le syndicat de la fonction publique afin de freiner l'impact des avancements automatiques sur la hausse des salaires et nous devons d'ores et déjà parler de l’orientation future de la politique salariale de l’État qui, dans les années 2007, 2008 et 2009, devra être plus modérée.

Voilà ce que je voulais vous dire, Monsieur le Président, et ce que j’avais à vous dire. La dernière partie était moins agréable. Mais elle était nécessaire.

Nous ne sommes pas en pleine crise, comme d’aucuns essaient de nous le faire croire.

Cependant, nous voyons que nous ne pouvons pas continuer comme avant. L’une des malformations congénitales de la démocratie, c’est que précisément ceux qui, aujourd’hui, lancent des avertissements et veulent aller un peu moins vite pour que, demain, nous soyons capables de l’élan dont nous avons besoin, ne font pas partie des hommes politiques les plus populaires. À voir!

Nous voulons nous repositionner pour l’avenir. C’est pour cela que nous œuvrons, que nous négocions. Nous voulons préserver notre modèle social pour les générations futures. Nous voulons que la solidarité reste vivante. Nous ne voulons pas qu’elle meure parce que nous en abusons aujourd’hui.

Nous, les Luxembourgeois, nous y arriverons. Si nous agissons tous, pour nous et pour les générations suivantes. Nous, Luxembourgeois, nous y arriverons, comme nous l’avons toujours fait – à condition de s’y prendre à temps.

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